Transcript for:
Analyse de 'Le Malade Imaginaire'

Le Malade imaginaire Comédie écrite en 1673, c'est la dernière oeuvre de Molière. Les personnages Argan, le Malade imaginaire Béline, seconde femme d'Argan Angélique, fille d'Argan et amante de Cléante Louison, petite fille d'Argan et soeur d'Angélique Béralde, frère d'Argan Cléante Amande Angélique, M. Diafoirus, médecin. Thomas Diafoirus, son fils et amande Angélique. M. Purgon, médecin d'Argan. M. Fleurant, apothicaire. M. Bonnefoy, notaire. Toinette, servante. La scène se passe à Paris. Acte 1. Scène... argan seul dans sa chambre assis une table devant lui compte des parties d'apothicaire avec des jetons il se fait parlant à lui-même les dialogues suivants trois et deux font cinq et cinq font dix et dix font vingt trois et deux font cinq plus du vingt-quatrième un petit préparatif et rémollant pour amollir humecter et rafraîchir les entrailles de monsieur ce qui me plaît de monsieur fleurant mon impoticaire c'est que ses parties sont toujours fort civiles les entrailles de monsieur trente sols oui mais monsieur fleurant ce n'est pas tout que d'être civil il faut être aussi raisonnable et ne pas écorcher les malades sol un lavement je suis votre serviteur je vous l'ai déjà dit vous ne me les avez mis dans les autres parties qu'à vingt sols et vingt sols en langage d'apothicaire c'est-à-dire dix sols les voilà dix sols plus du dix jours un bon clister détercif composé de catholicon double rhubarbe miel rosa et autres suivant l'ordonnance pour balayez lavez et nettoyez le bas-ventre de monsieur trente sols avec votre permission dix sols plus du dix jours le soir un gilet pépatique soporatif et somnifère composé pour faire dormir monsieur trente-cinq sols je ne me plains pas de celui-là car il me fit bien dormir dix quinze seize et dix-sept sols six deniers Plus du 25e, une bonne médecine purgative et corroborative, composée de casse-raissante avec Séné-le-Ventin et autres, suivant l'ordonnance de M. Purgon, pour expulser et évacuer l'habit de M. Quatrelivre. Ah ! M. Fleuron, cessez de moquer. Il faut vivre avec les malades. M. Purgon ne vous a pas ordonné de mettre quatre francs. Mettez... mettez trois livres s'il vous plaît vingt et trente sols plus du dix jours une potion anodine et astringente pour faire reposer monsieur trente sols bon dix et quinze sols plus du vingt-sixième un clister carminatif pour chasser les vents de monsieur trente sols dix sols monsieur florent plus le clister de monsieur réitéré le soir comme dessus trente sols monsieur fleurant dix sols plus du vingt-septième une bonne médecine composée pour hâter d'aller et chasser dehors les mauvaises humeurs de monsieur trois livres bon vingt et trente sols je suis bien aise que vous soyez raisonnable plus du vingt-huitième une prise de petit lait clarifié et corée pour adoucir, lénifier, tempérer et rafraîchir le sang de monsieur vingt sols, bon, dix sols, plus une potion cordiale et préservative composée avec douze grains de bézoar, sirop de limon et grenade et autres suivant l'ordonnance cinq livres. Ah, monsieur Fleuron, tout doux, s'il vous plaît. Si vous en usez comme cela, on ne voudra plus être malade. contentez-vous de quatre francs vingt et quarante sols trois et deux font cinq et cinq font dix et dix font vingt soixante et trois livres quatre sols six deniers Ah ! si bien donc que ce mois j'ai pris une, deux, trois, quatre, cinq, six, sept et huit médecines, et un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix, onze et douze lavements. L'autre mois il y avait douze médecines et vingt lavements. Je ne m'étonne pas si je ne me porte pas si bien ce mois-ci que l'autre. Je le dirai à M. Purgon afin qu'il mette ordre à cela. Allons, qu'on m'ôte tout ceci. il n'y a personne j'ai beau dire on me laisse toujours seul il n'y a pas moyen de les arrêter ici ils n'entendent point et ma sonnette ne fait pas assez de bruit point d'affaire ils sont sourds toi net tout comme si je ne sonnais point chienne coquine je suis en rage carogne à tous les diables est-il possible qu'on laisse comme cela un pauvre malade tout seul dreulin dreulin dreulin voilà qui est pitoyable dreulin dreulin dreulin mon dieu laisseront ici mourir dreulin dreulin dreulin toinette en entrant dans la chambre on y va ah chienne ah carogne toinette faisant semblant de s'être cogné la tête diantre sois fait de votre impatience vous pressez si fort les personnes que je me suis donné un grand coup de la tête contre la carne d'un volet ah traîtresse il y a il y a une heure tu m'as le chou tais-toi donc coquine que je te querelle coquine samon ma foi j'en suis d'avis après ce que je me suis fait ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah Chienne, tu veux... Quoi ? Il faudra encore que je n'ai pas le plaisir de quereller ? Quereller tout votre sou, je le veux bien. Tu m'en empêches, chienne, en m'interrompant à tout coup. Si vous avez le plaisir de quereller, il faut bien que de mon côté j'ai le plaisir de pleurer. Chacun le sien, ce n'est pas trop. Alors, il faut en passer par là. ôte moi ceci coquine ôte moi ceci argand se lève de sa chaise mon lavement aujourd'hui a-t-il bien opéré votre lavement oui ai-je bien fait de la bile ma foi je ne me mets le point dans ces affaires là c'est à m florent à y mettre le nez puisqu'il en a le profit qu'on ait soin de me tenir un bouillon près pour l'autre que je dois tantôt prendre Ce monsieur Florent là et ce monsieur Purgon, c'est gai sur votre corps. Ils ont en vous une bonne vache à lait, et je voudrais bien leur demander quel mal vous avez pour faire tant de remèdes. Hé, taisez-vous, ignorante. Ce n'est pas à vous à contrôler les ordonnances de la médecine. Qu'on me fasse venir ma fille Angélique. J'ai à lui dire quelque chose. La voici qui vient d'elle-même. Elle a deviné votre pensée. approchez angélique vous venez à propos je voulais vous parler angélique me voilà prête à vous bouillir courant au bassin angélique attendez donnez-moi mon bâton je vais revenir tout à l'heure allez vite monsieur allez ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah ah regarde-moi un peu eh bien je vous regarde toinette eh bien quoi toinette ne devines-tu point de quoi je veux parler je m'en doute assez de notre jeune amant car c'est sur lui depuis six jours que roulent tous nos entretiens et vous n'êtes point bien si vous n'en parlez à toute heure puisque tu connais cela, que n'es-tu donc la première à m'en entretenir ? Et que ne m'épargnes-tu la peine de te jeter sur ce discours ? Vous ne m'en donnez pas le temps, et vous avez des soins là-dessus qu'il est difficile de prévenir. Je t'avoue que je ne saurais me lasser de te parler de lui, et que mon cœur profite avec chaleur de tous les moments de s'ouvrir à toi. Mais dis-moi, condamnes-tu toi-même les sentiments que j'ai pour lui ? Je les garde. ai-je tort de m'abandonner à ces douces impressions je ne dis pas cela et voudrais-tu que je fusse insensible aux tendres protestations de cette passion ardente qu'ils témoignent pour moi ah dieu me plaise dis-moi un peu ne trouves-tu pas comme moi quelque chose du ciel quelque effet du destin dans l'aventure inopinée de notre connaissance oui ne trouves-tu pas que cette action d'embrasser ma défense sans me connaître est d'un honnête homme oui que l'on ne peut pas en user plus généreusement d'accord et qu'il fit tout cela de la meilleure grâce du monde oh oui ne trouves-tu pas toi net qu'il est bien fait de sa personne qu'il a l'air le meilleur du monde sans doute que ses discours comme ses actions ont quelque chose de noble cela est sûr qu'on ne peut rien de plus passionné que tout ce qu'il me dit il est vrai et qu'il n'est rien de plus fâcheux que la contrainte où l'on me tient qui bouche tout commerce aux doux empressements de cette mutuelle ardeur que le ciel nous inspire vous avez raison mais ma pauvre toinette crois-tu qu'il m'aime autant qu'il me le dit ces choses-là parfois sont un peu sujettes à sa caution les grimaces d'amour ressemblent fort à la vérité et j'ai vu de grands comédiens là-dessus. À toi, Nett, que dis-tu là ? Hélas, de la façon qu'il parle, serait-il bien possible qu'il ne me dit pas vrai ? En tout cas, vous en serez bientôt éclairci. Et la résolution où il vous écrivit hier qu'il était de vous faire demander en mariage est une prompte voie à vous faire connaître s'il vous dit vrai ou non. C'en sera là la bonne preuve. À toi, Nett. Si celui-là me trompe, je ne croirai de ma vie aucun homme. voilà votre père qui revient argand se met dans sa chaise oh çà ma fille je vais vous dire une nouvelle ou peut-être ne vous attendez-vous pas on vous demande en mariage qu'est-ce que cela vous riez cela est plaisant oui ce mot de mariage il n'y a rien de plus drôle pour les jeunes filles ah nature nature à ce que je puis voir ma fille je n'ai que faire de vous demander si vous voulez bien vous marier je dois faire mon père tout ce qui vous plaira de m'ordonner je suis bien aise d'avoir une fille si obéissante la chose est donc conclue et je vous ai promise c'est à moi mon père de suivre aveuglément toutes vos volontés ma femme votre belle-mère avait envie que je vous fasse religieuse et votre petite soeur louison aussi et tout le temps elle l'a été a heurté à cela. La bonne bête a ses raisons. Elle ne voulait point consentir à ce mariage, mais je l'ai emporté, et ma parole est donnée. Ah, mon père, que je vous suis obligée de toutes vos bontés. En vérité, je vous sais bon gré de cela, et voilà l'action la plus sage que vous ayez faite de votre vie. Je n'ai point encore vu la personne, mais on m'indique que j'en serai content, et toi aussi. Assurément, mon père. comment l'as-tu vue puisque votre consentement m'autorise à vous pouvoir ouvrir mon coeur je ne feindrais point de vous dire que le hasard nous a fait connaître il y a six jours et que la demande qu'on vous a faite est un effet de l'inclination que dès cette première vue nous avons prise l'un pour l'autre ils ne m'ont pas dit cela mais j'en suis bien aise et c'est tant mieux que les choses soient de la sorte ils disent que c'est un grand jeune garçon bien fait oui mon père de belle taille sans doute agréable de sa personne assurément de bonne physionomie très bonne sage et bien né tout à fait fort honnête le plus honnête du monde qui parle bien latin et grec oh c'est ce que je ne sais pas et qui sera reçu médecin dans trois jours lui mon père oui est-ce qu'il ne te l'a pas dit non vraiment qui vous l'a dit à vous monsieur purgon est-ce que monsieur purgon le connaît la belle demande il faut bien qu'il le connaisse puisque c'est son neveu neveu de monsieur purgon quelle cliente nous parlons de celui pour qui l'on a demandé en mariage eh oui eh bien c'est le neveu de monsieur purgon qui est le fils