En 1965, la chaîne NBC diffuse cette interview. Maintenant je suis devenu la mort, le destructeur des mondes. Ce sont ces mots, issus des textes sacrés hindous, qui viennent à l'esprit de Robert Oppenheimer ce 16 juillet 1945, lorsqu'il vit exploser sous ses yeux Trinity, la première bombe atomique de l'histoire. Pendant la Seconde Guerre Mondiale, bien loin des champs de bataille, les scientifiques les plus brillants de leur époque ont travaillé dans le plus grand secret à fabriquer l'arme la plus puissante jamais conçue, la bombe atomique.
Mais d'où vient l'idée de la bombe atomique ? Comment est-ce que les américains ont été convaincus d'investir des milliards dans le projet ? Comment est-ce qu'elle a été fabriquée ?
Et surtout, est-ce qu'elle a vraiment permis de mettre fin à la guerre ? Pas si sûr. Déjà, l'idée de créer une arme utilisant l'énergie atomique, ça date clairement pas de la seconde guerre mondiale. Bien avant d'être un programme d'armement, ça a surtout été pendant longtemps un fantasme de chercheurs dans les universités. Pour comprendre ça, il nous faut revenir au début du 20ème siècle.
A cette époque, ça fait déjà un moment que l'on connait les atomes, c'est ce qui nous compose nous mais aussi tout ce qui est autour de nous. Au début des années 1900, les physiciens imaginent l'atome comme une sorte de petit système solaire. Avec en son centre un noyau et des électrons qui gravitent autour. Le noyau d'un atome est composé de deux éléments, des protons et des neutrons. Bon, normalement, si vous avez suivi des cours de physique jusqu'au collège, vous n'êtes pas trop perdu.
Dans les années 30, les physiciens comprennent donc un peu mieux comment fonctionnent les atomes. Mais le casse-tête ne fait que commencer. Une nouvelle avancée importante a lieu en 1938. Problème, cette découverte est faite en Allemagne où les nazis sont au pouvoir. Le chimiste Otto Hahn et son assistant Fritz Strassmann découvrent que si l'on bombarde un noyau d'uranium avec des neutrons, il est possible de le casser en deux. Communiquant par le biais de lettres avec la physicienne autrichienne Liz Meitner et son neveu Otto Frisch, tous deux sont en train de se faire enlever.
exilés en Suède pour échapper au nazisme, tous arrivent à la même conclusion. En se basant sur les récents travaux d'un certain Albert Einstein, ils appliquent la formule E égal à mc2 et découvrent que l'uranium perd de la masse lorsqu'il se fissure. En gros, les deux morceaux d'atomes qui viennent de se casser sont devenus plus légers que lorsqu'ils ne formaient qu'un.
Et comme c'est impossible que cette masse disparaisse totalement, c'est bien qu'elle s'est changée en quelque chose d'autre. Cette chose, c'est de la chaleur et de l'énergie cinétique, autrement dit une explosion. Otto Hahn et son comparse viennent de réaliser une fission nucléaire.
D'autres découvertes suivent. Début 1939, plusieurs physiciens, dont le français Frédéric Joliot-Curie, observent que la fission de l'uranium projette des neutrons capables à leur tour de briser d'autres noyaux et ainsi de suite. C'est-à-dire que l'on peut créer une réaction en chaîne.
Et logiquement, plus la réaction en chaîne est grande, plus l'énergie dégagée est importante. Mais on découvre aussi que cette fission ne se contente pas que de libérer de l'énergie. Elle émet aussi de la radioactivité.
C'est là... que le monde scientifique prend conscience de deux possibilités. Si cette réaction en chaîne est contrôlée, alors ça veut dire que l'on pourrait canaliser l'énergie produite. C'est ce qui donnera quelques années après les centrales nucléaires, où c'est la chaleur dégagée par la fission d'atomes d'uranium qui permet de créer de l'électricité.
