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Vérité, Relativisme et Tolérance en Philosophie

Les gars ça me gonfle cette nouvelle saison de l'anti-sèche là J'ai toujours pas reçu les briefs des chinois et tout Comment ça les chinois ? Bah parce que tu sais tout le monde pense que c'est un truc pour les cours et tout Mais en fait c'est un outil de manipulation du gouvernement chinois quoi C'est eux qui me payent et tout pour... Non mais mec recommence pas avec ça Mais t'as pas vu tous les messages cachés que je mets dans toutes les anti-sèches ? Les apartés et tout ? C'est pour manipuler les gens Mais je suis payé par le gouvernement pour faire ça, toi tu me crois ? Qui dit vrai ? Est-ce qu'on peut dire que tout le monde a raison et que à chacun sa vérité En fait, en se posant cette question, on s'en pose deux. Déjà, est-ce que ça a du sens de dire à chacun sa vérité Et ensuite, est-ce que nous avons le droit de dire à chacun sa vérité Deux grosses questions auxquelles on va répondre dans une nouvelle Antisèche. Balance la sauce ! Il y a des gens qui pensent que la Terre est plate. Ils ont même un nom. Les platistes. Voilà, nous sommes les platistes. Je suis platiste, effectivement. Et là, pourquoi on ne pourrait pas dire il y en a qui pensent que la Terre est plate. Ok, après tout, à chacun sa vérité. Non ? Eh bien c'est là que la... intervient pour définir ce qu'est la vérité et pour savoir si oui ou non elle est propre à chaque individu déjà pour commencer c'est quoi la vérité bien c'est la correspondance entre la pensée et la réalité c'est à dire que la vérité n'est pas la réalité elle même mais mais la représentation qu'on s'en fait. Je vous explique. Si je vous dis que la Terre est ronde et que c'est vrai, pourquoi c'est vrai ? Parce que la manière dont je me représente la Terre correspond à la réalité. Parce que la Terre est vraiment comme ça, à l'extérieur de moi. En plus, on est d'accord qu'il n'y a qu'une seule réalité. Donc raison de plus pour dire qu'il ne peut pas y avoir des vérités différentes. Dans la réalité, la Terre est soit ronde, soit plate. Donc la vérité, c'est soit que la Terre est ronde, soit qu'elle est plate. Mais... Parce qu'il y a toujours un mais. Ça pose quand même question, cette soi-disant... en disant vérité absolue. Parce qu'il y a plein d'exemples dans l'histoire de scientifiques qui avançaient des théories complètement fausses tout en étant persuadés qu'elles étaient vraies. Par exemple, on a longtemps cru que c'était le soleil qui tournait autour de la Terre et non l'inverse. Ah non ! Ah ! Alors le soleil il ne tourne pas, il rebondit, en fait comme un ballon de basket tout simplement. Nos opinions et certitudes évoluent en permanence, et ce qui était évident hier ne l'est plus aujourd'hui. Ce qui pose la question de savoir si la manière dont on se représente la réalité ne dépend pas juste de notre point de vue. Ce qui revient à... Ah bah c'est bien ce que je dis ! Chacun sa vérité ! Mais d'un autre côté, si on commence à dire à chacun sa vérité, ça peut vite devenir hors de contrôle. Je prends le pire du pire des exemples. Mais si toutes les opinions se valent, on peut laisser quelqu'un affirmer haut et fort que les chambres à gaz n'ont pas existé. Donc la question à laquelle on va répondre dans cet anti-sèche, c'est est-ce qu'on peut dire à chacun sa vérité quand la vérité ne devrait être qu'une ? En fait, quand on dit à chacun sa vérité, ça veut dire quoi ? Eh bien c'est ce qu'on appelle le... Relativisme. Ça signifie que ce qui est vrai pour moi est faux pour vous. Ok, stop. Petit point définition. Quelque chose de relatif, c'est quelque chose qui n'a pas d'indépendance, qui n'existe qu'en relation avec autre chose, et du coup, ça dépend et ça change en fonction de la chose avec laquelle... elle est en relation. Par exemple, on dit souvent que la perception de la température est relative, on ne ressent pas tous le chaud ou le froid pareil. On connaît tous ce gars en short et en sandales toute l'année. Nous par exemple c'est notre auteur Alexis. Le relatif s'oppose donc à l'absolu qui lui existe de manière indépendante. En gros ce qui est absolu ne change pas en fonction des personnes qui