de son beau-frère le médecin monsieur diafoirus et ce fils s'appelle thomas diafoirus non pas cléante et nous avons conclu ce mariage-là ce matin monsieur purgon monsieur fleurant et moi et demain ce gendre prétendu doit m'être amené par son père qu'est-ce vous voilà tout éboubi c'est mon père que je connais que vous avez parlé d'une personne et que j'ai entendu une autre quoi monsieur vous auriez fait ce dessein burlesque et avec tout le bien que vous avez vous voudriez marier votre fille avec un oui de quoi te mêles-tu coquine impudente que tu aies mon dieu tout doux vous allez d'abord aux invectives est-ce que nous ne pouvons pas raisonner ensemble sans nous emporter là parlons de sang-froid quelle est votre raison s'il vous plaît pour un tel mariage ma raison est que me voyant infirme et malade comme je le suis je veux me faire un gendre et des alliés médecins afin de m'appuyer de bons secours contre ma maladie d'avoir dans ma famille les sources des remèdes qui me sont nécessaires et d'être à même des consultations et des ordonnances eh bien voilà une raison et il y a du plaisir à se répondre doucement les uns aux autres mais monsieur mettez la main à votre conscience est-ce que vous êtes malade eh comment coquine si je suis malade si je suis malade impudente eh bien oui monsieur vous êtes malade n'ayons point de querelles là-dessus oui vous êtes fort malade j'en demeure d'accord et plus malade que vous ne pensez voilà qui est fait mais votre fille doit épouser un mari elle et n'étant point malade il n'est pas nécessaire de lui donner un médecin c'est pour moi que je lui donne ce médecin et une fille de bon naturel doit être ravie d'épouser ce qui est à la santé de son père ma foi monsieur voulez-vous qu'en ami je vous donne un conseil quel est-il ce conseil de ne point songer à ce mariage là et la raison la raison c'est que votre fille n'y consentira point elle n'y consentira point non ma fille votre fille elle vous dira qu'elle n'a que faire de monsieur diafoiruse de son fils Thomas Diafoirus, ni de tous les Diafoirus du monde. J'en ai affaire, moi, outre que le parti est plus avantageux qu'on ne pense. M. Diafoirus n'a que ce fils-là pour tout héritier, et de plus, M. Purgon, qui n'a ni femme ni enfant, lui donne tout son bien en faveur de ce mariage, et M. Purgon est un homme qui a huit mille bonnes livres de rente. Il faut qu'il ait tué bien des gens pour s'être fait si riche. Oui, mais les livres de rente sont quelque chose, sans compter le bien du père. Monsieur, tout cela est bel et bon, mais j'en reviens toujours là. Je vous conseille entre nous de lui choisir un autre mari. Et elle n'est point faite pour être Madame Diaphorus. Et je veux, moi, que cela soit. ne dites pas cela mais comment que je ne dise pas cela eh non eh pourquoi ne le dirai-je pas on dira que vous ne songez pas à ce que vous dites on dira ce qu'on voudra mais je vous dis que je veux qu'elle exécute la parole que j'ai donnée non je suis sûre qu'elle ne le fera pas je l'y forcerai bien elle ne le fera pas vous dis-je elle le fera ou je la mettrai dans un couvent vous moi bon comment bon vous ne la mettrez point dans un couvent je ne la mettrai point dans un couvent non non non ouais voilà qui est plaisant je ne mettrai pas ma fille dans un couvent si je veux non vous dis-je qui m'en empêchera vous-même moi oui vous n'aurez pas ce coeur-là je l'aurai vous vous moquez je ne me moque point la tendresse paternelle vous prendra elle ne me prendra point une petite larme ou deux des bras jetés au cou un mon petit papa mignon prononcée tendrement sera assez pour vous toucher tout cela ne fera rien oui oui je vous dis que je n'en démordrai point bagatelle ne faut point dire bagatelle mon dieu je vous connais vous êtes bon naturellement je ne suis pas bon et je suis méchant quand je veux doucement monsieur vous ne songez pas que vous êtes malade je lui commande absolument de se préparer à prendre le mari que je dis. Et moi, je lui défends absolument d'en faire rien. Où est-ce que nous sommes ? Et quelle audace est-ce-là à une coquine de servante de parler de la sorte devant son maître ? Quand un maître ne songe pas à ce qu'il fait, une servante bien sensée est en droit de le redresser. Argan court après Toinette. Ah, insolente ! Il faut que je t'assomme ! Toinette se sauve de lui. il est de mon devoir de m'opposer aux choses qui vous peuvent déshonorer argand en colère court après elle autour de sa chaise son bâton à la main viens viens que je t'apprenne à parler toinette courant et se sauvant du côté de la chaise où n'est pas argand je m'intéresse comme je dois à ne vous point laisser faire de folies chienne non je ne consentirai jamais à ce mariage je ne veux point qu'elle épouse votre thomas diafoirus carogne et elle m'obéira plutôt qu'à vous angélique tu ne veux pas m'arrêter cette coquine là eh mon père ne vous faites point malade si tu ne me l'arrêtes je te donnerai ma malédiction et moi je la déshériterai si elle vous obéit argand se jette dans sa chaise étant là de courir après elle ah je ne m'en fuis plus voilà pour me faire mourir ah ma femme approchez oh qu'avez-vous mon pauvre mari venez-vous-en ici à mon secours qu'est-ce donc qu'il y a mon petit-fils mamie mon ami on vient de me mettre en colère hélas pauvre petit mari comment donc mon ami votre coquine toi n'êtes devenue plus insolente que jamais ne vous passionnez donc point elle m'a fait enrager mamie doucement mon fils elle a contrecarré une heure durant les choses que je veux faire là là tout doux elle a eu l'effronterie de me dire que je ne suis point malade c'est une impertinente vous savez mon coeur ce qui en est la commune oui mon coeur elle a tort mon coeur ma moui cette coquine là me fera mourir la commune et là et là elle est la cause de toute la bile que je fais la commune ne vous fâchez point tant et il y a je ne sais combien que je vous dis de me la chasser mon dieu mon fils il n'y a point de serviteurs et de servantes qui n'aient leur défaut on est contraint parfois de souffrir leur mauvaise qualité à cause des bonnes celle-ci est adroite soigneuse diligente et surtout fidèle et vous savez qu'il faut maintenant de grandes précautions pour les gens que l'on prend holà toinette madame pourquoi donc est-ce que vous mettez mon mari en colère moi madame hélas je ne sais pas ce que vous voulez me dire je ne songe qu'à complaire à monsieur en toutes choses la traîtresse il nous a dit qu'il voulait donner sa fille en mariage au fils de m diafoirus je lui ai répondu que je trouvais le parti avantageux pour elle mais que je croyais qu'il ferait mieux de la mettre dans un couvent il n'y a pas grand mal à cela et je trouve qu'elle a raison ma mou vous la croyez c'est une scélérate elle m'a dit sans insolence eh bien je vous crois mon ami là remettez-vous écoutez toinette si vous fâchez jamais mon mari je vous mettrai dehors ça donnez-moi son manteau fourré et des oreillers que je l'accommode dans sa chaise vous voilà je ne sais comment enfoncez bien votre bonnet jusque sur vos oreilles il n'y a rien qui enrume tant que de prendre l'air par les oreilles que je vous suis obligé de tous les soins que vous prenez de moi béline accommodant les oreillers qu'elle met autour d'argan levez-vous que je mette ceci sous vous mettons celui-ci pour vous appuyer et celui-là de l'autre côté mettons celui-ci derrière votre dos et cet autre là pour soutenir votre tête toinette lui mettant rudement un oreiller sur la tête et puis fuyant ah ah ah est-ce celui-ci pour vous garder du serein argand se lève en colère et jette tous les oreillers à toinette ah coquine tu veux m'étouffer hé là hé là qu'est-ce que c'est donc Argan, tout essoufflé, se jette dans sa chaise. Ah ! Ah ! Je n'en puis plus ! Pourquoi vous en portez ainsi ? Elle a cru faire bien ! Vous ne connaissez pas, ma moure, la malice de la pandarde ! Ah ! Elle m'a mis tout hors de moi ! Il faudra plus de huit médecines et de douze lavements pour réparer tout ceci ! Là, là, mon petit ami, apaisez-vous un peu ! ma mie vous êtes toute ma consolation ma vie pauvre petit-fils pour tâcher de reconnaître l'amour que vous me portez je veux mon coeur comme je vous ai dit faire mon testament mon ami ne parlons point de cela je vous prie je ne saurais souffrir cette pensée et le seul mot de testament me fait tressaillir de douleur je vous avais dit de parler pour cela à votre notaire ah le voilà là-dedans que j'ai amené avec moi faites-le donc entrer ma mouh hélas mon ami quand on aime bien un mari on est guère en état de songer à tout cela approchez monsieur de bonne foi approchez prenez un siège s'il vous plaît ma femme m'a dit monsieur que vous étiez fort honnête homme et tout à fait de ses amis et je l'ai chargé de vous parler pour un testament que je veux faire hélas je ne suis point capable de parler de ces choses-là elle m'a monsieur expliqué vos intentions et le dessein où vous êtes pour elle et j'ai à vous dire là-dessus que vous ne sauriez rien donner à votre femme par votre testament mais pourquoi la coutume y résiste si vous étiez en pays de droit écrit cela se pourrait faire mais à paris et dans les pays coutumiers au moins dans la plupart c'est ce qui ne se peut et la disposition serait nulle tout l'avantage qu'hommes et femmes conjoints par mariage se peuvent faire l'un à l'autre c'est un don mutuel entre vifs encore faut-il qu'il n'y ait enfants soit des deux conjoints ou de l'un d'eux lors du décès du premier mourant bien impertinente qu'un mari ne puisse rien laisser à une femme dont il est aimé tendrement et qui prend de lui tant de soin j'aurais envie de consulter mon avocat pour voir comment je pourrais faire ce ne pointe à des avocats qu'il faut aller car ils sont d'ordinaire sévères là-dessus et s'imaginent que c'est un grand crime que de disposer en fraude de la loi ce sont gens de difficultés et qui sont ignorant des détours de la conscience. Il y a d'autres personnes à consulter qui sont bien plus accommodantes, qui ont des expédiants pour passer doucement par-dessus la loi et rendre juste ce qui n'est pas permis, qui savent aplanir les difficultés d'une affaire et trouver des moyens d'éluder la coutume par quelques avantages indirects. Sans cela, où en serions-nous tous les jours ? Il faut de la facilité. dans les choses autrement nous ne ferions rien et je ne donnerais pas un solde de notre métier ma femme m'avait bien dit monsieur que vous étiez fort habile fort honnête homme comment puis-je faire s'il vous plaît pour lui donner mon bien et en frustrer mes enfants comment vous pouvez faire vous pouvez choisir doucement un ami intime de votre femme auquel vous donnerez en bonne forme, par votre testament, tout ce que vous pouvez. Et cet ami ensuite lui rendra tout. vous pouvez encore contracter un