Nous sommes au matin du 1er septembre 1715. Dans cette cour de marbre au cœur du château de Versailles, il est 8h15. De nombreux courtisans, des serviteurs, de simples curieux sont rassemblés ici. Cela fait près de 10 jours que le roi Louis XIV est entré dans son agonie.
Soudain, à 8h23, au balcon de la chambre du roi, une fenêtre s'ouvre. Le duc de Bouillon, grand chambelan de la cour, se présente, la tête couverte d'un chapeau à plumes noires. D'une voix émue, il proclame Le roi est mort Le roi est mort ! Le roi est mort !
Un instant, il s'éclipse, puis il revient, coiffé cette fois de plumes blanches. Et d'un ton beaucoup plus joyeux, il s'écrit Vive le roi ! Vive le roi ! Il a donc suffi de ces quelques mots pour que le petit Louis XV succède à Louis XIV.
En vertu du principe de continuité de la monarchie, le roi de France ne meurt jamais. Mais au-delà de la mort d'un vieillard de 77 ans, il s'agit aussi de la naissance d'une nouvelle époque. C'est ce moment crucial de notre histoire que je voudrais vous faire découvrir pas à pas. Musique On pourrait dire que Louis XIV a été le scénariste de sa propre mort.
Il veut mourir en roi. C'est une mort spectacle qu'il met en scène. En cet été 1715, la mort de Louis XIV arrive au terme d'une longue agonie et de très nombreuses maladies. Songez que le roi... a été purgé des centaines de fois, a subi des centaines de saignées.
Il y a deux, trois manières de mourir au XVIIe siècle. Il y a les guerres, les épidémies, et puis il y a les médecins quand ils commencent à vous soigner. De l'autopsie au funérail à Saint-Denis, nous découvrirons les rituels étonnants qui accompagnent la mort des rois. C'est véritablement la cuisine des funérailles. On va vider ce qu'on appelle les trois ventres, le crâne va être scié.
Après la mort du roi Soleil, vient aussi le temps du bilan, pour l'un des règnes les plus longs de l'histoire. Le royaume de France est dans un état calamiteux. Il y a un enfermement du pouvoir et ça c'est une des causes aussi de la fin de la monarchie, un siècle plus tard.
L'ouverture du testament royal est un coup de théâtre qui va donner lieu à une lutte sans merci entre le neveu de Louis XIV et son fils bâtard. Il y a des rendez-vous secrets. C'est une conspiration menée de bout en bout par une équipe de pieds-niquelés étonnantes.
La régence revient finalement au neveu du roi Soleil, Philippe d'Orléans, à charge pour cet homme de plaisir de se montrer à la hauteur de son oncle afin de redresser la France et d'encourager les arts. Je vais vous faire découvrir un trésor extraordinaire, le diamant, le régent, acquis par la France au moment de son gouvernement. 300 ans après sa mort, à Versailles et dans le monde entier, l'héritage de Louis XIV continue de nous éblouir. À travers les plus beaux palais d'Europe et jusque sous les ors de notre République. Louis XIV lègue à la France une hyper personnalisation du pouvoir.
Il a vraiment incarné l'État, il a été l'État. C'est vraiment ça l'ADN du règne et du siècle de Louis XIV. En cette année 1715, Louis XIV est sur le trône depuis 73 ans. Et la chapelle est sans doute l'endroit du château que le souverain connaît le mieux et qu'il fréquente le plus.
Chaque jour, il y entend la messe agrémentée de magnifiques motets. Vous savez, ces poèmes religieux composés par son maître de musique, Michel-Richard de Lalande. Et il se prépare.
a touché 1700 malades des écrouelles en vertu de son pouvoir thaumaturge, ce pouvoir de guérison que l'on prête au roi de France. Mais depuis quelques temps, le vieux roi se montre mélancolique. Le 3 mai, à Marly, il a assisté à une éclipse du soleil.
La disparition de cet astre, glorieux symbole de son règne, a valeur de présage. Chaque matin, dans cette chambre, ces médecins observent avec soin son état de santé. Comme tout le monde, et peut-être parfois plus que d'autres, le roi de la vie, le roi de la vie, le roi de la vie, le roi de la vie, le roi de la vie, le roi de la vie, le roi de la vie, Trois soleils a souffert dans sa chair tout au long de sa vie.
d'abord du sommeil du roi. Est-ce que le roi a bien dormi ? Ensuite, on observe si le roi a eu des sueurs nocturnes. C'est un roi qui a une santé de fer. Il a pu tenir jusqu'à presque l'âge de 77 ans, on pourrait dire presque malgré ses médecins, tellement la médecine était assez redoutable à l'époque.
Ils sont là à renifler les selles, à regarder la couleur des urines. On est vraiment dans les messins de Molière. Ils prennent son pouls et demandent tout simplement au roi. s'il souffre d'une partie de son corps et s'il se sent tout simplement bien. Un objet extraordinaire conservé au château de Versailles nous permet de découvrir Louis XIV tel que le voyaient chaque jour ses médecins.
Voici le portrait de Cire de Louis XIV. C'est un portrait qui a été réalisé à partir de prises d'empreintes à la terre. C'est une peau qui est un peu affaissée, les joues pendantes. Elle est grêlée, cette peau. Elle porte les marques de la variole qu'il a eues dans son enfance.
On peut parler véritablement d'une photographie tridimensionnelle du visage du roi. Si la santé de Louis XIV revêt une telle importance, c'est que le corps du roi est investi d'une dimension politique. Il y a deux rois dans la personne du roi.
Il y a le roi mortel, le roi physique, le roi, je dirais, humain, et puis il y a la souveraineté qu'il incarne. Or, la souveraineté ne meurt jamais. La propagande officielle n'arrête pas de répéter que jamais aucun roi n'a régné aussi longtemps et dans un état de santé aussi fleurissant. Et on peut dire que c'est un peu comme ça. dire que lui-même s'estime comme une sorte de miraculé, un des signes de l'élection divine que cette longue vie dans un relatif état de bonne santé.
En contrepoint de cette image officielle, un précieux manuscrit protège les secrets du corps du roi. Le journal de santé, tenu tout au long de sa vie par ses médecins, aujourd'hui à la Bibliothèque Nationale de France. Ce journal est tout à fait comme un carnet de santé de Louis XIV. On y retrouve toutes ses maladies, comme une sorte de journal intime de sa vie biologique.
On retrouve les vapeurs dont Louis XIV se plaint constamment. On voit que le roi est purgé. Ici, un arrachage de dents, le chicot tiré le 16 mars. Ici, pesanteur de tête, donc le roi souffre toujours de migraines. Un roi dont la santé se dégrade.
Tous les jours, un malaise, tous les jours, un mal de tête, des vomissements. On se rend compte quand même qu'il devait souffrir énormément. Dès son enfance, le roi, très chrétien, accumule les maladies, dont certaines ont des répercussions politiques évidentes.
La petite vérole qu'il contracte en pleine fronde à l'âge de 9 ans, ou encore une curieuse affection qui se déclare dans sa 17e année. Le roi se plaint d'avoir souillé ses chemises de nuit, si l'on peut dire. Il y a des écoulements constants, quand il monte à cheval, c'est extrêmement fâcheux. On était certains que le roi était puceau, mais... Les faits médicaux sont là et on a été forcé d'admettre qu'il s'agissait d'une bionoragie vraisemblablement donnée par Madame de Beauvais, qui a dû déniaiser le roi à la sortie d'un bain.
Le problème, c'était de savoir si le roi pourrait avoir des enfants. Parce qu'on savait que cette maladie pouvait entraîner une stérilité par atteinte des testicules, atteinte des déferrants, atteinte de l'urètre. Pour rétablir le membre viril, on va utiliser quelque chose qui, dans la nature, ressemble à ce membre viril.
Et là, en l'occurrence, le médecin prescrit de la corne de Cerf. Au XVIIe siècle, la médecine a peu évolué depuis l'Antiquité, et les traitements que les médecins préconisent sont souvent pires que le mal. Songez que le roi a été purgé des fantaisies.
une centaine de fois, a subi des centaines de saignées. On dit qu'à l'époque que la saignée, ça reconstitue les humeurs, mais je pense que ça fatigue aussi. Il y a deux, trois manières de mourir au XVIIe siècle. Il y a les guerres, les épidémies, et puis il y a les médecins quand ils commencent à vous soigner. Pour autant, certains remèdes naturels, comme le quinquina, utilisé par Louis XIV contre les fièvres, ont fait la preuve de leur efficacité.
La médecine d'Ancien Régime est une médecine avant tout d'accompagnement, c'est une médecine de réflexion, c'est une réflexion sur le corps qui propose un certain nombre de remèdes, tout en considérant que c'est Dieu qui envoie les maladies et c'est Dieu qui envoie la guérison. C'est Dieu qui quelque part choisit la vie et la mort. En 1658, le jeune Louis XIV qui se trouve à l'armée dans les Flandres est saisi d'une violente fièvre, accompagné de délires et d'incontinence. C'est la maladie de Calais, dont les symptômes correspondent à la typhoïde ou au typhus.
La fièvre monte toujours. L'avenir du royaume est suspendu à sa santé, c'est toujours plus ou moins le cas pour le roi, mais particulièrement pour un roi qui est encore jeune, qui n'est pas marié, qui n'a donc pas de postérité, ce qui ouvrirait une succession extrêmement délicate. Sommes peu d'années après la fronde. On s'est demandé si son frère n'allait pas lui succéder.
Immédiatement, ça entraîne des mouvements à la cour. La santé du roi, d'une certaine manière, c'est la santé du royaume. Si on dit que le roi, c'est l'État, si le roi est malade, l'État est malade. Ne me laissez pas.
Je suis là, Louis. Il faut que Louis XIV, que le corps de Louis XIV soit absolument vigoureux, parce que la vigueur de son corps, c'est la vigueur de l'État, et donc la souveraineté pleine et entière assumée par lui-même. On administre à Louis XIV un poison violent, l'antimoine, qui le fait vomir.
Contre toute attente, le jeune roi revient à la vie. Mais la maladie de Calais aura pour lui une conséquence inattendue. Le roi commence à perdre ses cheveux par poignée.
Cette chevelure léonine, pour Louis XIV, c'est le signe de sa virilité, de sa puissance. Et donc quand il commence à les perdre, c'est un véritable drame, il le dit à Mazarin. Et puis finalement, il commence à porter la perruque dite complète, qui va être presque comme une... comme une métaphore de la majesté royale.
À la cour, les médecins sont également présents au cours des repas. Un aspect du métier de roi qui n'est pas sans effet sur la santé de Louis XIV. Tous les témoins insistent sur, j'oserais presque dire, non pas la gloutonnerie du roi, mais le fait qu'il mange énormément. Quand le roi aime, il mange sans modération.
