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Découverte des merveilles de la Bretagne

Restée sauvage et mystérieuse, la Bretagne est séduisante de richesses : ses ports abrités et ses îles minuscules, ses reliefs épuisés par les vents et ses fameux menhirs énigmatiques, exercent un indéniable pouvoir de fascination. Cette terre aux paysages multiples évoque tantôt la chaleur des tropiques, tantôt la rudesse de l’océan. Toujours très forte aujourd’hui, l’identité bretonne se célèbre lors de festivals hauts en couleur. La Bretagne se découvre en longeant ses rives splendides, du golfe du Morbihan à la côte de Granit, où nous irons à la rencontre de ceux qui en forgent la personnalité. Entité tant géographique que culturelle, la région des nations dites Celtes occupe la péninsule de l’extrémité ouest de la France. Notre périple commence dans le département du Morbihan, où se loge l’île de Houat, qui ne manque pas de personnalité. Ce rocher préservé d’à peine 5km de long sur 1,3 km de large voit ses habitants circuler à vélo ou à pied. « Le privilège qu’il y a d’habiter ici, le calme et la qualité de vie tout simplement, le paysage…voilà où on travaille, c’est magnifique» Houat et sa voisine l'île d'Hoëdic sont entourées de nombreux ilots, formant le prolongement de la presqu'île de Quiberon, témoin d'un continent aujourd'hui disparu. Peuplé dès l'époque néolithique, le littoral offre également des vestiges des civilisations mégalithique et gallo-romaine. L’île présente un large plateau couvert de landes, qui abritent environ 500 espèces végétales, dont la plupart pousse à même le sable. L’absence de culture intensive et chimique permet d’y conserver un patrimoine bien plus riche que sur le continent. Certaines de ses plages donnent une impression de solitude, toutefois contredite par son histoire. Houat a en effet été l’objet de nombreuses convoitises : à plusieurs reprises pillée par les Anglais, et par les Hollandais, elle a enfin retrouvé le calme, en gagnant le statut tacite de port neutre, durant les guerres napoléoniennes. Aujourd’hui, c’est un mouillage de rêve que viennent chercher les plaisanciers, parfois nombreux à la belle saison. Ils seront bien accueillis s’ils acceptent de respecter ce petit trésor auquel ses habitants tiennent tant. Retour sur le continent, où nous découvrons le golfe du Morbihan, véritable mer intérieure parsemée d’îles, dont Vannes est la ville principale. Connue dans l’Antiquité sous le nom de Darioritum, elle devient sous l’administration romaine la Cité des Vénètes, après la guerre opposant ce peuple gaulois aux légions de César, à la fin du 1er siècle avant JC. Sa position stratégique au centre de la Bretagne-sud lui confère très tôt un rôle politique et religieux prédominant. Les Comtes et évêques de la ville sont des figures clés de l'équilibre des relations entre la Bretagne et le Royaume de France. Plus tard, Vannes devient la première capitale de l'État breton, et le siège de son administration. Chaque printemps, la semaine du Golfe du Morbihan attire tout ce que la voile connait de vieux gréements, de navires de pêches d’époque, et de bateaux à rame qui, plusieurs jours durant, vont fendre les flots pour des régates « amicales » et festives. « C’est une fête maritime comme il en existe d’autres mais celle-ci a la particularité d’être dans un endroit particulièrement beau, exceptionnel même, il y a beaucoup d’îles c’est extrêmement varié, très bucolique et photogénique et ça fait un énorme et excellent terrain de jeu qui permet d’accueillir des bateaux du 3 mat à la petite annexe. » Cette année encore, de nombreux 3 mats prestigieux ont fait le voyage, comme l’Étoile du roi, l’Oosterchelde des Pays Bas, et le Shtandart de Russie. La plupart de ces navires propose d’embarquer des passagers pour une étonnante promenade dans le golfe. Même le Belem, le plus célèbre 3 mat français, est venu saluer la flotte d’une brève incursion, accompagné d’un essaim de bateaux. Cette fête est aussi l’occasion de se frotter à des conditions de navigation bien particulières, en raison de courants très piégeux. « C’est une petite mer intérieure