grand nombre d'obligations non suspectes au profit de divers créanciers qui prêteront leur nom à votre femme et entre les mains de laquelle ils mettront leur déclaration que ce qu'ils en ont fait n'a été que pour lui faire plaisir vous pouvez aussi pendant que vous êtes en vie mettre entre ses mains de l'argent comptant ou des billets que vous pourrez avoir payables au porteur mon dieu il ne faut point vous tourmenter de tout cela s'il vient doute de vous mon fils je ne veux plus rester au monde maman oui mon ami si je suis assez malheureuse pour vous perdre ma chère femme la vie ne me sera plus de rien m'amour et je suivrai vos pas pour faire connaître la tendresse que j'ai pour vous maman vous me fendez le coeur consolez-vous je vous prie ces larmes sont hors de saison et les choses n'en sont point encore là ah monsieur vous ne savez pas ce que c'est qu'un mari qu'on aime tendrement tout le regret que j'aurais si je meure mamie c'est de n'avoir point un enfant de vous m purgon m'avait dit qu'il m'en ferait faire un cela pourra venir encore il faut faire mon testament de la façon que monsieur dit mais par précaution je veux vous mettre entre les mains vingt mille francs en or que j'ai dans le lambris de mon alcove et deux billets payables aux porteurs qui me sont dus l'un par monsieur damon et l'autre par monsieur non non je ne veux point de tout cela ah combien dites-vous qu'il y a dans votre alcove vingt mille francs ne me parlez point de biens je vous prie ah de combien sont les deux billets françois de montréal ils sont mamie l'un de quatre mille francs et l'autre de six mamie tous les biens du monde mon ami ne me sont rien au prix de vous voulez-vous que nous procédions au testament françois de montréal oui monsieur mais nous serons mieux dans mon petit cabinet mamour conduisez-moi je vous prie pauvre petit-fils les voilà avec un notaire et j'ai ouï parler de testament votre belle-mère ne s'endort point et c'est sans doute quelque conspiration contre votre intérêt où elle pousse votre père qu'il dispose de son bien à sa fantaisie pourvu qu'il ne dispose point de mon coeur tu vois toi ned les desseins violents que l'on fait sur lui oh ne m'abandonne point je te prie dans l'extrémité où je suis moi vous abandonner j'aimerais mieux mourir votre belle-mère a beau me faire sa confidente et me vouloir jeter dans ses intérêts je n'ai jamais pu avoir l'inclination pour elle et j'ai toujours été de votre partie laissez-moi faire j'emploierai toutes choses pour vous servir mais pour vous servir avec plus d'effet je veux changer de batterie couvrir le zèle que j'ai pour vous, et feindre d'entrer dans les sentiments de votre père et de votre belle-mère. Tâche, je t'en conjure, de faire donner avis à Cléante du mariage qu'on a conclu. Je n'ai personne à employer à cet office que le vieux usurier Polychinelle, mon amant. Et il m'en coûtera pour cela quelques paroles de douceur que je veux bien dépenser pour vous. Pour aujourd'hui, il est trop tard, mais demain de grand matin, je l'enverrai quérir, et... sera ravi de toinette voilà qu'on m'appelle bonsoir reposez-vous sur moi acte ii scène i toinette cléante que demandez-vous monsieur ce que je demande ah ah c'est vous quelle surprise que venez-vous faire séant savoir ma destinée parler à l'aimable angélique consulter les sentiments de son cœur et lui demander ses résolutions sur ce mariage fatal dont on m'a oui mais on ne parle pas comme cela de but en blanc angélique il faut des mystères et l'on vous a dit l'étroite garde où elle est retenue qu'on ne la laisse ni sortir ni parler à personne et que ce ne fût que la curiosité vieille tante qui nous fit accorder la liberté d'aller à cette comédie qui donna lieu à la naissance de votre passion. Et nous nous sommes bien gardés de parler de cette aventure. Aussi, ne viens-je pas ici comme Cléante et sous l'apparence de son amant, mais comme ami de son maître de musique, dont j'ai obtenu le pouvoir de dire qu'il m'envoie à sa place. voici son père retirez-vous un peu et me laissez lui dire que vous êtes là m purgon m'a dit de me promener le matin dans ma chambre douze allées et douze venues mais j'ai oublié à lui demander si c'est en long ou en large monsieur voilà un par le bas pandarde tu viens m'ébranler tout le cerveau tu ne songes pas qu'il ne faut point parler si haut à des malades je voulais vous dire monsieur par le bas te dis-je monsieur elle fait semblant de parler et je vous dis que elle fait semblant de parler qu'est-ce que tu dis je dis que voilà un homme qui veut parler à vous qu'il vienne toinette fait signe à cléante d'avancer Monsieur ? Ne parlez pas si haut, de peur d'ébranler le cerveau de monsieur. Monsieur, je suis ravi de vous trouver debout et de voir que vous vous portez mieux. Comment qu'il se porte mieux ? Cela est faux ! Monsieur se porte toujours mal. J'ai ouï dire que monsieur était mieux, et je lui trouve bon visage. Que voulez-vous dire avec votre bon visage ? Monsieur l'a fort mauvais, et ce sont des impertinents qui vous ont dit qu'il était mieux. il ne s'est jamais si mal porté elle a raison il marche dort mange et boit tout comme les autres mais cela n'empêche pas qu'il ne soit fort malade cela est vrai monsieur j'en suis au désespoir je viens de la part du maître à chanter de mademoiselle votre fille il s'est vu obligé d'aller à la campagne pour quelques jours et comme son ami intime il m'envoie à sa place pour lui continuer ses leçons de peur qu'en les interrompant elle ne vînt à oublier ce qu'elle sait déjà fort bien appelez angélique je crois monsieur qu'il sera mieux de mener monsieur à sa chambre non faites-la venir il ne pourra lui donner leçon comme il faut s'ils ne sont en particulier si fait si fait monsieur cela ne fera que vous étourdir et il ne faut rien pour vous émouvoir en l'état où vous êtes et vous ébranler le cerveau point point j'aime la musique et je serais bien aise de ah la voici allez-vous en voir vous si ma femme est habillée venez ma fille votre maître de musique est allé au chant et voilà une personne qui l'envoie à sa place pour vous montrer ah ciel qu'est-ce d'où vient cette surprise c'est quoi qui vous émeut de la sorte c'est mon père une aventure surprenante qui se rencontre ici comment j'ai songé cette nuit que j'étais dans le plus grand embarras du monde et qu'une personne faite tout comme monsieur s'est présentée à moi à qui j'ai demandé secours et qui m'est venue tirer de la peine où j'étais et ma surprise a été grande de voir inopinément en arrivant ici ce que j'ai eu dans l'idée toute la nuit ce n'est pas être malheureux que d'occuper votre pensée soit en dormant soit en veillant et mon bonheur serait grand sans doute si vous étiez dans quelque peine dont vous me jugeassiez digne de vous tirer et il n'y a rien que je ne fisse pour ma foi monsieur je suis pour vous maintenant et je me dédie de tout ce que je disais hier voici m diafaruse le père et m diafaruse le fils qui viennent vous rendre visite que vous serez bien engendré vous allez voir le garçon le mieux fait du monde et le plus spirituel il n'a dit que deux mots qui m'ont ravi et votre fille va être charmée de lui qui feint de vouloir s'en aller ne vous en allez point monsieur c'est que je marie ma fille et voilà qu'on lui amène son prétendu mari qu'elle n'a point encore vu ces mots n'auraient beaucoup monsieur de vouloir que je sois témoin d'une entrevue si agréable c'est le fils d'un habile médecin et le mariage se fera dans quatre jours fort bien mandez le un peu à son maître de musique afin qu'il se trouve à la noce je n'y manquerai pas je vous y prie aussi vous me faites beaucoup d'honneur allons qu'on se range les voici argand mettant la main à son bonnet sans l'ôter monsieur purgon monsieur m'a défendu de découvrir ma tête vous êtes du métier vous savez les conséquences nous sommes dans toutes nos visites pour porter secours aux malades et non pour leur porter de l'incommodité je reçois monsieur nous venons ici monsieur avec beaucoup de joie mon fils thomas et moi l'honneur que vous me faites vous témoignez monsieur j'aurais souhaité le ravissement où nous sommes de pouvoir aller chez vous de la grâce que vous nous faites pour vous en assurer de vouloir bien nous recevoir mais vous savez monsieur dans l'honneur monsieur ce que c'est qu'un pauvre malade de votre alliance qui ne peut faire autre chose et vous assurer que de vous dire ici que dans les choses qui dépendront de notre métier qu'il cherchera toutes les occasions de même qu'en tout autre de vous faire connaître monsieur nous serons toujours prêts monsieur qu'il est tout à votre service à vous témoigner notre zèle allons thomas avancez faites vos compliments thomas diafoirus est un grand benêt nouvellement sorti des écoles qui fait toutes choses de mauvaise grâce et à contre-temps et n'est-ce pas par le père qu'il convient de commencer oui monsieur je viens saluer reconnaître chérir et révérer en vous un second père mais un second père auquel j'ose dire que je me trouve plus redevable qu'au premier le premier m'a engendré mais vous m'avez choisi il m'a reçu par nécessité mais vous m'avez accepté par grâce ce que je tiens de lui est un ouvrage de son corps mais ce que je tiens de vous est un ouvrage de votre volonté et d'autant plus que les facultés spirituelles sont au-dessus des corporelles d'autant plus je vous dois et d'autant plus je tiens précieuse cette future filiation dont je viens aujourd'hui vous rendre par avance les très humbles et très respectueux hommages vive les collèges d'où l'on sort si habile homme cela a-t-il bien été mon père optime argand à angélique allons saluer monsieur baiserais je oui oui madame c'est avec justice que le ciel vous a concédé le nom de belle-mère puisque l'on madame ce n'est pas ma femme c'est ma fille à qui vous parlez où donc est-elle mademoiselle elle va venir mademoiselle attendrai-je mon père qu'elle soit venue mademoiselle faites toujours le compliment de mademoiselle ne plus ne moins que la statue de mémone rendait un son harmonieux lorsqu'elle venait à être éclairée par les rayons du soleil tout de même me sens-je animé d'un doux transport à l'apparition du soleil de vos beautés et comme les naturalistes remarquent que la fleur nommée héliotrope tourne sans cesse vers cet astre du jour aussi mon cœur d'ores en avant tournera toujours vers les astres resplendissants de vos yeux adorables ainsi que vers son pôle unique souffrez donc mademoiselle que j'appende aujourd'hui à l'autel de vos charmes l'offrande de ce coeur qui ne respire et n'ambitionne autre gloire que d'être toute sa vie mademoiselle votre très humble très obéissant et très fidèle serviteur et mari voilà ce que c'est que d'étudier on apprend à dire de belles choses eh que dites-vous de cela que monsieur