C'est vrai qu'on pourrait dire que cet excès participe à la souveraineté. Il est supérieur en tout, donc il mange plus que tout. Mais bon, ce n'est peut-être pas la raison essentielle.
Je pense qu'il avait aussi un plaisir simple de certains aliments et puis qu'il en a abusé. Fagon va essayer d'arrêter en disant à ces messieurs de la bouche, donc ceux qui s'occupent de la nourriture du roi, le roi prend trop de sucrerie, il n'ose pas le lui dire directement. Et ces messieurs de la bouche lui disent, nous nous sommes chargés de nourrir le roi.
Vous, vous êtes chargé de le purger. Dans le journal de santé, il est fait allusion à plusieurs reprises au teignat, donc au verre solitaire, que le roi aurait rejeté avec ses selles, le plus naturellement du monde. Mais il faut savoir que le teignat, le verre solitaire, donne des troubles. Il mangeait, il mangeait, il mangeait, peut-être est-ce le teignat. Le goût pour les sucreries et l'absence de dentifrice provoquent chez Louis XIV des problèmes de caries.
En 1685, pour y remédier, Il décide de se faire arracher les dents, mais l'opération tourne au fiasco. L'extraction d'une dent de Louis XIV va entraîner la perforation du palais. L'os se dégrade, pourrit, et une odeur absolument atroce émanait de la bouche et du nez du roi. Pendant qu'il dînait ou déjeunait, il avait du liquide qui coulait par le nez.
Quand même pas évidemment très engageant. Pour se débarrasser de cette fistule humiliante, Louis XIV accepte alors de se soumettre un traitement pour le moins radical. Les chirurgiens ont opéré le roi pour cautériser cette fistule nasopalatine en utilisant tout simplement le fer rouge.
Le médecin qui relate cet épisode évoque en même temps le stoïcisme du roi en disant il ne s'est pas tellement plaint, même si bien sûr il a énormément transpiré de par la proximité du fer rouge et de la douleur ressentie. Mais Louis XIV n'en a pas fini avec les fistules. L'année suivante, c'est Alanus qu'il est atteint de la même infirmité. Probablement favorisé par l'abus des clistères et la pratique de l'équitation. Il faut couper avec un bistouri, bien entendu à vif, cette partie qui en fait ne cicatrise jamais, qui durcit et qui cause des douleurs handicapantes pour un roi qui ne peut plus jamais monter à cheval.
Pour opérer Louis XIV, le premier chirurgien Félix a l'idée de créer un scalpel inédit, le bistouri à la royale. Ce bistouri ressemble à... Une sorte de rasoir qui a une forme courbe de façon à épouser la partie qu'il s'agit de sectionner. Le sérogien a voulu s'entraîner parce qu'il avait peur que ça saigne et que le roi meure.
Il a donc essayé sur plusieurs patients, près d'une dizaine, certains sont morts. Leurs corps ont été cachés, c'est-à-dire qu'il y a eu une véritable censure. autour de cette expérimentation. Lorsque le chirurgien se sent prêt, l'opération peut avoir lieu, le 18 novembre 1686. Monsieur le chirurgien, traitez-moi comme le moindre de mes sujets, ainsi votre main ne tremblera pas. Les valets ont tenu les jambes du roi bien remontées pour exposer la fistule.
On a fait des prières. et le chirurgien a introduit une canule contenant le bistouri. On entendra juste un Oh mon Dieu quelques soupirs.
On a sectionné d'un coup, net, d'après le témoignage du médecin, cette fistule. Et ça s'est bien passé. Au point que certains courtisans particulièrement zélés ne trouveront rien de mieux que de se faire opérer à leur tour de la fistule pour se conformer à ce que leur maître a été capable de faire. Alors que le succès de la grande opération est célébré en musique devant toute l'Europe, pour Louis XIV, rattrapé par la goutte, les rhumatismes et un début de diabète, plus rien ne sera comme avant. Au fil des années, le fardeau de l'État se fait de plus en plus lourd.
Louis XIV dépressif, officiellement non, officieusement oui. Officiellement non, puisque jusqu'à la fin de sa vie, il est resté vraiment ce roi de spectacle qui a fait de l'ensemble de son existence l'incarnation de l'État. La nuit, dans son lit, le roi a des cauchemars, le roi pousse des cris. Il avait les hallucinations. Il était perdu.
Madame de Maintenon est là pour le rassurer, pour lui remonter le moral. Surtout dans les dernières années, il est certain que Louis XIV a de plus en plus de mal à assumer cette fonction et ce système solaire qu'il a construit autour de sa personne. En ce début du XVIIIe siècle, le roi Soleil est devenu un vieillard qui s'efforce de faire bonne figure. Il ne voudrait surtout pas qu'on le prenne pour un personnage handicapé.
Il est le roi, il est en majesté. d'une façon permanente, mais il y a des moments où le confort est nécessaire. On sait qu'il ne se promène plus à pied, mais le plus souvent dans un fauteuil roulant.
Sa fameuse roulette, un siège en velours rouge galonné d'or, montée sur une petite plateforme, sur trois roues. Cette troisième roue, elle est importante puisqu'elle est reliée à un petit gouvernail d'acier, et donc c'est le roi qui le tient. Donc si le roi se fait pousser en chaise roulante, c'est quand même lui qui conduit.
Alors que le vieux souverain sillonne ses jardins dans le soleil couchant, Les courtisans sont de plus en plus nombreux, à chuchoter sur son passage. La santé déclinante du roi, à la cour, on en parle sans en parler. C'est-à-dire que chacun a dans la tête l'idée qu'un règne va s'achever, donc que les cartes vont être redistribuées. À Londres, à partir du printemps de 1715, les parieurs, des jeunes spécialités anglaises, considèrent qu'il ne passera pas le début du mois de septembre.
Et la nouvelle lui parvient par les correspondances diplomatiques, et il en est excessivement... blessé et furieux, et il se contraint à manger pour montrer qu'il est encore en bonne santé. Le seul héritier, c'est son arrière-petit-fils, qui est un enfant de 4 ans, fragile, le futur Louis XV.
On sait que la mort de Louis XIV va forcément changer quelque chose en Europe. En ce mois de février 1715, le palais de Louis XIV est traversé d'une excitation dont on a un peu perdu l'habitude. On s'apprête à recevoir en grande pompe Mémètre Isabègue, l'ambassadeur du chat de Perse. Comme la Perse a la réputation d'être le plus ancien empire du monde, il s'agit de ne pas hésiter sur les moyens. On choisit donc d'installer le roi sur un spectaculaire trône en bois doré, tout au bout de la galerie des glaces.
A l'issue de la cérémonie, on s'attend à ce que l'envoyé d'un si grand prince apporte avec lui des présents à la hauteur de sa réputation. Pourtant, l'ambassadeur n'offre que des brins borions, des objets de peu de valeur. La déception laisse libre cours aux rumeurs les plus folles. Pour certains, l'ambassadeur n'est qu'un imposteur. Pour d'autres, c'est un comédien, embauché pour divertir le vieux roi.
Le 10 août 1715 à Marly, alors qu'il inspecte la mise en place de ses statues, tout juste arrivée de Rome, le roi ressent soudain un fort mal de tête, bientôt suivi d'une douleur à la jambe. Pour le soulager, son premier médecin, Fagon, lui fait prendre du carabée, une potion à base d'opium. Le roi décide de revenir à Versailles, car il doit justement donner son congé à l'ambassadeur de Perse. Le dernier acte a commencé.
En roi artiste, il va faire de son agonie, puis de sa mort, un spectacle à la hauteur de son personnage. Il se croit atteint d'une sciatique, c'est ce que lui a dit son premier médecin. Et donc il va, autant que faire se peut, maintenir son rythme de vie habituel, parce qu'évidemment une sciatique, ça n'est pas une maladie de très grande gravité. Il entend bien être à Versailles, au milieu.
des courtisans. Ils ont été auprès de lui pendant toute sa vie, il se doit à eux en quelque sorte. Il a à tenir conseil, il a à assister aux cérémonies de la cour, religieuses ou non, comme si rien n'était fondamentalement changé par la maladie.
Le 11 août, Louis XIV trouve la force d'aller se promener encore une fois à Trianon. Mais la mécanique de course détraque. Dès le 13 août, le roi est obligé d'interrompre son souper au Grand Couvert. Il y a eu peu à peu le sentiment que...
c'était grave parce que le roi souffrait de plus en plus, parce qu'il dormait mal, il avait une fièvre terrible. La Palatine dira c'est un éclat de bois, c'est comme un éclat de bois, il est très desséché. J'ai cru voir un cadavre écrit d'Anjou dès le mois d'août. On lui donne également du lait d'Anais la nuit parce que le lait d'Anais était réputé pour être le plus fortifiant et un peu de quinine dans de l'eau, ça le soulage quelques instants mais immédiatement après le mal revient.
Bon courtisan, le premier médecin, Fagon, se veut rassurant. Pour ce praticien très sûr de lui, il s'agit toujours d'une sciatique. Et puis on voit cette tâche au niveau du pied gauche qui progresse.
Maréchal, le premier chirurgien, à la demande de Madame de Matenon, examine la jambe du roi. Maréchal a compris. Il n'a rien dit. Il n'a dit rien. Pourquoi ?
Parce que les chirurgiens sont en dessous hiérarchiquement du médecin et c'est Fagon qui a le pouvoir du diagnostic. Il est très vraisemblable que Louis XIV aussi ait compris. Il faut encore attendre le 24 août pour que Fagon se rende à l'évidence.
Conséquence du diabète, le pied du roi est atteint par la gangrène. À un moment donné, quand la gangrène progresse de façon très importante, il est même d'accord pour qu'on l'ampute. Là, on se rend compte que ce n'est plus possible et qu'il faut annoncer au roi l'inéluctable. Et l'inéluctable, c'est la mort. Louis XIV prend conscience qu'il entre dans sa dernière maladie.
Après un bref moment d'abattement, il décide de réagir. Il passe à un autre temps. Il passe du savoir souffrir au savoir mourir. Il doit offrir le spectacle de la bonne mort et de la meilleure des bonnes morts. Il veut mourir en roi.
Il veut mourir en chrétien. Et il veut mourir en très chrétien. La chambre du roi dans laquelle nous entrons maintenant, c'est le décor du dernier acte de la ville Louis XIV. On a cet espace extrêmement hiérarchisé avec le côté du public, le côté à l'intérieur de la balustrade qui est vraiment l'espace quasiment sacré réservé au roi. Louis XIV a tout prévu, il a mis en scène en quelque sorte ces derniers jours, mais c'est lui qui va un peu organiser, tant qu'il en est capable, les entrées, les sorties.
On sent un souverain qui prend congé de son personnage. et qui veut que sa fin soit parfaite. En ce 25 août, fête de la Saint-Louis, le moment est venu pour Louis XIV de se mettre en règle avec la religion.
