Un petit clic, quoi de plus inoffensif ? Simple, enfantin, ce simple clic ouvre la porte à un océan de contenu. Une infinité de musiques, de séries, de films.
Quoi de plus inoffensif ? Un clic libère le streaming. Il donne vie à cette créature infinie, mais dévastatrice.
Le stream tue à petit feu, là, sous nos yeux. Mais on ne le voit pas. Il crache 100 millions de tonnes de CO2 dans l'atmosphère, avale des tonnes de matières premières, génère des montagnes de déchets. En grande partie par sa faute, le numérique représentera bientôt 6% des gaz à effet de serre par an, autant que l'aviation. Il sera bientôt plus polluant que l'automobile.
Le stream envahit nos vies, s'immisce dans notre intimité, nos familles, notre travail. Le monstre colonise notre quotidien. Il devait être à notre service, nous sommes désormais à sa merci. Emprisonnés et asphyxiés par ce monstre que nous avons nous-mêmes créé, la bête nous a échappés et elle se retourne contre nous. A nous de reprendre le contrôle du streaming avant qu'il nous dévore.
En 2025 seront échangés sur internet 181 états octets de données, soit 181 000 milliards d'octets. Ça ne vous dit rien ? C'est normal, un tel trafic échappe à l'entendement.
Dire qu'à l'origine chaque octet comptait, le streaming était rare, raisonnable. L'histoire du streaming est une success story, une réussite à l'américaine. Dès la naissance, le petit stream doit se battre pour se faire une place parce qu'Internet n'a pas du tout été pensé pour lui.
Le web du début des années 90. Un laboratoire, un Far West du futur, peuplé de personnages hauts en couleurs. Un Internet aux usages rudimentaires et pas très fun. C'était pas très multimédia, c'était un ordinateur plus austère, pas de son, pas d'image du texte. Tout cela va changer grâce à un homme, Rob Glazer. Sans lui, pas de Netflix, pas de Zoom, pas de Youtube, pas de Spotify.
Le confinement aurait été beaucoup plus long sans cet homme. le père du streaming. Rob est ingénieur chez Microsoft.
Au printemps 1993, il se rend à une conférence organisée par Mitch Kapor, un des pionniers du net. Je suis à ce rendez-vous et l'un de mes collègues, Dave Farber, qui est vraiment l'un des pères de l'Internet, pour vrai, qui est l'un des originateurs de la technologie qui a conduit à l'Internet, il dit, Hey, tout le monde, vous voulez voir cette chose mosaïque ? J'ai vu ce browser qui vous permettrait de Au même moment qu'Internet, un autre réseau voit le jour.
Son nom, le GIEC. Il a publié son premier rapport en 1990 et émet une hypothèse. L'activité humaine provoquerait un réchauffement de la planète.
Et le réchauffement de la Terre, même si certains n'osent pas s'en plaindre, risque d'avoir des conséquences dramatiques d'ici la fin du siècle. Rob et ses amis geeks s'en moquent. Comment imaginer que leur créature représentera 30 ans plus tard 82% du trafic Internet, formant la principale source de pollution numérique ? Pour l'heure, le streaming n'est qu'une opportunité de business.
Il faut déjà lui donner vie. Internet ne pollue pas encore. Le web s'est greffé sur le réseau téléphonique existant.
Du bon vieux cuivre, déjà bien en place. Pas besoin de passer des câbles ou de poser de nouvelles antennes. Ça ne pollue pas, tout est déjà là.
Mais c'est lent, très lent. Mille fois plus lent que la fibre. Peu de données, peu de fichiers.
Le web est sobre, raisonnable, limité par l'étroitesse des réseaux de télécommunication. La vitesse faible de connexion de l'époque permet de faire des choses plus rapides. On permet de lire du texte, très léger en données. Mais quand on veut transmettre de l'audio ou de la vidéo, qui sont des centaines de fois plus lourds, alors ça bloque.
Pour que le streaming voit le jour, la solution, c'est la compression. D'abord, il fallait numériser les contenus, donc prendre les contenus tels qu'ils existaient, les rendre numériques. Et une fois qu'on les avait numérisés, la taille qu'ils occupaient, pour les faire passer dans les tuyaux de l'époque, ce n'était pas possible.
beaucoup notre capacité transmission alors le l'astuce ça consistait à prendre la résolution existante le nombre de pixels qu'on avait dans une image les descendants donc on avait tendance à descendre la résolution des images qui voulait dire perdre de détails La compression rend les données légères, sobres, écolo, dirait-on aujourd'hui. Cette cure d'amégrissement est vitale pour le streaming s'il veut passer dans des tuyaux encore étroits. Elle s'applique d'abord aux fichiers son, grâce à un ingénieur allemand. J'ai fait de l'audio-technologie tout mon vie.
D'abord, je me suis demandé comment on pouvait transmettre des sons, de la musique, en transmetant les données le plus sereinement possible. Carl Heinz est à la tête d'un gang d'informaticiens du Centre de recherche en psychoacoustique de l'Institut Fraunhofer. Leur défi, alléger le poids d'un fichier son pour ne garder que les informations essentielles et agréables pour notre cerveau.
Une mission de toute première importance pour ce grand mélomane. J'ai un goût musique assez large, donc avec la musique classique, sur toutes les périodes, et avec la musique pop et rock, mais pas du hard rock. Pour mener ses recherches, il choisit une chanson qui sort de son catalogue, Tom's Diner de Suzanne Vega. J'ai lu dans une édition de la FF, que ce chanson de Suzanne Vega et que Susan Vega, Tom Steiner, a utilisé pour tester des paroles de son. Et j'ai pensé, voyons comment ça sonne avec ce procédé de début pour le MP3.