fait merveille et que s'il est aussi bon médecin qu'il est bon orateur il y aura plaisir à être de ces malades assurément ce sera quelque chose d'admirable s'il fait d'aussi belles cures qu'il fait de beaux discours alors vite ma chaise et des sièges à tout le monde mettez-vous là ma fille vous voyez monsieur que tout le monde admire monsieur votre fils et je vous trouve bien heureux de vous voir un garçon comme cela monsieur ce n'est pas parce que je suis son père mais je puis dire que j'ai sujet d'être content de lui et que tous ceux qui le voient en parlent comme d'un garçon qui n'a point de méchanceté il n'a jamais eu l'imagination bien vive ni ce feu d'esprit qu'on remarque dans quelques-uns mais c'est par là que j'ai toujours bien auguré de sa judiciaire qualité requise pour l'exercice de notre art lorsqu'il était petit il n'a jamais été ce qu'on appelle mièvre et éveillé on le voyait toujours doux paisible et taciturne ne disant jamais mot et ne jouant jamais à tous ces petits jeux que l'on nomme enfantins on eut toutes les peines du monde à lui apprendre à lire et il avait neuf ans qu'il ne connaissait pas encore ses lettres bon disais-je en moi-même les arbres tardifs sont ceux qui portent les meilleurs fruits on grave sur le marbre bien plus malaisément que sur le sable mais les choses y sont conservées bien plus longtemps et cette lenteur à comprendre cette pesanteur d'imagination est la marque d'un bon jugement à venir lorsque je l'envoyai au collège il trouvait de la peine mais il se raidissait contre les difficultés et ses régents se louaient toujours à zamois de son assiduité et de son travail enfin à force de battre le fer il en est venu glorieusement à avoir ses licences et je puis dire sans vanité que depuis deux ans qu'il est sur les bancs il n'y a point de candidat qui ait fait plus de bruit que lui dans toutes les disputes de notre école il s'y est rendu redoutable et il ne s'y passe point d'acte où il n'aille argumenter à outrance pour la proposition contraire il est ferme dans la dispute fort comme un turc sur ses principes ne démord jamais de son opinion et poursuit un raisonnement jusque dans les derniers recoins de la logique mais sur toutes choses ce qui me plaît en lui et en quoi il suit mon exemple c'est qu'il s'attache aveuglément aux opinions de nos anciens et que jamais il n'a voulu comprendre ni écouter les raisons et les expériences des prétendues découvertes de notre siècle touchant la circulation du sang et autres opinions de même farine thomas diafoirus tirant de sa poche une grande thèse roulée qu'il présente à angélique j'ai contre les circulateurs soutenu une thèse qu'avec la permission de monsieur j'ose présenter à mademoiselle comme un hommage que je lui dois des prémices de mon esprit monsieur c'est pour moi un meuble inutile et je ne me connais pas à ces choses-là donnez donnez elle est toujours bonne à prendre pour l'image cela servira à parer notre chambre avec la permission aussi de monsieur je vous invite à venir voir l'un de ces jours pour vous la dissection d'une femme sur quoi je dois raisonner le divertissement sera agréable il y en a qui donnent la comédie à leur maîtresse mais donner une dissection est quelque chose de plus galant au reste pour ce qui est des qualités requises pour le mariage et la propagation je vous assure que selon les règles de nos docteurs il est tel qu'on le peut souhaiter qu'il possède en un degré louable la vertu prolifique et qu'il ait du tempérament qu'il faut pour engendrer et procréer des enfants bien conditionnés n'est-ce pas votre intention monsieur de le pousser à la cour et d'y ménager pour lui une charge de médecin à vous en parler franchement notre métier auprès des grands ne m'a jamais paru agréable et j'ai toujours trouvé qu'il valait mieux pour nous autres demeurer au public le public est commode vous n'avez à répondre de vos actions à personne et pourvu que l'on suive le courant des règles de l'art on ne se met point en peine de tout ce qui peut arriver mais ce qu'il y a de fâcheux auprès des grands c'est que quand ils viennent à être malades ils veulent absolument que leurs médecins les guérissent cela est plaisant et ils sont bien impertinents de vouloir que vous autres messieurs vous les guérissiez vous n'êtes point auprès d'eux pour cela vous n'y êtes que pour recevoir vos pensions et leur ordonner des remèdes c'est à eux à guérir s'ils le peuvent cela est vrai on n'est obligé qu'à traiter les gens dans les formes monsieur faites un peu chanter ma fille devant la compagnie j'attendais vos ordres monsieur et il m'est venu en pensée pour divertir la compagnie de chanter avec mademoiselle une scène d'un petit opéra qu'on a fait depuis peu lui donnant un papier tenez voilà votre parti moi ne vous défendez point s'il vous plaît et me laissez-vous faire comprendre ce que c'est que la scène que nous devons chanter je n'ai pas une voix à chanter mais ici il suffit que je me fasse entendre et l'on aura la bonté de m'excuser par la nécessité où je me trouve de faire chanter mademoiselle les vers en sont-ils beaux c'est proprement ici un petit opéra impromptu Et vous n'allez entendre chanter que de la prose cadencée, ou des manières de vers libre telles que la passion et la nécessité peuvent faire trouver à deux personnes qui disent les choses d'eux-mêmes et parlent sur le champ. fort bien écoute-t-on cléante sous le nom d'un berger explique à sa maîtresse son amour depuis leur rencontre et ensuite ils s'appliquent leurs pensées l'un à l'autre en chantant voici le sujet de la scène un berger était attentif aux beautés d'un spectacle qui ne faisait que de commencer lorsqu'il fut tiré de son attention par un bruit qu'il entendit à ses côtés il se retourne et voit un brutal qui de paroles insolentes, maltraitait une bergère. D'abord, il prend les intérêts d'un sexe à qui tous les hommes doivent hommage. Et, après avoir donné au brutal le châtiment de son insolence, il vient à la bergère et voit une jeune personne qui, des deux plus beaux yeux qu'il n'eût jamais vus, versait des larmes qu'il trouva les plus belles du monde. Hélas, dit-il en lui-même, est-on coupable d'outragir une personne si aimable ? Et quel inhumain, quel barbare ! ne serait touché par de telles larmes il prend soin de les arrêter ces larmes qu'il trouve si belles et l'aimable bergère prend soin en même temps de le remercier de son léger service mais d'une manière si charmante si tendre et si passionnée que le berger n'y peut résister et chaque mot chaque regard est un trait plein de flammes dont son coeur se sent pénétré est-il disait-il quelque chose qui puisse mériter les aimables paroles d'un tel remercîment Et que ne voudrait-on pas faire ? À quel service, à quel danger ne serait-on pas ravi de courir pour s'attirer un seul moment des touchantes douceurs d'une âme si reconnaissante ? Tout le spectacle passe sans qu'il n'y donne aucune attention, mais il se plaint qu'il est trop court parce qu'en finissant, il le sépare de son adorable bergère. Et de cette première vue, de ce premier moment, il emporte chez lui tout ce qu'un amour de plusieurs années peut avoir de plus violent. le voilà aussitôt à sentir tous les maux de l'absence et il est tourmenté de ne plus voir ce qu'il a si peu vu il fait tout ce qu'il peut pour se redonner cette vue dont il conserve nuit et jour une si chère idée mais la grande contrainte où l'on tient sa bergère lui en ôte tous les moyens la violence de sa passion le fait résoudre à demander en mariage l'adorable beauté sans laquelle il ne peut plus vivre et il en obtient d'elle la permission par un billet qu'il a l'adresse de lui faire tenir mais dans le même temps on l'avertit que le père de cette belle a conclu son mariage avec un autre et que tout se dispose pour célébrer la cérémonie jugez quelle atteinte cruelle au coeur de ce triste berger le voilà accablé d'une mortelle douleur il ne peut souffrir l'effroyable idée de voir tout ce qu'il aime entre les bras d'un autre et son amour au désespoir lui fait trouver moyen de s'introduire dans la maison de sa bergère pour apprendre ses sentiments et savoir d'elle la destinée à laquelle il doit se résoudre il y rencontre les apprêts de tout ce qu'il craint il y voit venir l'indigne rival que le caprice d'un père oppose aux tendresses de son amour il le voit triomphant ce rival ridicule auprès de l'aimable bergère ainsi qu'auprès d'une conquête qui lui est assurée et cette vue le remplit d'une colère dont il a peine à se rendre le maître il jette de douloureux regards sur celle qu'il adore et son respect et la présence de son père l'empêchent de lui rien dire que des yeux mais enfin il force toute contrainte et le transport de son amour l'oblige à lui parler ainsi belle philie sait trop sait trop souffrir rompons ce dur silence émouvrez vos pensées apprenez-moi ma destinée faut-il vivre faut-il mourir vous me voyez tircis triste et mélancolique aux apprêts de l'hymen dont vous vous alarmez je lève au ciel les yeux je vous regarde je si vous en dire assez oui je ne croyais pas que ma fille fût si habile que de chanter ainsi à livre ouvert sans hésiter hélas belle philis se pourrait-il que l'amoureux tircis eût assez de bonheur pour avoir quelque place dans votre coeur Je ne m'en défends point dans cette peine extrême. Oui, Tyrsis, je vous aime. Oh, paroles pleines d'appât, Ai-je bien entendu, hélas ? Redites-la, Phyllis, Que je n'en doute pas. Oui, Tyrcys, je vous aime. De grâce encore, Phyllis, Je vous aime. recommencez sans foi ne vous en lassez pas je vous aime je vous aime oui tircis je vous aime dieu roi qui sous vos pieds regardez tout le monde pouvez-vous comparer votre bonheur au mien mais philis une pensée vient troubler ce doux transport un rival un rival je ne hais plus que la mort et sa présence ainsi qu'à vous m'est un cruel supplice mais un père à ses vœux vous veut assujettir plutôt plutôt mourir que de jamais y consentir plutôt plutôt mourir plutôt mourir que dit le père à tout cela il ne dit rien Et voilà un soper que ce père-là de souffrir toutes ces sottises-là sans rien dire. non non en voilà assez cette comédie là est de fort mauvais exemples le berger tircis est un impertinent et la bergère phyllis une impudente de parler de la sorte devant son père montre-moi ce papier ah où sont donc les paroles que vous avez dites il n'y a là que de la musique écrite est-ce que vous ne savez pas monsieur qu'on a trouvé depuis peu l'invention d'écrire les paroles avec les notes mêmes fort bien je suis votre serviteur monsieur jusqu'au revoir nous nous serions bien passés de votre impertinent opéra j'ai cru vous divertir les sottises ne divertissent point a voici ma femme ma moure voici le fils de m diafoy russe thomas diafoirus commence un compliment qu'il aurait