Après s'être confessé, il demande à recevoir le viatique. L'héviatique, c'est ce sacrement qui lui permet de passer de vie à trépas, si on peut dire, ou plus exactement, de la vie terrestre à la vie céleste. C'est l'hostie, tout simplement.
L'extrême onction est pratiquée donc immédiatement après la communion. Le cardinal de Rens, le grand aumônier, applique onze onctions avec une huile sainte qui s'appelle l'huile des infirmes sur différentes parties du corps du roi. L'enjeu pour le XIV de réussir sa mort, c'est de réussir aussi son éternité. Songez qu'un roi absolu, comme il l'est, n'a de comptes à rendre à personne. Personne n'a le droit de le juger, il ne peut être traduit devant aucun tribunal, donc le seul tribunal qui l'attend, c'est le tribunal de Dieu.
Mais pour le roi, l'heure n'est pas encore venue. Et sa jambe se charge de le lui rappeler. Pour mesurer l'état d'avancement de la gangrène, tout simplement, il utilise une lancette, c'est-à-dire un bistouri, et pique le roi à plusieurs endroits. et le roi ne réagit pas, ce qui en fait est le signe que la partie est déjà morte.
On arrive à un moment où la sensibilité est là. Vous me faites mal, maréchal ? Et oui, mais ce n'était pas au niveau du pied, c'était beaucoup plus haut. Le roi puait. Il était en train de se décomposer tout en étant vivant.
Le roi doit maintenant prendre congé de sa cour et de la France, au cours d'une véritable cérémonie des adieux. Des garçons bleus aux officiers, en passant par les princes de la maison de France, Louis XIV dit au revoir et merci. Ce roi qui durant son règne a été assez peu bavard finalement, peu d'isère, se met tout d'un coup à beaucoup parler et à...
les messages d'adieu et il les conçoit comme autant d'entrées de balais et successives, faisant entrer dans sa chambre différentes catégories de membres de son entourage pour leur adresser à chacune d'entre elles le message approprié qui destinait à marquer les esprits. A ces officiers, il déclare je m'en vais, mais l'état demeurera toujours. Le moment le plus attendu est consacré aux petits dauphins.
Futur Louis XV, âgé de 5 ans seulement. Ce qui est d'abord frappant avant le contenu politique, c'est l'affection. Il y a tellement d'attachements l'un pour l'autre que Louis XIV...
On pleure. C'est à la fois une crise de conscience et une sorte d'aveu du fait que le XIV n'a pas réussi finalement la totalité de ce que la souveraineté aurait pu lui permettre de réaliser pour la société de ce temps. Louis XIV passe aussi de longs moments en tête à tête avec celle qui reste la femme de sa vie, son épouse secrète, Madame de Maintenon. Il lui dit qu'il trouve une consolation à l'idée qu'elle va le rejoindre bientôt.
Ça montre qu'il tient à elle, puisqu'il souhaite la retrouver dans la mort. Il lui demande pardon pour les offenses qu'il a pu lui faire. Le 29 août, un personnage assez singulier fait irruption à la cour. C'est apparemment quelqu'un qui n'est pas un médecin patenté, qui voyageait en direction de Paris et qui aurait appris que le roi était à l'agonie. Il s'appelle Brun et il vient avec un elixir, une potion miracle qu'il se propose d'administrer au roi.
De toute manière, il n'y a plus d'espoir et pourquoi pas ne pas essayer cela ? Alors que les courtisans font déjà antichambre chez le duc d'Orléans, pressenti pour la régence. Dans la chambre du roi, on teste le médicament miracle. Des gouttes, dit le marquis de Danjou, réalisées à partir du corps d'un animal, mélangées à du vin de Bourgogne, sont données de 8h en 8h à Louis XIV.
Et contre toute attente, l'état de santé du souverain semble s'améliorer. Tout le monde se précipite à nouveau parce qu'il s'agit de se faire voir. Il s'agit de montrer qu'on existe. En réalité, dès le lendemain, les symptômes vont reprendre de plus belle, l'état du roi se dégrade, l'embellie n'a été que très passagère.
On chasse ce brin dont on se rend compte que ça n'était qu'un charlatan. Alors que Madame de Maintenon quitte Versailles pour toujours, le roi Louis XIV entre dans sa dernière agonie. Les deux derniers jours, à la fin du mois d'août, Versailles est vraiment isolée.
On interdit par exemple au courrier. d'envoyer la moindre lettre, la moindre dépêche, pour ne pas alerter l'Europe. Mais l'Europe attend la mort du roi. On n'est plus dans le spectacle, car on n'est plus dans le métier de roi.
Là, c'est un chrétien mourir. qui se prépare à comparaître devant Dieu. On récite le Credo, le Salve Regina, vous avez toutes les prières, et à un moment donné, on entend la voix du roi.
On ne sait pas s'il est conscient. Le roi, en quelque sorte porté par la prière de tous ceux qui sont autour de lui, reprend et d'une voix forte qui surprend tout le monde. Ses paroles, Mon Dieu hâtez-vous de me secourir qu'il connaissait depuis son enfance. Ce n'est que le matin suivant, 1er septembre 1715, à 8h23, que le roi Louis XIV, très paisiblement, rend son dernier soupir. On a comparé cela à une chandelle qu'on éteint.
Le premier geste des Valais Bleus... ça a été d'arrêter toutes les horloges de Versailles à l'heure exacte de la mort du roi. Comme si la mort du roi avait arrêté le cours du temps.
Le duc d'Orléans se rend auprès de Louis XV pour le saluer du titre de sire. Il n'a pas besoin de lui dire que son arrière-grand-père est mort. Le petit enfant le comprend tout de suite et se met à pleurer, évidemment. Louis XV est devenu Louis XV à l'instant même, à la seconde même, où le roi est mort. La monarchie veut que le mort saisit le vif et que donc il n'y a aucune interruption de souveraineté.
Le roi mort, c'est un nouveau spectacle qui commence. Pendant une journée, le corps est exposé dans la chambre, afin que tous puissent constater le décès. Puis vient le temps de l'autopsie et de l'embaumement.
On va vider ce qu'on appelle les trois ventres. Le crâne va être scié, on va enlever le cerveau, ensuite le deuxième ventre, c'est-à-dire la poitrine, ensuite le troisième ventre, l'intestin. C'est véritablement la cuisine des funérailles. On va bouffer...
le cadavre d'Aromat. Il n'est pas habillé. Il est entouré très sérieusement de bandelettes, des pieds à la tête.
Grande différence par rapport à d'autres monarchies. Les rhodespins regardent un habit de cour. Puis, le roi est transporté à travers les appartements jusqu'au salon de Mercure. Pendant huit jours, le royaume défile pour lui rendre un dernier hommage. Il y a le cercueil qui contient le corps.
Sur le cercueil, on met l'urne contenant le cœur. Et au pied du cercueil, sous la crédence, l'urne contenant les entrailles. Et il y a des autels qui sont le long des murs, de chaque côté, et sur ces autels sont dites en permanence des messes Comme son père Louis XIII avant lui, le roi a souhaité que son cœur soit transporté dans l'église des jésuites, rue Saint-Antoine.
Tandis que ses entrailles reposeront dans le cœur de Notre-Dame de Paris. Et dans la nuit du 9 septembre, un immense convoi de 2500 personnes prend le chemin de l'abbaye de Saint-Denis. Les enterrements des grands personnages ont lieu de nuit.
C'est parce que le jeu de la lumière dans la nuit est assez extraordinaire et ça renforce d'une façon très considérable La somptuosité du convoi. On traverse la mort, si on peut dire, pendant la nuit, et on arrive à l'aube à Saint-Denis, où la résurrection va pouvoir attendre celui qu'on a ainsi transporté. Il fallait absolument que le corps de Louis XIV rejoigne le mausolée de tous ses ancêtres.
Saint-Denis, c'est le Versailles des rois morts depuis les Mérovingiens, en passant par toutes les lignées, et donc ça marque la continuité de la nation France. Musique de générique Le mardi 10 septembre 1715, à 7 heures du matin, dans les fumées d'encens et les aspersions d'eau bénite, le cercueil de Louis XIV est accueilli dans cette basilique de Saint-Denis, nécropole des rois de France depuis le 7e siècle. Pendant 43 jours, Louis XIV va être veillé ici même par les moines bénédictins. Et il faut attendre le 23 octobre pour que soient célébrés ses funérailles. La façade de la basilique est recouverte de trois grandes bandes de velours noir.
La nef et le cœur, y compris les voûtes, sont également tendues de deuil. Tableaux et médaillons illustrent les hauts faits et la piété du roi. Dans le chœur, le cercueil est placé sur un catafalque surmonté d'un immense dais qui s'élève jusqu'à la voûte. Sur la dépouille, on a déposé les emblèmes royaux, tels que les éperons, l'épée, la bannière de France, la main de justice, le sceptre et même la couronne.
Après les absoutes solennelles, le cercueil est porté par quatre gardes du corps dans le caveau funéraire des Bourbons, aménagé depuis 1683 dans cette crypte de la basilique de Saint-Denis. En signe d'humilité, Louis XIV n'a pas souhaité que son tombeau soit orné d'un somptueux monument, mais d'une simple épitaphe. Au même moment, dans Paris, des libelles circulent sous le manteau.
S'il gît le maître des impôts qui mourut de la gangrène, il en mérita bien la peine, ayant rongé son peuple jusqu'aux eaux. Pour la France, vous le voyez, c'est l'heure du bilan. Il faut voir que c'est un très long règne aussi. 72 ans de règne. Pratiquement personne dans le royaume n'a vécu sous un autre roi.
Donc on peut penser que sa disparition, c'est d'abord un soulagement pour beaucoup. La France est un pays fatigué, indiscutablement, qui a connu des désastres climatiques, c'est le petit âge glaciaire, 1693-1694, une famine épouvantable. 1 300 000 morts, c'est-à-dire autant que la guerre 14 dans un pays deux fois moins peuplé. L'eau et le vin ont gelé, Sire. Tout cela en sus de la mortalité naturelle.
630 000 morts... Pendant le grand hiver de 1709, ce sont des saignées terribles, beaucoup plus lourdes même que les saignées de la guerre. Au séquel des catastrophes naturelles, il faut ajouter les conséquences des guerres de Louis XIV. Comme la guerre de succession d'Espagne qui vient de s'achever au bout de 14 ans.
Après avoir décimé la noblesse du royaume et ruiné les finances publiques. L'État a une dette de 600 millions de livres en 1715. Pour donner une comparaison, sachez qu'un artisan gagne une livre par jour. Et donc l'État est endetté de 600 millions de journées de travail. On est au bord de la banqueroute, on est au bord de la faillite.