Et ça a sonné très bien. Ce morceau devient le maître étalon face auquel il va affiner son algorithme. il va l'écouter. Tellement l'écouter, pendant presque dix ans, jusqu'à ce que cette voix redevienne aussi pure que du cristal. Le MP3 est né.
Malgré les tympans meurtris par dix mille écoutes cauchemardesques, Karl restera ami avec Suzanne. Grâce au MP3, ce format doux pour les oreilles et léger en données, la compression devient la nouvelle obsession des ingénieurs. Il faut tout réduire pour s'offrir ce qui sera le plus bel argument de vente du streaming.
Sa vitesse. J'ai donc contacté mes amis des Mariners et je leur ai demandé si c'était OK si nous broadcastions un de ces streams en live. Et un de ces streams sur Internet. Et j'ai eu deux réponses, qui étaient, qu'est-ce que c'est ?
Et puis, quand j'ai expliqué ça, c'était comme, OK, c'est cool. Donc, nous avons pris un jeu qui s'est passé à être un jeu entre les Mariners de Seattle et les Yankees de New York. Dites-nous si vous avez apprécié cette première broadcast sur Internet. En écoutant sur le web mondial et l'Australie.
Nous avons dévoilé ce stream en live. C'était le premier stream que nous avons fait, je pense que c'était le premier stream en live de toute sorte. Et ça a devenu un moment historique pour l'Internet.
On l'a testé et on s'est rendu compte que ça fonctionnait. Mais les jeux de baseball sont longs, ils ont une durée de trois heures. Et il s'est arrivé qu'il y avait un bug dans notre software, que après deux et demi d'heures, on avait un overflow de buffer. Le streaming va corriger ses propres erreurs. Et même mieux, il va se rendre indispensable.
Comment ? Toujours grâce à Rob Glazer. Il va inoculer un virus qui va contaminer le web.
Hypnotiser les internautes, provoquer une avalanche de data et va émettre 25 ans plus tard 100 millions de tonnes de CO2 par an. Ce virus, c'est la vidéo. En 1997, Rial Player met en ligne sa première vidéo en streaming, un court-métrage réalisé par un grand nom du cinéma indépendant. qui est un très brillant mais aussi un individu indépendant, et lui a demandé s'il considérait faire ces vidéos courtes.
Et il a dit oui. Et nous avons dit, vous, vous filmez ce que vous voulez. Le troisième film, vous rencontrez un jeune génie, Savian Glover, star et chorégraphe qui apporte le funk, apporte le bruit.
Quand il a dit qu'il voulait interviewer Savian Glover, j'ai pensé, oh, d'accord, ça serait intéressant. Je suis sûr qu'il est un très intelligent, créatif gars. Mais ce qu'il fait, c'est des tap-dances. J'ai un ton dans ma tête. Je vais essayer de le produire par ma tête.
En vidéo, un mouvement a besoin de détails pour être fluide. La compression, c'est justement éliminer ces détails coûteux en données. Donc avec le flux ultra compressé nécessaire au streaming, ça finit en purée de pixels. Mais ils n'ont peur de rien, les gars de chez RealPlayer. On est en octobre 1997 et le streaming fait ses premiers pas, encore hésitant.
Et ça sacrifice l'audio et l'image qualité. Et on peut voir que c'est un peu jumpy, c'est beaucoup jumpy. Oui. Mais c'est le prix que vous payez pour le voir en temps réel.
Exactement. Alors, qu'est-ce que c'est que l'application ici ? C'est pour les hobbyistes ? Je ne vais pas me mettre ici pour une demi-heure et regarder un clip jumpy dans un verre de stampage posté, n'est-ce pas ? La même année est ratifié le protocole de Kyoto.
Pour la première fois, les pays signataires s'engagent à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Le web, lui, ne s'engage à rien et ne s'engagera jamais. A la fin des années 90, il est encore propre.
La compression fait mal aux yeux, mais elle sert de garde-fou. Elle tasse le stream, le compacte pour le faire rentrer dans les tuyaux. C'est l'infrastructure qui décide. Le contenu s'adapte et s'incline. La qualité aussi.
Mais à mesure que le web va grandir, la compression va devenir inutile et voler en éclats. Fini la modération. La bête est lâchée. Au début des années 2000, un nouveau mode de connexion fait son apparition et va permettre au stream d'asseoir sa suprématie sur Internet.
Son nom, le haut débit. 4 lettres, ADSL, qui accroissent la bande passante pour atteindre des vitesses 20 à 50 fois supérieures à celles d'un réseau classique. Ce que ça implique, c'est qu'on va pouvoir accéder à des contenus auxquels on ne pouvait pas accéder.
Donc le premier saut important, la première rupture, c'est la connexion au débit dans tous les foyers en France au travers de la généralisation de l'ADSL. L'ordinateur personnel fait sa place dans les foyers. On passe de 2,5 millions d'internautes en France et en Allemagne en 1995 à plus de 41 millions en 2001. Mois après mois, site après site, Internet prend des couleurs. Le web devient sexy. Toute la société se plonge dans cette nouvelle technologie tête baissée, les yeux fermés, soufflés par la vitesse du changement.
Le déploiement de la DSL nécessite la fabrication d'une nouvelle infrastructure. Une pluie de plastique et de cuivre s'abat sur le monde. On ouvre les vannes sans compter, comme aux plus belles heures des 30 Glorieuses.
Grâce à ce nouveau réseau enfin à sa mesure, libéré du carcan de la compression, le streaming va sortir du bois. Pour triompher des internets et nous inonder de contenus, il va d'abord apprendre de son grand frère, le téléchargement. C'est cette technologie qui va lui préparer le terrain.