Mais, si on décide de créer une réaction en chaîne non contrôlée, alors on pourrait obtenir une arme dévastatrice. En Allemagne, Hitler est au pouvoir depuis 1933, et une partie de la communauté scientifique n'a alors qu'une crainte, que les nazis puissent un jour fabriquer une arme utilisant la fission atomique, car les nazis s'intéressent eux aussi à l'atome. Dès le mois d'avril 1939, les nazis lancent le projet Uranium, un vaste programme de recherche atomique supervisé par l'armée allemande.
C'est pourquoi, à la veille du déclenchement de la seconde guerre mondiale, plusieurs scientifiques décident de solliciter le gouvernement américain. Mais pourquoi l'Amérique ? Et bien c'est assez simple.
Sous la présidence de Franklin Roosevelt, au pouvoir depuis 1932, le... Le pays est en train de se relever doucement de la crise économique de 1929. L'Amérique a une main d'oeuvre qualifiée, beaucoup d'argent et de gros moyens matériels. Les Etats-Unis sont donc le meilleur choix, surtout qu'ils ont l'avantage d'être à des milliers de kilomètres de la menace allemande.
C'est pourquoi un petit groupe de physiciens, dont Leo Szilard, réussissent à convaincre Einstein de signer un courrier destiné à Roosevelt, ce qu'il fait le 2 août 1939. Dans leurs lettres, ils informent le président américain des risques que représente la réaction en chaîne de l'uranium, qui pourrait conduire à la création d'armes extrêmement puissantes. D'après eux, une seule bombe pourrait être capable d'anéantir une ville taïwanienne. moyenne. Il donne également à Roosevelt une information cruciale et plutôt inquiétante. L'Allemagne a récemment interrompu la vente d'uranium.
Il semble que les allemands se soient récemment découvert un besoin en uranium, dont ils ont acquis de grandes réserves après avoir annexé la Tchécoslovaquie. Cela ne veut dire qu'une chose, les scientifiques allemands font déjà eux aussi de la recherche atomique. A ce stade, personne ne sait si la création d'une bombe serait possible, mais on préfère pas prendre de risque.
on connaît déjà l'uranium 238 qui est le plus abondant. Mais on pense qu'il n'est pas possible de créer une arme avec. En revanche, un autre isotope plus facilement fissible, l'uranium 235, pourrait fonctionner.
Problème, pour l'obtenir, il faut enrichir du 238. Et ça c'est un procédé qui est très coûteux et très dangereux, surtout qu'à cette époque, on n'est même pas sûr que l'on puisse vraiment en fabriquer. Einstein et d'autres scientifiques réclament donc aux américains un soutien financier et matériel dans la recherche atomique. Bon Vous l'aurez d'ailleurs compris, contrairement à ce que l'on peut entendre parfois, non, Einstein n'a pas inventé la bombe atomique.
Il a juste signé une lettre pour Roosevelt, qui a été l'impulsion qui a conduit au projet Manhattan. Par la suite, il a d'ailleurs avoué avoir regretté écrire cette lettre. Sa lettre envoyée en août, Einstein ne recevra une réponse qu'en octobre, après qu'Hitler ait lancé son invasion de la Pologne. Après ça, quelques programmes sont donc lancés aux Etats-Unis, mais rien de très ambitieux pour le moment. Le seul vrai changement pour le moment, c'est la censure de toutes les publications scientifiques qui ont plus ou moins un rapport avec la recherche dans le nucléaire.
Le but est d'éviter d'éveiller les soupçons des puissances étrangères qui pourraient penser que l'Amérique développe une arme atomique. Pendant que l'Allemagne met à genoux une partie de l'Europe, elle met la main sur les réserves d'eau lourde de la Norvège, élément essentiel à leur recherche atomique. Au même moment, en Californie, les physiciens de l'université de Berkeley développent une alternative à l'U. l'uranium 235, le neptunium, un métal radioactif. En février 1941, après quelques années de recherche, le chimiste Glenn Cyborg décide d'enrichir le neptunium et réussit à créer pour la première fois du plutonium.
