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Figures de Style Indispensables

Bonjour à toutes et tous et bienvenue sur le français c'est clair, Je m'appelle Marie-Astrid, je suis professeur de français et aujourd'hui nous allons parler de ces fameuses figures de style que l'on nomme aussi des procédés littéraires ou des figures de rhétorique. Ces figures de style sont source de stress pour les plus jeunes parce qu'ils mélangent certains termes qu'ils ont du mal à retenir. Nous allons dans cette vidéo aborder les 7 figures de style les plus indispensables à maîtriser, parce qu'elles sont les plus fréquentes d'abord mais aussi les plus faciles à repérer, je garderai les plus rares et les plus compliquées pour d'autres épisodes. Mais avant tout, posons nous ces questions : à qui servent les figures de style et pourquoi les connaître ? Avec des figures de style, un auteur ou une autrice donne du style à son texte. Il ou elle ne se dit pas, tiens ici je vais mettre une anaphore et une gradation. En revanche, l'auteur(e) utilise, consciemment ou non, des figures de style qui sont des techniques, des outils rhétoriques - qui servent à bien s'exprimer - et qui remontent à l'Antiquité. Ces figures lui permettent d'arranger les mots, les phrases d'une manière frappante, originale, afin de produire sur son lecteur différents effets. Pour le lecteur justement, connaître les figures de style ne lui sert à rien : lire en s'arrêtant à chaque figure de style serait même une sorte de cauchemar car comment se laisser transporter par les phrases si on les décortique sans cesse ? En revanche, un lecteur bien entraîné remarquera très vite s'il aime ou non le style d'un auteur, et ça, cela a à voir avec les fameuses figures. Mais qu'en est-il de l'élève, du lycéen, de l'étudiante ? Ce que leur prof leur demande, à eux, ce n'est pas d'apprécier un texte, même si bien sûr il l'espère mais c'est plutôt d'être capable de l'étudier, de l'analyser, c'est ce qu'il faut faire pour deux grands exercices du bac, l'étude linéaire et le commentaire de texte. Pour ces analyses, les professeurs fournissent aux élèves dès le collège une boite à outils dans lesquelles se rangent, entre autres, les figures de style. Grâce à elles, l'élève peut décrire le texte et observer les techniques mises en oeuvre ce qui permet d'expliquer pourquoi, par exemple, un texte comme La ballade des pendus de François Villon a traversé 6 siècles pour arriver jusqu'à lui. J'ajoute pour finir que connaître les figures de style peut vous aider à mieux écrire puisqu'il s'agit en fait d'outils, d'astuces qui rendront vos écrits plus élégants, plus efficaces. Mais venons en aux fameuses figures, que j'appuierai sur des exemples littéraires fameux et dont nous observerons chaque fois l'effet produit, parce que c'est une question souvent posée et que justement, c'est le plus important. Commençons par la figure de style la plus emblématique et la plus utilisée, la comparaison. Comme d'autres figures dites d'analogie, une comparaison repose sur deux éléments distincts que l'on rapproche parce qu'on leur trouve des traits analogues ou, plus simplement, des points communs. Dans une comparaison je compare un élément, objet ou être vivant à un autre objet ou être vivant. Cette comparaison est rendue évidente grâce à la présence de mots appelés outils de comparaison : comme, tel, pareil à ou bien de verbes attributifs comme être, ressembler, paraître... On trouve des comparaisons dans les textes les plus anciens, comme l'Odyssée d'Homère ce chef d'oeuvre dont vous devez vous souvenir auquel j'ai consacré une série de vidéos. Vous vous rappelez du cyclope ? Homère dit qu'il ressemble au sommet boisé d'une haute montagne : ici le verbe ressembler signale la comparaison. C'est la même chose dans la suite du texte lorsque Polyphème attrape deux des compagnons d'Ulysse comme des chiots, pour les assommer. Cela laisse songeur et effrayé n'est-ce-pas ? Autre exemple saisissant, lorsque François Villon évoque les corps des pendus, mangés par les pies et les corbeaux, il les décrit comme « plus becquetés d'oiseaux que dés à coudre ». Ici la comparaison est introduite par plus que et cette image très familière laisse le lecteur à la fois surpris et songeur. C'est le but d'une comparaison, quelle qu'elle soit, elle