étudié et la mémoire lui manquant ne peut continuer madame c'est avec justice que le ciel vous a concédé le nom de belle-mère puisque l'on voit sur votre visage monsieur je suis ravi d'être venu ici à propos pour avoir l'honneur de vous voir puisque l'on voit sur votre visage puisque l'on voit sur votre visage madame vous m'avez interrompu au milieu de ma période et cela m'a troublé la mémoire thomas réservez cela pour une autre fois je voudrais mamie que vous eussiez été ici tantôt ah madame vous avez bien perdu de n'avoir point été au second père à la statue de même nom et à la fleur nommée héliotrope allô ma fille touchez dans la main de monsieur et lui donnez votre foi comme à un mari mon père eh bien mon père qu'est-ce que cela veut dire de grâce ne précipitez pas les choses donnez-nous au moins le temps de nous connaître et de voir naître en nous l'un pour l'autre cette inclination si nécessaire a composé une union parfaite quant à moi mademoiselle elle est déjà toute née en moi et je n'ai pas besoin d'attendre davantage si vous êtes si prompte monsieur il n'en est pas même de moi et je vous avoue que votre mérite n'a pas encore assez fait d'impression dans mon âme oh bien bien cela aura tout le loisir de se faire quand vous serez mariés ensemble et mon donnez-moi du temps je vous prie le mariage est une chaîne où l'on ne doit jamais soumettre un coeur par force et si monsieur est honnête homme il ne doit point vouloir accepter une personne qui serait à lui par contrainte mademoiselle et je puis être honnête homme et vouloir bien vous accepter des mains de votre père c'est un méchant moyen de se faire aimer de quelqu'un que de lui faire violence nous lisons des anciens mademoiselle que leur coutume était d'enlever par force de la maison des pères les filles qu'on menait marier afin qu'il ne semblât pas que ce fût de leur consentement qu'elles convolaient dans les bras d'un homme les anciens monsieur sont les anciens et nous sommes les gens de maintenant les grimaces ne sont point nécessaires dans notre siècle et quand un mariage nous plaît nous savons fort bien y aller sans qu'on nous y traîne donnez-vous patience et si vous m'aimez monsieur vous devez vouloir tout ce que je veux oui mademoiselle jusqu'aux intérêts de mon amour exclusivement mais la grande marque d'amour c'est d'être soumise aux volontés de celle qu'on aime distinguo mademoiselle dans ce qui ne regarde point sa possession concedo mais dans ce qui la regarde vous avez beau raisonner m effraye est moulu du collège et il vous donnera toujours votre reste pourquoi tant résister et refuser la gloire d'être attaché au corps de la faculté elle a peut-être quelque inclination en tête si j'en avais madame elle serait telle que la raison et l'honnêteté pourraient me le permettre oui je joue ici un plaisant personnage si j'étais que de vous mon fils je ne la forcerai point de se marier et je sais bien ce que je ferai oh je sais madame ce que vous voulez dire et les bontés que vous avez pour moi mais peut-être que vos conseils ne seront pas assez heureux pour être exécutés c'est que les filles bien sages et bien honnêtes comme vous se moquent d'être obéissantes et soumises aux volontés de leur père cela était bon autrefois le devoir d'une fille a des bornes madame et la raison et les lois ne l'étendent point toutes sortes de choses. C'est-à-dire que vos pensées ne sont que pour le mariage, mais vous voulez choisir un époux à votre fantaisie. Si mon père ne veut pas me donner un mari qui me plaise, je le conjurerai au moins de ne me point forcer à en épouser un que je ne puisse pas aimer. Monsieur, je vous demande pardon de tout ceci. Chacun a son but en se mariant. Pour moi, qui ne veux un mari que pour l'aimer véritablement, et qui prétendent en faire tout l'attachement de ma vie je vous avoue que j'y cherche quelques précautions il y en a d'autres qui prennent des maris seulement pour se tirer de la contrainte de leurs parents et se mettre en état de faire tout ce qu'elles voudront il y en a d'autres madame qui font du mariage un commerce de pur intérêt qui ne se marient que pour gagner des douaires que pour s'enrichir par la mort de ceux qu'elles épousent et courent sans scrupule de mari en mari pour s'approprier leurs dépouilles ces personnes-là à la vérité n'y cherchent pas tant de façon et regardent peu à la personne je vous trouve aujourd'hui bien résonnante et je voudrais bien savoir ce que vous voulez dire par là moi madame que voudrais-je dire que ce que je dis vous êtes si sotte mamie qu'on ne saurait plus vous souffrir vous voudriez bien madame obliger à vous répondre quelque impertinence mais je vous avertis que vous n'aurez pas cet avantage il n'est rien d'égal à votre insolence non madame vous avez beau dire et vous avez un ridicule orgueil une impertinente présomption qui fait hausser les épaules à tout le monde tout cela madame ne servira de rien je serai sage en dépit de vous et pour vous ôter l'espérance de pouvoir réussir dans ce que vous voulez je vais m'ôter de votre vue écoute il n'y a point de milieu à cela choisis d'épouser dans quatre jours ou monsieur ou un couvent abeille ne vous mettez pas en peine je l'arrangerai bien abeille je suis fâché de vous quitter mon fils mais j'ai une affaire en ville dont je ne puis me dispenser je reviendrai bientôt allez ma'mour et passez chez votre notaire afin qu'il expédie ce que vous savez abeille adieu mon petit ami adieu ma'mie ah voilà une femme qui m'aime cela n'est pas croyable nous allons monsieur prendre congé de vous je vous prie monsieur de me dire un peu comment je suis m diafoirus lui tâte le pouls allons thomas prenez l'autre bras de monsieur pour voir si vous saurez porter un bon jugement de son pouls quid dit-on que le pouls de monsieur est le pouls d'un homme qui ne se porte point bien qu'il est duruscule pour ne pas dire dur fort bien repoussant bene et même un peu caprisant optime ce qui marque une intempérie dans le paranchymesplénique c'est-à-dire la rate fort bien non m purgon dit que c'est mon foie qui est malade eh oui qui dit paranchymes dit l'un et l'autre à cause de l'étroit sympathie qu'ils ont ensemble par le moyen du va brevet du piloré et souvent des méas colidoques ils vous ordonnent sans doute de manger force rôti non rien que du bouilli oui rôti bouilli même chose ils vous ordonnent fort prudemment et vous ne pouvez être entre de meilleures mains monsieur combien est-ce qu'il faut mettre de grains de sel dans un oeuf par les nombres pairs comme dans les médicaments par les nombres impairs jusqu'au revoir monsieur je viens mon fils avant que de sortir vous donner avis d'une chose à laquelle il faut que vous preniez garde en passant par devant la chambre d'angélique j'ai vu un jeune homme avec elle qui s'est sauvé d'abord qu'il m'a vu un jeune homme avec ma fille Oui, votre petite fille Louison était avec eux, qui pourra vous en dire des nouvelles. Envoyez-la ici, ma mourante, envoyez-la ici. L'effrontée, je ne m'étonne plus de sa résistance. Qu'est-ce que vous voulez, mon papa ? Ma belle-maman m'a dit que vous me demandiez. Oui, venez ça, avancez là. Tournez-vous, levez les yeux, regardez-moi. Quoi, mon papa ? là quoi vous n'avez rien à me dire je vous dirai si vous voulez pour vous désennuyer le conte de podame ou bien la fable du corbeau et du renard qu'on m'a apprise depuis peu ce n'est pas là ce que je demande Quoi donc ? Ah, rusé, vous savez bien ce que je veux dire. Pardonnez-moi, mon papa. Est-ce là comme vous m'obéissez ? Quoi ? Ne vous ai-je pas recommandé de me venir dire d'abord tout ce que vous voyez ? Oui, mon papa. L'avez-vous fait ? Oui, mon papa, je suis venu dire tout ce que j'ai vu. Et n'avez-vous rien vu aujourd'hui ? Non, mon papa. Non ? Non, mon papa. Assurément ? Assurément. Non. je m'en vais vous faire voir quelque chose moi il va prendre une poignée de verges ah mon papa petite masque vous ne me dites pas que vous avez vu un homme dans la chambre de votre soeur mon papa voici qui vous apprendra à mentir louison se jette à genoux ah mon papa C'est que ma soeur m'avait dit de ne pas vous le dire, mais je m'en vais vous dire tout. Il faut premièrement que vous ayez le fouet pour avoir menti, et puis après nous verrons au reste. Pardon mon papa. Non, non. Mon pauvre papa, ne me donnez pas le fouet. Vous l'aurez ! Au nom de Dieu, mon papa, que je n'ai les pas ! Argan la prenant pour la fouetter. Allons, allons ! Ah, mon papa, vous m'avez blessée ! Attendez, je suis morte ! Elle contrefait la morte. Oh là ! Qu'est-ce que... louison louison mon dieu louison ma fille malheureux ma pauvre fille est morte qu'ai-je fait misérable chaîne de verge la peste soit des verges ma pauvre fille ma pauvre petite louison là là mon papa ne pleurez point tant je ne suis pas morte tout à fait voyez-vous la petite rusée oh ça ça Je vous pardonne pour cette fois, pourvu que vous me disiez bien tout. Ah oui, mon papa. Prenez-y garde au moins, car voilà un petit doigt qui sait tout et qui me dira si vous mentez. Mais mon papa ne dit pas à ma soeur que je vous le dis. Non, non. C'est mon papa qu'il est venu un homme dans la chambre de ma soeur comme j'y étais. Eh bien ? Je lui ai demandé ce qu'il demandait et il m'a dit qu'il était son maître à chanter. Hum hum, voilà. Voilà l'affaire. Eh bien ? Ma sœur est venue après. Eh bien ? Elle lui a dit, sortez, sortez, sortez, mon Dieu, sortez. Vous me mettez au désespoir. Eh bien ? Et lui, il ne voulait pas sortir. Qu'est-ce qu'il lui disait ? Il lui disait je ne sais combien de choses. Et quoi encore ? Il lui disait tout ci, tout ça, qu'il aimait bien et qu'elle était la plus belle du monde. Et puis après ? Et puis après, il se mettait à genoux devant elle. Et puis après ? Et puis après ? lui baiser les mains. Et puis après ? Et puis après, ma belle-maman est venue à la porte et il s'est enfui. Il n'y a point autre chose ? Non, mon papa. Voilà mon petit doigt pourtant qui gronde quelque chose. Attendez et... Ah, ah, oui... Oh, oh... Voilà mon petit doigt qui me dit quelque chose que vous avez vu et que vous ne m'avez pas dit. Ah, mon papa, votre petit doigt est un menteur. Prenez garde. Non, mon papa, ne le croyez pas, il ment, je vous assure. Bien, bien, nous verrons cela. Allez-vous-en et prenez bien garde à tout. Allez. Il n'y a plus d'enfant. que d'affaire. Je n'ai pas seulement le loisir de songer à ma maladie. En vérité, je n'en puis plus. Il se remet dans sa chaise. Eh bien, mon frère, qu'est-ce ? Comment vous portez-vous ? Ah, mon frère, fort mal. Comment fort mal ? Oui, je suis dans une faiblesse si grande que cela n'est pas croyable. Ah, voilà qui est fâcheux ! Je n'ai pas seulement la force de pouvoir parler. J'étais venu ici, mon frère, vous proposer un parti pour ma nièce Angélique. Mon