On découvre ensuite rapidement que ce plutonium peut lui aussi être fissible tout comme l'uranium 235. Et en plus de ça, la production de plutonium est beaucoup plus simple et moins cher que l'uranium. Mais pour le moment, tout ça reste très théorique. Le gouvernement américain a subventionné quelques programmes par-ci par-là, mais pour le moment ça reste très timide. En même temps, pourquoi faire ? L'Amérique est ultra isolationniste, et on parle quand même d'une guerre qui a lieu hyper loin.
Y'a vraiment aucune raison qui pourrait pousser l'Amérique à développer en urgence une bombe atomique. Vraiment aucune. Ouais, j'ai peut-être parlé trop vite.
Le 7 décembre 1941, l'attaque japonaise contre la base américaine de Pearl Harbor à Hawaii jette les Etats-Unis dans la Seconde Guerre Mondiale. Immédiatement, le gouvernement américain mobilise tous ses scientifiques pour concevoir des innovations pour la marine, l'armée de l'air et l'infanterie. Mais le département de la défense souhaite aussi se doter de cette nouvelle arme surpuissante dont parlent les physiciens, bien qu'elle soit encore hypothétique. C'est le début, en 1942, d'un programme top secret pour mettre au point une arme atomique.
Nom de code, projet Manhattan. A sa tête, le général Leslie Groves, du corps des ingénieurs militaires. Il obtient de suite des moyens matériels et financiers considérables. Avec un budget de 2 milliards de dollars étalés sur 5 ans, une somme titanesque pour l'époque, Groves va mettre en place un archipel d'usines, de laboratoires et de bases militaires sur tout le territoire américain.
Le projet va évidemment nécessiter des dizaines de milliers de personnes à travers tout le pays. Mais il faut bien comprendre que la plupart des gens qui travaillent dessus ignorent sa finalité. Les gens connaissent le strict nécessaire pour accomplir leur tâche.
Et c'est tout. D'ailleurs, je suis tombé sur l'anecdote d'une femme qui, des années après le projet Manhattan, a découvert, en allant dans un musée, une photo qui était pour une exposition consacrée au projet Manhattan, une photo sur laquelle elle apparaissait, alors que jusque-là, elle ignorait totalement qu'elle avait travaillé sur le projet. La plus grande crainte de Groves, c'est l'espionnage, aussi bien allemand que soviétique. C'est pourquoi il fait installer les infrastructures du projet Manhattan dans des endroits isolés.
La principale usine de plutonium est établie à Hanford dans les montagnes de l'état de Washington. Et pour enrichir l'uranium produit, un complexe secret est bâti à Oak Ridge dans le Tennessee. Pendant qu'au même moment, une grande partie des travaux de recherche sont conduits à l'université de Chicago. C'est là que le scientifique italien Enrico Fermi parvient, le 2 décembre 1942, à obtenir la première réaction en chaîne contrôlée dans une pile de graphite et d'uranium. Le procédé est ensuite immédiatement repris et répété par les équipes du projet Manhattan.
Mais cette bombe, il faut ensuite l'assembler. C'est là qu'est construit un immense laboratoire d'assemblage en plein milieu du désert du Nouveau-Mexique, à Los Alamos. Lieu totalement secret, le complexe de Los Alamos, surnommé le site Y, ne figure sur aucune carte. Pourtant, c'est en fait une véritable ville qui sort de terre en...
en quelques mois. On y trouve des laboratoires, des ateliers où travaillent et vivent des milliers de personnes, scientifiques, militaires, ouvriers et employés de bureaux. Tout est fait pour que l'existence du site reste secrète, et de nombreux messages rappellent aux habitants que tout ce qu'ils font et voient doit rester ici, et de prendre garde à ce qu'ils écrivent ou disent à cause du risque d'espionnage.