qui se vide et qui se remplit 2 fois par jour c’est une énorme quantité d’eau qui sort par 2 goulets principaux et donc il y a de très forts courant entre les îles et particulièrement à la sortie, ce sont les courants parmi les plus fort d’Europe, presque 10 nœuds. » Au Sud du Golfe, la presqu’île de Rhuys s’enorgueillit de six châteaux. Dressée face à l’Océan Atlantique dans la commune de Sarzeau, la forteresse de Suscinio est sans doute le plus impressionnante. Résidence des ducs de Bretagne du 13e au 15e siècle, le domaine est finalement délaissé par François II, lui préférant la ville de Nantes. Trente ans d’un important travail de restauration auront pourtant rendu à cet ancien manoir toute sa noblesse. Sur les rives sud du Morbihan, les anciens marais salants et les réserves naturelles constituent des zones protégées, où aiment se nicher les oiseaux. Durant la semaine de fête, les îles du Golfe voient accoster de nombreuses flottilles. La plus longue et la plus connue, l’Île-aux-Moines, sera surtout la plus visitée. Pendant longtemps, cette commune a prospéré grâce à l’élevage et au cabotage, avant que les Îlois se lancent dans la pêche au thon, dans le golfe de Gascogne. Le littoral recèle de « Rias », ou « Abers » en breton, des baies étroites, étendues et relativement profondes, notamment dans le nord-ouest, où le charmant port du Bono accueille les embarcations pour une nuit à l’abri et au calme. Dans ce dédale d’îles aux Abers sinueux, il n’est pas rare de se perdre ! Nous parvenons pourtant à Auray, à l’extrémité nord du Golfe du Morbihan, qui se confond avec la rivière Loch. Saint-Goustan, son port, reçoit lui aussi quelques flottilles, fatiguées d’un long parcours. Autrefois havre de pêche et de commerce, Saint-Goustan a permis la prospérité de la cité, dont les maisons à colombage des 15e et 16e siècles sont un témoignage éclatant. Le pays d’Auray s’est en effet développé grâce à l’exportation de céréales, de tissus, de toile, et bien sûr de poisson. En direction de l’Océan, peu avant Quiberon, s’érige le géant de Crucuno, c’est le plus grand dolmen recensé dans le monde à ce jour, coiffé d’une table longue de plus de 7 mètres.. À Carnac, la ville voisine, c’est jour de tonte pour des moutons bien particuliers.... « Ici à Carnac on a une trentaine de Brebis et ce sont des landes de Bretagne, une race dite locale qui a été retrouvée un peu par hasard au début des années 1990, il en restait à peine 70 brebis de cette race-là. Elle a été répandue après. » « L’objectif est de tondre les brebis par hygiène et aussi par valorisation de laine dans la mesure où on peut une fois par an. » La laine servira essentiellement à la confection de feutre. Ces brebis sont des résidentes permanentes des alignements de Carnac, l’un des plus grands ensembles mégalithiques au monde, et haut-lieu de la préhistoire européenne. Les files de menhirs indiquent le chemin vers un espace estimé sacré : les enceintes. Les dolmens ont, eux, une fonction funéraire. « Sur les alignements de Carnac, la végétation est essentiellement constituée de landes, une terre d’ajonc de genêts et c’est une brebis qui a la particularité d’aimer cette végétation assez rude. Elle nous permet de nous filer un coup de main nous à l’entretien, pour que l’on ait une vue en permanence sur les menhirs, que la végétation soit suffisamment rase. » Nichée dans la baie de Quiberon, à proximité du beau village de Saint Colomban, l’Anse du Pô élève les plus fameuses huîtres du Morbihan. À marée basse, ses parcs s’emparent du paysage. Maxime Cochenec est un jeune ostréiculteur de talent, dont la famille exerce le métier depuis 4 générations. À peine sorties des filets, les huîtres sont triées selon leur taille. Maxime en éliminera un certain nombre qui devront retourner à l’eau. « On a vraiment un goût d’algue très prononcé, très particulier contrairement à d’autres régions, d’autres régions sont plus iodées, on a vraiment ce côté marin qui ressort plus que l’iode. » « On essaye d’autres techniques, on essaye de faire des poches suspendues, on essaye de faire plein de choses pour justement se différencier du