Salut ! Aujourd'hui je te propose une vidéo un peu spéciale qui m'a été demandée par plusieurs élèves sur ma chaîne. J'ai trouvé l'idée excellente, donc voilà j'ai décidé de passer la première partie de l'oral du bac français devant toi. L'occasion évidemment de te montrer à quoi doit ressembler une analyse linéaire de A à Z.
Je vais donc te présenter une introduction, un développement et une conclusion. qui vont durer environ 10 minutes. Le choix du texte n'est pas très important ici, j'ai d'ailleurs sélectionné un extrait de Candide ou l'Optimisme qui ne fait pas partie du programme de première générale mais sur lequel tu peux tomber éventuellement si tu es en première technologique.
L'on imagine donc que je viens de terminer mon brouillon et que je vais passer directement devant toi. J'angoisse un petit peu, j'espère que tu me donneras une bonne note. A tout de suite !
Aujourd'hui, je vais vous présenter un extrait de Candide ou l'optimisme, écrit par Voltaire. Alors Voltaire, de son vrai nom François-Marie Arouet, est une figure emblématique du siècle des Lumières. Son esprit critique, sa lutte pour les droits de l'homme et son engagement pour la tolérance ont marqué le XVIIIe siècle.
Parmi ses œuvres majeures figure le conte philosophique Candide ou l'optimisme, publié en 1759. Candide est un jeune homme innocent qui est convaincu que le monde autour de lui est merveilleux. Il est influencé par son précepteur professeur Pangloss qui répète sans cesse tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possible Mais au fil d'un long voyage, Candide va découvrir des réalités cruelles, notamment l'intolérance religieuse, la guerre et l'esclavage. Justement, dans cet extrait du chapitre 19, Candide et Cacambo, son compagnon de voyage, approchent de la ville de Suriname et s'apprêtent à rencontrer un esclave mutilé. À présent, je vais lire le texte. En approchant de la ville, ils rencontrèrent un nègre étendu par terre, n'ayant plus que la moitié de son habit, c'est-à-dire d'un caleçon de toile bleue.
Il manquait à ce pauvre homme la jambe gauche et la main droite. Eh mon Dieu ! lui dit Candide en hollandais, que fais-tu là, mon ami, dans l'état horrible où je te vois ? J'attends mon maître, M.
Vanderdendur, le fameux négociant, répondit le nègre. Est-ce M. Vanderdendur, dit Candide, qui t'a traité ainsi ? Oui, monsieur, dit le nègre, c'est l'usage. On nous donne un caleçon de toile pour tout vêtement deux fois l'année.
Quand nous travaillons aux sucreries et que la meule nous attrape le doigt, on nous coupe la main. Quand nous voulons nous enfuir, on nous coupe la jambe. Je me suis trouvé dans les deux cas.
C'est à ce prix que vous mangez du sucre en Europe. Cependant, lorsque ma mère me vendit dix écus patagons sur la côte de Guinée, elle me disait Mon cher enfant, bénis nos fétiches, adore-les toujours, ils te feront vivre heureux. Tu as l'honneur d'être esclave de nos seigneurs les blancs et tu fais par là la fortune de ton père et de ta mère.
Hélas, je ne sais pas si j'ai fait leur fortune, mais ils n'ont pas fait la mienne. Les chiens, les singes et les perroquets sont mille fois moins malheureux que nous. Les fétiches hollandais qui m'ont convertie me disent tous les dimanches que nous sommes tous enfants d'Adam, blancs et noirs.
Je ne suis pas généalogiste. Mais si ces prêcheurs disent vrai, nous sommes tous cousins issus de Germain. Or, vous m'avouerez qu'on ne peut pas en user avec ses parents d'une manière plus horrible. A l'issue de cette lecture, nous pouvons donc nous demander comment Voltaire, à travers le témoignage du nègre, dénonce l'horreur de l'esclavage. Je propose de segmenter le texte en trois mouvements.
Dans le premier mouvement, allant de la ligne 1 à la ligne 4, Candide et Cacambo rencontrent un esclave mutilé. Dans le deuxième mouvement, de la ligne 4 à la ligne 8, l'esclave décrit avec une certaine résignation les conditions de vie atroces qu'il doit supporter. Enfin, le troisième mouvement, de la ligne 8 à la ligne 14, met en lumière l'absurdité des justifications religieuses.
Cet extrait s'ouvre sur une scène frappante, pourtant décrite avec simplicité. Le passé simple, rend contraire à la ligne 1, marque une action et s'accompagne d'un complément d'objet direct surprenant, un nègre étendu par tard. La posture de ce personnage, choquante, est accentuée par la négation restrictive n'ayant plus que la moitié de son habit qui souligne son état de dénuement.
L'imparfait descriptif il manquait à ce pauvre homme à la ligne 2 annonce son portrait. Mais c'est un portrait qui est dénué d'émotion, présenté de manière abrupte à l'aide d'un parallélisme frappant la jambe gauche et la main droite. Ce procédé stylistique, par sa symétrie, souligne l'horreur de la mutilation en énonçant froidement les pertes subies.