A partir de février 1943, Groves place à la tête du programme la figure de pro de la physique américaine, un certain Robert Oppenheimer. Et ce, malgré son passé plutôt ambigu de militant de gauche. Ouais, faut aussi que je vous raconte ça. Né en 1904, il est élevé parmi la bourgeoisie juive et progressiste de Manhattan.
Après avoir obtenu son diplôme de chimie, puis avoir passé son doctorat de physique à Cambridge, en Angleterre, il part ensuite poursuivre sa formation en Allemagne à Göttingen. où il est témoin de la montée du nazisme et de l'antisémitisme. Mais protégé par son statut d'étudiant étranger, il évite les ennuis.
De retour aux Etats-Unis, il mène plusieurs travaux de recherche dans différentes universités. Parallèlement, il développe des opinions politiques qu'on pourrait classer plutôt à gauche. Il se rapproche de membres du Parti Communiste Américain et de syndicalistes défenseurs des droits civiques. Lorsque le FBI décide en 1937 de mettre sur écoute le Parti Communiste Américain, ses liens avec Oppenheimer sont clairement établis. Et lorsqu'il est choisi par Groves pour prendre la tête du projet Manhattan six ans plus tard, la crainte qu'Oppenheimer soit un agent travaillant pour les services soviétiques refait surface.
Il faudra un dossier de 7000 pages qui conclut qu'Oppenheimer n'est plus en lien que le parti communiste et l'intervention personnelle du général Groves pour lever les derniers doutes. Pour le moment. Arrivé à Los Alamos, Oppenheimer se sert de son immense réseau tissé au fil des ans entre l'Amérique et la Grande-Bretagne, où se trouvent également des scientifiques allemands exilés. Pour convaincre, plusieurs brillants scientifiques de rejoindre le projet Manhattan. Ce qui n'est pas chose évidente, car malgré sa renommée, Oppenheimer n'a pas de prix Nobel, il n'a jamais travaillé avec l'armée, et surtout, tout le monde sait que les recherches en matière de fictions nucléaires piétinent depuis plusieurs années.
Pour servir l'effort de guerre, la plupart des scientifiques préfèrent se tourner vers le développement de sonars, de radars ou de torpilles, bref, des choses plus concrètes. Pour rappel, encore une fois, on n'est toujours pas sûr qu'une bombe atomique puisse être réalisable. Mais grâce à sa force de conviction, Oppenheimer parvient à convaincre certains grands noms de le rejoindre, comme Léo Szilard ou Enrico Fermi qu'on a déjà abordé. Tous ces experts désormais réunis, ils vont pouvoir maintenant se consacrer à une seule chose, fabriquer l'arme absolue. Début 1944, les américains n'ont désormais plus qu'une crainte, voir l'Allemagne réussir à fabriquer l'arme atomique en premier.
Mais fabriquer ce gadget, comme le surnom les scientifiques, n'a rien d'évident. Des calculs complexes sont réalisés afin d'optimiser la taille et la forme de la bombe, mais aussi son mode d'allumage et la quantité de matériaux nucléaires nécessaires pour obtenir l'effet le plus puissant avec le moins de ressources possibles. N'étant pas sûr de ce que cela allait donner, les scientifiques de Los Alamos décident de fabriquer deux bombes bien différentes.
La première, baptisée Little Boy, devra fonctionner avec de l'uranium-235, tandis qu'une seconde bombe, Fat Man, utilisera du plutonium. Plusieurs systèmes de mise à feu sont testés. Le premier, c'est l'implosion. On place au cœur de la bombe du plutonium qu'on force à s'effondrer sur lui-même avec une petite explosion à l'intérieur de la bombe, qui va comprimer des neutrons contre le plutonium pour déclencher la réaction en chaîne. C'est ce qui sera utilisé sur le gadget et sur Fat Man.
