Bonjour à tous et bienvenue dans cette vidéo de la série sur l’énergie. Cette fois ci on va parler de l’intégration au réseau électrique des énergies renouvelables intermittentes comme l’éolien ou le photovoltaïque. Bon c’est vrai que j’avais annoncé une vidéo sur le réseau électrique mais Mr Bidouille a fait, il y a peu, une excellente vidéo sur le sujet. Non seulement traiter la même chose est moyennement utile mais, en plus, je ne pourrais pas faire mieux que lui qui a de belles animations et qui a fait une visite d’un centre de dispatching ! C’est une vidéo complémentaire à la mienne que je vous recommande fortement d’aller voir, le lien sera en description ! Comme pour les autres trucs que je vais recommander... Ok mais du coup, on va parler de quoi ? La question qui m’intéressait vraiment quand j’ai commencé mes recherches sur ce sujet ce n’est pas tellement le fonctionnement du réseau mais ce que la physique de l’électricité et la structure du réseau électrique impliquent pour les différents moyens de produire de l’électricité. On va donc parler de ces contraintes physiques qui sont importantes pour comprendre pourquoi l’intégration de la production éolienne et photovoltaïque au réseau électrique n’est pas si facile. Mais, je vous préviens, c’est un sujet technique complexe, et qui repose pour partie sur des développements à venir. Je vais donc vous donner des clefs pour comprendre tout ça mais il y a plein de choses que je ne pourrai pas trancher. Comme d’habitude, je fais de longues recherches sur le sujet, je me fais relire et je pose des questions à des gens savants, ce qui limite normalement les bêtises que je pourrais dire. Mais en toute logique, il faut connaître un peu le réseau électrique pour comprendre les contraintes qui en découlent. C’est vrai. Pour commencer, le réseau électrique c’est ce qui nous permet d’avoir de l’électricité constamment à disposition et avec laquelle on fait beaucoup de choses ! Et oui, l’électricité permet de nous éclairer de façon efficace et sûre, de communiquer, de conserver notre alimentation, de faire la cuisine, d’avoir une température stable, de se déplacer en train, de regarder cette vidéo. L’électricité a aussi permis de nous libérer d’un certain nombre de corvées comme laver les vêtements. Une tâche qui incombait essentiellement aux femmes et qui était extrêmement chronophage. En un siècle, l’électricité a radicalement changé le quotidien de milliards de personnes et pour le mieux, la fameuse fée électricité comme on l’appelait à ses débuts. Vous pouvez regarder une chouette vidéo de Nota Bene sur ce sujet. Par choix, ou par la force des choses, il est tout à fait possible qu’on ait moins d’énergie à l’avenir. Et de façon générale, réduire sa consommation est une façon indiscutable de réduire son impact sur le monde. Mais, il est très improbable qu’on abandonne l’électricité parce qu’elle a trop d’avantages ! Donc pour toi l’électricité c’est une source d’énergie qu’on gardera ? Attention, l'électricité n’est pas une source d’énergie. C’est un vecteur énergétique c’est à dire un moyen de la déplacer et de l’utiliser. L’électricité doit être produite grâce au vent, au soleil, à la combustion de ressources fossiles ou encore à la fission nucléaire. Une fois produite, l’électricité permet le transport de cette énergie et son usage parfois très loin de son lieu de production. A chaque fois que vous allumez votre four électrique, celui-ci fonctionne parce qu’une centrale quelque part est en train de produire de l’électricité quasiment au même moment. Mais il a bien fallu un peu de temps pour que l’électricité se propage ? Vraiment très peu de temps en fait. La vitesse du signal électrique dans un fil de cuivre est d’environ 200 000 km par seconde, proche de la vitesse de la lumière. En une seconde, un signal électrique a le temps de faire cinq fois le tour de la Terre. Pour simplifier un peu la vidéo, on va considérer que l’électricité se propage instantanément. Par contre, avec le courant alternatif, les électrons restent en gros à leur position. Il est donc complètement faux de croire que des électrons partent de la centrale électrique