frère, ne me parlez point de cette coquine-là. C'est une fréponne, une impertinente, une effrontée que je mettrai dans un couvent avant qu'il soit de jour. Ah, voilà qui est bien. Je suis bien aise que la force vous revienne un peu et que ma visite vous fasse du bien. Oh ça, nous parlerons d'affaires tantôt. je vous amène ici un divertissement que j'ai rencontré qui dissipera votre chagrin et vous rendra l'âme mieux disposée aux choses que nous avons à dire ce sont des égyptiens vêtus en maure qui font des danses mêlées de chansons où je suis sûr que vous prendrez plaisir et cela vaudra bien une ordonnance de m purgon allons acte iii scène 1 bérald argand toinette eh bien mon frère qu'en dites-vous cela ne vaut-il pas bien une prise de casse de bonne casse est bonne ossa voulez-vous que nous parlions un peu ensemble un peu de patience mon frère je vais revenir tenez monsieur vous ne songez pas que vous ne sauriez marcher sans bâton tu as raison n'abandonnez pas s'il vous plaît les intérêts de votre nièce j'emploierai toute chose pour lui obtenir ce qu'elle souhaite il faut absolument empêcher ce mariage extravagant qu'il s'est mis dans la fantaisie et j'avais songé en moi-même que ça aurait été une bonne affaire de pouvoir introduire ici un médecin à notre poste pour le dégoûter de son m purgon et lui décrier sa conduite mais comme nous n'avons personne en main pour cela j'ai résolu de jouer en tour de ma tête comment c'est une imagination burlesque ce sera peut-être plus heureux que sage laissez-moi faire agissez de votre côté voici notre homme vous voulez bien mon frère que je vous demande avant toute chose de ne vous point échauffer l'esprit dans notre conversation voilà qui est fait de répondre sans nulle aigreur aux choses que je pourrais vous dire oui et de raisonner ensemble sur les affaires dont nous avons à parler avec un esprit détaché de toute passion mon dieu oui voilà bien du préambule d'où vient mon frère qu'ayant le bien que vous avez et n'ayant d'enfant qu'une fille car je ne compte pas la petite d'où vient dis-je que vous parlez de la mettre dans un couvent d'où vient mon frère que je suis maître dans ma famille pour faire ce que bon me semble votre femme ne manque pas de vous conseiller de vous défaire ainsi de vos deux filles et je ne doute point que par un esprit de charité elle ne fût ravie de les voir toutes deux bonnes religieuses nous y voici voilà tout d'abord la pauvre femme en jeu c'est elle qui fait tout le mal et tout le monde lui en veut non mon frère laissons lala c'est une femme qui a les meilleures intentions du monde pour votre famille et qui est détachée de toutes sortes d'intérêts qui a pour vous une tendresse merveilleuse et qui montre pour vos enfants une affection et une bonté qui n'est pas concevable cela est certain n'en parlons point et revenons à votre fille sur quelle pensée mon frère la voulez-vous donner en mariage au fils d'un médecin sur la pensée mon frère de me donner un gendre tel qu'il me le faut ce n'est point là mon frère le fait de votre fille et il se présente un parti plus sortable pour elle oui mais celui-ci mon frère est plus sortable pour moi mais le mari qu'elle doit prendre doit-il être mon frère ou pour elle ou pour vous il doit être mon frère et pour elle et pour moi Et je veux mettre dans ma famille les gens dont j'ai besoin. Par cette raison-là, si votre petite était grande, vous lui donneriez en mariage un apothicaire ? Pourquoi non ? est-il possible que vous serez toujours embéguiné de vos apothicaires et de vos médecins et que vous vouliez être malade en dépit des gens et de la nature comment l'entendez-vous mon frère j'entends mon frère que je ne vois point d'homme qui soit moins malade que vous et que je ne demanderai point une meilleure constitution que la vôtre une grande marque que vous vous portez bien et que vous avez un corps parfaitement bien composé c'est qu'avec tous les soins que vous avez pris vous n'avez pu parvenir encore à gâter la bonté de votre tempérament et que vous n'êtes point crevé de toutes les médecines qu'on vous a fait prendre mais savez-vous mon frère que c'est cela qui me conserve et que m purgon dit que je succomberais s'il était seulement trois jours sans prendre soin de moi si vous n'y prenez pas garde il prendra tant soin de vous qu'il vous enverra en l'autre monde mais raisonnons un peu mon frère vous ne croyez donc point à la médecine non mon frère et je ne vois pas que pour son salut il soit nécessaire d'y croire quoi vous ne tenez pas véritable une chose établie par tout le monde et que tous les siècles ont révérée bien loin de la tenir véritable je la trouve entre nous une des plus grandes folies qui soit parmi les hommes et à regarder les choses en philosophe je ne vois point une plus plaisante mômerie je ne vois rien de plus ridicule qu'un homme qui se veut mêler d'en guérir un autre Pourquoi ne voulez-vous pas, mon frère, qu'un homme en puisse guérir un autre ? Par la raison, mon frère, que les ressorts de notre machine sont des mystères jusqu'ici où les hommes ne voient goutte, et que la nature nous a mis au devant des yeux des voiles trop épais pour y connaître quelque chose. Les médecins ne savent donc rien, à votre compte. C'est fait, mon frère. Ils savent la plupart de fort belles humanités, savent parler en beau latin, savent nommer en grec toutes les maladies, les définir et les diviser. mais pour ce qui est de les guérir c'est ce qu'ils ne savent pas du tout mais toujours faut-il demeurer d'accord que sur cette matière les médecins en savent plus que les autres ils savent mon frère ce que je vous ai dit qui ne guérit pas de grand'chose et toute l'excellence de leur art consiste en un pompeux galimatia en un spécieux babil qui vous donne des mots pour des raisons et des promesses pour des effets mais enfin mon frère il y a des gens aussi sages et aussi habiles que vous Nous voyons que, dans la maladie, tout le monde a recours aux médecins. C'est une marque de la faiblesse humaine, et non pas de la vérité de leur art. Mais il faut bien que les médecins croient leur art véritable, puisqu'ils s'en servent pour eux-mêmes. C'est qu'il y en a parmi eux qui sont eux-mêmes dans l'erreur populaire dont ils profitent, et d'autres qui en profitent sans y être. Votre monsieur Purgon, par exemple, n'y sait point de finesse. C'est un homme tout médecin, depuis la tête jusqu'aux pieds. un homme qui croit à ses règles plus qu'à toutes les démonstrations des mathématiques et qui croirait du crime à les vouloir examiner qui ne voit rien d'obscur dans la médecine rien de douteux rien de difficile et qui avec une impétuosité de prévention une raideur de confiance une brutalité de sens commun et de raison donne au travers des purgations et des saignées et ne balance aucune chose il ne lui faut point vouloir mal de tout ce qu'il pourra vous faire c'est de la meilleure foi du monde qu'il vous expédiera il ne le fera en vous tuant que ce qu'il a fait à sa femme et à ses enfants et ce qu'en a besoin il ferait à lui-même c'est que vous avez mon frère une dent de lait contre lui mais enfin venons au fait que faire donc quand on est malade rien mon frère rien rien il ne faut que demeurer en repos la nature d'elle-même quand nous la laissons faire se tire doucement du désordre où elle est tombée c'est notre inquiétude c'est notre impatience qui gâtent tout et presque tous les hommes meurent de leurs remèdes et non pas de leurs maladies mais il faut demeurer d'accord mon frère qu'on peut aider cette nature par de certaines choses mon dieu mon frère ce sont de pures idées dont nous aimons à nous repaître et de tout temps il s'est glissé parmi les hommes de belles imaginations que nous venons à croire parce qu'elle nous flatte et qu'il serait à souhaiter qu'elle fût véritable. Lorsqu'un médecin vous parle d'aider, de secourir, de soulager la nature, de lui ôter ce qui lui nuit et lui donner ce qui lui manque, de la rétablir et de la remettre dans une pleine facilité de ses fonctions. Lorsqu'il vous parle de rectifier le sang, de tempérer les entrailles et le cerveau, de dégonfler la rate, de raccommoder la poitrine, de réparer le foie, de fortifier le cœur, de rétablir et conserver la chaleur humaine, et d'avoir des secrets pour étendre la vie à de longues années. Il vous dit justement le roman de la médecine. Mais quand vous en venez à la vérité et à l'expérience, vous ne trouvez rien de tout cela. Il en est comme de ces beaux songes qui ne vous laissent au réveil que le déplaisir de les avoir crus. C'est-à-dire que toute la science du monde est renfermée dans votre tête et vous voulez en savoir plus que tous les grands médecins de notre siècle. Dans les discours et dans les choses, ce sont deux sortes de personnes que vos grands médecins. Entendez-les parler, les plus habiles gens du monde. Voyez-les faire, les plus ignorants de tous les hommes. vous êtes un grand docteur à ce que je vois et je voudrais bien qu'il y eût ici quelqu'un de ces messieurs pour rembarrer vos raisonnements et rabaisser votre moi mon frère je ne prends point à tâche de combattre la médecine et chacun à ses périls et fortunes peut croire tout ce qui lui plaît ce que j'en dis n'est qu'entre nous et j'aurais souhaité de pouvoir un peu vous tirer de l'erreur où vous êtes et pour vous divertir vous mener voir sur ce chapitre quelques-unes des comédies de molière c'est un bon impertinent que votre molière avec ses comédies et je le trouve bien plaisant d'aller jouer d'honnêtes gens comme les médecins ce ne sont point les médecins qu'il joue mais le ridicule de la médecine c'est bien à lui à faire de se mêler de contrôler la médecine voilà un bon ego un bon impertinent de se moquer des consultations et des ordonnances de s'attaquer au corps des médecins et d'aller mettre sur son théâtre des personnes vénérables comme ces messieurs-là que voulez-vous qu'il y mette que les diverses professions des hommes on y met bien tous les jours les princes et les rois qui sont d'aussi bonne maison que les médecins par la mort non de diable si j'étais que des médecins je me vengerais de son impertinence et quand il sera malade je le laisserais mourir sans secours et il aurait beau faire et beau dire je ne lui ordonnerais pas la moindre petite saignée le moindre petit lavement, et je lui dirai, crève, crève, cela t'apprendra une autre fois à te jouer de la faculté. Vous voilà bien en colère contre lui. Oui, c'est un malavisé, et si les médecins sont sages, ils feront ce que je dis. Il sera encore plus sage que vos médecins, car il ne leur demandera point de secours. Tant pis pour lui, s'il n'a point recours aux remèdes. Il a assez raison pour n'en point vouloir. et il soutient que cela n'est permis qu'aux gens vigoureux et robustes, et qui ont des forces