Et le second système, plus simple à mettre en place mais moins efficace, c'est le Gun Method, qui consiste à tirer comme un coup de fusil un morceau d'uranium, qui entre en collision avec un autre morceau placé à l'autre bout de la bombe, ce qui déclenche l'explosion. C'est le système qui sera conservé pour Little Boy. A l'origine, ces deux bombes auraient dû être larguées sur l'Allemagne. Mais les américains vont bientôt faire une découverte qui va totalement remettre en question cette course à la bombe.
Lorsque les alliés débarquent en France en juin 1944, ils sont suivis par un petit groupe de scientifiques du projet Manhattan. Dirigés par le physicien Samuel Gutschmidt et le colonel Pache, il s'agit de l'opération Alsos. Le but est de découvrir où en sont les allemands dans leur programme atomique. Ils mettent la main sur les scientifiques du projet Uranium, dont le physicien Werner Heisenberg a la tête du programme. Mais c'est la douche froide pour les américains.
Comme il manquait de connaissances, Heisenberg et ses collègues avaient fini par penser que créer une bombe atomique était tout bonnement impossible. Ils avaient du coup préféré concentrer leurs efforts sur la création d'un prototype de réacteur nucléaire. Contrairement aux craintes des alliés, les allemands étaient en réalité très loin d'avoir une bombe atomique fonctionnelle.
Les bombardements sur les villes et les usines du Reich de plus en plus soutenus mettaient à mal l'effort de guerre. Et Hitler qui ne croyait plus au projet, préférait mettre ses scientifiques sur ses projets d'armes secrètes comme le missile V2. Mai 1945, les soviétiques prennent Berlin et l'Allemagne capitule avant une première bombe ne soit au point.
Mais la guerre est loin d'être terminée. Dans le Pacifique, les américains mènent toujours de sanglants combats contre les japonais. Les pertes pour les deux camps sont effroyables et le début de l'utilisation de pilotes kamikazes choque les américains.
Pourtant, depuis peu, le Japon est à portée de tout nouveaux bombardiers américains B-29 Super Fortress, avec un rayon d'action de plusieurs milliers de kilomètres. Début 1945, le Japon commence donc à être touché par de violents bombardements, comme sur Tokyo dans la nuit du 9 juillet. au 10 mars, qui fait plus de 100 000 victimes. Mais l'obsession suicidaire des chefs japonais à continuer le combat est toujours là.
Le Japon ne semble toujours pas prêt à se rendre, et les américains le savent, un débarquement coûterait la vie de centaines de milliers d'hommes supplémentaires. Mais heureusement pour eux, les hommes du projet Manhattan estiment que l'arme atomique sera bientôt prête. Tout va s'accélérer.
A l'été 1945, après trois ans de travail acharné, le projet Manhattan touche au but. Plusieurs tests sont d'abord réalisés dans le désert du Nouveau-Mexique, dans un premier temps sans charge atomique. Le but c'est pas de tout faire péter maintenant, mais de tester le mécanisme de largage du B-29.
Puis après on fait d'autres essais avec de l'uranium et du plutonium, qui d'ailleurs laisse les militaires et scientifiques plutôt mitigés. Après ça, Groves et Oppenheimer planifient un premier vrai test grandeur nature. Ce premier essai atomique de l'histoire est prévu pour le 16 juillet 1945. Nom de code de ce test, Trinity. La bombe, chargée de plutonium, est suspendue à 100 pieds de haut au sommet d'un pylône d'acier. 8 groupes sont créés, chargés d'activer la mise à feu, puis de mesurer l'onde de choc, les secousses sismiques, les émissions radioactives, ou encore gérer la capture vidéo du test.
Mais Oppenheimer et Groves sont inquiets. Personne ne sait avec certitude ce qui peut se passer. Le général craint notamment d'être poursuivit en justice si les radiations du test atteignent les populations civiles. Le 16 juillet 1945, au petit matin, le jour que tous les membres du programme attendent est arrivé. Il est temps pour eux d'enfin tester leurs armes.