pour venir jusque chez vous. Okay donc pour que je consomme de l’électricité, il faut qu’elle soit produite quasiment au même moment ! Et on arrive à un point absolument fondamental: il doit toujours y avoir équilibre entre la production et la consommation. C’est la base du réseau électrique. On verra un peu plus loin comment on fait pour maintenir cet équilibre mais retenez juste que si on n’y arrive pas, le réseau électrique s’effondre et on n’a plus d’électricité… gênant. Le problème, et vous le savez, c’est que l’électricité est quelque chose de très difficile à stocker. C’est même quelque chose qu’on ne sait stocker qu’indirectement, en passant par une autre forme d’énergie. Par exemple, je vous avais parlé, il y a un an, des moyens de stockage sous forme d’énergie mécanique. On avait notamment vu que certains barrages pouvaient être utilisés pour stocker indirectement un surplus d’électricité. Quand il y a trop d’électricité, de l’eau est pompée jusqu’en haut du barrage et quand on veut récupérer cette énergie, on fait redescendre l’eau à travers des turbines pour produire de l’électricité. Ces barrages qu’on appelle des STEPs, constituent à ce jour l’immense majorité des moyens de stockage utilisés dans le monde pour l’électricité bien devant les batteries, par exemple. Pourtant, quelques calculs rapides montraient qu’environ 1% de la production électrique française passait par ce stockage. De façon générale, l’immense majorité de l’électricité que consommée dans le monde est donc produite en direct. Mais si on connaît la consommation, comment on fait pour produire la bonne quantité d’électricité? Et d’ailleurs comment on connaît la consommation? On engage des voyantes ? On va commencer doucement. Imaginons qu’on sache parfaitement ce qu’il faut produire comme quantité d’électricité en fonction du temps et qu’on sorte une boîte à outils dans laquelle on a tous nos moyens de production. Et ? C'est qui ce type ? Ce type ? non mais un peu de respect quand même ! Bah c’est Dimitri de la chaîne M. Bidouille, j’en parle depuis le début. C’est lui qui a fait les chouettes vidéos sur le réseau, sur les lignes à haute tension et tout ça. Sur la technologie de ces sujets, il en connaît beaucoup plus que moi ! Bref, dans cette boîte à outils de moyens de production, on a plein de trucs : des centrales thermiques fossile, des centrales nucléaires, de l’hydroélectricité, de l’éolien, du solaire et d’autres technologies qui sont anecdotiques à l'échelle de la production du pays donc on ne va pas en parler pour éviter d'alourdir la vidéo. Okay, mais ces moyens ils n’ont rien à voir entre eux. Une éolienne fonctionne quand il y a du vent alors qu’une centrale au charbon fonctionne quand on veut enfin tant qu’on a du charbon. Oui c'est tout à fait exact. En fait, on sépare généralement en deux les moyens de production. D’un côté, on a les moyens de production dits pilotables. On peut les démarrer et les arrêter quand on veut. Enfin. On démarre pas une centrale nucléaire en 10min il faut un peu plus de temps. Mais on peut planifier le démarrage de la centrale ou l'arrêt et surtout faire varier à la demande la quantité d'énergie produite. Enfin bref dans les moyens de production dits pilotables, on retrouve les centrales thermiques fossiles ou nucléaires et une partie de la production d'hydroélectricité. Seulement une partie de l’hydroélectricité ? Oui, et d'ailleurs c'est très bien expliqué dans la vidéo sur l’hydroélectricité sur cette chaîne. D’un côté on a des centrales hydroélectriques de lac. Lac qui sert de réservoir d'énergie potentielle qu'on peut utiliser. Il suffit d'ouvrir le robinet pour produire de l’électricité et faire varier l'ouverture du robinet pour produire plus ou moins. A l’autre extrême, on a les centrales hydroélectriques au fil de l’eau qui ne comportent pas de réservoir ou un très petit. Dans ce cas, on ne peut pas moduler la production électrique, on produit avec l’eau qui passe, la puissance varie un peu avec l’eau disponible et donc les saisons mais c'est globalement stable dans le temps. Et tous les moyens pilotables peuvent moduler de la même façon ? Evidemment