le regardent. Donc quand on dit à chacun sa vérité, on veut dire par là que toute connaissance est relative. Autrement dit, toute connaissance dépend du point de vue de celui qui parle ou pensent. Mais attendez, si personne ne perçoit la même chose, comment savoir qui a raison et si ce qu'on perçoit c'est bien la réalité ? Sacré Bourbier ! L'homme est la mesure de toutes choses, de celles qui sont, du fait qu'elles sont, de celles qui ne sont pas, du fait qu'elles ne sont pas. C'est pas moi qui le dit. C'est Protagoras, un célèbre sophiste du 5e siècle avant Jésus-Christ. Bon en gros, c'est une autre manière de dire à chacun sa vérité. Et d'ailleurs, c'est une position courante dans l'antiquité grecque. Et si l'homme est mesure de toutes choses... ça signifie que ce qui existe n'existe que pour chaque homme. Ça nous amène à faire une distinction super importante entre ce qui existe pour soi et ce qui existe en soi. Et vous allez voir que cette distinction recoupe celle entre relatif et absolu. Ce qui est en soi signifie que la chose existe en elle-même. En gros, la chose existe indépendamment de la perception personnelle que peuvent en avoir Enzo, Nadia ou Camille. Ce qui existe pour soi, c'est ce qu'on perçoit en fonction de notre point de vue. Et là, ça nous rappelle qu'on voit les choses sur le plan de l'esprit. sous le prisme de notre singularité. C'est comme si on voyait tous avec un filtre. On voit pas la chose dans l'absolu et pas tous la même chose. Mais alors, qu'est-ce qui détermine notre point de vue ? Eh bien, il y a pas mal de facteurs. Allez, c'est parti pour le top 5. Top 5 des facteurs qui déterminent notre point de vue. Facteur numéro 1. Notre position particulière dans l'espace. Eh oui, si vous assistez à un concert collé à la scène avec tous les fans hardcore, vous n'aurez pas la même perception du show que votre oncle qui a préféré rester au 3e balcon. Facteur numéro 2, notre constitution physique particulière. On voit les choses différemment en fonction de la constitution de notre corps. Un daltonien par exemple ne verra pas les mêmes couleurs que les autres. Pareil pour le ressenti des températures. Facteur numéro 3, notre constitution psychologique particulière. Notre point de vue dépend de notre personnalité, de notre perception, et sera toujours influencé par notre caractère, notre vécu, nos désirs ou nos intérêts. Comme quand quelqu'un est scandalisé par un événement et que vous, vous êtes mort de rire quoi. Ou l'inverse d'ailleurs. Facteur numéro 4, le temps. Au cours d'une vie, on change et on évolue. Donc c'est pareil pour notre point de vue, il change avec le temps. Si demain vous retrouvez la peluche de quand vous étiez petit, ça ne vous fera plus le même effet. Personnellement, en retrouvant mon dessin de maternelle, j'ai eu un déclic. Voilà, c'est plat. Facteur numéro 5, la culture. Notre point de vue varie aussi en fonction de l'éducation qu'on a reçue. Rien que la langue conditionne notre rapport au réel. Dites-vous que les écossais, ils ont 421 mots pour dire la neige. Les gars, vous imaginez genre comment ils ont galéré à traduire genre la reine des neiges en écossais ? T'imagines ? Libéré, délivré... Bon, je résume. L'homme est mesure de toute chose parce que ce qui existe pour lui, la réalité, c'est ce qui lui apparaît. Et ça, ça dépend de son... point de vue. C'est sa réalité en quelque sorte. Et dans la mesure où rien d'autre n'existe pour nous, et où on ne peut pas sortir de notre point de vue, alors dans ce cas, on peut affirmer à chacun sa vérité. Mais attendez, ça revient à dire que rien n'est stable, que tout est en perpétuel changement en fonction des gens, des moments, etc. Bref, qu'il n'y a pas de vérité. On n'est pas sortis de l'auberge là. Il est gentil Protagoras, mais vous imaginez un monde sans vérité ? Ça paraît impossible. Et puis il y a bien des bonnes choses à faire. des moments où on est vraiment d'accord, des moments où on parle les mêmes choses et on a les mêmes arguments. Ce qui prouve qu'il existe un monde commun, une vérité objective. D'ailleurs, il y a un signe qui montre qu'il y a une objectivité, c'est le langage. Grâce au langage, on communique ce que l'on pense, donc