de reste pour porter les remèdes avec la maladie. Mais que pour lui, il n'a justement de la force que pour porter son mal. Les sept raisons que voilà ! Tenez, mon frère, ne parlons point de cet homme-là davantage, car cela m'échauffe la bile, et vous me donneriez mon mal. Je le veux bien, mon frère. Et pour changer de discours, je vous dirais que, sur une petite répugnance que vous témoigne votre fille, Vous ne devez point prendre les résolutions violentes de la mettre dans un couvent, que pour le choix d'un gendre, il ne faut pas suivre aveuglément la passion qui vous emporte, et qu'on doit sur cette matière s'accommoder un peu à l'inclination d'une fille, puisque c'est pour toute la vie, et que de là dépend tout le bonheur d'un mariage. M. Florent, une seringue à la main. Ah ! mon frère, avec votre permission... Comment ? que voulez-vous faire monsieur fleurant prendre ce petit lavement là ce sera bientôt fait monsieur fleurant vous vous moquez est-ce que vous ne sauriez être un moment sans lavement ou sans médecine remettez cela une autre fois et demeurez un peu en repos monsieur fleurant à ce soir ou à demain au matin de quoi vous mêlez vous de vous opposer aux ordonnances de la médecine et d'empêcher monsieur de prendre mon clistère vous êtes bien plaisant d'avoir cette hardiesse là allez monsieur on voit bien que vous n'avez pas accoutumé de parler à des visages on ne doit point ainsi se jouer des remèdes et me faire perdre mon temps je ne suis venu ici que sur une bonne ordonnance et je vais dire à m purgon comme on m'a empêché d'exécuter ses ordres et de faire ma fonction vous verrez vous verrez mon frère vous serez causé ici de quelque malheur le grand malheur de ne pas prendre un lavement que m purgon a ordonné encore un coup mon frère est-il possible qu'il n'y ait pas moyen de vous guérir de la maladie des médecins et que vous vouliez être toute votre vie ensevelie dans leurs remèdes mon dieu mon frère vous en parlez comme un homme qui se porte bien mais si vous étiez à ma place vous changeriez bien de langage Il est aisé de parler contre la médecine quand on est en pleine santé. Mais quel mal avez-vous ? vous me feriez enrager je voudrais que vous lussiez mon mal pour voir si vous jaseriez tant ah voici m purgon je viens d'apprendre là-bas à la porte de jolies nouvelles qu'on se moque ici de mes ordonnances et qu'on a fait refus de prendre le remède que j'avais prescrit monsieur ce n'est pas voilà une hardiesse bien grande une étrange rébellion d'un malade contre son médecin cela est épouvantable un clister que j'avais pris plaisir à composer moi-même ce n'est pas moi inventé et formé dans toutes les règles de l'art il a tort et qui devait faire dans les entrailles un effet merveilleux mon frère le renvoyer avec mépris c'est louis c'est une action exorbitante Cela est vrai. Un attentat énorme contre la médecine. Il est cause. Un crime de laisse-faculté qui ne se peut assez punir. Vous avez raison. Je vous déclare que j'aurai commerce avec vous. C'est mon frère. Que je ne veux plus d'alliance avec vous. Vous ferez bien. Et que pour finir notre liaison avec vous, voilà la donation que je faisais à mon neveu en faveur du mariage. c'est mon frère qui a fait tout le mal méprisez mon clister faites-le venir je vais le prendre je vous aurais tiré d'affaire avant qu'il fût peu il ne le mérite pas j'allais nettoyer votre corps et en évacuer entièrement les mauvaises humeurs ah mon frère et je ne voulais plus qu'une douzaine de médecines pour vider le fond du sac il est indigne de vos soins mais puisque vous n'avez pas voulu guérir par mes mains ce n'est pas ma faute puisque vous vous êtes soustrait de l'obéissance que l'on doit à son médecin cela crie vengeance puisque vous vous êtes déclaré rebelle au remède que je vous ordonnais point du tout j'ai à vous dire que je vous abandonne à votre mauvaise constitution à l'intempérie de vos entrailles à la corruption de votre sang, à l'accreté de votre bile et à la féculence de vos humeurs. C'est fort bien fait. Oh, mon Dieu ! Et je veux qu'avant qu'il soit quatre jours, vous deveniez dans un état incurable. Ah, miséricorde ! Que vous tombiez dans la bradypepsie. Monsieur Purgon ! De la bradypepsie dans la dyspepsie. Monsieur Purgon ! De la dyspepsie dans la pepsie. M. Purgon ! De la Pepsi dans la lianterie. M. Purgon ! De la lianterie dans la dysenterie. M. Purgon ! De la dysenterie dans l'hydropysie. M. Purgon ! Et de l'hydropysie dans la privation de la vie, où vous aura conduit votre folie. Ah, mon Dieu, je suis mort ! mon frère vous m'avez perdu quoi qu'y a-t-il je n'en puis plus je sens déjà que la médecine se venge ma foi mon frère vous êtes fou je ne voudrais pas pour beaucoup de choses qu'on vous vit faire ce que vous faites tâtez-vous un peu je vous prie revenez à vous-même et ne donnez point tant à votre imagination vous voyez mon frère les étranges maladies dont il m'a menacé le simple homme que vous êtes il dit que je deviendrai incurable avant qu'il soit quatre jours et ce qu'il dit que fait-il à la chose est-ce un oracle qui a parlé il semble à vous entendre que m purgon tienne dans ses mains le filet de vos jours et que d'autorité suprême il vous l'allonge et vous le raccourcisse comme il lui plaît songez que les principes de votre vie sont en vous-même et que le courroux de m purgon est aussi peu capable de vous faire mourir que ses remèdes de vous faire vivre voici une aventure si vous voulez à vous défaire des médecins ou si vous êtes né à ne pouvoir vous en passer il est aisé d'en avoir un autre avec lequel mon frère vous puissiez courir un peu moins de risques mon frère il sait tout mon tempérament et la manière dont il faut me gouverner il faut vous avouer que vous êtes un homme d'une grande prévention Et que vous voyez les choses avec d'étranges yeux. Monsieur, voilà un médecin qui demande à vous voir. Et quel médecin ? un médecin de la médecine je te demande qui il est je ne le connais pas mais il me ressemble comme deux gouttes d'eau et si je n'étais sûre que ma mère était honnête femme je dirais que ce seraient quelques petits frères qu'elle m'aurait donnés depuis le trépas de mon père vous êtes servi à souhait un médecin vous quitte un autre se présente j'ai bien peur que vous ne soyez cause de quelque malheur encore vous en revenez toujours là voyez-vous j'ai sur le coeur toutes ces maladies là que je ne connais point c'est toinette en agréé que je vienne vous rendre visite et vous offrir mes petits services pour toutes les saignées et les purgations dont vous aurez besoin monsieur je vous suis fort obligé par ma foi voilà toinette elle-même monsieur je vous prie de m'excuser j'ai oublié de donner une commission à montvallée je reviens tout à l'heure ne diriez-vous pas que c'est effectivement il est vrai que la ressemblance est tout à fait grande mais ce n'est pas la première fois qu'on a vu de ces sortes de choses et les histoires ne sont pleines que de ces jeux de la nature pour moi j'en suis surpris et toi nette quitte son habit de médecin si promptement qu'il est difficile de croire que ce soit elle qui apparût en médecin que voulez-vous monsieur comment ne m'avez-vous pas appelé moi non il faut donc que les oreilles m'écornaient demeure un peu ici pour voir comme ce médecin te ressemble oui vraiment j'ai affaire là-bas et je l'ai assez vu si je ne les voyais tous deux je croirais que ce n'est qu'un j'ai lu des choses surprenantes de ces sortes de ressemblances et nous en avons vu de notre temps où tout le monde s'est trompé oh pour moi j'aurais été trompé à celle-là et j'aurais juré que c'est la même personne monsieur je vous demande pardon de tout mon coeur cela est admirable vous ne trouverez pas mauvais s'il vous plaît la curiosité que j'ai eue de voir une illustre malade comme vous êtes et votre réputation qui s'étend partout peut excuser la liberté que j'ai prise monsieur je suis votre serviteur je vois monsieur que vous me regardez fixement quel âge croyez-vous bien que j'aie je crois que tout au plus vous pouvez avoir vingt-six ou vingt-sept ans j'en ai quatre-vingt-dix quatre-vingt-dix oui vous voyez en effet des secrets de mon art de me conserver ainsi frais et vigoureux et par ma foi voilà un beau jeune vieillard pour quatre-vingt-dix ans je suis médecin passager qui vais de ville en ville de province en province de royaume en royaume pour chercher d'illustres matières à ma capacité pour trouver des malades dignes de m'occuper capables d'exercer les grands et beaux secrets que j'ai trouvés dans la médecine je dédaigne de m'amuser à ce menu fatras de maladies ordinaires à ces bagatelles de rhumatismes et de fluxions à ces fièvrotes à ces vapeurs et à ces migraines je veux des maladies d'importance de bonnes fièvres continues avec des transports au cerveau de bonnes fièvres pourprées de bonnes de bonnes hydropisies formées de bonnes pleurésies avec des inflammations de poitrine c'est là que je me plais c'est là que je triomphe et je voudrais monsieur que vous eussiez toutes les maladies que je viens de dire que vous fussiez abandonnés de tous les médecins désespérés à l'agonie pour vous montrer l'excellence de mes remèdes et l'envie que j'aurais de vous rendre service je vous suis obligé monsieur de que vous avez pour moi donnez-moi votre pouls allons donc que l'on batte comme il faut ah je vous ferai bien aller comme vous devez ouais ce pouls là fait l'impertinent je vois bien que vous ne me connaissez pas encore qui est votre médecin monsieur cet homme-là n'est point écrit sur mes tablettes entre les grands médecins de quoi dit-il que vous êtes malade il dit que c'est du foie et d'autres disent que c'est de la rate ce sont tous des ignorants c'est du poumon que vous êtes malade du poumon oui que sentez-vous je sens de temps en temps des douleurs de tête justement le poumon il me semble parfois que j'ai un voile devant les yeux le poumon j'ai quelquefois des maux de coeur le poumon je sens parfois des lassitudes par tous les membres le poumon et quelquefois il me prend des douleurs dans le ventre comme si c'était des coliques le poumon vous avez appétit à ce que vous mangez oui monsieur le poumon vous aimez à boire un peu de vin oui monsieur le poumon il vous prend un petit sommeil après le repas et vous êtes bien aise de dormir oui monsieur le poumon le poumon vous dis-je que vous ordonne votre médecin pour votre nourriture il m'ordonne du potage ignorant de la volaille ignorant du veau ignorant des bouillons des oeufs frais ignorant le soir de petit pruneau pour lâcher le ventre et surtout de boire mon vin fort trempé ignorantus ignoranta ignorantum il faut boire votre vin pur et pour épaissir votre sang qui est trop subtil il faut manger de bons gros boeufs de bons gros porcs de bons fromages de hollande