non, sinon ça serait beaucoup trop simple.Chaque moyen de production peut monter plus ou moins vite en puissance. Les centrales hydroélectriques de lac, les centrales au gaz et les centrales au fuel sont capables de moduler rapidement leur puissance. Comme par exemple la centrale électrique au gaz de Bouchain, qui peut monter de 50MW par minute, ce qui est très rapide. Oui je ressors l'exemple de ma dernière vidéo mais j'ai vu qu'il y a des fans de cette centrale sur Twitter donc je leur passe le coucou. En revanche les centrales nucléaires représentent un fort coût fixe et un faible coût variable contrairement aux centrales fossiles qui représentent un coût fixe faible mais un coût variable important... Je vais peut-être un peu détailler. En gros : Le prix du combustible nucléaire ne pèse pas beaucoup dans la production d'électricité, ce qui coûte de l'argent, c'est la centrale, le personnel, l'entretien, etc. Donc quand on utilise la centrale à une fraction de sa capacité, elle coûte presque aussi cher que si on l'utilisait à sa capacité nominale. Alors que si on compare avec une centrale au charbon par exemple, le combustible représente une grosse part du coût de la production. Donc quand on n'utilise pas ou peu la centrale, ça coûte beaucoup moins cher qu'à sa capacité nominale. C’est pour ça que la plupart des pays utilise les centrales nucléaires “en base”, c'est à dire qu'on garde les centrales au maximum de leur puissance pour assurer cette partie de la consommation. Parce que quand on regarde la consommation à la journée par exemple on s’aperçoit qu’il y a une grosse partie qui ne varie pas . Et cette grosse partie ne varie pas sur des durées très très longues. On a toujours une consommation dans le pays et cette base de consommation varie lentement au fil des saisons. On fait ensuite moduler d’autres capacités de production pour équilibrer avec la consommation. Donc la partie du haut là qui varie beaucoup. Alors vous le savez sûrement le réveilleur a fait une vidéo sur les centrales nucléaires et il explique qu’en France, une partie des réacteurs nucléaires font du suivi de charge et sont donc capables de réguler leur production pour suivre la demande mais la France est une exception sur cet aspect. Et même si elles peuvent moduler leur production les centrales nucléaires le font lentement et avec des contraintes importantes. Pendant une grande partie de l’histoire du réseau électrique, la production était donc constituée d’une base faite avec des centrales gardées à puissance maximale et d’hydroélectricité au fil de l’eau non modulables. Puis des centrales thermiques au fuel, au gaz ou des centrales hydroélectriques de lac qui étaient chargées d'apporter une puissance modulable pour ajuster la production à la consommation. Mais maintenant on a aussi l’éolien et le photovoltaïque ! Oui, et l’électricité produite à partir d’éoliennes et celle produite à partir de panneaux photovoltaïques est en augmentation. Pour lutter contre le changement climatique, la pollution de l’air, l’épuisement des ressources fossiles et plein d’autres soucis, on aimerait que ces moyens de production électrique remplacent l’utilisation massive de ressources fossiles. Mais ces deux moyens de production électrique renouvelable ont un défaut... majeur. C’est quoi ce défaut ? J’en sais rien, c'est au Réveilleur, j'ai terminé ma partie. Leur intermittence ou leur variabilité. Bah intermittence ou variabilité ? C’est quoi le bon terme ? En fait, les deux termes ne sont pas terribles. Le terme d’intermittence n’est pas très bien adapté parce qu’il définit normalement un phénomène qui passe par des périodes de fonctionnement et des périodes d’arrêts. Hors, la production éolienne ou photovoltaïque change au cours du temps mais ne se limite pas à une production nulle ou maximale. Du coup, on pourrait utiliser le terme “variable” mais ce n’est pas terrible non plus parce qu’il donne l’impression qu’on peut faire varier cette production volontairement alors que tout le problème c’est bien qu’elle varie indépendamment de notre contrôle. Dans la presse scientifique anglophone, le terme variable est majoritairement