Et il y a une... crise financière qui ne sera finalement jamais résolue et qui finira par aboutir quelques dizaines d'années plus tard. tard à la chute du régime. Pour satisfaire à l'entretien d'une armée de 400 000 hommes, l'État n'a eu d'autre choix que de lever toujours plus d'impôts. Une ponction douloureuse, particulièrement mal perçue par l'opinion.
Le poids des impositions est surtout ressenti comme injuste parce qu'il est foncièrement... structurellement inégalitaire, puisque le clergé n'est pas imposé, la noblesse ne veut pas la taille, qui est le principal impôt foncier. Pour la noblesse, l'impôt qu'elle paye, c'est l'impôt du sang. Elle se bat pour le roi de guerre, et donc, en étant blessée, en étant morte à la guerre, c'est un impôt suffisamment lourd pour ne pas avoir à payer cet impôt vulgaire, cet impôt roturier, qui est l'impôt de la taille. Et dans le tiers-épisode...
il y a une grande inégalité entre les villes et les campagnes. Et ceux qui paient majoritairement l'impôt direct, ce sont les paysans. C'est-à-dire qu'un paysan qui gagne quelques dizaines de livres par an, ou quelques centaines de livres au maximum, d'abord il doit payer la taille, ensuite il doit payer la capitation, puis il doit payer le dixième, il doit payer aussi la gabelle, c'est-à-dire le sel, donc il ne reste plus grand-chose. Le pas représente pratiquement les deux tiers des revenus du paysan ou de l'artisan.
Composée à 85% de paysans, la France de 1715 connaît des situations très disparates selon les régions. Et bien souvent, les conditions de vie sont rudimentaires. La vie matérielle chez les humbles paysans est très réduite. Ça peut être une chaumière de terre battue, et puis quelques meubles, un lit tout simple, un grabat. Dans les campagnes, c'est la misère, voire la misère noire.
Il paraît qu'on mange de la viande trois fois par an, pas plus, dans certains fonds de campagne. On trouve encore des villages où la faim provoque la maladie et la mort, bien sûr. Mais le règne de l'Eucéter, ça a été marqué par la faim des familles.
La famine, c'est vraiment, on meurt de faim, il y a des disettes importantes. On met dans le sel, il n'y a pas naturellement d'autre manière de conserver les aliments. Les familles sont nombreuses, il y a beaucoup de...
de mortalité infantile. Il faut deux enfants pour faire un homme. Ça veut dire qu'on a une chance sur deux d'arriver à 20 ans.
En même temps, la France est un pays jeune, où l'on décèle déjà les prémices d'un décollage économique. La France n'est pas faite que de profondeur rurale. Il y a aussi une France des rivages, une France des ports. Et cette France-là, malgré les guerres, parfois aussi à cause des guerres, si vous prenez par exemple Saint-Malo, cette France-là... depuis les années 1680-90 a commencé un essor spectaculaire.
Louis XIV a intensifié la présence française au sein des colonies. Il y a un vrai empire colonial que Louis XV va perdre par la suite, mais c'est d'une nature. assise pour l'enrichissement tout à fait importante.
Donc il y a tout de même une transformation sociale qui est évidente au temps de Louis XIV, mais il faudra attendre le siècle des Lumières pour voir vraiment la société fondamentalement être transformée positivement. Sur le plan politique, en revanche, le bilan du règne de Louis XIV est considérable. La noblesse, autrefois frondeuse, est désormais domestiquée par le système de la cour.
Avec le roi Soleil, la vieille... La vieille féodalité a définitivement laissé place à la souveraineté de l'État. Le terme même d'État est ambigu puisque quand Louis XIV dit État, il dit mon État et c'est une sorte d'équivalent de royaume.
Mais au cours du règne, on voit bien qu'il y a une sorte de changement de sens et en 1643, on parlait plus volontiers du service du roi et en 1715, on commence à parler autant du service de l'État. Il y a un renforcement de l'État, mais un renforcement de l'État non pas au sens policier du terme, mais au sens, je dirais, de gestion. économique des provinces, des généralités. On peut citer parmi les institutions qui ont pris des tournures sous son règne le Conseil du Roi, qui est l'ancêtre du Conseil d'État actuel. Les intendants, qui ne sont pas créés par Louis XIV, mais qui se sont généralisés sous son règne.
Les intendants qui sont aussi une préfiguration de nos préfets. Et on a aussi la structuration de l'armée et la création de la marine. Il a mis au service de l'État des catégories entières de la population. Quant au bilan territorial du règne, qui doit beaucoup aux efforts de Richelieu et Mazarin, les deux cardinominaires, il est également très positif. Le règne de Louis XIV a permis à la France de s'agrandir.
L'Alsace, le Roussillon, l'Artois, une partie des Flandres. Les frontières sont beaucoup mieux assurées que sous Louis XIII. Vauban va construire la ceinture de fer avec les citadelles.
On a un pays qui n'est pas loin de l'hexagone actuelle. À l'échelle internationale, le décès du vieux roi qui dominait depuis plus de 50 ans le concert des nations laisse un vide considérable. On cite cette phrase qui est peut-être apocryphe mais qui en dit long, c'est le roi de Prusse qui annonce à ses courtisans, le roi est mort. Il n'a même pas besoin de nommer Louis XIV, le roi est mort, tout le monde comprend que le roi, le roi par excellence, c'est Louis XIV.
La France est une grande puissance en 1715, c'est le... La plus grande puissance probablement du monde. On ne connaît pas très bien ce qui se passe en Chine. Il y a 20 millions de Français, donc c'est le pays le plus peuplé d'Europe.
Le second étant la Russie avec 14 millions d'habitants. Ça donne les rapports de force. Et la Grande-Bretagne, elle, n'a que 7 ou 8 millions d'habitants.
Donc la France reste la plus grande puissance, mais elle est en recul. Juste avant de mourir, le roi Soleil est parvenu à placer un de ses petits-fils, Philippe d'Anjou, sur le trône espagnol. Alors que depuis plus de 100 ans, l'Espagne faisait figure d'ennemi héréditaire. Pour les successeurs de Louis XIV, après le temps de la guerre, il s'agit de gagner la paix.
La France n'a pas véritablement d'allié. Son allié principal, c'est l'Espagne de Philippe V, qui est un pays tout aussi affaibli et épuisé que la France. Et l'hésitation, c'est de savoir si on va chercher à se rapprocher de l'empereur germanique. ou de l'Angleterre, ou de la Prusse, voire même de la Russie qui commence à apparaître sur la scène européenne. Parmi les affaires que le roi défunt n'a pas eu le temps de traiter, la religion se taille la part du lion, à commencer par la question protestante.
30 ans après la douloureuse révocation de l'édit de Nantes, qui garantissait les droits des réformés du royaume, l'heure est à l'examen des conséquences à long terme. Plusieurs centaines de milliers de protestants se sont enfuis, exilés à l'étranger, notamment en Hollande, en Angleterre, en Prusse, dans les différentes principautés allemandes. Ce qui est bien connu, c'est qu'un tiers de la population de Berlin, en 1715, était complotée.
de Huguenots français. On en retrouve jusqu'en Afrique du Sud, jusqu'aux Amériques. Et ces protestants étaient souvent dans les métiers les plus innovants de l'économie du royaume.
Beaucoup d'artisans, beaucoup de négociants, beaucoup de financiers. Ces populations étaient plus éduquées que la moyenne, plus riches de spécialistes, de marins, d'officiers. Et donc, on a affaibli la France d'un côté et renforcé d'autant.
Ses adversaires, et à l'intérieur on se retrouve avec plusieurs centaines de milliers de protestants qu'on appelle les nouveaux convertis, mais qui ne sont convertis que de façon superficielle, et dont on peut les analyser comme des ennemis de l'intérieur. Pour Louis XIV et une partie de son entourage, on a retrouvé l'unité religieuse qui était perdue depuis les guerres de religion. Son point de vue c'est qu'il faut un roi, une foi, une loi.
C'est pourquoi Louis XIV veut aussi régler la question janséniste, ce catholicisme rigoriste qu'il considère comme une secte et combat sans pitié, au point d'emprisonner ses fidèles et de raser son principal foyer. le couvent de Port-Royal-des-Champs. Pour les gens sénistes, le seul roi, c'est le roi invisible, c'est Dieu. Il y a un tel pouvoir donné à ce Dieu tout-puissant que toute autorité civile finalement est un néant face à la puissance de Dieu. Et ça, pour le 14, c'est évidemment intolérable.
En 1713, Louis XIV a cru se débarrasser définitivement des gens sénistes en demandant au pape de les condamner par un texte dogmatique, la bulle Unigénitus. Mais l'enregistrement de cet acte provoque des résistances qui vont gâcher les derniers jours qui lui restent à vivre. Ça alarme non seulement les gens sénistes, mais tous ceux qui, en France, ceux qu'on appelle les Gallicants, considèrent que l'Église de France a des libertés, vous voyez, par rapport à Rome. Et à partir de ce moment-là, un certain nombre de gens en France vont protester contre la politique royale au nom de la défense des droits du roi.
Vous voyez, vont s'opposer au roi au nom de l'autonomie politique qui est celle du pouvoir royal par rapport au Saint-Siège. La crise de la bulle Unigénitus est aussi et surtout la première vraie remise en cause de l'autorité monarchique. L'eau 14 n'a pas mesuré l'état de l'opinion à la fin de son règne.
C'est-à-dire qu'à la fin de son règne, il n'est plus le roi absolu qu'il a été longtemps. On a l'impression que Versailles, c'est une mécanique qui marche à vide. Bien sûr, le roi continue d'être roi.
Bien sûr, la liturgie continue. Le lever, le coucher, les repas. Mais bon, est-ce qu'on y croit ?
J'en suis pas sûr. Le roi est isolé à Versailles, ça c'est sa volonté. Il a emmené la cour, emmené le gouvernement, installé le pouvoir loin de Paris et un enfermement du pouvoir et ça c'est une des causes aussi de la fin de la monarchie un siècle plus tard.
Il y a une image, c'est la Palatine, elle dit après la mort de Louis XIV que Versailles c'est comme une volière, une volière vide, la vie se passe ailleurs. La jeune noblesse déjà déserte Versailles, on ne revient plus que pour quelques grandes cérémonies, mais on va s'amuser en bande joyeuse dans les hôtels du Marais, dans les hôtels du Faubourg Saint-Germain. Là est la vraie sociabilité qui se recrée, des salons existent, des salons de lecture, des clubs littéraires apparaissent. Il y a une libération de la parole, et vraiment on veut passer à autre chose.
Lorsqu'il meurt le 1er septembre 1715, Louis XIV ne quitte pas ce monde sans laisser derrière lui ses dernières volontés. Cela fait d'ailleurs plus d'un an qu'il a rédigé un testament dans lequel il fixe les modalités de sa succession. Ce document exceptionnel est aujourd'hui conservé dans le saint dessin de notre patrimoine historique, l'armoire de fer des archives nationales qui va s'ouvrir exceptionnellement pour nous. Regardez, elle est là.