voisin, pour essayer de faire autre chose, pour essayer d’avoir une qualité optimale. » Une fois nettoyées et rincées, les huitres sont déjà prêtes à être consommées. « On est sur un produit propre, qui est propre, qui est vendable et qui est commercialisable tout de suite, pour seulement 24 heures. » Pour l’ouverture des coques, la mère de l’ostréiculteur a le coup de main. Les huîtres sont servies dans un bar installé juste derrière les salles techniques, offrant une vue imprenable sur les parcs. Partons maintenant vers Quiberon, avant de prendre la mer pour Belle-Île. La presqu’île de Quiberon est une langue rocheuse, qui s’avance de 14 km dans la mer. Cette ancienne île est reliée au continent par un tombolo sableux, un cordon qui s’est élargi au fil des siècles et du travail des hommes. Dans le port de Portivy, à marée basse, l’activité est très calme. La plupart des pêcheurs sont sortis en mer. Bâti au 18ème siècle puis reconstruit au 19ème en s’inspirant des édifices de Vauban, le Fort de Penthièvre est aujourd’hui un centre d’instruction commando de marine. À St Pierre de Quiberon, Dilo s’est installée un atelier d’artiste original et lumineux. En vedette : le poisson sous toutes ses formes. Si Dilo peint sur des supports aussi variés que les vieilles cartes marines ou les voiles récupérées, elle privilégie les anciennes coques de bateaux, qui la fascinent depuis toujours. « Le choix, c’est avant tout de préserver des bateaux qui sont des outils de travail, des petites merveilles fabriquées par des hommes et c’est bien triste de les voir partir la plupart du temps à la décharge ou à la mer ou à l’incinérateur et donc ma volonté première c’était de travailler sur ce support, sur celui-là et des cartes marines anciennes. » « On a dans la famille des navigateurs, des explorateurs, des cartographes, je pense que toute petite j’ai été baigné là-dedans et puis je trouve que le poisson est superbe, un bel animal. » « J’ai eu un choix oui parce qu’il est beau des 2 côtés, voilà, le côté qui a été choisi finalement avec le bar et puis l’intérieur de la coque, tous ces reliefs de peintures successives, il y a du bleu clair, du bleu foncé, du blanc, du vert. » C’est à l’extrémité de la presqu’ile, dans la station balnéaire de Quiberon, que l’on embarque pour Belle-Île ou pour Houat. Île vedette des côtes bretonnes, Belle-île-en mer cache ses trésors à une heure de traversée du continent. Ses campagnes vallonnées, ses plages douces, et ses chaos rocheux ont beaucoup inspiré le peintre Claude Monet. Il n’y a pas si longtemps, le Port du Palais, la ville principale, ne vivait que de la pêche à la sardine. Aujourd’hui, les visiteurs font la part belle au bar et au homard. L’imposante citadelle Vauban domine le port. Construite sur les vestiges du fort des Gondi, elle fut rachetée par Fouquet puis fortifiée par Vauban à la fin du 17ème siècle. Occupée par l’armée allemande pendant la seconde guerre mondiale, elle fut ensuite délaissée et finit par tomber en ruine, jusqu’à ce que son rachat privé en 1960 permette un effort important de restauration. Aujourd’hui, ses dix hectares sont occupés par un musée, un hôtel et des restaurants. Sauvage et battue par les vents, la pointe des Poulains, au nord-ouest de l’île, a séduit Sarah Bernhardt, charmée par les seuls cris des mouettes et le fracas des vagues contre les rochers. Le conservatoire du littoral assure la préservation de ces côtes magnifiques, où viennent nicher mouettes et goélands. La villa de l’ancienne actrice et le phare inoccupé semblent veiller sur cette parcelle reculée de la région. Le Port de Sauzon flotte sur un estuaire débouchant sur la côte nord de l’île. Son bourg a connu une histoire mouvementée : longtemps abri de navires de passage, il devient le repaire de pirates saxons, avant qu’au Vème siècle, les Bretons insulaires ne viennent à leur tour s’y installer. Dans le vallon de Bordilla, on manquerait presque la verrerie Fluïd, dissimulée dans la végétation. Fabien Barebau et son équipe s’y sont installés en 2008, pour exercer une activité fréquente sur les côtes bretonnes. Malgré l’éloignement, Fluïd travaille