La réaction de Candide est immédiate. Il est ému, sensible à cette situation, comme le suggèrent les interjections... et mon dieu.
Sa compassion, sa sollicitude se manifestent également à travers la phrase interrogative ligne 3. Que fais-tu là mon ami dans l'état horrible où je te vois ? Cette question un peu naïve souligne à la fois l'étonnement de Candide face à cette situation et son incompréhension comme en témoigne l'adjectif péjoratif horrible. Le groupe nominal mon ami exprime une forme de proximité et de bienveillance à l'égard du nègre. La soumission de l'esclave transparaît clairement dans sa réponse, notamment à travers le verbe attendre. J'attends mon maître.
Ce maître, monsieur Vendère d'Endure, porte un nom évocateur. Ici, Voltaire joue sur les mots. Le vendeur fait référence à l'idée d'un marchand impitoyable. À la dendure signifie qu'il s'agit d'un homme intraitable qui n'hésite pas à sacrifier l'humain. au profit de l'argent.
En réponse à la nouvelle question directe de la part de Candide Est-ce M. Vendère d'Endure ? dit Candide qui l'a traité ainsi, l'esclave livre un témoignage à la fois saisissant et résigné de sa condition d'esclave. Il précise à la ligne 5 c'est l'usage Son nom commun usage évoque une sorte d'habitude.
Il fait même écho au code noir Un ensemble de lois régissant l'esclavage colonial dont Voltaire s'inspire. Le pronom personnel indéfini on dans la phrase simple on nous donne un caleçon de toile pour tout vêtement deux fois l'année accentue l'anonymat et la froideur des oppresseurs, des maîtres. Les deux propositions subordonnées circonstancielles de temps quand nous travaillons aux sucreries et que la meule nous attrape le doigt aboutissent à une chute brutale. on nous coupe la main.
Ce rythme se poursuit avec un nouveau parallélisme. Quand nous voulons nous enfuir, on nous coupe la jambe. La répétition de la structure souligne cette mécanique implacable à laquelle on ne peut pas échapper. La phrase complexe et emphatique tombe comme un coup près.
C'est à ce prix que vous mangez du sucre en Europe. Ici, Voltaire apostrophe le public européen, notamment avec le pronom personnel vous Ce contraste entre le plaisir superficiel du sucre et le prix inhumain payé par les esclaves est évidemment mis en lumière. Mais le témoignage de l'esclave ne s'arrête pas là. Le connecteur d'opposition, cependant, introduit une rupture nette, une sorte de transition vers un autre aspect de sa souffrance.
La proposition subordonnée circonstancielle de temps, lorsque ma mère me vendit dix écus patagons, accentue la déshumanisation de l'esclave qui est réduite à une simple valeur monétaire. Sa mère, pour justifier cet acte, se réfugie derrière un discours religieux, comme le montre le champ lexical de la religion, béni, fétiche, adore. L'utilisation du nom commun mélioratif l'honneur d'être esclave renverse la situation.
Le nègre ne manque pas d'humour et joue sur la polysémie du mot fortune qui peut signifier l'argent comme le bonheur. Hélas, je ne sais pas si j'ai fait leur fortune, mais ils n'ont pas fait la mienne. L'énumération des animaux, les chiens, les singes et les perroquets, est suivie d'une hyperbole marquante.
100 000 fois moins malheureux que nous. Elle dénonce la brutalité d'un système dans lequel les esclaves sont traités avec moins de considération que les animaux. Le champ lexical de la religion se retrouve notamment à travers la périphrase Les fétiches hollandais qui désignent les maîtres. La répétition de tous tous les dimanches et tous enfants d'Adam accentue l'ironie du nègre.
Malgré leur discours d'égalité, les maîtres ne reconnaissent pas l'humanité des esclaves. Enfin, la conjonction coordination or Le futur de certitude dans la phrase or vous m'avouerez qu'on ne peut pas en user avec ses parents d'une manière plus horrible souligne le paradoxe de la situation et l'hypocrisie des européens. Pour rappel, notre problématique était la suivante.
Comment Voltaire, à travers le témoignage du nègre, dénonce-t-il l'horreur de l'esclavage ? À travers ce témoignage teinté de résignation, qui mêle un ton pathétique et ironique, Voltaire dénonce la réalité brutale et la déshumanisation de l'esclavage. Il critique la violence des maîtres, la complicité des européens et l'hypocrisie religieuse. En somme, la scène a pour objectif de choquer et d'interpeller le lecteur en le rendant témoin de cette barbarie.
Nous pouvons faire un parallèle avec un texte de Montesquieu de l'esclavage des nègres, dans lequel le philosophe des Lumières, avec un ton assez ironique aussi, s'attaque aux contradictions entre les valeurs humanistes et la réalité de la traite des Noirs.