Derrière cette première porte, que j'ouvre, et derrière cette deuxième porte, vous avez la troisième et dernière porte. En fait, le document est dans cette boîte rouge. Voilà le testament écrit de la main même du roi soleil.
Je lis. Ceci est notre disposition et ordonnance de dernière volonté pour la tutelle du dauphin. Notre arrière-petit-fils est pour le...
de régence que nous voulons être établi après notre décès pendant la minorité du roi. En effet, la succession de Louis XIV s'annonce délicate. Le nouveau roi Louis XV n'est âgé que de 5 ans et pour la première fois, il n'y a pas de reine mère pour assurer la vie.
la Régence. Le vieux roi, au fond, ne se fait guère d'illusions sur l'avenir de ce testament. D'ailleurs, quelques mois avant sa mort, il déclare à la reine d'Angleterre en exil Madame, le voilà fait, il deviendra ce qu'il pourra, mais au moins, on ne me tourmentera plus Son ouverture au lendemain de sa mort va donner lieu à la première bataille politique du nouveau règne. 2 septembre 1715, sur l'île de la Cité à Paris. Le lendemain de la mort de Louis XIV, à 9h du matin, le Parlement s'apprête à ouvrir le testament du roi.
Depuis la mort prématurée du fils et du petit-fils de Louis XIV trois ans plus tôt, les rumeurs sur la succession sont nombreuses. Il est temps de savoir qui le roi a nommé pour gouverner la France pendant la minorité de son arrière-petit-fils, le petit Louis XIV. Tout l'avenir du royaume repose sur un enfant qui ne sera pas en état de régner, qui ne sera pas majeur, la majorité des rois étant fixée à 13 ans. Le roi meurt, qui va assurer la régence ?
Eh bien, pourquoi pas le fils de son frère Orléans, c'est-à-dire Philippe, le duc d'Orléans, qui logiquement devrait être celui-ci, mais il y a aussi le duc d'Humaine. Le duc d'Humaine, fils illégitime de Louis XIV et de Madame de Montespan, légitimé... par le roi, rendu dynaste par une de ses dernières ordonnances. Et il y a son petit-fils qui est roi d'Espagne, Philippe V. Mais les traités passés avec l'Espagne font que le roi d'Espagne n'a aucune revendication possible à faire pour la couronne de France.
Mais on sait que Philippe V espérait toujours tout de même revenir en tant que régent, pourquoi pas. C'était en tout cas une des possibilités qu'il évoquait parfois lors de ses missives. Pourtant, ce matin-là à Paris, les membres du Parlement s'attendent à voir le neveu du roi, Philippe d'Orléans, nommé régent du royaume. À leurs yeux, le plus légitime des trois candidats. Philippe d'Orléans, c'est le fils de M.
Fré... frère du roi et d'Elisabeth de Bavière, qu'on appelle la princesse Palatine. C'est un garçon intelligent, c'est un garçon qui a des idées politiques, c'est un garçon qui a un savoir absolument encyclopédique. En 1715, il a 41 ans, c'est un homme ambitieux qui ne rêve que du pouvoir.
D'ailleurs, Philippe d'Orléans a une bonne raison d'être sûr de son bon droit. Lorsque Louis XIV est sur le point de mourir, il fait appeler Philippe d'Orléans près de lui et il appelle son neveu bien-aimé. En effet, Louis XIV lui avait dit sur son lit de mort Je vous ai conservé tous vos droits Donc il pouvait penser qu'il était régent ?
On a l'impression que les deux personnages s'entendent fort bien et l'ouverture du testament prouve le contraire. Dès la première page du document royal, Louis XIV annonce clairement ses intentions, pas tout à fait conformes à ses promesses. C'est la stupéfaction, Louis XIV ne donne pas la régence à Philippe d'Orléans. C'est un peu compliqué, c'est-à-dire qu'il lui donne le titre de président d'un conseil de régence d'un conseil de régence que Louis XIV a lui-même formé, avec les personnages qu'il souhaite, mais il ne lui donne pas le titre de régent.
Louis XIV se défie de lui, car il se défie des Orléans en tant qu'Orléans. La tradition dans la famille de France depuis Louis XIII, c'est de se défier des Orléans. Donc le roi a écarté son frère de toute responsabilité et son neveu de toute responsabilité et de tout commandement.
Le deuxième point, c'est que Philippe d'Orléans est aussi quelqu'un qui aimait faire de la provocation, qui n'acceptait pas tous les rituels de la vie de cour. Quand on lui demande ce qu'il lit à la messe, il vient avec un gros livre et dit je lis Rabelais C'est un côté provocateur, bien entendu, mais Madame de Matenon n'aime pas la plaisanterie. Mais en même temps, Louis XIV éprouve une certaine jalousie vis-à-vis de Philippe d'Orléans, qui était un prince extrêmement brillant, qui est un prince qui est beaucoup plus brillant que son propre fils. Le principal reproche que Louis XIV fait au duc d'Orléans, c'est finalement d'être son neveu et de n'être pas son héritier direct. Alors pour éviter que cet encombrant neveu obtienne les pleins pouvoirs, Louis XIV fait entrer dans le jeu ses autres fils.
Un mois avant sa mort, il fait de ces bâtards des princes aptes à monter sur le trône de France. En particulier l'aîné, qu'il a couché sur son testament. Il cherche à gonfler l'importance de la vie.
de son fils naturel, le duc du Maine, auquel il confie la surintendance de l'éducation du jeune Louis XV et le commandement des troupes de la maison du roi. Les troupes de la maison du roi sont chargées d'exercer la surveillance du petit roi et dans l'honneur qui est fait au duc du Maine, c'est très important. On peut dire qu'à ce moment-là, Maine est une sorte de père putatif, de substitution pourrait-on dire, du dauphin. Il aurait la force et il aurait le gouvernement. Alors messieurs, calme !
Pour l'Assemblée présente le 2 septembre 1715 à l'ouverture du testament, c'est un véritable scandale. Louis XIV laisse une espèce de bombe allumée avec son testament et les codicides qui le suivent. Il perturbe d'une certaine manière, je dirais, ce qu'on appelle les lois fondamentales du royaume en érigeant son fils bâtard à la possibilité d'être souverain.
Le château de Sceaux près de Paris conserve le souvenir de ce fils naturel du roi Soleil. Au XVIIIe siècle, le duc du Maine rachète ce qui a été le château du premier ministre de son père, Jean-Baptiste Colbert. Un édifice somptueux, entièrement décoré par le brun, vendu pierre à pierre un siècle plus tard.
Le château actuel est aujourd'hui musée. Parmi ses trésors, quelques objets personnels de Louis-Auguste de Bourbon. Nous avons ici un document extrêmement représentatif du caractère du duc d'Humaine, qui était un homme plutôt de cabinet, un homme d'études. C'est un manuscrit qui est assez touchant dans la mesure où, d'abord, il est gros, il est énorme. C'est un gros travail qu'il a écrit de sa main.
C'est en outre un ouvrage sur les psaumes, verset par verset, pour mon propre usage, comme indiqué ici. Donc un ouvrage spirituel qui montre que le duc d'Humaine était animé d'une foi profonde. Une foi qui lui a été transmise par celle qui l'a élevée. Son ancienne gouvernante, Madame de Maintenon, que le roi a épousée en secret en octobre 1683. Louis XIV avait été poussé par Madame de Maintenon à lui donner une place importante dans son testament.
Il avait une passion pour ce jeune homme. On ne peut pas nous empêcher de penser que c'est Madame de Maintenon qui lui avait tenu la plume, évidemment, pour ce texte, en lui disant mais il n'y en a qu'un pour vous succéder honorablement, c'est mon petit mène chéri Et aussi grand roi soit-il, pour avoir la paix, il a accepté de suivre les conseils de Madame de Maintenon. Louis XIV a une telle conception de l'État, une telle conception de la souveraineté, qu'on ne peut pas penser que c'est sous la pression de sa seconde épouse qu'il aurait érigé, en quelque sorte, ses deux fils au rang de successeurs potentiels du trône.
Non, je crois que ce que Louis XIV redoute, c'est, je dirais, le collapsus de l'État, c'est-à-dire le fait que l'État ne soit plus incarné, que le sang royal se soit tari. Louis XIV a dit un jour au duc d'Humaine très clairement qu'il pouvait le soutenir de son vivant, mais que dès qu'il aura disparu, ce sera à lui de prendre le pouvoir et de s'imposer. C'était un petit peu le garant de la continuité de la politique de Louis XIV, mais ça n'était pas un grand tempérament.
Ce n'est pas quelqu'un qui a une volonté farouche, ce n'est pas quelqu'un qui osera taper sur la table. Mais en même temps, c'est quelqu'un de posé, qui n'a pas une intelligence fulgurante, c'est très clair, mais qui aimerait être quelque chose. Le malheur, c'est qu'il était boiteux, il était quelque peu bossu. Cette infirmité n'entache pas le rêve du duc d'Humaine, convaincu par son père de jouer peut-être un jour un premier rôle dans le royaume. Le tableau que nous avons ici représente le duc d'Humaine en 1715 exactement, à un moment où le duc d'Humaine est en position d'espérer peut-être assumer la régence, voire succéder à Louis XIV.
Et François III a fait un tableau comme il en fait rarement, c'est-à-dire un tableau assez majestueux, un tableau qui fait allusion au portrait de Louis XIV que Rigaud avait peint en 1701, qui se trouve à Versailles. Et on sent très bien que, de même que l'ambition du duc à ce moment-là est grande, la peinture exprime très clairement cet avenir qu'il suppose proche. Le duc d'Humaine était parfaitement au courant du contenu du testament et du rôle que le roi entendait lui faire jouer. Après sa mort, il était persuadé que ce testament s'appliquerait, tout lui tomberait, tout cuit.
C'est sans compter sur son cousin et rival Philippe d'Orléans. Lui aussi a appris le contenu du testament bien avant la mort de Louis XIV et a eu le temps de préparer sa riposte. Philippe d'Orléans, méthodiquement, a entamé des discussions dès les débuts de la maladie de Louis XIV avec tous les opposants rois. qui se sentait un peu écarté du pouvoir, et a su préparer la suite.
Philippe d'Orléans n'est pas du tout surpris lors de l'ouverture du testament. Il fait mine d'être surpris. Il s'est levé et a dit que le roi l'avait trompé. Il va dire que le roi avec lequel il s'est entretenu peu de temps avant sa mort, il a assuré qu'il aurait tous ses droits à la régence. Il revendique donc être pleinement régent.