on communique notre perception et notre point de vue. Et quand vous parlez de l'arbre à côté de l'entrée du lycée, vos potes comprennent et peuvent même ajouter une information, genre Ah ouais, grave, c'est un cèdre Personne n'a cette conversation. C'est juste de la philo. Bref, vous parlez tous bien de la même chose. Mais quand on y réfléchit, si on suit ce raisonnement, à chacun sa vérité, en fait, c'est une contradiction. Dans la métaphysique, Aristote écrit En gros, ça veut dire qu'une chose ne peut pas être tout et son contraire en même temps. Prenez Jean-Jacques. Jean-Jacques, il ne peut pas être vivant et mort à la fois. Sauf si c'est le chat de Schrödinger. Ou un zombie. Il est soit mort, soit vivant. Mais si on sort la carte à chacun sa vérité, je peux très bien dire Jean-Jacques est vivant, et vous pouvez me dire, mais non, il est mort. Nous aurons tous les deux raison. Faudrait voir à se décider quand même là. Bref, ça ne mène à rien, il ne peut pas y avoir plusieurs vérités. La question maintenant, c'est comment faire la part des choses entre ce qui relève de notre subjectivité et ce qui nous fait objectivement connaître la vérité. D'abord, affirmer à chacun sa vérité, c'est confondre l'opinion et la science. Dans le Ménon, Platon prend l'exemple de la route pour aller à Larissa. La route pour aller à Larissa ? On n'est pas dans la sauce. Larissa, c'est une ville en Grèce. Imaginez maintenant que quelqu'un vous demande quel est le chemin pour aller à Larissa et que vous n'y êtes jamais allé. Que faites-vous ? Réponse A, vous répondez sur la base d'informations que vous avez entendues. Réponse B, vous répondez sur la base... d'impression que vous avez eu ou bien réponse c vous répondez au pif c'est la question que je vous pose dans tous les cas que ce soit la bonne route ou non votre réponse n'est pas certaine votre réponse est seulement une opinion c'est au feeling la deuxième façon de répondre c'est parce que vous êtes déjà allé à l'harissa donc vous connaissez la meilleure route et là c'est la science est ce qu'on a un kebab ça harissa c'est de la science aussi dans un cas on a affaire à une croyance qui n'est fondée sur rien et dans l'autre on a aussi affaire à une croyance mais qui est devenue une certitude parce que vous savez pourquoi vous pensez c'est la différence entre l'opinion et la science la terre est bien ronde parce qu'on peut l'expliquer et parce qu'on a des preuves et quand on dit à chacun sa vérité c'est juste qu'on a des lacunes en science Donc si je comprends bien, pour dépasser le relativisme, ça va être grâce à la rigueur des démonstrations scientifiques qui nous permettent de comprendre pourquoi telle ou telle affirmation est vraie. Mais attendez deux minutes là, s'il n'y a qu'une seule vérité, est-ce que nous... on ne se dirige pas lentement vers un truc totalitaire. Genre, c'est pas dangereux pour la vie morale et politique de refuser la diversité des opinions ? Je vous rappelle qu'on a justement fondé la démocratie sur l'acceptation de la diversité des opinions et des discours. C'est hyper important de reconnaître qu'il y a plusieurs opinions. surtout dans le domaine politique. Ne plus pouvoir dire à chacun sa vérité, c'est donc de l'intolérance. En fait, il y a une forme d'utilité à dire à chacun sa vérité, histoire de ne pas tomber dans une dictature de pensée ou une société sans liberté d'expression. Ah bah voilà ! Mais la tolérance a elle aussi des limites. Ça arrive qu'on l'utilise comme une excuse pour éviter le conflit ou cacher ce qu'on pense. On se planque derrière le chacun son opinion pour ne pas argumenter. En fait, la tolérance limite, ça devient un refuge. Et ça, est-ce que c'est pas accepter une sorte de défaite de la pensée ? Parce que si on y réfléchit, La véritable pensée, c'est celle qui cherche la vérité. C'est ce qui doit faire l'effort de se confronter à d'autres opinions. Et c'est exactement ce que nous raconte Platon avec l'allégorie la plus famous en philo, j'ai nommé l'allégorie de la caverne. Évidemment. En deux mots, la caverne c'est quoi ? Faut imaginer des hommes enchaînés au fond d'une caverne, qui ne peuvent voir que la paroi devant eux, sur laquelle on projette des