pour de grandes marques de luxe. « La pérennité de notre projet, et depuis le début finalement notre force est dans le collectif, on est une scope, on est une coopérative, on partage un outil et on s’associe à plusieurs pour pratiquer le métier de nos rêves finalement et ça, ça crée une dynamique, ça crée une force sans commune mesure. » « C’était un inconvénient au début, rassembler du savoir-faire et des outils spéciaux sur ce territoire c’est devenu un avantage quand on s’est perçu que Belle Île était plus qu’un… plus qu’une belle Île c’était aussi un lieu de rencontre, les gens qui viennent ont un lien affectif avec l’île, qui s’intéresse à ceux qui vivent à ceux qui travaillent... et parallèlement à notre production finalement » L’aiguade Vauban, appelée communément « Belle-Fontaine » par les bellilois, domine l’anse de Port Larron. Cet édifice est l’un des vestiges militaires les plus importants de l’île. Conçu autour de 1703, il permettait aux navires d’État et de commerce de s’approvisionner en eau douce sur la côte. Les initiés viennent parfois discrètement s’y baigner. Les bords de mer sont ici paradisiaques. La plage des Grands Sables en est un bon exemple. Mais le charme de Belle-île vient également de ses côtes lacérées et dentelées, à l’image de la pointe de Skeul, au sud des terres. Plus à l’ouest, l’anse de Donnant exhibe un univers minéral, adouci par les plages qui accueillent des surfeurs. Pour rejoindre Lorient, plus au nord, nous passons devant la fameuse barre d’Etel, un banc de sable sous-marin qui marque l’entrée du Ria d’Etel, petite mer intérieure bordée de dunes, dont la physionomie change au gré des marées. À l’entrée de la rade de Lorient, le regard est tout de suite happé par Port Louis et sa citadelle. Édifié en 1591, en pleines guerres de religion qui font rage dans la région, le fort est entièrement détruit dès 1598. Vingt ans plus tard, Louis 13 décide de le reconstruire, conscient de l’intérêt stratégique de la rade. La citadelle est le témoin orgueilleux du temps où la compagnie des Indes, née en 1664 sous le règne de Louis XIV, assurait la prospérité de la région. Durant la seconde guerre mondiale, les Allemands s’y sont installés pour protéger leur base de sous-marins. Aujourd’hui rénovés, les bâtiments de la cour intérieure accueillent les musées de la Marine et de la Compagnie des Indes. Maquettes de vaisseaux, estampes, cartes anciennes, mobilier indo-européen, porcelaines de Chine, ou encore cotonnades indiennes, y sont autant de témoignages d’une incroyable épopée maritime. La quête de précieuses marchandises a conduit bien des navires, au terme de longs et périlleux périples marins, sur les rives d'Afrique, d'Orient, d'Asie et d’Amérique La ville a été presque totalement rasée en 1943-1944, puis reconstruite jusque dans les années 1970. Mémoire de la guerre, la base sous-marine de Kéroman a été établie en 1941 par l’occupant. Mais cet ancien bunker est devenu un lieu dynamique d’exposition consacré à la course au large. La cité de la voile Eric Tabarly propose une découverte des techniques de navigation, et rend hommage à ce marin hors normes, précurseur passionné et grand concepteur. Les visiteurs explorent de façon ludique l’univers de la voile moderne, des quilles aux gréements, des flotteurs de grands voiliers aux légendaires Pen Duick d’Eric Tabarly. Un bassin équipé de ventilateurs permet aux plus jeunes de s’initier aux subtilités des régates. Face au musée, le pôle « course au large » connait une animation permanente. Entre les essais de matériel, les sorties en mer, et les mises à l’eau, les skippers et leur équipage ont beaucoup à faire. Ces géants de course « Ultime », montés sur foil, peuvent atteindre des vitesses spectaculaires. Plus au nord, Concarneau révèle un décor chargé d’Histoire. La veille ville est ceinte d’une forteresse entourée par le port. Appelée la « Ville Close », cet îlot de 380 mètres est le berceau historique de la cité. Bâties au fil des siècles, les premières constructions de cet ensemble fortifié datent du haut moyen âge. Ses remparts ont été construits au 16ème siècle, pour être ensuite