Bien décidé à emporter le titre de régent, il fait de son discours un coup d'éclat politique, rendant aux parlementaires un privilège perdu depuis plus de 40 ans. Philippe d'Orléans a été obligé de faire une concession de taille, c'est de leur rétablir le droit de remontrance, c'est-à-dire un droit que Louis XIV avait complètement muselé et qui permettait au Parlement de s'opposer à l'enregistrement de certaines décisions royales en allant faire des remontrances aux souverains. Parce que Louis XIV... n'avait absolument pas toléré.
Les parlementaires sont ravis, évidemment, de retrouver ce rôle politique qui leur permettra, tout au long du XVIIIe siècle, de grignoter une partie du pouvoir législatif de la monarchie. Ce privilège retrouvé, le Parlement l'utilisera sans relâche pour bloquer les réformes de la société jusqu'à la Révolution. Mais pour l'heure, cette décision assure à Philippe d'Orléans d'être proclamé régent de France par acclamation. Le duc d'Humaine s'est levé en disant qu'il avait besoin, lui, d'avoir les troupes de la maison du roi que lui promettait Louis XIV pour s'occuper du jeune Louis XV, et le régent l'a fait taire.
Écarter définitivement le duc d'Humaine, c'était pas très difficile parce que le duc d'Humaine n'était pas aimé. Personne n'avait digéré l'inscription dans leur dynastique des bâtards. Et puis, ce n'était pas un personnage sympathique.
Son aspect physique, sa boiterie, etc. ne le servait pas. On n'avait pas envie de se battre pour un tel candidat. À la fin de cette journée, maigre récompense, le duc d'Humaine est nommé surintendant de l'éducation de Louis XV. Le Parlement vient d'annuler le testament de son père et il semble être le seul à s'en étonner.
Louis XIV savait très bien que les rois de France, comme il l'a dit lui-même à ce moment-là, nous sommes tous tant que nous sommes vivants. Nous ne sommes rien ensuite. Il savait très bien que dès que le testament serait ouvert, Philippe d'Orléans, qui était le régent légitime, ferait tout pour casser le testament. Et c'est effectivement ce qui se passe le 2 septembre 1715. Le 14 a simplement voulu garder pour le duc d'Humaine des éléments qui lui permettraient un rétablissement ou des compensations honorables. Au lendemain de sa victoire, Philippe d'Orléans prend soin de faire oublier les dernières volontés du roi.
Le précieux testament reste caché dans sa famille jusqu'à son arrière-petit-fils. À l'aube de la Révolution française, Louis-Philippe Joseph, duc d'Orléans, le confie à Charles Gilbert de Lévis. de la chapelle, un officier du roi Louis XVI.
En 1921, un collectionneur rachète finalement le testament à la famille de la chapelle. Mais il faudra encore presque 30 ans pour qu'il entre officiellement aux archives nationales et rejoigne, en 1948, les autres documents royaux dans l'inviolable armoire de fer. Je vous retrouve à présent au musée du Louvre, devant cette magnifique porte, chef-d'œuvre de la ferronnerie d'art du XVIIe siècle et qui ouvre sur la galerie d'Apollon, dans laquelle on conserve certains des plus précieux objets d'art des collections royales. Suivez-moi.
Une fois régent de France, Philippe d'Orléans doit relever un défi d'envergure. Assurer l'avenir d'un royaume qui est au bord de la banqueroute, tout en se montrant à la hauteur du défunt Louis XIV. En matière de goût, le nouvel homme fort n'a pourtant de leçons à recevoir de personne.
Venez, je vais vous faire découvrir un trésor extraordinaire acquis par la France au moment de son gouvernement. Il s'agit du... plus célèbre des joyaux de la couronne, le diamant le Régent. Depuis Louis XV, il a orné les parures de tous nos souverains et aujourd'hui encore, on le considère comme le plus beau diamant du monde pour sa pureté de la première eau.
et la qualité de sa taille. Découvert en 1698 à Golconde, en Inde, il est préparé en Angleterre selon une technique nouvelle que l'on appelle la taille en brillant. De quoi magnifiquement orner la couronne du jeune Louis XV à l'occasion de son sacre. Le duc d'Orléans en fait l'acquisition des 1717, pour la somme astronomique mais justifiée de 650 000 livres sterling. Il faut dire que depuis son accession au pouvoir, Philippe d'Orléans, que tout le monde appelle le régent, fait preuve d'une singulière habileté politique.
Philippe d'Orléans a de l'ambition politique. C'est assez étonnant parce que ce n'est pas quelqu'un qui a été formé pour ça. Et d'ailleurs c'est assez extraordinaire le destin de Philippe d'Orléans qui n'a jamais participé au Conseil du roi et qui du jour au lendemain devient...
l'équivalent du roi et là son génie politique va apparaître je dirais dès le premier jour tout juste proclamé régent de france philippe d'orléans doit maintenant relever un défi de taille prouver qu'il est à la hauteur de la tâche pour laquelle il s'est battu. Pour cela, il commence par fuir Versailles et le fantôme de Louis XIV afin d'imposer sa personnalité. Louis XIV et le Régent, c'est le jour et la nuit. Louis XIV, c'est quasiment l'incarnation de Dieu sur Terre et il faut que ça se sache.
Il fait en sorte qu'on le sache et qu'on le respecte et qu'on le vénère. Tandis que le Régent, il est beaucoup plus ouvert, il est beaucoup plus sensible, beaucoup plus épanoui. Il bavarde volontiers avec un tel ou un tel.
Il n'a pas ce côté erratique que pouvait avoir le roi Soleil. Le régent s'installe à Paris, au Palais Royal, la demeure familiale des Orléans depuis 1690. C'est à Paris qu'il y a l'opéra, c'est à Paris qu'il y a tous les plaisirs auxquels il est accoutumé et il ne veut absolument pas s'enterrer à Versailles. Le Parlement de Paris reprend un rôle politique, donc il n'est pas mauvais d'être à portée de main. pour pouvoir influer sur les différents magistrats.
Il y a un déplacement du centre de gravité de l'État, de Versailles à Paris, donc vraiment Paris redevient capitale. Une capitale où le régent établit aussi le petit roi de France, Louis XV, aux Tuileries, à deux pas du palais royal où il vit. Le régent veille sur cet enfant comme sur la prunelle de ses yeux. C'est le roi et le régent est un homme qui a un grand, grand sens de l'État et de la continuité de la royauté. Son souci premier, C'est de rendre à Louis XV, au jour de sa majorité, un royaume en paix et un royaume qui va prospérer.
Pour cela, le régent s'appuie sur un homme de confiance, l'abbé Guillaume Dubois, son ancien précepteur qu'il a nommé Premier ministre. Un Premier ministre remarquable et qui a des dons d'hommes politiques tout à fait évidents. Dubois, c'est comme Mazarin pour Louis XIV. Mazarin était un Italien raffiné, tandis que Dubois, lui, on le présente toujours comme un petit renard fouineur. Mais c'est un grand politique et un grand diplomate.
Des qualités plus que nécessaires à l'aube de la Régence. Pour redresser la France sans fâcher personne, le Régent, soutenu par son Premier ministre, va faire preuve d'audace et d'habileté politique. Le Régent va créer des conseils.
à la place des ministres, et à la tête de chacun de ces petits conseils, qui sont autant de ministères, il va placer un noble. Finalement, c'est une manière de contrôler la noblesse de cour en l'associant au pouvoir. Et on va appeler ce système de gouvernement par les conseils la polysynodis, qui en grec signifie plusieurs conseils. C'est sur ces conseils que le Régent compte s'appuyer pour gouverner le royaume, épuisé par 25 années de guerre.
Philippe d'Orléans a... Le programme essentiel pour redresser la France, c'est d'abord éviter de nouvelles guerres, c'est une obsession, et Dubois estime que c'est en faisant alliance avec l'ennemi de toujours, avec la perfide Albion, qu'on va réussir à éviter une nouvelle guerre. L'autre obsession du régent, réduire la dette abyssale de l'État qui affame le peuple et décime la France.
2 milliards de livres, soit environ 25 milliards d'euros. Pour assainir les finances du royaume, le régent va faire confiance à un certain John Lowe, un joueur invétéré venu d'outre-manche que Philippe d'Orléans a rencontré autour d'une table de jeu. John Lowe, que les français appellent Jean Lasse parce qu'on prononçait ce W comme deux S, c'est un écossais qui a développé un talent extraordinaire pour les mathématiques, c'est un joueur de génie précisément parce qu'il maîtrise les mathématiques, il gagne presque toujours. C'est un... une sorte d'aventurier.
Il a parcouru l'ensemble de l'Europe et il en a profité pour s'intéresser au système bancaire des grands pays européens. Jusqu'ici, pour payer, on payait en pièces d'or, en pièces d'argent sonnantes et trébuchantes. C'était lourd, c'était long à transporter. L'idée géniale de John Law, c'est on va faire ça avec des billets.
Et que, bien entendu, ces billets seraient échangeables à tout moment contre de l'or ou de l'argent. C'est-à-dire qu'il crée l'économie abstraite. À Paris, le musée Carnavalet possède encore quelques rares exemplaires de ses premiers billets de banque de l'histoire de France.
Dans ce recueil, nous avons des coupures qui vont de 10 livres à 10 livres. Il existait même des coupures de 10 000 livres. Le système voulu par l'eau ne consistait pas à mettre l'argent à disposition du grand public.
C'était plutôt, au contraire, pour faciliter le travail des hommes d'affaires, pour faciliter l'investissement. Ces billets étaient tous numérotés et signés, donc il y avait une certaine traçabilité, comme on pourrait dire, de nos jours. La seconde grande idée de John Law, qui va être réalisée, mais dans un second temps, c'est le système moderne des actions. Law cherche à éponger. les dettes de l'État.
Lowe est un homme très riche, il est à la tête de la compagnie des Indes et il a l'idée d'émettre des actions de cette compagnie. Et ces actions vont pouvoir être obtenues en échange des dettes de l'État que des particuliers ou que des financiers détenaient à l'époque. La bourse française vient de naître rue Quincampoix, à Paris. Devant la Banque royale, on s'arrache les actions.
Du matin au soir, soir, on ne fait qu'agiotter, autrement dit spéculer, jusqu'à remporter 20 fois sa mise. Les gens se disent, je mets 1 euro et je me retrouve demain avec 10 euros, puis avec 100 euros, puis avec 1000 euros. C'est merveilleux.
Le terme de millionnaire date donc de ces années 1719-1720. C'est la première fois qu'on voyait comme ça des gens s'enrichir au point de gagner un million en très peu de temps. Ce qui est extraordinaire avec ce système de l'As, c'est qu'il va connaître un succès fulgurant et un effondrement encore plus rapide. Le souci, c'est qu'on échangeait ses actions contre de l'or, mais qu'il n'y avait pas assez d'or dans les caisses.
Et donc, il vient un moment où on est obligé de suspendre la conversion des actions en or. C'est là que le système s'effondre. Sans le vouloir, John Lowe a donc aussi inventé le premier krach boursier.