De la fin des années 90 jusqu'au milieu des années 2000 en gros, voire même à la fin des années 2000 pour le grand public, c'est le téléchargement qui est le roi. Parce que ça marche bien, technologiquement c'est pertinent avec la bande passante du moment et tout le monde comprend comment ça fonctionne. les données sont lues en temps réel et nécessitent donc un débit constant.
Le souci, c'est que l'ADSL à ses débuts est certes rapide et fougueux, mais instable. D'où une lecture parfois hachée, qui gâche le plaisir. Quand on télécharge un film ou une chanson, on le transporte en entier d'un ordinateur à l'autre, de paire à paire, en anglais, peer-to-peer.
Ça peut être long, mais on est sûr que le fichier arrive. Une fois entièrement téléchargé, il est prêt à être lu d'un simple clic. On vivait dans l'ère de la rareté dans le 20ème siècle, c'est à dire que si je cherchais un disque, si je n'avais pas accès physiquement, je ne pouvais pas l'écouter tout simplement. Il fallait que j'aie un CD, qu'on me prête une cassette ou que j'entende ce morceau à la radio ou que j'aille voir un concert en gros. A partir du duo M-Dub.
MP3, pierre-tout-pierre sur Internet. Si j'ai envie d'écouter un morceau, je le cherche sur Internet et puis je peux le trouver. Donc ça, c'est une révolution complètement dingue. Le téléchargement impose une nouvelle norme sur Internet. L'offre sans limite.
Des millions de chansons s'échangent sous forme de fichiers grâce au MP3. Vous vous souvenez ? On l'avait laissé en Allemagne dans le casque de Karl-Heinz Brandenburg. Sa découverte a rendu la musique immatérielle, impalpable.
C'est une rupture dans l'histoire des arts. Devenue fluide, La musique s'écoule en continu. Le robinet s'ouvre et ne se refermera jamais. Le MP3 a préparé la philosophie. Les internautes devaient passer presque par le MP3, par le téléchargement, par l'idée de manipuler des fichiers pour comprendre intellectuellement l'idée du streaming, qui est de lire de la musique sur Internet.
Si on était passé directement du... du CD au streaming, probablement que ça aurait peut-être pas marché tout de suite en termes intellectuels parce que ça aurait été une rupture trop forte probablement et que le glissement par le téléchargement a permis d'avoir une sorte de sas technologique. nécessaires également intellectuellement.
Surtout, le téléchargement est gratuit. Il introduit un principe qui va être dévastateur pour l'environnement. Les datas échangées sur Internet n'ont aucune valeur. Imaginez un monde avec une essence gratuite. Zéro euro le plein de gasoil.
Au début des années 2000, c'est comme cela que le web se met à fonctionner. Un hypermarché culturel totalement gratuit, ouvert 24h sur 24, sans répit. Boosté par des forfaits eux aussi illimités, à quoi bouge le monde ?
ou bon éteindre son PC ou sa box. Les ordinateurs débordent de fichiers, la consommation électrique s'envole, les serveurs surchauffent. Ceux qui vont avoir la peau du téléchargement, ce ne sont pas des écolos inquiets. Les premiers à crier et à se faire entendre sont les défenseurs du copyright.
Dans un pays démocratique comme la France, il doit être sanctionné. Studio et Major vont mettre fin au téléchargement et faire du streaming de leur bouée de sauvetage, en proposant une offre payante et légale. Avec le téléchargement, le fichier atterrit dans l'ordinateur de l'internaute, qui en détient la propriété physique.
La maison de disques perd tout contrôle sur sa chanson. L'internaute peut alors partager le fichier à l'infini. Une chanson lue en streaming, elle, ne fait que transiter sur l'ordinateur de l'internaute, comme s'il la louait.
Il n'en devient pas propriétaire. Dès qu'elle a fini d'être consommée, elle disparaît. Sur le cadavre encore chaud du téléchargement, les majors placent un nouveau cerveau, celui du streaming.
Pour moins cher qu'un CD par mois et de façon totalement légale, le stream se vend sur des plateformes hyper léchées, au catalogue illimité. Un acquis du téléchargement sur lequel les internautes ne reviendront jamais. Désormais bien packagé, propre sur lui, il va pouvoir faire du cash pour les ayants droit et pour les plateformes.
Lancé en 2008, Spotify compte aujourd'hui 406 millions d'utilisateurs avec 82 millions de chansons. 60 000 nouvelles chaque jour. Spotify en 2020 a émis 169 000 tonnes de CO2, soit plus que l'industrie musicale américaine en 2000. La grande époque du CD, pourtant très gourmande en plastique. L'immatériel pollue plus que le matériel.
Le numérique salit plus que le physique. Le stream... révèle son vrai visage. Le constat est plus alarmant encore avec YouTube.
La plateforme émet au bas mot 11 millions de tonnes de CO2 par an, l'équivalent d'une ville comme Francfort ou Glasgow. Et dire que tout cela avait débuté devant de gentils éléphants. Cette petite vidéo est la première postée sur le site, le 24 avril 2005. Elle est tournée au zoo de San Diego, comme une ode à la biodiversité que YouTube va contribuer à faire disparaître. Le jeune homme qui crève l'écran, c'est Jawed Karim.
Derrière la caméra, Chad Hurley. Associés à Steve Chan, ces trois jeunes geeks sont les fondateurs du site internet lancé dans un garage. Ils mettent au point une technologie de lecture vidéo en temps réel, à destination du grand public. Leur trouvaille attire les investisseurs de la Silicon Valley. YouTube a fait un bon travail en faisant l'upload facile.