modifiés par Vauban. Au centre, les demeures anciennes se sont elles aussi peu à peu transformées à travers le temps. Le port reste à la fois un centre de pêche et un chantier naval très actif. En Bretagne, la mer s’offre souvent de profondes incursions dans les terres pour muter en cours d’eau, comme cet Aber devenu la rivière Le Goyen, voyageant d’Audierne jusqu’à Pont Croix. Ce village était autrefois un centre administratif et commercial important, enrichi d’un château aujourd’hui disparu. Son église collégiale reste toutefois l’une des plus impressionnantes du Finistère. Le porche sud est surmonté d’un haut gâble finement ouvragé. En prenant maintenant la route vers la pointe du Raz, nous faisons une halte à Pont L’abbé, au cœur du pays Bigouden. Aujourd’hui, la ville est en effervescence : c’est la fête annuelle des brodeuses, qui célèbre ces femmes habiles et talentueuses d’un temps où l’on portait encore la coiffe. Tous les villages de la région se sont préparés pour ce défilé unique en costumes d’époque. « Le pays Bigouden ici dans toute la Bretagne c’est là où se sont porté en dernier les coiffes et les costumes locaux, ailleurs ils ont disparu depuis on va dire 25, 30 ans voire davantage, ici ça s’est maintenu jusqu’à aujourd’hui. » « Il faut dire que les Bigoudens ont horreur du vide que ce soit sur les plastrons, voyez c’est plein, c’est de la broderie pleine, partout, on couvre de broderie et bien pour les coiffes c’était pareil. » Créée en 1954, la Fête des Brodeuses est l’une des plus anciennes manifestations traditionnelles de France. Elle trouve son origine dans l’élection de la « Reine des Brodeuses », organisée pour la première fois en 1909. Cette coutume mobilisait toutes les maisons de broderie de la ville, alors nombreuses. La reine, choisie et couronnée parmi les ouvrières de ces ateliers, avait pour tâche de représenter la profession toute entière. Chaque ville du pays bigouden est venue avec son bagad, un orchestre traditionnel, accompagné de figurants et de danseurs. Le défilé, qui réunit une trentaine d’associations, se poursuit le long des quais.. « Il y a encore une personne qui porte au quotidien le costume traditionnel, c’est la toute dernière Bigouden qui a 93 ans et qui a porté ces costumes toute sa vie, elle s’appelle Alexia. » Sur cette scène du bois Saint Laurent, les danses se succèdent devant un public conquis. La ferveur populaire que rencontre l’événement garantit aux brodeuses de belles années de fêtes devant elles. À quelques kilomètres, la mythique pointe du Raz offre un panorama éblouissant sur la mer d’Iroise. Ces falaises du Cap Sizun sont les plus avancées vers l’ouest océanique. Par temps calme, difficile d’imaginer les violentes tempêtes qui viennent fouetter le phare, cerné de courants puissants. Au fond, l’île de Sein est l’ultime rempart avant l’Atlantique. La statue de Notre Dame des naufragés rend hommage aux marins disparus en mer. Très connu, le site attire de nombreux visiteurs. Les sentiers ont été balisés pour protéger le littoral et assurer la survie de la flore. Atones, les moulins de Trouger témoignent d’une époque révolue où chaque paysan venait moudre son grain à la seule force du vent. Haut de 330 m, le Ménez Horm appartient à la chaine des montagnes noires. Le sommet offre une vue unique sur la vallée de l’Aulne, et la presqu’ile de Crozon qui se devine dans la brume. Péninsule peu ordinaire, cette terre ultime est entourée de falaises vertigineuses dont l’extrémité ressemble à un trident. Pointe du Pen him et pointe du Toulinguet dessinent un décor sauvage et sublime, dès lors que le soleil est de la partie. Du temps de la marine à voile, Camaret-sur-mer était un port de relâche où les bateaux cherchaient refuge durant les tempêtes. La ville a vécu de la pêche à la sardine pendant des décennies. À la fin du XIXe siècle, on y comptait jusqu’à six conserveries. À l’autre extrémité de la presqu’ile, la Pointe des Espagnols donne sur le goulet de Brest. Les vestiges de fortification, fruits d’efforts militaires des Espagnols pour contrôler la rade, remontent au 16e siècle. Un fortin a été ajouté sous