ombres. Comme ils ne sont jamais sortis de leur caverne, ils pensent que les ombres qui sont projetées sont la réalité. C'est une allégorie du monde de la paroi. et de l'opinion. On croit qu'on connaît la vérité mais en fait on n'accède qu'à l'apparence des choses. Le reste de l'allégorie consiste à montrer que si on libère un de ces hommes, il va se rendre compte qu'il n'est que dans une caverne et quand il va voir le feu qui projetait les ombres derrière lui puis le soleil hors de la caverne il va d'abord être ébloui, puis déstabilisé. Mais Platon ne s'arrête pas là. Il nous explique même que si l'homme redescend dans la caverne pour délivrer les autres, on le prendra pour un fou et on ne l'écoutera pas. Et on essaiera de le tuer. Au passage, parenthèse, celui qui sort de la caverne, c'est le philosophe. On en arrive à une situation paradoxale, où les prisonniers se battent et se tuent pour leur propre enfermement. D'ailleurs, ma première vidéo sur ma chaîne perso, c'est sur l'allégorie de la caverne. Je ne jugeais pas trop parce que c'était il y a 8 ans. Ça montre que l'opinion, c'est-à-dire la relativité des points de vue de chacun, est un enfant. confortable. Et du coup notre pseudo tolérance avec le à chacun sa vérité c'est surtout une question de rester dans son confort. Bref en conclusion la tolérance vis-à-vis de la pluralité des opinions ne garantit pas vraiment le respect des libertés. C'est une fausse liberté qui maintient les individus dans le confort de l'ignorance et les empêche donc de vraiment réfléchir et donc d'accéder à la vérité. En résumé on peut dire à chacun sa vérité si on considère que toute opinion est relative. Pourtant il y a des moments où on est tous capable de parler de la la même chose et de tomber d'accord. Il y a un monde commun, donc une vérité connue. Mais dans certaines situations où la science ne peut pas nous aider, comme en politique par exemple, ça peut être utile de considérer la pluralité des opinions, ne serait-ce que par souci de tolérance. Mais attention, il ne faut pas se contenter du confort, de la tolérance où on accepte les différents points de vue et donc les différentes vérités. Ça pourrait vous prêter certaines libertés, comme dans le cas des gars de la caverne. Si vous cherchez vraiment la vérité, il va falloir essayer de dépasser les désaccords et confronter les opinions. Ah bah y'a pas le choix. Sauf si vous voulez kiffer avec vos potes ou... au fond d'une caverne, mais ce sera sans moi. Bon, je sens qu'on a besoin d'un petit récap là. Parce que c'est pas mal de choses. C'est parti. Voici le plan que vous pouvez faire si vous tombez sur la vérité en philo. En grand 1, on peut dire à chacun sa vérité, car toute opinion est relative. Avec en A, on voit que toutes nos opinions sont relatives en opposant la notion d'absolu et relatif. Puis en B, on s'appuie sur le copain protagoras avec le fait que l'homme est mesure de toute chose. Là, vous confrontez ce qui existe en soi et ce qui existe pour soi. Ensuite, en grand 2, on s'oppose à ce qu'on vient de dire, il n'est pas possible de dire à chacun sa vérité, avec en A l'existence d'un monde commun par le biais du langage, puis en B, on voit qu'en réalité, dire à chacun sa vérité est une contradiction dans les termes avec la métaphysique d'Aristote. Enfin, en C, c'est grâce à la méthode qu'on peut se défaire de la relativité de notre point de vue avec le ménon de Platon et sa route pour Larissa. On termine en grand 3 sur la nécessité pratique de tolérance qui pourrait finalement légitimer qu'on dise à chacun sa vérité, avec d'abord en A que si on ne peut pas dire au sens strict à chacun sa vérité, A chacun sa vérité, on peut au moins le dire pour des raisons pratiques et ne pas sombrer dans une dictature de la pensée. Et enfin, en B, on relève quand même une certaine limite à la tolérance, qu'on dise à chacun sa vérité, avec l'allégorie de la caverne de Platon. Et du coup, le message crypté, là, il était où dans la vidéo ? Bah, je peux pas vous dire, en fait. Sinon, c'est plus crypté. Ouais, c'est ça. Ouais. Parce qu'en fait ils vont le voir après la vidéo, ils vont se dire bah il dit tout dans la vidéo quand tu vois, je sais pas en fait.