Mais le problème avec l'upload facile, c'est que beaucoup d'entre eux vont upload des choses qu'ils n'ont pas le droit d'uploader. Pour l'utilisateur, c'est gratuit, c'est simple et ça marche. Une popularité qui s'appuie sur le même ADN que le téléchargement.
YouTube c'est fondamentalement une plateforme de streaming et c'est fondamentalement une plateforme de streaming pirate. C'est ça qui est... en fait on l'oublie et on le rappelle pas, YouTube est une plateforme pirate, c'est à dire que personne n'a le droit de diffuser de la musique à tout le monde sur YouTube comme personne n'avait le droit de le faire sur Napster, sur La Moyeure, sur Emule.
C'est avec YouTube que le stream devient mainstream. Un contenu pirate, mais toléré, cohabite avec des vidéos légales et lucratives. Le streaming attaque sur deux fronts. Une offre double dose qui emporte tout sur son passage. Youtube est devenu la porte d'entrée du quotidien.
C'est là où on va regarder les extraits des matchs de foot avec les buts, c'est là qu'on va regarder la vidéo qui a été envoyée par la petite sœur, etc. C'est là qu'on regarde le monde se faire. Le stream s'immisce dans nos vies et se transforme en monstre.
Près de 6 milliards de vidéos sont consommées chaque jour. 4 millions par minute. On s'y perd, on s'y noie. Le streaming nous hape dans ses abysses. On se gave de data et l'on enlève.
gaspille presque autant. Si on coupait la vidéo quand on écoute une chanson, on pourrait réduire de 500 000 tonnes de CO2 son impact. Sauf que YouTube ne permet pas de couper une vidéo. YouTube veut toujours plus d'audience, de vues.
Comment trouve-t-on le temps de regarder autant de vidéos ? La faute à cet homme et son petit gadget qui va se vendre à 2 milliards d'exemplaires. Il va provoquer l'un des plus importants siphonnages de matières premières de l'ère moderne. iPhone. Ce qui fait sa force, c'est son pouvoir d'attractivité, sa facilité d'utilisation qui le rend addictif.
Il capte l'imaginaire du consommateur avec sa vision d'un futur plus glossy. La même année que l'iPhone, le GIEC présente son quatrième rapport. Comme Steve Jobs, les climatologues parlent de révolution.
Celle d'un monde où le réchauffement est sans équivoque, avec des températures en hausse de 2 à 4,5 degrés d'ici 2100. Pas de quoi faire dévier Rob, Steve et toute la Silicon Valley, toujours aussi ambitieux pour la créature. sur votre téléphone sans être connecté à la broadband. Cette révolution a évidemment pris l'Internet de tout le PC à tout le pocket. Cela l'a fait de plus en plus grand, de tant de façons, y compris en stream. Le smartphone fait sortir le monstre de sa boîte.
Le streaming colonise les moindres recoins de notre existence. En fait, ce qui est intéressant, c'est que les courbes d'utilisation du streaming suivent exactement... les courbes de déploiement de la 3G et des abonnements 3G et les courbes de pénétration aussi des smartphones. Les trois courbes sont super similaires parce que les trois technologies vont vraiment de pair et il faut attendre 2015-2018, c'est pas pour rien que c'est c'est pendant ces années-là que le streaming devient un grand public.
C'est juste que la technologie est mûre, tout le monde a un smartphone dans la poche et il n'y a plus qu'un. Au seuil des années 2020, le streaming a réalisé son rêve, celui de devenir la technologie reine. L'arrivée de la fibre confirme son triomphe avec l'avènement d'un nouveau service. La vidéo à la demande avec des plateformes comme Netflix ou Amazon Prime.
Le stream remplace le cinéma et la télévision. Il envahit le salon et devient un nouveau membre de la famille. Il a fait main basse. sur la culture.
Ce braquage technologique est permis par les vertus du stream. Connecté, ultra rapide, sans limite, il est le symbole triomphant de notre époque. Mais le prix de son succès saute au visage. Il engloutit 80% de la bande passante et recrache 100 millions de tonnes de CO2 par an. Autant que la République tchèque.
La tendance s'accélère. La totalité des vidéos pornographiques consommées en stream en 2022 rejettera 80 millions de tonnes de CO2. Autant que la production annuelle de CO2 en Belgique.
En 2025, le secteur du numérique approchera les 6% des émissions, presque autant que l'automobile. Cette pollution, à l'inverse de toutes les autres, ne se voit pas. Alors quand on fait du streaming, en fait qu'est-ce qui se passe ?
On récupère des données en temps réel, ou quasi réel, qui viennent d'un endroit distant. Ces données, elles ne circulent pas dans l'air en fait. Elles ont besoin d'un support physique pour circuler. On a un peu une espèce de pensée magique autour du fait que le numérique c'est virtuel. D'ailleurs il y a tout un tas de mots, il y a tout un vocabulaire qui est associé à ça, qui nous laisse dans cette pensée.
Il y a le mot virtuel, il y a le mot cloud par exemple, qui nous donne l'image d'une nuage tout blanc, tout pur. Ce nuage n'est pas rempli de fines particules d'eau. Il est composé de millions de kilomètres de câbles, d'antennes, d'ordinateurs, eux-mêmes truffés de métaux et de plastique.
Le cloud, c'est une technologie qui s'est développée à partir des années, on va dire, 2010 et qui permet de virtualiser l'informatique. C'est- à-dire que pour une entreprise qui avant avait ses propres serveurs et stockait ses données chez elle, ça lui permet, en fait, via l'accès à Internet, d'avoir... ses données hébergées ailleurs, chez un prestataire, mais également son système informatique. Tous ces fichiers migrent dans des centres de données.