Napoléon 1er. En longeant le littoral, on atteint l’estuaire de l’Aulne. Un peu plus bas, le village de Landévennec profite de son statut enclavé, loin de tout tumulte. L’église Notre-Dame et son cimetière marin jouissent d’une baie magnifique. Cet isolement paisible a conduit Saint Guénolé et ses moines à bâtir au 5e siècle une Abbaye aujourd’hui détruite. En 1958, une communauté Bénédictine s’est installée à proximité des vestiges. Le climat est doux et humide, et le village bien abrité des vents forts. Dans ce petit coin de terre breton, la végétation du midi se développe et prospère admirablement. Sur la presqu’ile voisine de Plougastel, ce grand calvaire fut édifié en 1602 pour honorer la fin d’une terrible épidémie de peste. La péninsule compte également 8 chapelles datant du XVIe siècle, nichées dans un cadre verdoyant et apaisant. Complètement détruite en 1944, Brest a aujourd’hui retrouvé tout son caractère et son souffle marins, soutenus par de récents aménagements sur le cours Dajot qui surplombe le port de commerce. Seul le château de la ville a échappé à la destruction des bombes. Forteresse renforcée par Vauban sous Louis XIV, cet édifice convoité en tout temps aura été livré aux Anglais pendant la guerre de cent ans, habité par la duchesse Anne au début du 16ème siècle, et connu l’Occupation allemande durant la seconde guerre mondiale. La réhabilitation du plateau des Capucins redonne tout son lustre au cœur historique de la ville. Emblème de ce quartier, la rue Saint-Malo est la seule voie encore pavée de Brest. En suivant le littoral vers l’ouest, nous atteignons la Pointe St Mathieu. Les ruines de son Abbaye partagent la falaise avec le sémaphore et le phare. Les sources commentant la naissance de ce monastère manquent et diffèrent. Là où certains rapportent une première fondation dès le 6e siècle, d’autres préfèrent la légende associant l’édification de l’abbaye aux reliques de Saint-Mathieu, rapportées d’Égypte par des marins bretons au 9e siècle. L’architecture romane et le style gothique sont l’œuvre de moines bénédictins, qui ont mené une vie conventuelle à Saint-Mathieu du 11e siècle jusqu’à la Révolution française. Plus bas, à Plougonvelin, le Fort de Bertheaume est un ancien poste de défense du goulet de Brest. En reprenant la route vers le nord, on ne peut être que séduit par les plages du Conquet.. Au vu de la force des houles et des vagues, les surfeurs devraient y trouver leur compte. Depuis le port du Conquet, on atteint assez vite en bateau l’archipel des îles molènes, où ne vit qu’une trentaine d’habitants. Rattachée au continent durant la période glaciaire, l’ancienne péninsule s’est depuis détachée en 9 ilots, dont aucun ne se ressemble. L’île Quemenes accueillait autrefois des fermes et leur bétail, quand d’autres rochers n’hébergent que des mouettes. De son côté, L’îlot de Balaneg est le domaine d’une importante colonie de phoques gris, et l’un de leur rare lieu de reproduction en France. Entre Janvier et Avril, c’est aussi un site de mue important. Avec un peu de chance, on peut croiser de grands dauphins blancs, une espèce qui mesure entre 2 et 4 mètres, et qui peut vivre jusqu’à 40 ans. Le goémon reste une ressource importante, dont les industries alimentaires et pharmaceutiques sont très friandes. Les algues sont récoltées en Mer d’Iroise à l’aide d’une technique dite du « peigne norvégien ». Elles sont ensuite débarquées à Lanildut, premier port goémonier d’Europe, où 48 000 tonnes d’algues sont chargées chaque année. La chapelle de Saint Samson marque l’entrée dans la Côte des Légendes. Plus au large, on aperçoit les roches d’Argenton, puis les roches de Portsall. Nous sommes là en plein cœur du pays des Abers, ces embouchures de fleuves côtiers soumis aux marées, qui composent des paysages versatiles, sans cesse redessinés au gré des flux marins. L’aber Benoit et l’Aber Wrac’h s’incrustent dans les terres sur plus de 30 km. Le Phare de l’île vierge serait quant à lui situé sur un ancien sanctuaire druidique. Au 15e siècle, le rocher aux eaux cristallines a aussi accueilli un couvent que les moines ont pourtant finalement