utilisé mais le terme intermittent domine largement la question dans les textes en français. Vu que c’est le terme dominant, qu’il limite les confusions et que je n’ai pas trouvé de terme plus adapté, j’ai choisi de garder ce terme d’intermittence mais je suis conscient de ses limites. Avec les prévisions météos on peut prévoir partiellement cette intermittence mais on ne peut que la subir, on a presque aucun contrôle dessus. La seule chose qu’on peut éventuellement faire c’est moduler à la baisse en perdant volontairement une partie de la production Okay on en parle tout le temps de cette intermittence,mais on peut voir un peu à quoi ça ressemble ? Si je regarde la production photovoltaïque et éolienne en France sur deux semaines, j’obtiens ces courbes. C’est quelque chose que vous pouvez facilement faire avec l’outil en ligne ECO2MIX. Un outil que je vous recommande fortement d’utiliser ! Vous voyez que la production photovoltaïque a lieu pendant les heures de jours, en gros entre 8h et 18h sur ce mois de janvier. A noter que cette production est plus importante en été. Il y a une variation d’un jour à l’autre suivant la météo et notamment l’ennuagement. La production éolienne est plus forte en hiver, peut rester stable pendant quelques jours et varier très brutalement. Mais là tu as choisi la période. En plus je suis sûr que t’as pris celle qui t'arrange Il n’y a pas une façon de quantifier un peu cette intermittence ? Si, pour vous donner une idée, on m’a suggéré une petite méthode que je vais vous expliquer. Ce que vous voyez ici c’est la puissance moyenne pendant une heure pour les 8760 heures de l’année et on se déplace chronologiquement de janvier à décembre. J’ai sommé la puissance des éoliennes terrestres et offshore et du photovoltaïque pour la France pour toute l’année 2019. Ce n’est pas facile de tirer quelque chose de cette courbe alors je vais faire quelques transformations. D’abord, je divise par le maximum, ça ne change pas grand chose. Mais l’axe des ordonnées s’exprime maintenant en pourcentage de la puissance maximale annuelle. Et maintenant, j’ordonne de façon décroissante ces 8760 points. Evidemment on perd l’information sur l’évolution temporelle mais on a une courbe bien plus simple à lire. Et pour que ce soit encore plus claire, j’ai exprimé l’axe des abscisses en pourcentage du temps. Maintenant, qu’est-ce qu’on peut voir sur cette courbe? On peut voir par exemple que les moyens intermittents fonctionnent moins de 20% du temps à plus de 50% de leur puissance maximale annuelle. Ou encore, plus de 90% du temps à plus de 10% de leur puissance maximale annuelle. Il y a donc des moyens intermittents qui fonctionnent toujours un peu mais la puissance produite peut être bien plus faible que le maximum observé. Pour les plus curieux, j’ai ajouté un petit tableau et vous pouvez faire pause pour avoir des points de repères. Un autre truc intéressant, c’est de faire l’hypothèse d’une consommation électrique constante sur une année, ce qui est évidemment faux, mais voyez le comme un petit exercice de pensée, on se demande ensuite quelle partie de la consommation pourrait couvrir des moyens électriques intermittents si la puissance maximale annuelle était égale à cette consommation constante. Dans ce cas, on voit qu’ils couvriraient près du tiers des besoins et donc qu’il faudrait produire les deux tiers de l’électricité restante avec d’autres moyens de productions. Donc là on pose comme principe un déploiement massif des renouvelables intermittents! mais je crois qu’on avait déjà dit qu’en France on avait une électricité bas carbone grâce au nucléaire et à l’hydroélectricité c’est vraiment bien de déployer plein de renouvelable intermittent pour nous ? Ici, c’est vraiment un petit exercice de pensée pour avoir un point de repère et un chantier comme celui-ci serait long, difficile et générerait évidemment des impacts environnementaux. Mais, dans cette vidéo, je me pose la question des effets qu’auraient un déploiement massif et des outils disponibles pour le permettre. Je ne dis pas que c’est souhaitable dans tous les cas et tous les pays. Mais,aujourd’hui