Les illusionnistes du marketing maquillent le phénomène et travestissent la réalité en lui donnant le nom de dématérialisation. On appelle ça un nuage. Un nuage, c'est voluptueux, c'est léger, c'est naturel, c'est essentiel. On a tout gagné.
C'est la plus belle invention marketing, je pense, du monde moderne, de manière générale. La dématérialisation, c'est fabuleux. Parce que finalement, le cerveau humain n'est pas câblé pour ressentir des dangers que les sens ne peuvent pas percevoir.
Les data centers sont le rouage essentiel du streaming, le cœur de son réacteur. Bunker froid, pollueur sans odeur, Ils sont responsables à eux seuls de 25% des émissions de gaz à effet de serre de l'ensemble du secteur numérique. Quand on va lancer une vidéo en streaming, les toutes premières secondes de votre vidéo vont être...
On va charger sur un datacenter qui est très près de chez vous. Le temps que ces données arrivent, un autre datacenter, un peu plus gros, un peu plus loin, va charger le reste. Et pendant ce temps-là, un troisième, encore plus loin, va charger tout le reste de votre film ou de votre vidéo. Pour satisfaire tous les internautes, les centres de données sont répartis partout à la surface du globe. En moyenne, une data parcourt 15 000 km.
Et comme les voitures, plus elles roulent, plus elles consomment. Quand on transporte de la donnée d'un point à un autre sur Terre, on va traverser tout un tas d'équipements, qui sont des équipements réseaux et qui sont branchés électriquement. Et donc, si on a une longue distance, en général, en moyenne, on va avoir plus d'équipements et donc ça va coûter plus cher en énergie. ça coûte plus cher en énergie et donc ça génère plus de gaz à effet de serre. Pour notre confort, et traquer la moindre milliseconde d'attente avant le lancement d'une vidéo, ces serveurs tournent 24h sur 24, 7 jours sur 7. Un tel effort nécessite des climatiseurs très gourmands en énergie qui viennent refroidir la machine.
Tout cela commence à peser sur les réseaux électriques. Aujourd'hui, par exemple en France, le numérique c'est 8 à 10% de la consommation électrique totale, donc c'est quand même déjà beaucoup. C'est même plus que la consommation de la ville de Lyon.
Mais l'essentiel se situe davantage dans la qualité que dans la quantité. Cette électricité, il y en a de la plus ou moins clean. Selon le mix énergétique, on passe du tout au tout. On sait qu'en Chine, le charbon est extrêmement utilisé pour les industries numériques.
On sait aussi que sur la côte est des Etats-Unis, dans les secteurs de Virginie, vers les Appalaches, etc., l'énergie charbon est aussi extrêmement utilisée encore. Donc on a effectivement du data center le plus dirty jusqu'à celui qui est le plus propre. Les data centers de dernière génération sont immenses.
On les appelle les hyperscale. En mutualisant les équipements, ils consomment moins et réduisent drastiquement leurs émissions. Bravo à eux !
Reste un souci, leur localisation. Le premier critère pour les data centers, c'est de se situer près d'une source d'électricité puissante. C'est-à-dire d'être sûr d'avoir beaucoup de puissance pour longtemps, pour pouvoir grandir et pour pouvoir accueillir de plus en plus de clients. Ça peut poser problème pour d'autres entreprises, ou d'autres industries, ou d'autres activités qui auraient besoin d'une puissance électrique et qui du coup n'en auraient plus la possibilité. La preuve en Irlande, une île plutôt accueillante fiscalement pour Microsoft, Google et Amazon.
Ces géants américains sont venus s'implanter en masse. D'ici 2030, il pourrait y avoir une centaine de data centers. Ils risquent de pomper à eux seuls 70% de la consommation électrique irlandaise. Ils voient bien que s'ils continuent à accueillir des data centers, en fait, il n'y aura pas assez de capacité de production, donc ce ne sera juste pas possible. Et ils ne peuvent pas enlever de la production électrique des habitants pour des data centers.
Le streaming va-t-il provoquer un blackout géant ? On peut toujours compter sur les géants du numérique pour disrupter tout ça. Leur nouveau chantier ?
Produire eux-mêmes leur propre électricité. Facebook et Apple se sont mis ensemble pour construire des fermes solaires. Apple a construit des petits barrages hydrauliques aussi. Donc il y a quand même aussi quelque chose qui se passe, qui peut être inquiétant pour les opérateurs énergétiques aux Etats-Unis, c'est que Google, Apple, etc. sont devenus des spécialistes de l'énergie et pourraient devenir même des opérateurs énergétiques s'ils le souhaitaient.
tellement fort sur toutes les régulations, sur la production, sur toutes ces dimensions-là qu'il pourrait clairement remplacer ces transopérateurs traditionnels qui sont un peu à la traîne et qui sont encore un peu trop charbon. La sobriété devait être une solution. Les géants du numérique proposent l'inverse. Toujours plus de données, d'équipements. Le streaming implique un gros déploiement de l'infrastructure et un développement de l'infrastructure.
bâti en fait, que ce soit les centres de données, que ce soit les antennes, etc. Donc tout ça repose sur le fait qu'on continue à développer les réseaux, qu'on continue à développer la fibre, qu'on continue à développer les réseaux mobiles. Et par la suite, sûrement pour quelques entreprises américaines, le fait qu'on déploie des réseaux satellitaires basse orbite.
Et toujours plus de gadgets. Le streaming se regarde sur des smartphones, des ordinateurs, des tablettes, des téléviseurs, bref, des objets au bilan carbone épouvantables. Dans un smartphone par exemple qui peut être le terminal avec lequel on écoute de la musique ou on regarde une vidéo, dans un smartphone on a entre 40 et 60 matériaux différents. On a en gros une quarantaine de minerais. Et donc ce qui coûte cher aujourd'hui d'un point de vue environnemental, c'est l'extraction des minerais.