Sur place, les observateurs, scientifiques et techniciens, ont reçu l'ordre de se placer à au moins 10 km de l'explosion, et de se retrancher dans des bunkers. Mais à quelques heures du test, certaines craintes persistent. Certains officiers scientifiques craignent que l'explosion devienne tout bonnement incontrôlable. Il y a même une rumeur qui circule qui dit que l'explosion pourrait consumer toute l'atmosphère. Mais peu importe, il est trop tard pour reculer maintenant.
A 5h29, le gadget explose. Générique C'est l'explosion la plus violente qui ait jamais engendré l'humanité. La région entière se met à trembler. Une immense colonne de fumée et de flammes s'élève sur 8 km de hauteur et 600 m de large. Au cœur de l'explosion, il fait plus de 10 millions de degrés Celsius.
Le pylône d'acier sur lequel était accrochée la bombe est pulvérisé et laisse place à un cratère de 400 m d'envergure. Les scientifiques sont bouche bée. Les retombées radioactives de l'explosion dépassent toutes les prévisions et se dispersent dans une zone de près de 150 km. Les témoins de l'explosion seront marqués à tout jamais par ce qu'ils ont vu. Dans une interview donnée en 1962, Oppenheimer dira Nous savions que le monde ne serait plus jamais le même.
En réaction, certains tentent même de faire machine arrière. Contrairement à Oppenheimer, qui maintient qu'utiliser l'arme atomique pour mettre fin à la guerre est nécessaire, Léo Osilar et d'autres scientifiques du projet Manhattan signent une pétition pour demander au président Truman, qui a succédé à Roosevelt après sa mort quelques semaines plus tôt, de ne pas faire usage de la bombe contre le Japon, estimant que sa seule existence constituait déjà un avertissement suffisant. Mais vous connaissez la suite, ils n'ont pas été écoutés. Au même moment en Allemagne se tient la conférence de Potsdam près de Berlin, qui réunit les vainqueurs du nazisme, dont Staline et Truman. qui en profite pour informer le chef de l'URSS du succès de l'essai d'une toute nouvelle arme, sans préciser pour autant qu'il s'agit de la bombe atomique.
Mais Staline ne semble pas vraiment surpris par cette annonce. En fait, il sait très bien de quelle arme il s'agit. Ses espions avaient infiltré le projet Manhattan. Staline savait tout depuis un moment. Au sein du projet Manhattan, le Target Committee doit déterminer quelle ville sera ciblée selon plusieurs critères.
Être une ville... avoir une véritable valeur stratégique et avoir été épargné jusque là par les bombardements. Cinq villes sont retenues, Yokohama, Kokura, Hiroshima, Nagasaki et Kyoto, qui elle est vite écartée car c'est la capitale culturelle du Japon.
Pendant ce temps à Posdam, américains, soviétiques, britanniques et chinois lancent un dernier ultimatum au Japon pour exiger sa reddition, mais les alliés se heurtent à un refus. Alors le 21 juillet 1945, Pour mettre fin à la guerre le plus rapidement possible, pour impressionner son rival soviétique, le président américain Truman autorise les bombardements atomiques. Au matin du 6 août 1945, le bombardier B-29, surnommé Enola Gay, s'apprête à décoller depuis les îles Mariannes pour Hiroshima.
Quelques temps avant, le pilote du bombardier Paul Tibet avait rencontré Oppenheimer à Los Alamos, qui l'avait mis en garde. Quand vous aurez largué votre bombe, l'onde de choc pourrait bien pulvériser votre appareil. Je suis désolé mais je ne peux pas promettre que vous allez survivre.
Mais peu importe, tous ces hommes connaissent les risques et veulent aller jusqu'au bout de leur mission. Enola Gay décolle à 2h45 du matin. Quelques heures plus tard, à 8h15, il largue Little Boy qui explose à 580 mètres au-dessus du sol, pulvérisant entièrement la ville d'Hiroshima.