nous surprend et nous donne à penser. Passons à l'autre figure d'analogie superstar, celle qu'on appelle la métaphore. Ici encore, l'auteur rapproche deux éléments mais d'une manière plus subtile, sans le signaler par un outil de comparaison, un peu comme une énigme discrète. A l'origine, le mot métaphore en grec veut dire transport, et en effet, au lieu d'employer un mot, l'auteur se transporte et en emploie un autre qui a avec lui des points communs. Mais contrairement à la comparaison, il le fait sans tout nous expliquer, c'est à nous de le deviner, d'interpréter. Ainsi, quand Victor Hugo écrit Demain dès l'aube pour sa fille Léopoldine qui vient de mourir, il écrit ces vers : Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe, Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur. Ici, l'or du soir qui tombe évoque le ciel tout doré des crépuscules. Mais plutôt que de dire le ciel sera comme doré, il crée un raccourci, l'or du soir qui tombe, créant alors un contraste entre l'or du ciel et la nuit qui tombe pour tous mais surtout pour lui, puisqu'il a perdu sa fille. Dans un poème plus joyeux, « 17 juin 1943 », le poète René Guy Cadou emploie une métaphore curieuse pour décrire le jour où il rencontra sa femme Hélène  : « Le soleil agitait ses brins de mimosa ». Ses brins de mimosa désigne les rayons du soleil, c'est sûr, mais en utilisant le mimosa, cette fleur parfumée et lumineuse, qui annonce la fin de l'hiver et apporte l'espoir. Ici vous le voyez, la métaphore transforme donc quelque chose de banal, les rayons du soleil, en une véritable merveille. Citons aussi Colette qui évoque « les fleurs (...) apportées par la vague », « fleurs impérissables effeuillées en pétale de nacre rose » : avez-vous deviné à quoi renvoie cette coquette métaphore ? Et oui, elle évoque les bouts de coquillages que l'on trouve sur la plage, non loin de Saint Malo. Je poursuis avec la personnification, en 3e position sur le podium des figures de style données au brevet et elle est aussi une figure d'analogie c'est la raison pour laquelle on la prend souvent pour une métaphore ce qui n'est pas absurde. Mais une personnification, c'est plus précis : c'est le procédé littéraire qui consiste à attribuer à quelque chose de non humain des propriétés humaines. Premier exemple tiré du poème « A une passante de Baudelaire » : « La rue assourdissante autour de moi hurlait ». Grâce à cette personnification, nous comprenons certes que la rue est bruyante mais elle ressemble même un être vivant surnaturel puisqu'elle est capable de hurler. Dans le poème de du Bellay « Heureux qui comme Ulysse » il y a aussi une personnification plus discrète dans les deux vers : « Plus me plaît le séjour qu'ont bâti mes aïeux, Que des palais Romains le front audacieux. » Evidemment, un palais à Rome n'a pas de front encore moins de front audacieux mais grâce à cette personnification le poète suggère de manière brève que ces palais et leurs habitants sont dignes, fiers et même sans doute, un peu snob. Continuons avec Maupassant. Lorsqu'il écrit les arbres gémissent sous le vent, il use d'une personnification et il dit aussi quelque chose de la scène qui va se dérouler. Avec plus d'originalité encore, Jules Renard note élégamment dans son journal : Les arbres font le gros dos sous la pluie. Je passe à ma quatrième figure de style très utilisée dans les textes littéraires, l'énumération. Une énumération, c'est au moins trois mots ou groupes de mots de même nature qui se suivent parce qu'un seul mot ça n'aurait pas été assez. Pensez au héros du Horla qui se regarde dans un miroir et ne se voit pas : «  Je ne me vis pas dans ma glace ! Elle était vide, claire, profonde, pleine de lumière ! » Ici les adjectifs augmentent l'impression de vertige, d'effroi ressenti par le héros. Souvent aussi l'énumération produit l'effet d'une profusion, d'une certaine générosité, comme dans ce beau vers de Verlaine : « Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches. » Parfois encore l'énumération a un effet comique lorsque Perrette casse son pot au lait : « adieu veau, vache, cochon, couvée. » Mais on peut aussi utiliser l'énumération de verbes comme Phèdre, foudroyée d'amour : « Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue. » Dans ce seul vers, l'énumération, associée à d'autres