Ouvrons la boîte noire pour y voir de plus près. On a les classiques. Le nickel, l'argent, l'or, le cuivre, l'aluminium, l'étain et le plomb. Des éléments chimiques moins communs et aux noms rigolos, comme antimoine, lithium, cobalt, brôme et indium. Et enfin, des terres rares, comme leur nom ne l'indique pas du tout, sont des métaux, très durs à extraire, et dont les ressources périclites à vue d'œil.
Leurs noms ? Néodyme, lantane, terbium et autres. Tout ça, c'est en quantité minuscule dans nos appareils. Pour fabriquer une barrette mémoire d'un gramme, on a besoin de 16 000 fois son poids. Pour fabriquer une voiture, on a besoin de 54 fois son poids.
Et donc il n'y a rien qui soit aussi intensif en matière première, parmi tout ce qui est fabriqué par les êtres humains, que le cœur des composants électroniques qui sont ceux qu'on utilise, notamment dans le réseau, mais aussi dans d'autres appareils avec lesquels on va pouvoir bénéficier du streaming. Le téléviseur par exemple. Cet objet préhistorique qui tente de résister à l'envahissement de l'ordinateur dans le salon. En plus de sa consommation électrique 100 fois supérieure au téléphone, sa fabrication est archi-polluante du fait de sa taille.
Avant même de l'allumer, le mal est fait. 80% de son impact environnemental est déjà présent. Une vidéo en streaming possède trois sources de pollution. La première a pour origine les data centers à hauteur de 25%.
La deuxième provient des infrastructures réseau. Câbles, antennes, relais, et équivaut à 28%. La troisième, la plus importante, concerne l'objet avec lequel on regarde cette vidéo, à la fois sa fabrication et sa consommation électrique.
47%, soit près de la moitié des émissions de gaz à effet de serre. Heureusement pour notre petite conscience écologique, La scène du crime se situe en Asie et en Afrique. Donc en fait, tout ce qui est très polluant, c'est loin de chez nous. Donc nous, qu'est-ce qu'on voit ?
Nous, on voit nos smartphones ou nos ordinateurs avec cette belle vitre toute polée. propre, tellement propre qu'on passe notre journée à passer notre doigt dessus. Et c'est tout. Et à la fin, on s'en débarrasse et voilà.
Donc on n'a aucune expérience de la réalité vraiment matérielle de cet objet. On nous pousse tout le temps à changer de modèle alors qu'il faudrait les maintenir en état le plus longtemps possible. Au moindre accro, on s'en débarrasse. L'espérance de vie dépasse rarement les 18 mois alors qu'il faut se débrouiller. fonctionne encore très bien.
On est entraîné dans une fuite en avant du toujours plus beau, plus de pixels, plus rapide, plus adapté, mieux connecté. Porté par cette obsolescence de perception, nous jetons sans jamais regarder derrière nous. Ces anciens appareils aujourd'hui on sait très mal les recycler. On recycle à peu près une vingtaine de pourcents et sur les métaux rares en eux-mêmes c'est à peu près 1%. C'est très difficile de recycler des métaux rares.
Si je vous donne un exemple c'est comme une miche de pain. Vous avez la farine, la levure, le sel, l'eau, et je vous la donne et je vous dis, tu me sépares ces quatre éléments, s'il te plaît. Ça n'est pas possible. On recycle très peu et très mal.
On ne récupère qu'une petite partie, avec des méthodes aux conséquences environnementales et sanitaires désastreuses. À chaque rupture technologique, l'histoire se répète. Quand la 3G est apparue, il a fallu remplacer tout le parc de téléphones existants inadaptés à cette nouvelle norme. Même chose avec la 4G, et avec toutes les générations à venir. Et je suis assez sidérée de voir qu'on n'en parle pas plus que ça, parce que c'est le quotidien.
Aujourd'hui on passe à la 5G, très bien, ça va aider pour plein de secteurs. Par contre, personne ne parle de l'enjeu du recyclage. Ah oui, le recyclage, c'est tout ce qu'on dit.
Et finalement, des acteurs comme moi, on sait parfaitement où est-ce que ça atterrit. Faute de recyclage, on puise toujours plus profondément dans les mêmes gisements. Ces ressources naturelles ne sont pas infinies. Certaines études affirment que d'ici 30 à 50 ans, il n'y aura plus assez de minerais pour fabriquer des équipements informatiques.
On a un usage totalement immodéré du numérique, sans limite. Et donc pour cette dernière nuit d'ivresse numérique, d'une certaine façon, nous sommes en train d'handicaper la capacité de nos enfants ou des générations à venir à utiliser elles aussi le numérique, puisque c'est une ressource critique, non renouvelable, donc en quantité finie. La maison brûle. Le streaming doit-il se consumer avec elle ? Parce qu'il n'est pas une simple technologie, le streaming mérite d'être sauvé.
Il révolutionne notre façon de communiquer, de créer, de travailler. Chacun est potentiellement diffuseur de contenu, sans intermédiaire, comme les chaînes de télé et les réseaux. Les radios, les labels, les studios. Le stream offre au web son printemps culturel. Le streaming est une avancée technologique passionnante pour l'accès à la musique.
Moi je vois des jeunes adultes qui ont 20 ans et qui ont une connaissance de la musique. Je trouve ça génial, vraiment, qu'on puisse accéder à de la pop coréenne et du rap nigérian et de la folk mexicaine très facilement. Des tutos de vulgarisation scientifique aux conférences, en passant par les cours en ligne, le streaming réalise toutes les promesses d'Internet comme source d'accès au savoir universel. Moi je sais que j'ai des mômes. Ils m'ont fait découvrir des choses sur YouTube que je ne soupçonnais pas.