Sans réponse de Tokyo, le 9 août, C'est Fatman qui tombe sur Nagasaki. Dans les secondes qui suivent leur détonation, les deux explosions atomisent plus de 110 000 personnes. Pour ceux qui survivent, leur sort est encore plus terrible.
Après avoir échappé à la fureur de l'explosion, ce sont maintenant des poussières radioactives mortelles qui retombent sur la population. Ce qui fait que les radiations et les brûlures continueront de tuer bien après l'explosion. D'après certaines estimations... les retombées de l'explosion tueront deux fois plus que les explosions en elles-mêmes.
Le Japon, déjà durement touché par les nombreux raids aériens sur ses villes, et surpris entre les deux attaques atomiques par une fulgurante offensive soviétique en Manchurie, contraint l'empereur Hirohito à annoncer la reddition de son pays le 15 août. C'est la fin de la Seconde Guerre Mondiale. En faisant le choix d'utiliser l'arme atomique à deux reprises contre la population japonaise, Le président Truman vient de faire basculer le monde dans l'âge atomique. Rapidement, les grandes puissances entament à leur tour une course pour obtenir la bombe.
Tandis que le monde fête la fin de la guerre, l'arme qui avait permis d'y mettre fin pourrait bien plonger la planète dans un troisième conflit mondial. Si Little Boy et Fat Man ont en partie contribué à mettre fin à la seconde guerre mondiale, il devient rapidement évident pour tous les camps Qu'ils ne mettront pas fin aux guerres. Après la seconde guerre mondiale, deux superpuissants s'imposent comme les grands vainqueurs.
Les Etats-Unis et l'Union Soviétique. Au-delà de deux pays, ce sont surtout deux idéologies qui s'affrontent. A la fin de l'année 1945, la tension n'est donc pas redescendue.
Et il reste encore une question. Que faire de la bombe atomique ? Aux Etats-Unis, à la fin de la guerre, la population américaine découvre l'existence du projet Manhattan. Et ce projet les divise.
Nombreux sont ceux sidérés d'apprendre qu'un tel secret leur ait été dissimulé. Encore plus lorsqu'ils découvrent tout l'argent englouti par le programme. Mais au-delà du coup, si certains voient la bombe atomique comme une avancée scientifique majeure, d'autres ont peur qu'elle ne fasse qu'apporter la mort à plus grande échelle. C'est pourquoi les États-Unis décident rapidement d'encadrer l'usage du nucléaire sur son territoire. En 1946, le président Truman dissout le projet Manhattan, qui est remplacé par une commission à l'énergie atomique, supervisée par le Congrès.
qui doit encourager le développement du nucléaire dans tous les domaines. Dans cette commission, on retrouve Oppenheimer, qui souhaite que le nucléaire serve dans les domaines énergétiques, industriels et... et médicale.
Mais la commission souhaite aussi renforcer le nucléaire dans le domaine militaire. Avec notamment le début des recherches qui conduiront à la bombe à hydrogène, plus connue sous le nom de bombe thermonucléaire, encore plus puissante que la bombe atomique. Oppenheimer, encore traumatisé par les événements d'Hiroshima et Nagasaki, s'oppose à ces programmes militaires qu'il qualifie de potentiels instruments de génocide. Ces déclarations lui attirent la colère de certains physiciens favorables à la bombe thermonucléaire, mais aussi du nouveau président Eisenhower et surtout du sénateur Joseph McCarthy, qui mène alors une traque paranoïaque contre les communistes aux Etats-Unis.
Et sans surprise, son passé de militant de gauche est déterré, et le Congrès va même jusqu'à l'accuser de collaboration avec l'URSS. Il faut dire qu'au même moment, les Américains viennent d'apprendre une terrible nouvelle. Le 29 août 1949, Les soviétiques viennent de tester avec succès leur première bombe atomique.
La guerre froide bascule dans une nouvelle phase, celle de l'équilibre de la terreur. Forcément, on accuse Oppenheimer d'avoir aidé les soviets, sauf qu'évidemment, il n'a rien à voir là-dedans. Mais ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu d'espionnage.