l’essentiel des pays du monde repose largement sur les ressources fossiles pour leur production électrique. Un déploiement massif de renouvelables serait clairement meilleur que les mix électriques existants dans la majorité des pays du monde. Il ne faut pas juger les renouvelables intermittents en partant du mix électrique français qui est vraiment un cas à part. Okay, je comprends mieux ta démarche . Et ta courbe montre bien l’intermittence mais il suffit de mettre des éoliennes partout il y a toujours du vent quelque part non ! Tu soulèves ici la question de ce qu’on appelle le foisonnement.. L’idée c’est que comme il y aurait toujours du vent ou du soleil quelque part, répartir géographiquement des moyens de production intermittents permettrait de lisser la production et donc de diminuer la variabilité. On peut voir l’idée générale sur cette simulation où on a tracé la production éolienne en considérant des zones géographiques de plus en plus grandes. On voit que la production sur un parc éolien varie très vite dans le temps avec des pics atteignant presque le maximum de la puissance installée mais durant moins de quelques jours. Quand on regarde la production éolienne sur une zone géographique plus large, ici dans l’ordre: la région de Bavière, l’Allemagne, sur sept pays différents et finalement sur l’Europe, on se rend compte que la puissance monte moins haut en pourcentage de la puissance installée et varie moins vite dans le temps. Agréger sur une plus grande zone géographique permet donc de lisser la production de ces énergies intermittentes. Le foisonnement existe mais on ne peut pas dire qu’il suffit à gérer l’intermittence. Même agrégée à l’échelle européenne, il y a encore une forte variabilité de la puissance fournie. Et la courbe que tu nous as montrée pour quantifier l’intermittence, ça prend en compte le foisonnement ? C’est une agrégation au niveau de la France des différents moyens intermittents donc ça prend déjà en compte le foisonnement au niveau national qu’on pense aux complémentarités entre le solaire et l’éolien ou aux différents régimes de vent. Mais c’est fait à partir de ce qui a été installé vu que ce sont des données réelles et on pourrait rétorquer que les installations n’ont pas nécessairement été faites pour maximiser le foisonnement. Et entres pays européens, est-ce qu’on voit un foisonnement ? Je peux tracer la courbe de la production européenne pour la comparer avec celle de la France. A chaque fois que je vais parler des données pour l’Europe dans cette vidéo , ce sera, en réalité, les données pour l’ensemble des pays que j’ai listé ici. Encore une fois j’ai pris la somme de la production du photovoltaïque, de l’éolien terrestre et de l’éolien offshore heure par heure, divisé par le maximum annuel et ordonné de façon décroissante. C’est pour ça que le maximum est également à 100% alors qu’on regarde une puissance plus importante dans le cas de l’Europe que dans le cas de la France, c’est en pourcentage de la puissance maximale observée sur une année. On voit qu’en Europe, la puissance est à plus de 50% de la puissance maximale un tiers des heures de l’année 2019 et que la puissance est à plus de 10% de la puissance maximale toute l’année. La situation s’est donc améliorée. Même chose si on reprend notre petit exercice de pensée de toute à l’heure. En faisant l’hypothèse d’une puissance appelée constante qui coïncide avec le maximum de production des moyens intermittents, il pourrait couvrir 43% des besoins européens contre 33% quand on regardait seulement la France. On voit que l’intermittence est plus faible à l’échelle européenne qu’à l’échelle française. Mais tu as regardé en mélangeant tous les moyens intermittents, est-ce que cela change quelque chose si on sépare l’éolien terrestre et l’éolien offshore par exemple ? C’est vrai que c’est intéressant de regarder séparément les différents modes de production intermittents, on apprend d’autres choses. Vous voyez que le photovoltaïque ne produit quasiment rien la moitié du temps. C’est simple… il fait nuit. Et comme les pays européens sont dans le noir à peu près en même temps et partagent les mêmes