Deux ans après la naissance de ce système économique pourtant novateur, son créateur est expulsé du royaume. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, la France n'est pas du tout en faillite. Le système de l'eau a réussi tout de même à éponger une partie de la dette. Donc le pouvoir de Philippe d'Orléans est parfaitement bien installé.
À l'image de Louis XIV, le régent s'est donc se montrer aussi intraitable que travailleur. Et ce n'est pas son seul point commun avec le roi Soleil. Il se lève tôt le matin pour étudier ses dossiers, puis vers midi il prend...
Juste une tasse de chocolat, il va ensuite à ses audiences présider le conseil de régence, il travaille jusqu'à 6h du soir, mais c'est aussi quelqu'un qui sait faire la part entre le travail et les plaisirs. Le régent est un prince éclairé, c'est-à-dire que comme son oncle, il a l'amour des arts, il va s'intéresser à la science, enfin pas n'importe laquelle, il va chercher la pierre philosophale à un moment. Il aime l'alchimie, à l'époque c'était très à la mode, il aime les sciences occultes, l'astrologie comme Louis XIV, il s'intéresse à tout. À un moment, il se passionne pour la peinture, donc il va peindre. À un autre moment, il s'intéresse à la musique, donc il va composer.
Un touche-à-tout qui a même composé deux opéras, dont voici quelques notes. La bibliothèque de l'Arsenal à Paris conserve les deux seuls exemplaires de ces compositions du Régent qui soient parvenus jusqu'à nous. Les deux opéras du Réjean, il faut bien le comprendre, ce sont des œuvres composées pour animer ses soirées privées, soit à Fontainebleau, soit au Palais Royal. Louis XIV avait un très bon sens, je dirais artistique, mais un bon goût en quelque sorte, tandis que le Réjean était capable, lui, de juger de la musique de l'intérieur en tant même qu'interprète. On sait qu'il a appris à jouer de la flûte.
On sait qu'il jouait de la viol de gambe, du clavecin, de la guitare. Il savait inventer des mélodies très chantantes, donc faciles finalement à retenir. Vous savez, ce type de mélodies qui viennent vous enquiquiner toute la nuit, qui vous empêchent de dormir parce que ça tourne, ça tourne dans la tête. Il a progressivement favorisé les nouveaux genres musicaux du XVIIIe siècle.
Ces morceaux sont également joués lors des petits-soupers de Philippe d'Orléans, restés célèbres dans l'histoire de la Régence. Philippe d'Orléans invente en quelque sorte la sphère privée. Messieurs, à nous ! Quand on vient le soir, il demande à ses valets de s'en aller et il fait lui-même la cuisine. C'est un très bon cuisinier.
Il a d'ailleurs des spécialités, comme la matelote de poisson, qu'il sait faire, paraît-il, à merveille. Il y a même un pain qui s'appelait le pain à la d'Orléans et c'est lui qui le fabriquait lui-même. Il dressait une liste d'invités qu'on appelait les rouets, ou les rouets, S-O, féminins. Alors, il y a des femmes de la cour, certes, mais il y a aussi des comédies. et des courtisanes.
Il est évident que la plupart du temps, ça se terminait de façon très graveleuse sous la table ou dans les divans. Il y avait même, au cas où un monsieur aurait une panne, il y avait ce que l'on appelait les mirbalets. Les mirbalets étaient des hommes qui étaient là en attente pour pouvoir satisfaire les dames qui n'avaient pas pu être satisfaites par ces messieurs.
Parmi les compagnons de débauche, il y a l'abbé Dubois. L'abbé Dubois, c'est un abbé de cour, ce n'est pas un homme religieux du tout. On a dit qu'il amenait des petites couturières ou blanchisseuses ou des petites actrices à Philippe d'Orléans lorsqu'il avait envie de s'amuser le soir. pour se délasser.
Il jetait la soutane par-dessus les moulins dès que l'occasion se présentait, qu'on a même composé cette fameuse comptine qu'on a tous chantée quand on était petits. Il court, il court le furet, le furet du bois mesdames, le furet du bois joli. En réalité, c'est une contrepétrie.
Il fourre, il fourre le furet du bois. Vous savez qu'il obtiendra quand même le bonnet de cardinal au Palais Royal. On disait mais, innocent 13, le pape est capable de faire des miracles, il a fait du macro un rouget.
Les phrases que libertine de Philippe d'Orléans et de son premier ministre ne font que renforcer la détermination de leurs plus farouches opposants à les renverser. En particulier, le roi Philippe V. Le petit-fils que Louis XIV a mis sur le trône d'Espagne en 1700 accepte mal l'obtention de la régence par son cousin. Malgré le traité d'Utrecht signé en 1713, qui lui a fait renoncer au trône de France, Philippe V se considère comme le plus légitime dans l'ordre de succession.
Ses plus fervents soutiens se cachent au château de Sceaux, où Louise Bénédicte de Bourbon, l'épouse du duc d'Humaine, ourdit un complot avec le prince de Sélamare, ambassadeur d'Espagne en France. La duchesse d'Humaine n'accepte pas que le régent ait finalement réduit à néant les ambitions politiques de son mari. Elle-même est petite fille du Grand Condé, elle a la fronde inscrite pratiquement dans ses gènes, et donc quand l'opportunité se présente, elle pousse bien évidemment le duc d'Humaine à se présenter dans l'arène.
L'idée était en fait de ravir la régence au duc d'Orléans, de la faire conférer à Philippe V, et Philippe V aurait fait du duc d'Humaine son représentant. en France. La communication dans le cadre de cette conspiration se fait de deux façons. Il y a des rendez-vous secrets, et puis il y a ensuite des échanges de lettres quittes à l'encre blanche entre les lignes, c'est-à-dire une encre sympathique.
Généralement, ça se faisait avec du jus de citron, des choses comme ça. Donc, c'est des lettres qui sont portées par des serviteurs aussi discrets que possible, de Sceaux à Paris, de Paris en Espagne. tout le folklore y est, les manteaux couleur de muraille, les choses comme ça.
C'est une conspiration menée de bout en bout par une équipe de pieds-niquelés absolument étonnante. La conspiration dite de Sélamarre est d'un tel amateurisme qu'elle tourne court au bout de quelques mois. Depuis 1715, Philippe d'Orléans a mis en place tout un réseau d'espions autour des activistes les plus connus. Et finalement, le régent, à la sagesse d'en rire, fait simplement emprisonner pour la forme le duc et la duchesse d'Humaine. Ça ne dure pas bien longtemps, mais ça a un peu quand même refroidi les relations franco-espagnoles.
Même si, bien sûr, Philippe V a fait celui qui n'était au courant de rien, bien sûr. Ses ennemis écartés, et après plus de sept ans à la tête du royaume, il est temps pour le régent de rendre ses pouvoirs au petit roi de France. Le 25 octobre 1722, à 13 ans, Louis XV est couronné en la cathédrale de Reims. La régence de Philippe d'Orléans est une réussite.
Louis XV est donc à la tête d'un royaume qui est en bien meilleur état qu'il n'était en 1715. Et en fait, derrière l'apparence de rupture, il y a une profonde continuité. Et on va s'apercevoir, si on fait le bilan de la régence, que finalement, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur, le régent a été dans la suite parfaite de Louis XIV et qu'il a préservé et maintenu la monarchie absolue. tel que Louis XIV l'avait fait prévaloir en 1661. Si les jardins du roi soleil continuent de fasciner le monde entier par leur beauté, et nous sommes ici dans le bosquet de la salle de balle, dernière création de le nôtre, il n'aura pas fallu 80 ans pour que la couronne de Louis XIV...
soit balayée par le vent de l'histoire. Le 14 octobre 1793, en application du décret de la Convention ordonnant la destruction des tombeaux des rois, la Nécropole royale de Saint-Denis est profanée. la dépouille du roi soleil est arrachée à sa crypte et à son cercueil.
Selon un témoin, le corps bien conservé était d'une couleur d'ébène, conséquence probable de la gangrène. Comme celui d'Henri IV et des autres rois qui régnèrent sur la France, le corps du roi soleil est jeté à la fosse commune. Après avoir permis à la foule de se déchaîner, on répand alors sur le charnier de la Chaux-Vive. Et pourtant, en cette aube du XXIe siècle, Et dans notre France républicaine, le souvenir de Louis XIV ne s'est pas effacé. 300 ans après sa mort, une partie non négligeable de son héritage demeure bien vivante.
Versailles, le rêve d'un roi, le château le plus cher d'Europe à sa construction, le plus visité au monde aujourd'hui, un legge sans précédent dans l'histoire de France. Il y a finalement peu de monuments dans le monde qui soient liés à un seul personnage, vraiment. Et Versailles fait partie de ces monuments parce que Versailles égale Louis XIV.
Versailles, c'est l'expression matérielle, l'image inscrite dans la pierre de cette prétention de l'État français à rayonner sur le monde. C'est le modèle du château royal qui sera imité partout, dans toute l'Europe. Louis XIV a donné le ton à l'Europe entière à travers cette expression du pouvoir monarchique qui trouve sa quintessence à Versailles.
Et donc finalement, c'est pour cela que la plupart des souverains d'Europe ne vont pas copier la lettre de Versailles, mais l'esprit de Versailles. Cet extravagant palais de 2300 pièces et 680 mètres de long a donné le signal d'une véritable course à la création de châteaux somptueux à travers l'Europe. A commencer par celui de Schönbrunn en Autriche, bâti en 1696 à la gloire de l'empereur Léopold Ier. Ou encore Péterhof, le palais du tsar de Russie Pierre le Grand.
Le fondateur de Saint-Pétersbourg, venu rendre visite au jeune Louis XV en 1717, a su s'inspirer du roi Soleil pour faire rayonner sa grandeur. Mais ce que les souverains tiennent à reproduire par-dessus tout dans le palais de l'Empereur Léopold Ier, Le palais de Louis XIV, c'est son impressionnante galerie des glaces et ses 357 miroirs. Ce qui est extraordinaire, c'est la façon dont la galerie est conçue comme une œuvre d'art total, qui associe la peinture, les antiques, la dorure, le bronze, le marbre, et surtout, surtout, les miroirs qui sont pour les gens de cette époque l'essentiel de la féerie. Le premier peut-être à vouloir copier cette galerie, c'est le roi de Suède.
En fait, il se trouve que le palais royal de Stockholm a brûlé. quelques années auparavant et que l'architecte et surintendant des bâtiments du roi de Suède est chargé d'une grande reconstruction. Et il reproduira, toute proportion gardée, au Palais Royal de Stockholm, une galerie des glaces tout à fait magnifique. Au total... On compte près d'une dizaine de palais inspirés de Versailles dans le monde.