procédés que l'on verra plus tard rend cette description très brève bien plus efficace qu'un longs discours : elle est tombée amoureuse de son beau fils et, pardonnez-moi l'expression, elle est foutue. Continuons avec une forme particulière de l'énumération qui est la gradation. Lorsqu'on a repéré une énumération, cela vaut toujours la peine de vérifier s'il ne s'agit pas plus précisément d'une gradation. Ce mot est construit à partir du mot degré, qui désignait autrefois les marches d'un escalier. Une gradation c'est donc une énumération dans laquelle chaque élément nous fait grimper un peu plus haut et amplifie l'effet recherché. C'est ce qu'emploie Victor Hugo, rendant hommage à sa chère George Sand : « Je l’ai aimée, je l’ai admirée, je l’ai vénérée . » Aimer, admirer, c'est déjà pas mal mais vénérer fait de l'écrivaine une véritable déesse. Songeons aussi au nez de Cyrano de Bergerac : ici, en plus de quatre métaphores, il y a une gradation du plus petit au plus grand  : « C’est un roc ! … c’est un pic ! … c’est un cap ! Que dis-je, c’est un cap ? … C’est une péninsule ! » C'est ce que l'on observe encore avec les premiers verbes de Don Diègue qui lui donne de l'élan, va cours vole lorsqu'il s'adresse à son fils : « Va, cours, vole et nous venge ». Parfois la gradation a un effet comique parce qu'elle se termine souvent par un terme ou plusieurs termes très exagérés qu'on appelle hyperbole, nous y reviendrons. Regardez ce que dit l'Avare de Molière qui a perdu son trésor  : « je n'en puis plus ; je me meurs ; je suis mort ; je suis enterré » Voilà un mort vivant qui nous amène à notre prochaine figure l'oxymore. On peut dire oxymore ou oymoron, mais attention les deux termes sont masculins. Cette figure de style utilisée dès la Grèce antique a été joliment définie par un he lléniste comme « l'ingénieuse alliance de mots contradictoires ». Inspiré par les Grecs, l'empereur romain Auguste avait un oxymore pour devise : hâte-toi lentement, par lequel il incitait à la prudence, à la réflexion dans l'action. Mais le plus souvent, un oxymore est l'alliance d'un nom et d'un adjectif de sens opposé comme le mort vivant et dans Le Cid encore il est donc question de « l'obscure clarté qui tombe des étoiles ». Oups : j'aurais dû écrire « le soleil noir de la mélancolie » de Nerval... Dernier exemple, Victor Hugo emploie de nombreux oxymores dans Les Misérables, pour parler de Gavroche, l'enfant courageux tué devant les barricades il écrit à sa mort : « Cette petite grande âme venait de s'envoler ». J'en viens à la dernière des 7 figures de style super faciles à repérer et très fréquente en prose comme en vers, l'anaphore. Une anaphore, c'est la reprise en début de phrase ou de vers d'un même mot ou groupe de mots. Pour en revenir au Cid, vous vous souvenez sans doute qu'après le soufflet reçu par le Compte, Don Diègue regarde son bras impuissant et le met en valeur en début de vers : « Mon bras, qu’avec respect toute l’Espagne admire, Mon bras, qui tant de fois a sauvé cet empire ». Dans les discours politiques, l'anaphore est fréquente, on en entend dans presque tous les discours, mais pour prendre un exemple plus littéraire et resté dans l'histoire, citons le discours de Gaulle à la libération de Paris. L'orateur rythme, il martèle son discours grâce à une anaphore particulièrement réussie : « Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! mais Paris libéré ! ». Vous n'aurez peut-être pas remarquée dans cette imitation particulièrement ratée la gradation, l'opposition, et même l'homéotéleute qu'on peut y voir aussi, mais nous reviendrons à ces figures de style au nom compliqué qui ne sont pas si difficiles à repérer. Quoiqu'il en soit, retenez l'essentiel : ce n'est pas de coller la bonne étiquette. Si vous ne vous souvenez plus du nom d'une figure, décrivez la avec vos mots et surtout expliquez pourquoi les mots choisis provoquent en vous par exemple amusement, peur, admiration ou réflexion Le récapitulatif des 7 figures de style les plus utiles est terminé, j'espère que mon choix d'exemple vous a donné envie de replonger dans les chefs d'oeuvre évoqués. N'oubliez pas de vous abonner pour être averti(e) des prochaines vidéos, ajoutez pouces vers le haut, questions et commentaire et sans trop de style je vous dis simplement à bientôt.