saisons, regarder pays par pays ou au niveau de l’Europe ne change pas grand chose. Pour l’éolien terrestre et offshore, vous voyez que les courbes sont assez proches. Quand je calcule la moyenne sur l’année, on est dans les deux cas autour de 40% de la puissance maximale annuelle. Ne pas trouver de différences entre l’éolien terrestre et offshore est une curiosité sur laquelle je vais revenir un peu plus tard. Les courbes que j’ai tracées jusque là étaient la somme de ces trois moyens de production intermittents. Mais, vu que la puissance fournie par les éoliennes terrestres est plus importante, c’est surtout elle qui joue sur la forme de la courbe finale. Pour avoir un point de repère, je pense que c’est intéressant de regarder l’hydroélectrique au fil de l’eau puisque c’est un moyen de production peu modulable. On voit que l’intermittence est plus faible que pour l’éolien ou le photovoltaïque. Et encore, une partie de la variabilité de ce moyen de production est voulue. Je vous ai tracé la production européenne sur la première semaine de janvier pour vous montrer ça. En fait, l’hydroélectrique au fil de l’eau intègre aussi des centrales d’éclusées qui peuvent stocker l’eau sur quelques heures. La variabilité observée est donc en partie volontaire et vient moduler la production de base. Vous voyez qu’on répète le même motif qui est simplement celui de la consommation journalière, ces moyens aidant à ajuster la production électrique. A ça s’ajoute une variabilité inter-saisonnière, non représentée, qui est complètement subie et liée aux précipitations. En gros, non seulement l'hydroélectrique au fil de l’eau est moins variable mais sa variabilité n’est pas entièrement subie contrairement au photovoltaïque ou à l’éolien. Ajoutons maintenant la production nucléaire. On voit que le nucléaire est à l’échelle de l’Europe proche de la puissance maximale annuelle pendant une bonne partie de l’année. Et même quand il diminue, c’est la plupart du temps dû à des arrêts pour rechargement ou inspection qui sont planifiés et donc anticipables. De plus, il y a une baisse qui est voulue dans le cas du parc français où on module la puissance pour l’adapter à la consommation. Mais, c’est un point de comparaison intéressant parce que beaucoup de pays l’utilise en base. Si je traçais cette courbe pour tous les moyens de production, vous verriez que le nucléaire est une des courbes les plus hautes. La production nucléaire est donc fiable mais participe peu à l’équilibrage du réseau électrique. Comparer la variabilité d’autres moyens de production comme le gaz naturel ou le charbon ne serait pas pertinent ici parce que ces moyens de production sont modulés pour équilibrer le réseau. On ne subit pas leur variabilité comme pour l’éolien ou le photovoltaïque mais on varie volontairement pour garder la stabilité du réseau électrique. Revenons maintenant plus en détail sur l’éolien. L’éolien offshore a normalement une production plus stable et plus élevée que l’éolien terrestre. C’est un point qui est souvent mis en avant par les promoteurs d’éoliens offshore. Donc, il est étonnant que ces deux courbes soient aussi proches. Pour résoudre ce paradoxe, laissez moi tracer le cas de l’éolien terrestre et offshore en Allemagne, pays particulièrement intéressant car disposant d’un parc important des deux. Là, on voit clairement que l’éolien offshore est plus stable et plus productif que l’éolien terrestre. Il est à un pourcentage plus important de sa puissance maximale annuelle la majorité du temps. Alors pourquoi on trouve quelque chose de différent à l’échelle de l’Europe ? Tout simplement parce que le foisonnement de l’éolien terrestre à l'échelle européenne permet de réduire la variabilité au point de mettre la production des éoliennes terrestres au même niveau que l’éolien offshore. Par contre, l’éolien offshore foisonne très peu parce que la production européenne est concentrée dans une zone limitée comme on le voit très bien sur cette carte provenant du site connaissance des énergies. Avec le déploiement actuel d’éoliennes en Europe, l’éolien terrestre montre une certaine complémentarité entre pays européens