Des gens qui faisaient de la médiation scientifique en recherche sur YouTube, des YouTubeurs ultra talentueux qui diffusent des articles de recherche. des mômes de 14 ans, 16 ans qui regardent ça, ces gens-là, ils le font mieux que nous-mêmes, les chercheurs. Mais ils connaissent la recherche.
Moi-même, j'ai appris des choses en regardant, je suis devenu consommateur de ça. Je m'attendais. Donc, ce n'est pas que les chats, YouTube. Dans un futur proche, le streaming peut même se transformer en allié contre le changement climatique. Le GIEC l'a bien compris avec sa propre page YouTube.
Outil de travail des scientifiques, le stream sert de porte-voix à leur recherche, de mégaphone pour alerter sur l'urgence écologique. Le streaming est une formidable technologie dans un ensemble de situations critiques. C'est aussi une formidable technologie quand on est en pleine pandémie pour continuer à fonctionner, pour continuer aussi à accéder à de la culture, etc.
Le sujet, c'est l'usage raisonnable du streaming. C'est ça le sujet. Le stream est nécessaire.
Il doit donc devenir vert. Comment le domestique-t-on ? C'est le terme. Aucune sphère de notre existence n'échappe à son bilan carbone. Logement, vêtements, alimentation, transports...
Tous ces secteurs visent l'efficacité environnementale. Le streaming, comme le reste du numérique, s'affranchit de cette nouvelle norme. On brûle de la data sans compter.
Notre gaspillage n'est pas qu'alimentaire, il est aussi technologique. L'heure est venue pour le stream de rentrer dans le rang. La sobriété appliquée au streaming, ce n'est pas non plus le retour à l'âge de pierre, ce n'est pas non plus le goulag, ce n'est pas de l'écologie punitive, c'est simplement être raisonnable.
Et donc quand on regarde une émission où la qualité de l'image, par exemple, n'est pas absolument prépondérante, je peux... peut peut-être le regarder en haute définition plutôt qu'en 4K. Ça sera tout à fait suffisant pour suivre un journal télévisé. Le stream nous a convertis à l'immédiateté.
Plus besoin d'attendre pour regarder un programme. Il abolit les horaires et doit commencer quand on veut, c'est-à-dire tout de suite. C'est tellement génial, c'est tellement pratique, c'est tellement chouette le streaming, parce que c'est vrai que c'est vraiment pratique et que c'est vraiment chouette.
Cette instantanéité et le fait de pouvoir consommer des dizaines de milliers de films documentaire comme ça en claquant des doigts. Il y a un côté magique, un côté super pratique. Et donc, on a envie de pouvoir continuer ces usages-là, quand bien même, on commence quand même à prendre conscience que ça a des impacts absolument délétères sur l'environnement.
Miroir de nos propres excès sur Internet, le streaming nous a rendus plus impatients que jamais. En passant de la 2G à la 3G, puis à la 4G, les vitesses de connexion s'accélèrent. A chaque fois, un nouveau réseau est déployé, avec des nouvelles antennes, de nouveaux serveurs, un nouveau parc de téléphones.
On détruit la planète pour gagner quelques millisecondes. On évolue toujours vers des réseaux de plus en plus puissants, des 5G, 6G, 8G, on va y arriver, parce que la bande passante doit être toujours plus grande ou toujours plus efficace pour plein d'enjeux. Parce qu'on est dans l'ère de l'instantanéité, on est dans la tyrannie du maintenant, tout de suite, et qu'on veut effacer toute l'expérience nécessaire de la frustration, de l'attente, de l'ennui. Rien ne semble l'arrêter.
Le streaming dans sa toute puissance nous abreuve jusqu'à l'écœurement, nous impose une boulimie de contenu. Binge-watcher une série non-stop pendant 8 heures est devenu la norme. Le streaming n'a plus de fin. Sur Twitch, un streamer a dépassé 500 jours en live stream. Les données envahissent nos vies.
Et ce n'est qu'un début. Le Métaverse promet dans un futur proche un monde parallèle, immersif et virtuel. Chacun évoluera derrière un avatar ou un hologramme pour jouer, travailler, discuter, apprendre.
Dans cet univers tout numérique, le streaming règnera en maître, parachevant sa conquête de nos existences. De simples outils d'accès à la culture, le streaming devient un mode d'interaction sociale. D'abord, la ressente de présence.
C'est la qualité définitive du Métaverse. Vous allez vraiment vous sentir là avec d'autres personnes. Vous verrez leurs expressions faciales, leur langue de corps, peut-être vous verrez s'ils sont en train de tenir une main gagnante. Reste une certitude, la data coule à flot et nous étouffe. Aujourd'hui on pourrait dire qu'au niveau du numérique, on se situe comme avant le choc pétrolier des années 70 quand on a eu en gros une hausse très importante des prix et que tout le monde s'est rendu compte qu'il fallait changer de modèle.
La data, elle semble gratuite, infinie. On ne se rend pas compte de l'impact que ça a. On est complètement captif de toutes ces données.
Donc on est dans un système aussi de plus en plus complexe de gestion de tout par la donnée. Et on n'a pas effectivement encore vécu de choc numérique qui permettrait peut-être de se dire, changeons de méthode. Le streaming a besoin de prendre une nouvelle direction. de se diriger vers un modèle plus économe où la data est ni gratuite ni illimitée. Et en finir avec cette idée que le numérique est immatériel.