du gruau et du riz et des marrons et des oublis pour coller et conglutiner votre médecin est une bête je veux vous en envoyer un de ma main et je viendrai vous voir de temps en temps tandis que je serai en cette ville vous m'obligerez beaucoup que diantre faites-vous de ce bras-là comment voilà un bras que je me ferai couper tout à l'heure si j'étais que de vous pourquoi ne voyez-vous pas qu'il tira soie toute la nourriture et qu'il empêche ce côté-là de profiter oui mais j'ai besoin de mon bras vous avez là aussi un œil droit que je me ferais crever si j'étais à votre place crever à un œil ne voyez-vous pas qu'il incommode l'autre et lui dérobe sa nourriture croyez-moi faites-vous le crever au plus tôt vous en verrez plus clair de l'œil gauche cela n'est pas pressé adieu je suis fâché de vous quitter si tôt mais il faut que je me trouve à une grande consultation qui doit se faire pour un homme qui mourut hier pour un homme qui mourut hier oui pour aviser et voir ce qu'il aurait fallu lui faire pour le guérir jusqu'au revoir vous savez que les malades ne reconduisent point voilà un médecin vraiment qui paraît fort habile oui mais il va un peu bien vite tous les grands médecins sont comme cela me couper un bras et me crever un oeil afin que l'autre se porte mieux j'aime bien mieux qu'il ne se porte pas si bien la belle opération de me rendre borgne et allons allons je suis votre servante je n'ai pas envie de rire qu'est-ce que c'est votre médecin ma foi qui me voulait tâter le pouls voyez un peu à l'âge de quatre-vingt-dix ans oh çà mon frère puisque voilà notre m purgon brouillé avec vous ne voulez-vous pas bien que je vous parle du parti qui s'offre pour ma nièce non mon frère je veux la mettre dans un couvent puisqu'elle s'est opposée à mes volontés je vois bien qu'il y a quelque amourette là-dessous et j'ai découvert certaines entrevues secrètes qu'on ne sait pas que j'aie découvertes eh bien mon frère quand il y aurait quelques petites inclinations cela serait-il si criminel et rien peut-il vous offenser quand tout ne va qu'à des choses honnêtes comme le mariage quoi qu'il en soit mon frère elle sera religieuse c'est chose résolue vous voulez faire plaisir à quelqu'un je vous entends vous en revenez toujours là et ma femme vous tient au coeur eh bien oui mon frère puisqu'il faut parler à coeur ouvert c'est votre femme que je veux dire et non plus que entêtement de la médecine je ne puis vous souffrir l'entêtement où vous êtes pour elle et voir que vous donniez tête baissée dans tous les pièges qu'elle vous tend ah monsieur ne parlez point de madame c'est une femme sur laquelle il n'y a rien à dire une femme sans artifice et qui aime monsieur qui l'aime on ne peut pas dire cela demandez-lui un peu les caresses qu'elle me fait cela est vrai l'inquiétude que lui donne ma maladie assurément et les soins et les peines qu'elle prend autour de moi il est certain à béralde voulez-vous que je vous convainque et vous fasse voir tout à l'heure comme mme et monsieur à argand monsieur souffrez que je lui montre son bec jaune et le tire d'erreur comment madame s'en va revenir mettez-vous tout étendu dans cette chaise et contrefaites le mort vous verrez la douleur où elle sera quand je lui dirai la nouvelle je le veux bien oui mais ne la laissez pas longtemps dans le désespoir car elle en pourrait bien mourir laisse-moi faire toinette abéralde cachez-vous vous dans ce coin-là n'y a-t-il point quelque danger à contrefaire le mort non non quel danger y aurait-il étendez-vous là seulement il y aura plaisir à confondre votre frère voici madame tenez-vous bien ah mon dieu ah malheur quel étrange accident qu'est-ce toinette ah madame qu'y a-t-il votre mari est mort Mon mari est mort ? Hélas oui, le pauvre défunt est trépassé. Assurément ? Assurément. Personne ne sait encore cet accident-là, et je me suis trouvé ici toute seule. Il vient de passer entre mes bras. Tenez, le voilà tout de son long dans cette chaise. Le ciel en soit loué ! Me voilà délivré d'un grand fardeau. Tu es sotte, toi-même, de t'affliger de cette mort. Je pensais, madame, qu'il fallut pleurer. Va, va, cela n'en vaut pas la peine. Quelle pertesque la sienne, et de quoi servait-il sur la terre ? Un homme incommode à tout le monde, malpropre, dégoûtant, sans cesse en lavement ou une médecine dans le ventre, mouchant, toussant, crachant toujours, sans esprit, ennuyeux, de mauvaise humeur, fatiguant sans cesse les gens et grondant jour et nuit servant des valets. Voilà une belle oraison funèbre. il faut toinette que tu m'aides à exécuter mon dessein et tu peux croire qu'en me servant ta récompense est sûre puisque par un bonheur personne n'est encore averti de la chose portons le dans son lit et tenons cette mort cachée jusqu'à ce que j'aie fait mon affaire il y a des papiers il y a de l'argent dont je veux me saisir et il n'est pas juste que j'aie passé cent fruits auprès de lui mes plus belles années viens toinette prenant auparavant toutes ses clefs argand se levant brusquement doucement béline surprise et épouvantée oui madame ma femme c'est ainsi que vous m'aimez ah ah le défunt n'est pas mort argand à béline qui sort je suis bien aise de voir votre amitié et d'avoir entendu le beau panégyrique que vous avez fait de moi ah voilà un avis au lecteur qui me rendra singe à l'avenir et qui m'empêchera de faire bien des choses bérald sortant de l'endroit où il s'est caché eh bien mon frère vous le voyez par ma foi je n'aurais jamais cru cela mais j'entends votre fille remettez-vous comme vous étiez et voyons de quelle manière elle recevra votre mort c'est une chose qu'il n'est pas mauvais d'éprouver et puisque vous êtes en train vous connaîtrez par là les sentiments que votre famille a pour vous oh ciel ah fâcheuse aventure malheureuse journée qu'as-tu toinette et de quoi pleures-tu hélas j'ai de tristes nouvelles à vous donner et quoi votre père est mort père est mort toinette oui vous le voyez là il vient de mourir tout à l'heure d'une faiblesse qui lui a pris oh ciel quelle infortune quelle atteinte cruelle hélas faut-il que je perde mon père la seule chose qui me restait au monde et qu'encore pour un surcroît de désespoir je le perde dans un moment où il était irrité contre moi que deviendrais-je malheureuse et quelle consolation trouver après une si grande perte qu'avez-vous donc belle angélique et quel malheur pleurez-vous hélas je pleure tout ce que dans la vie je pouvais perdre de plus cher et de plus précieux je pleure la mort de mon père ciel quel accident quel coup inopiné hélas après la demande que j'avais conjurée à votre oncle de lui faire pour moi je venais me présenter à lui et tâcher par mes respects et par mes prières de disposer son coeur à vous accorder à mes vœux ah cléante ne parlons plus de rien laissons là toutes les pensées du mariage après la perte de mon père je ne veux plus être du monde et j'y renonce pour jamais oui mon père si j'ai résisté tantôt à vos volontés je veux suivre du moins une de vos intentions et réparer par là le chagrin que je m'accuse de vous avoir donné souffrez mon père que je vous en donne ici ma parole et que je vous embrasse pour vous témoigner mon ressentiment argand se lève ah ma fille angélique épouvantée ah eh viens n'aie pas peur je ne suis pas mort va tuer mon vrai sang ma véritable fille je suis ravi d'avoir vu ton bon naturel oh quelle surprise agréable mon père puisque par un bonheur extrême le ciel vous redonne à mes voeux souffrez qu'ici je me jette à vos pieds pour vous supplier d'une chose si vous n'êtes pas favorable au penchant de mon coeur si vous me refusez cléante pour époux je vous conjure au moins de ne me point forcer d'en épouser un autre c'est toute la grâce que je vous demande cléante se met à genoux monsieur laissez-vous toucher à ses prières et aux miennes et ne vous montrez point contraire aux mutuels empressements d'une si belle inclination mon frère pouvez-vous tenir la compte monsieur serez-vous insensible à tant d'amour qu'il se fasse médecin je consens au mariage et faites-vous médecin je vous donne ma fille très volontiers monsieur s'il ne tient qu'à cela pour être votre gendre je me ferai médecin apothicaire même si vous voulez ce n'est pas une affaire que cela et je ferai bien d'autres choses pour obtenir la belle angélique mais mon frère il me vient une pensée faites-vous médecin vous-même la commodité sera encore plus grande d'avoir en vous tout ce qu'il vous faut cela est vrai voilà le vrai moyen de vous guérir bientôt et il n'y a point de maladie si osée que de se jouir à la personne d'un médecin. Je pense, mon frère, que vous vous moquez de moi. Est-ce que je suis en âge d'étudier ? Bon, étudier, vous êtes assez savant. Il y en a beaucoup parmi eux qui ne sont pas plus habiles que vous. Mais il faut savoir bien parler latin, connaître les maladies et les remèdes qu'il faut faire. En recevant la robe et le bonnet de médecin, vous apprendrez tout cela. Et vous serez après plus habile que vous ne voudrez. Quoi ? l'on sait discourir sur les maladies quand on a cet habit là oui l'on n'a qu'à parler avec une robe et un bonnet tout galimatia devient savant et toute sottise devient raison tenez monsieur quand il n'y aurait que votre barbe c'est déjà beaucoup et la barbe fait plus de la moitié de mes dessins en tout cas je suis prêt à tout voulez-vous que l'affaire se fasse tout à l'heure comment tout à l'heure oui et dans votre maison Dans ma maison ? Oui, je connais une faculté de mes amis qui viendra tout à l'heure en faire la cérémonie dans votre salle. Cela ne vous coûtera rien. Mais moi, que dire ? Que répondre ? On vous instruira en deux mots et l'on vous donnera par écrit ce que vous devez dire. Allez-vous en vous mettre en habit décent, je vais les envoyer guérir. Allons, voyons cela. Que voulez-vous dire ? Et qu'entendez-vous ? avec cette faculté de vos amis. Quel est votre dessin ? De vous divertir un peu ce soir. Les comédiens ont fait un petit intermède de la réception d'un médecin avec des danses et de la musique. Je veux que nous en prenions ensemble le divertissement et que mon frère y fasse le premier personnage. Mais mon oncle, il me semble que vous vous jouez un peu beaucoup de mon père. Mais ma nièce, ce n'est pas tant le jouer que s'accommoder à ses fantaisies. tout ceci n'est qu'entre nous nous y pouvons aussi prendre chacun un personnage et nous donner ainsi la comédie les uns aux autres le carnaval autorise cela allons vite préparer toutes choses y consentez-vous oui puisque mon oncle nous conduit Littérature audio vous a présenté le malade imaginaire de Molière. Bérald, Christophe Ménager, M. Florent Apothicaire, Le Moco, M. Purgon, Aïkar, avec l'aimable participation de Noémie dans le rôle de Louison et Isabelle qui a lu les Didascalies.