Mais la copie la plus impressionnante du château de Louis XIV se trouve sur une petite île de Bavière. À la fin du XIXe siècle, un homme va vivre dans la gloire de Louis XIV, c'est Louis II de Bavière, qui à travers le château d'Heremkinze va rendre un hommage vibrant à Versailles. C'est la seule citation littérale de Versailles complète qui existe. Deux siècles après Louis XIV, Louis II de Bavière s'inspire pour son bureau des grands appartements du roi et s'offre une galerie des glaces 25 mètres plus longue que l'originale.
Jusqu'à l'escalier des ambassadeurs, disparu aujourd'hui à Versailles. Une reproduction un peu folle dans les moindres détails. Elle veut même surpasser le modèle et en même temps elle rend justice à Versailles.
en tant que suprême incarnation du pouvoir absolu. Louis XIV reste donc dans l'histoire comme un roi bâtisseur. Avec son château, il nous lègue de célèbres places parisiennes, comme la place Vendôme, ou encore la place des Victoires, bâtie en l'honneur de ses succès militaires.
Pour ses soldats, le roi construit aussi l'Hôtel des Invalides, au cœur de Paris. Un lieu où sont accueillis depuis 300 ans ceux qui ont exposé leur vie et prodigué leur sang pour la défense de la nation. Les Invalides, c'est une sorte, je dirais, de sécurité sociale avant la lettre concernant les militaires qui ne sont plus laissés à l'abandon et qui sont accueillis par une institution d'État. On voit apparaître les pensions qui sont l'origine des retraites actuelles puisque finalement le modèle de l'armée va s'étendre à la fonction publique tout entière. Aujourd'hui encore, l'Institution Nationale des Invalides demeure la maison d'accueil et de soins des militaires âgés, malades ou blessés au combat.
Un édifice sur le porche duquel le monarque n'a pas oublié d'apposer sa signature. Ludovicus Magnus, Louis le Grand, tient aussi à rappeler sa puissance, mais c'est aussi un signal pour tous ses successeurs, pour dire que cet établissement est sous la protection du chef de l'État français. Ce haut lieu de la monarchie est donc devenu un symbole fort de l'armée de la République. Depuis le roi Louis XIV, il y a une véritable continuité dans cette vocation du chef de l'État à protéger la mission des Invalides.
Cette cour d'honneur des Invalides est devenue un lieu où on honore nos soldats tués en leur rendant un hommage national. Roi de guerre, Louis XIV est aussi homme de science. Créé en 1667 à Paris, le monarque laisse aux générations futures un observatoire moderne pour percer le secret des étoiles, mais aussi pour mesurer la longitude de la Terre. C'est la grande salle qui héberge en son milieu cette grande ligne qui fait 32 mètres de long, c'est la longueur de la salle, et qu'on appelle une ligne méridienne.
Alors la ligne méridienne c'est quoi ? C'est une ligne qui rejoint d'une façon imaginaire le pôle Nord au pôle Sud. C'est ce qui a marqué pendant très longtemps le méridien de France, le méridien de Paris. Le soleil vient projeter son image et ce que l'on peut constater, c'est son déplacement.
À cette époque-là, les montres indiquaient ce que l'on appelle aujourd'hui le temps solaire vrai, c'est-à-dire lorsque cette image-là était exactement coupée par cette ligne, il était midi pour tout le monde. L'Observatoire de Paris est aujourd'hui le plus ancien encore en activité dans le monde, même si sa mission a beaucoup évolué depuis Louis XIV. Au XVIIe siècle, il s'agissait surtout à l'époque de faire rayonner la grandeur du roi Soleil.
Aujourd'hui, l'Océatoire de Paris s'intéresse à tous les domaines de l'astrophysique, et puis l'étude du Soleil, les planètes du système solaire, les étoiles, puis l'évolution de tout l'univers. On est enviés de par le monde de pouvoir faire de l'astrophysique moderne, avec les meilleurs moyens modernes qui existent aujourd'hui, dans ce cadre historique que nous avons. L'égal Louis XIV.
Père de nombreuses institutions françaises, comme l'Académie des sciences, Louis XIV nous a aussi transmis la passion des arts, qui fut le fil conducteur de son règne. Le grand siècle, c'est le siècle de Louis XIV. Cette incroyable floraison des arts. On peut vraiment trouver dans tous les domaines, que ce soit le théâtre, la musique, etc., des noms que tout le monde connaît.
Songez qu'il y a Madame de Sévigné, Racine, Corneille, Pascal, Boileau, La Fontaine, Lully. Et ça, cette concentration de génie a servi la gloire du roi. Pour rendre hommage à ce roi découvreur de talent, un sculpteur, Évrard Titton du Tillet, nous a légué une bien mystérieuse montagne. Trois mètres de bronze et de bois, exposés aujourd'hui à Versailles. Cet étrange monument s'appelle le Parnasse français.
Il a été réalisé au début du XVIIIe siècle, après la mort de Louis XIV. Le Parnasse, c'est le mont Parnasse, c'est un mont de la Grèce antique qui est dominé par la figure d'Apollon sous les traits de Louis XIV. Dans la Grèce antique, c'était les muses qui entouraient Apollon sur le mont Parnasse.
Ici, ce sont les gens de lettres qui sont à Louis XIV, ce que les muses étaient à Apollon. Corneille est représentée debout, la main sur la hanche, vêtue d'une armure à l'antique. Torse nu, c'est Molière.
Voltaire, lui aussi vêtu à l'antique. Et Racine. Il y a le poète La Fontaine, qui est représenté assis avec à côté de lui plusieurs des animaux tirés de ses fables.
Cette sculpture n'est en réalité que la maquette d'un monument public de 20 mètres de haut destiné à orner la cour carrée du Louvre au XVIIIe siècle. Un projet avorté, à la gloire de celui qui est aussi le grand-père de nombreux souverains d'Europe. Le roi d'Espagne, Philippe VI, ou le grand-duc Henri de Luxembourg, descendent du petit-fils de Louis XIV, placé sur le trône d'Espagne en 1700. Le roi Albert II de Belgique, lui, a pour ancêtre le comte de Toulouse, l'un des fils légitimés du roi Soleil.
Des princes plutôt fiers du sang qui coule dans leurs veines. J'ai reçu un héritage. que j'assume, mais je ne suis pas seul à le porter. C'est notre mémoire commune, nos fondations, nos racines. Des racines qui, si elles permettent à certains princes de prétendre au trône de France, inspirent aussi le sommet du pouvoir.
Je ne prendrai qu'un seul exemple, c'est le portrait officiel. Le premier portrait officiel de l'histoire de France, c'est le grand portrait de Yacinthe Rigaud de 1701. Et vous pouvez comparer ce portrait à tous les portraits des présidents de la République. et bien d'une certaine manière, ils essaient de se confronter à ce portrait emblématique. On voit qu'il y a la reprise de certains codes, la pose debout, le fait de s'appuyer plus ou moins négligemment soit à une table, soit à un sceptre, et puis ce regard quelque peu perdu dans le lointain qui peut être l'État, la France, la postérité.
Et même quand notre président Hollande a voulu être un président ordinaire, son portrait d'une certaine manière a été un petit peu... critiqué parce qu'on a dit, ben voilà, il manque un peu de majesté. Louis XIV lègue à la France une hyper personnalisation du pouvoir.
Et maintenant, on juge les présidents de la République, justement, à cette puissance d'incarnation. A-t-il réussi à incarner l'État, à être l'État ? La conception du rôle du chef de l'État, la plus proche de celle de Louis XIV, c'est le général de Gaulle.
Le président est naturellement le seul détenteur de l'autorité de l'État. D'ailleurs, rappelez-vous que dans le Canard Enchaîné, il y avait une rubrique vivante du général de Gaulle qui faisait rire toute la France, qui s'appelait La Cour. Et on voyait le général de Gaulle lui-même dessiné en Louis XIV, avec la grande perruque. D'ailleurs, le général de Gaulle va faire revivre Versailles. Depuis le XIXe siècle, le château abrite la chambre du Congrès, où sénateurs et députés se réunissent aux grandes heures de la République.
Dans les années 60, le général en fait un passage obligé des visites d'État. Pour cela, il choisit le palais de Trianon, résidence appréciée de Louis XIV et de ses successeurs, mais aussi de l'empereur Napoléon. Le premier grand voyage, c'est celui du Tsar Nicolas II en 1896, où il est accueilli ici par Félix IV.
et où se fixe à peu près le protocole qui va être celui qui accompagnera toutes les visites des chefs d'État depuis. Ce protocole a été encore accentué par le général de Gaulle lorsqu'il a fait de très... Trianon est une résidence présidentielle puisqu'il proposait à ses autres étrangers de séjourner à Trianon.
Il fait faire des travaux importants, il crée des cuisines, il crée l'électricité, il fait beaucoup de choses. Après cinq ans de rénovation, le trianon républicain peut recevoir à la manière des rois. Le président américain Richard Nixon est reçu par le général en 1969. La reine Elisabeth II viendra cinq ans plus tard à l'invitation.
de Georges Pompidou qui met à sa disposition la plus belle chambre du palais, celle de l'impératrice Marie-Louise. La reine d'Angleterre a fait savoir qu'elle ne souhaitait pas dormir dans ce lit, ce lit qui avait été celui de Napoléon. Peut-être que l'histoire de la France et de l'Angleterre n'y est pas complètement étrangère.
Cette chambre, en fait, aurait pu jouer un rôle dans l'histoire des visites officielles, puisque c'est une des chambres d'apparat les plus prestigieuses du lieu, mais en fait... Seul le chat d'Iran a accepté de dormir dans cette pièce, mais tous les autres, semble-t-il, n'ont pas souhaité dormir dans le lit de Napoléon. Après Boris Yeltsin, accueilli ici en 1992 par François Mitterrand, en mars 2014, c'est le président chinois, Xi Jinping, qui reçoit les honneurs de Versailles et de Trianon. C'est saisissant de penser qu'en cette année du tricentenaire de la mort de Louis XIV, c'est de voir que le château de Versailles continue à vivre dans le XXIe siècle. depuis que Louis XIV l'a voulu, au XVIIe siècle.
On pourrait dire que Louis XIV a réussi son coup. Non seulement, dans sa vie, il a voulu être le plus grand roi du monde, mais il est resté le plus grand roi du monde. Le règne de Louis XIV ne laisse pas totalement indifférent. Si les historiens n'ont pas fini de débattre sur les grandeurs et les misères du règne du roi Soleil, il y a une réussite que l'on ne contestera pas à Louis XIV.
Il a su partir en beauté, dans une mort digne de ce que fut sa vie. Aucun dirigeant après lui ne parviendra à faire de sa mort un spectacle total au service de l'État. Je vous remercie de votre fidélité et je vous donne rendez-vous très prochainement pour un nouveau numéro de Secrets d'Histoire. Musique de générique