mais c’est très peu le cas de l’éolien offshore. Dans les deux cas, ça peut amener des échanges d’électricité des pays européens bien pourvus en énergies renouvelables intermittentes vers ceux qui en ont moins parce qu’une surproduction de ces moyens de production s’échange à un prix faible. Et les échanges d’électricité entre les pays dont on parle ici... c’est quelque chose qui existe déjà ? Sur cette carte vous pouvez voir la quantité totale d’électricité qui a été échangée entre les pays pour l’année 2018. En tout, plusieurs centaines de TWh ont été échangées, c’est de l’ordre de grandeur de la production électrique française. C’est donc une quantité importante. Les échanges transfrontaliers sont une variable d’ajustement importante entre consommation et production et si vous avez déjà jeté un coup d’oeil à la production électrique en France ou en Allemagne, vous avez sûrement remarqué la présence d’imports et d’exports. En effet, une bonne partie de l’Europe partage aujourd’hui un réseau électrique commun et il y a tout le temps des échanges électriques entre différents pays européens. Franchement je ne pensais pas qu’on échangeait autant d’électricité entre pays européens! L’interconnexion des pays européens est extrêmement importante pour comprendre la stabilité d’un pays. Par exemple, le Danemark qui produit aujourd’hui près de la moitié de son électricité avec de l’éolien doit en partie sa stabilité aux interconnexions avec ses voisins et en particulier avec la Norvège et ses énormes ressources hydroélectriques. La capacité de ses interconnexions va même dépasser la puissance maximale consommée par le pays. Ses lignes transfrontalières deviendront suffisamment puissantes pour que le pays puisse théoriquement être alimenté en électricité sans production interne, ce qui est assez fou ! Aujourd’hui, je ne pense pas que le Danemark pourrait avoir un réseau électrique stable si il n’avait pas de voisins avec qui échanger. Et c’est un problème ? Non,du moins tant que le Danemark reste en bons termes avec ses voisins. Les interconnexions jouent un rôle hyper important dans la stabilité des réseaux et le Danemark est un des pays les plus stables d’Europe malgré une importante production éolienne grâce à ses interconnexions. Le réseau électrique français comme les autres est stabilisé par ces interconnexions. Il y a beaucoup plus de coupures de courant dans les petits réseaux électriques isolés comme ceux des îles que sur de grands réseaux densément interconnectés. Par contre, une conséquence importante de ça, c’est que le pourcentage des énergies intermittentes dans un mix électrique ne peut pas être apprécié au niveau national si le réseau électrique de ce pays est stabilisé par ses voisins, il faudrait donc le regarder au niveau du réseau électrique dans son ensemble. Et oui… ça veut dire qu’on peut mettre à la poubelle un bon paquet d’articles qu’on voit sur le sujet… Si le Danemark produit 50% de son électricité avec des éoliennes, on ne peut pas en déduire qu’un réseau électrique avec 50% d’énergie intermittente est possible. Du coup, les renouvelables intermittents peuvent faire augmenter les échanges d’électricité? Oui, on a vu qu’il y avait une relative complémentarité entre les pays européens, donc il y aurait intérêt à échanger. C’est d’autant plus vrai aujourd’hui que les moyens renouvelables intermittents ne sont pas bien répartis entre les pays. Certains pays comme l’Allemagne en ont beaucoup et d’autres comme la Pologne en ont très peu. Il peut donc y avoir une surproduction d’électricité renouvelable peu chère qui induit des échanges avec les voisins. Et pour ceux qui se posent la question, plus d’échanges augmentent les pertes en ligne mais elles sont très faibles sur le réseau de transport, moins de 2%. On peut échanger de l’électricité sur de longues distances si les lignes transfrontalières existent mais ces lignes sont coûteuses à mettre en place. Et il y a d’autres façons de pallier l’intermittence pour augmenter la part de ces renouvelables ? Oui, on peut recourir à ce qu’on appelle l’écrêtement et cette figure qu’on a déjà pas mal utilisée va nous aider