délaissé, rebutés par la stérilité de ses terres. Située sur la pointe ouest de la baie de Morlaix, et forte de son port en eau profonde, Roscoff est une plateforme majeure des échanges avec l’Irlande et l’Angleterre. Ancien havre de corsaires puis de contrebandiers, la ville devient, à partir du XVIe siècle, un des premiers ports à envoyer ses bateaux à la pêche à la morue sur les bancs de Terre Neuve, puis sur les côtes d’Islande. Ce poisson salé était ensuite vendu dans toute la France, mais surtout en Espagne. La Bretagne n'étant pas soumise à la gabelle, les pêcheurs picards et normands venaient aussi à Roscoff s'approvisionner en sel à bon compte. À 2km à peine au large de la cité, l’île de Batz respire la simplicité et l’authenticité. D’à peine 3,5 km de long, elle révèle des décors paisibles alternant roches et anses de sable blanc. Tout comme à Roscoff, les coefficients de marée y sont importants, et il aura fallu attendre les années 1930 et la modernisation des cales pour pouvoir y accoster avec facilité. À peine arrivés sur l’île, nous découvrons bien vite que Batz est un immense potager. Les mystères du microclimat y donnent des légumes mûrs un mois avant ceux des champs d'en face. L'îlot est riche de plus de 650 espèces d'algues, qui sont utilisées en agriculture, en médecine, en cosmétologie, et en thalassothérapie. L'église actuelle a été construite à l'emplacement d'une ancienne chapelle dédiée à Notre-Dame du Bon Secours, bâtie par le doyen des chanoines de Saint-Pol-de-Léon, vers le milieu du XVIIème siècle. Le fameux Gulf Stream, ce courant chaud venu de l’Atlantique, exerce probablement une influence sur la qualité des plantes qui poussent sur l’île. C’est d’ailleurs ce qu’a bien compris Georges Delaselle en y plantant son jardin tropical en 1897. Il aura tout de même fallu bien des d’efforts humains et financiers pour faire cohabiter les palmiers et nombreuses plantes exotiques. Plus proche de la mer, la section réservée aux plantes grasses réserve de belles surprises, à commencer par ces sublimes Aeonium. De l’autre côté de l’île, Jean-Pierre Craignou et son épouse sont en pleine récolte : ils cultivent la fameuse pomme de terre de Batz, chérie par les gastronomes. Relativement fragile, elle présente l’avantage de pousser avant celles du continent. « Le climat joue un petit peu il y a le Gulf stream qui passe pas trop loin il nous amène un peu sa bonne odeur je pense. » « Le principal c’est que l’on a une terre assez sablonneuse et on met beaucoup d’algues, d’algues marines que l’on ramasse sur les plages en hiver et c’est l’iode qui donne le goût à la pomme de terre. » Sur le continent, les champs de Saint Pol de Léon prennent des allures altières en ce mois de juillet, pleine saison des artichauts. Poursuivons maintenant notre remontée vers le nord, en direction de Perros Guirec. Au 19ème siècle, cette ville était déjà une station balnéaire prisée, à l’attrait renforcé par l’arrivée du train en 1881. Dès lors, Perros-Guirec est devenu un lieu de villégiature privilégié de familles parisiennes aisées et d’artistes renommés. À quelques kilomètres de là, nous quittons le port de l’île Grande à bord de Théo 2 avec Franck Jouet. Ce pêcheur professionnel de Homard sort relever ses casiers, comme tous les jours, quelle que soit la météo. Après 45 minutes de navigation, Franck et son équipier entrent enfin en action autour du phare des Triagoz, érigé en 1864. « Ici dans notre zone les crustacés se portent assez bien par contre tout ce qui est poisson ça baisse, ça baisse, je pense 20 à 30% en moins depuis le temps où j’ai commencé la pêche, oui le casier, le crustacé se porte bien la langouste on en revoit beaucoup plus qu’avant et le homard on en a plus peut-être parce que moins de prédateurs, moins de poisson. » L’exercice est intense : chaque casier pèse environ 15 kilos. Et ce n’est que le début, les pêcheurs ont du pain sur la planche : ils doivent encore mesurer et rejeter à la mer les homards trop jeunes et trop petits, puis regarnir en appâts les casiers avant de les remettre à l’eau. Même par beau temps, la navigation demande beaucoup d’attention. La