Des personnes travaillant pour le projet Manhattan avaient bel et bien été recrutées par les services soviétiques, comme par exemple Theodor Hall, David McGreglass ou encore Klaus Fuchs, qui a carrément transmis les plans du gadget à Moscou. Mais il n'y a pas d'Oppenheimer dans la liste. Alors même si Oppenheimer est donc innocent dans cette histoire, son insubordination va lui coûter son poste.
En 1953, il est renvoyé de la commission à l'énergie atomique et on lui retire ses accès à tous les sites de recherche confidentiels. C'est le début d'une véritable descente aux enfers pour Oppenheimer qui va durer plusieurs années. Alors il se retire de la vie publique pour continuer ses travaux à l'université de Princeton aux côtés notamment d'Albert Einstein. Il lui faudra attendre presque 10 ans pour être réhabilité par le président Kennedy en 1962. Il continuera ses travaux qui lui vaudront le prix Fermi en 1963, une récompense qui porte le nom de l'un de ses acolytes de Los Alamos. C'est un des prix les plus prestigieux pour un scientifique américain, même si au final il n'aura jamais eu le prix Nobel.
Au fil du temps, Oppenheimer devient favorable à un contrôle plus strict des armes nucléaires. Et même s'il ne l'a jamais avoué publiquement, certaines de ses interventions à la fin de sa vie laisse clairement penser qu'il a regretté son invention. Comme dans cette interview française de 1962, où il se montre pessimiste. Beaucoup de gens pensent qu'en trouvant le moyen de désintégrer la matière, l'homme a découvert un secret qui le dépasse, et qu'il est en train de creuser son propre tombeau. Qu'en pensez-vous, vous ?
C'est bien possible. Je ne suis pas optimiste. Mais je maintiens mon espoir.
Grand fumeur, le physicien meurt en 1967 à 62 ans, terrassé par un cancer de la gorge. Aujourd'hui, le débat existe toujours entre historiens pour savoir si oui ou non les bombes atomiques ont été décisives dans la fin de la guerre. En revanche, il y a une chose dont on est sûr, les travaux de Los Alamos ont eu un impact immense. Après la guerre, on voit fleurir tout un tas d'innovations. que l'on connaît aujourd'hui que ce soit pour le nucléaire civil ou militaire, avec le début d'une course entre américains et soviétiques pour développer des bombes de plus en plus puissantes.
Poussant même certains membres du projet Manhattan, dont Oppenheimer, à regretter leur invention qui, malgré eux, a changé à jamais l'équilibre du monde. Merci beaucoup d'avoir vu cette vidéo, j'espère qu'elle vous a plu. On se retrouve dans un cadre un peu particulier parce que j'ai deux choses à vous dire, ne partez pas de suite.
Déjà, la vidéo que vous venez de voir, c'est la dernière de la saison. Normalement, le prochain gros épisode, il sortira fin août ou... début septembre. Et deuxième chose, je vais faire une FAQ.
Oui, enfin, parce que j'en ai en fait jamais fait. J'en avais teasé une en décembre mais finalement j'ai pas eu le temps et puis bah là le début de l'été ça me semble être le meilleur moment pour en faire une. Ça va être l'occasion de parler de la chaîne.
de son avenir de un peu de moi vu que du coup vous ne connaissez pas vraiment je pense et puis ben un petit peu aussi des dessous de l'envers du décor donc si vous avez des questions mettez les en commentaire pour que ça soit plus simple mettez un petit hashtag et faq ça sera plus simple pour moi pour les retrouver et du coup on se retrouve très prochainement pour la petite et faq et puis après à la rentrée donc les pas comme d'habitude le like le commentaire à vous abonner vous pouvez me suivre sur twitter et instagram moi je remercie encore une fois guilhem de la chaîne d'histoire histoire avec qui cette vidéo a été co-écrite et on se retrouve très bientôt à la prochaine !