à comprendre ce que c’est. Si on reprend notre petite exercice de pensée avec une consommation constante qui coïncide avec le maximum de la production, je peux choisir d’augmenter arbitrairement la puissance fournie de 60%, ce qui reviendrait à construire plus de moyens renouvelables intermittents. La conséquence, c’est qu’on a alors une surproduction pendant plusieurs heures de l’année. Mais, cette surproduction représente moins de 3% de la totalité de l’électricité produite. L’intérêt, c’est qu’on passe alors de 43% des besoins couverts par des moyens intermittents à 63%. Je pense que ce petit exercice de pensée montre bien l’intérêt de l’écrêtement. Un surdimensionnement des moyens renouvelables intermittents permet d’augmenter beaucoup leur part dans la consommation électrique totale au prix d’une surproduction faible. L’écrêtement est quelque chose qui peut s’avérer économiquement rentable et c’est un mécanisme qui est présent dans beaucoup de scénarios de développement des renouvelables intermittents. Les interconnexions ou l’écrêtement sont donc des moyens techniques qui permettent d’augmenter la part de renouvelables intermittents dans le mix électrique. Mais on pourrait très bien stocker cette surproduction et utiliser ce stockage plus tard quand on a plus assez de production. Effectivement… et on en parlera dans une seconde vidéo ! Dans une seconde vidéo ? Si vous voyez ce passage, c’est qu’au montage j’ai trouvé la vidéo un peu trop hardcore et que je vais donc couper en deux. Même moi j’ai mes limites.. L’écriture de la seconde partie étant quasiment finie la deuxième vidéo devrait arriver rapidement ! Dans cette première partie, on a vu quelques bases du réseau électrique. En particulier, on a vu que pour que le réseau électrique fonctionne, il faut toujours qu’il y ait équilibre entre consommation et production. Historiquement, on produisait l’électricité avec des centrales qui fonctionnaient à plein régime et d’autres qui étaient chargées de moduler leur puissance pour ajuster la production à la consommation. Mais, l’arrivée de moyens de production électriques comme l’éolien ou le photovoltaïque change radicalement la donne puisque ces énergies, dites intermittentes, varient en fonction de conditions météo qui échappent à notre contrôle. J’ai passé pas mal de temps à essayer de quantifier cette variabilité subie. J’ai également essayé de quantifier le foisonnement, l’effet qu’aurait une répartition géographique de moyens de production intermittents. On a vu que ce phénomène existe mais qu’il avait des limites. Du coup, une façon d’intégrer plus de moyens renouvelables intermittents est d’utiliser les interconnexions entre les pays, interconnexions qui existent déjà mais vont continuer de croître. Une autre façon d’intégrer plus de moyens renouvelables intermittents est de surdimensionner ces moyens de production, ce qui se fait au prix de la perte d’une surproduction qui représente une faible part de la production totale. Dans la prochaine vidéo, on verra d’autres moyens de gérer cette variabilité subie pour intégrer plus de moyens intermittents au mix électrique. On verra aussi si ces moyens intermittents posent des problèmes pour l’équilibre du réseau électrique Merci à tous d’avoir regardé cette vidéo. C’est un sujet que je connaissais peu, où j’ai appris pas mal de choses et j’espère que vous aussi j’ai essayé de mettre un peu les mains dans les données pour vous donner une vision précise d’une chose dont on entend souvent parler, l’intermittence, mais qu’on voit assez peu quantifié. Comme toujours de nombreuses personnes m’ont aidé et je vous laisse une petite liste en description. Je remercie en particulier Nicolas Goldberg qui est un expert de ces questions et que je vous conseille de suivre sur twitter. Je remercie évidemment Dimitri de la chaîne M. Bidouille qui est une chaîne de grande qualité et qui est un excellent complément à la mienne si des questions comme les réseaux électriques vous intéressent. Et je remercie évidemment les personnes qui me soutiennent financièrement et permettent à ce contenu d’exister. C’était Le Réveilleur et à bientôt sur le net.