circulation entre les rochers, dont certains sont à peine immergés, peut s’avérer périlleuse. Lorsque la mer s’agite, la tâche est plus ardue encore. Entre deux aires de pêches, Franck et son collègue neutralisent les pinces des homards, pour éviter qu’ils ne s’attaquent entre eux dans le bac. Après une bonne demie journée en mer, il est temps de regagner le port. La pêche a été bonne, Franck va pouvoir livrer ses clients habituels, des restaurateurs de la région. Katrina, l’épouse du pêcheur, vendra le reste des homards sur les quais, dès son arrivée. Non loin, les falaises de Ploumanach prennent des teintes splendides au coucher du soleil. Le littoral entier est ici couvert d’une roche rosée, créant une atmosphère étrange et poétique. Plus à l’est, juste au-dessus de la ville de Perros Guirrec, les carrières de granit sont toujours en activité. Ces impressionnants gisements de minerais fournissent depuis des siècles toute la région. À proximité, justement, Notre Dame de la Clarté, édifiée au 15ème siècle, exhibe les éclats de ce granit rose. Sur le littoral, les ilots se multiplient dans des eaux aux teintes tropicales. Plus à l’est, le trafic de plaisance s’intensifie autour de l’île de Bréhat, très prisée des estivants. Un peu plus bas, à Paimpol, l’Abbaye de Beauport est un site classé et protégé des Côtes d’Armor. Bâtie au 13e siècle sur le littoral, et devenue une importante seigneurie au 15ème siècle, l’abbaye se développe grâce à l’exploitation du sel, et d’aménagements hydrauliques, de digues et de talus, laissant son empreinte sur la côte. Nous reprenons la route vers l’est, pour gagner un site emblématique de la côte de Penthièvre : le Cap Fréhel. Au même titre que la pointe du Raz, le Cap Fréhel dévoile une vue exceptionnelle, un univers magique et minéral, couvert d’une lande où règnent ajonc et bruyère. De l’Anse des Sévignés au Fort de Latte, ces paysages ravissants nous amènent vers la Côte d’Émeraude, où Dinard déploie ses demeures somptueuses. Les Britanniques furent les premiers touristes à fréquenter celle que l’on surnomme « la Nice du Nord ». Pendant l’entre-deux-guerres, la ville connut une période faste rappelant la Belle époque. Dinard comptait alors une centaine d’hôtels, et 4 casinos. Le charme opère toujours Plus au sud, Dinan domine l’estuaire de la Rance, qui se faufile entre ses remparts. Postée stratégiquement entre la Bretagne et la Normandie, la ville est contrôlée au 13 siècle par les Ducs de Bretagne, qui en développent l’activité économique, et en organisent la défense. La ceinture fortifiée conférant à la ville son ambiance médiévale en est l’empreinte vivace. La Rance connait de très fortes amplitudes de marée et a donné l’idée à des passionnés d’en rénover un moulin bien particulier. « Là vous êtes dans les plus fortes marées d’Europe c’est-à-dire entre la Basse Mer et la Haute Mer, il y a 14 mètres de différence. Donc on va capter cette énergie pour faire marcher un moulin à marée ». Sur l’estuaire de la Rance on pouvait compter une quinzaine de moulins qui datent tous à peu près du milieu du 16ème siècle. A l’époque ces moulins à marées faisaient surtout de la farine, fameux blé noir que tout le monde connait en Bretagne, pour faire les galettes maintenant. Chaque commune avait plus ou moins son moulin et faisait son pain pour la commune. » À l’embouchure du fleuve, nous jetons un dernier regard vers St Malo, icône de ce littoral breton. La seule vue de ses remparts est évocatrice de voyages lointains, des pages de Jules Verne aux exploits de Surcouf. La Tour Solidor, qui protège l’estuaire de la Rance depuis le 14ème siècle, a vu défiler bien des Malouins partis comme Jacques Cartier aux 4 coins des océans explorer le monde. À la grande époque du commerce de la morue, Saint-Malo a pu célébrer ses corsaires, devenus les hommes les plus riches de la ville. C’est sur ces images d’un littoral crépusculaire que nous laissons la Bretagne s’endormir paisiblement. Cette région d’une beauté sauvage et minérale aux rivages saisissants nous aura dévoilé un patrimoine historique et culturel généreux, que l’on a hâte de revenir célébrer.