Ça fait 30 ans qu'on nous fait croire que ça n'a pas d'impact en fait. Et comme n'importe quelle industrie, ça a un impact. Et du coup, comme n'importe quelle industrie, il faut aussi le réguler, il faut aussi le maîtriser et il faut le faire rentrer dans un cadre dans lequel c'est soutenable. À l'heure où chaque degré compte, où les citoyens sont appelés à réduire leur bilan carbone, les acteurs du numérique, eux, avancent comme s'il n'y avait pas de dérèglement climatique.
Le streaming, aveuglé par sa croissance, s'envole sans se soucier de sa propre pollution. On a besoin de savoir en temps réel ce que ça coûte quand on a une action, quand on a un geste numérique, qu'est-ce qu'il coûte. Ce genre de connaissances va être indispensable si on veut arriver à des neutralités carbone.
dont on parle, si on veut arriver à la protection de l'environnement et à respecter les recommandations du GIEC, il va falloir qu'on en passe par cette éducation et par cette capacité outillée des citoyens à savoir exactement ce qu'ils sont en train de faire et l'incidence que ça a. Comme l'interdiction de la paille ou du sac plastique, des petits gestes peuvent faire le plus grand bien pour la planète. Vous pensiez pomper de la 4G à pleine balle ? C'est préférable d'opter pour le Wi-Fi, qui utilise trois fois moins d'énergie. Plutôt que regarder en streaming des films ou des séries en 5G dans les transports, mieux vaut les télécharger avant.
Lors d'un visio, sachez que les effets vidéo comme les fonds flous ou les oreilles de chat très gourmands en données ne sont pas indispensables. Si vous pouvez couper la vidéo, c'est encore mieux. Mais le plus important, prenez soin de vos appareils. Ne les jetez pas.
Si vous changez, prenez des plus réparables. Pour les cinéphiles, passez au rétroprojecteur. Le vidéoprojecteur, sur la phase d'utilisation, va consommer plus d'électricité, donc aura plus d'impact environnemental sur la phase d'utilisation.
Mais sa fabrication est tellement moins impactante que celle d'un écran à diagramme. identique, qu'il vaut mieux utiliser un vidéoprojecteur. Nos téléphones, tablettes et ordinateurs sont les premiers émetteurs de gaz à effet de serre du numérique. Ils n'ont pas l'air comme ça, si beaux, si lisses.
Ce sont pourtant d'affreux pollueurs ultra énergivores, que l'on garde au chaud dans nos poches et que l'on rachète dès qu'on peut. Il faut absolument réduire la consommation d'équipements, c'est sûr. Il faut que ça dure plus longtemps. On ne peut pas vivre dans un monde dans lequel des smartphones vont durer que 2 à 3 ans.
Ce n'est pas normal. Et utiliser des ressources pour faire ça, c'est quand même pas réfléchir sur ce qu'on aura disponible dans les prochaines années. Comment faire pour les préserver quand les systèmes d'exploitation changent en permanence, rendant obsolètes des appareils qui fonctionnent encore ? Quand les algorithmes de compression nécessitent des processeurs toujours plus avancés techniquement ?
Quand le coût de réparation de ces objets de haute technologie côtoie ceux d'un appareil neuf ? Ne devrait-on pas changer notre relation au contenu numérique ? Ralentir la frénésie, circonscrire son usage dans le temps et dans l'espace, y chercher autre chose ? Moins de gavage, plus d'appréciation.
Comment faire durer un équipement ? Qu'est-ce que ça veut dire pour l'ensemble de mes usages ? Comment en fait, j'entre dans une autre relation avec le numérique, avec l'écosystème numérique, dans le sens où un téléphone qui est moins puissant, tu développes moins d'usage, ou en tout cas, t'es moins sur ton téléphone, parce qu'en fait c'est plus lent, etc. Et finalement tu dis, bon, est-ce que j'ai besoin de tout faire par le numérique ? En 2025, le streaming fêtera ses 30 ans.
La même année, le GIEC prévoit le franchissement de la barre des 1,5 degrés de réchauffement climatique. Et si le stream pouvait enfin écouter le GIEC ? Ils sont de la même génération.
30 ans, c'est l'âge de raison. Si le stream ne se régule pas seul, il faut l'aider et éventuellement l'encadrer par la loi. Il n'y a pas de recette miracle.
Un stream plus propre, c'est avant tout moins de stream. À l'heure où Internet pollue plus que l'aviation, et bientôt plus que l'automobile, n'est-ce pas l'heure de se désintoxiquer ? Mais demander aujourd'hui aux internautes d'être raisonnables, c'est un peu demander à un fumeur d'arrêter la cigarette, tout en posant une cartouche dans son salon. Moi je ne crois pas vraiment à cette idée de dire aux gens faites attention, soyez responsables à votre consommation. Il faut plutôt poser la question aux entreprises et se poser la question à nous en tant que société.
Qu'est-ce qu'on demande aux entreprises ? Et il faut que les politiques se saisissent je pense du sujet pour voir qu'est-ce qu'on autorise, qu'est-ce qui est pertinent, qu'est-ce qui fonctionne bien technologiquement, qu'est-ce qui est économe. Il y a plein de progrès possibles. Aujourd'hui on ne les fait pas parce que...
Parce que la puissance informatique est tellement disponible et c'est pas cher, qu'en fait on n'a pas de raison de le faire au niveau du marché. Mais il y a plein d'options qui sont là, qui sont possibles, qui sont sous la main. Et le jour où ça deviendra soit rentable, soit vital, elles seront là et elles seront prises en main, je pense. La technologie n'est qu'un outil à notre service. À nous de lui redonner sa juste place, alignée avec nos besoins.
Pas ceux que l'on nous vend, mais ceux qui nous permettent de maintenir un équilibre entre préservation des ressources et ce délicieux plaisir du clic.