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Morphée : le dieu des rêves grecs

Bonsoir, ce soir je vais vous raconter l'histoire de Morphée, le dieu grec des rêves. Morphée se faufile dans les songes des mortels et des dieux pour les façonner selon ses désirs. Installez-vous confortablement dans votre lit et préparez-vous à passer une merveilleuse nuit de sommeil. Lorsque vous êtes installé, fermez les yeux. Morphée, dieu grec des rêves, avait un pouvoir unique et fantastique. Lorsque les mortels s'endormaient, ils apparaissaient dans leurs rêves sous les traits d'un humain de son choix. Ainsi, ils pouvaient donner forme à leurs songes pour leur apporter sagesse et réconfort quand ils en avaient besoin. Souvent, ils leur faisaient voir leur avenir ou des événements qui se produisaient ailleurs dans le monde. Grâce à ses pouvoirs divins, il pouvait influencer tous les hommes, du bas peuple jusqu'au plus grand seigneur. Il pouvait même influencer les rêves des dieux eux-mêmes. Morphée vivait au royaume des rêves et travaillait pendant son sommeil. Il volait à travers le monde, filant de rêve en rêve. Une nuit, alors qu'il dormait paisiblement au royaume des rêves, Morphée rendit visite à un cultivateur d'olives nommé Nicolas. Nicolas dormait profondément sur son matelas de brindilles tissé, mais dans ses rêves, il était agité. Il passait toutes ses journées à s'occuper de ses oliviers sous un soleil de plomb. Il était passionné par les olives, qui jouaient un rôle majeur dans la vie des Grecs. En plus de nourrir la population, elle leur fournissait de l'huile pour alimenter leurs lanternes et les éclairer dans l'obscurité. Mais l'huile d'olive avait d'autres pouvoirs en plus de celui d'éclairer le monde. Les grecs l'utilisaient pour soigner les blessures et les enversaient parfois sur la terre en offrande aux dieux. Le bois des oliviers leur servait pour construire des abris et pour faire du feu afin de réchauffer. Mais cette nuit-là, Nicolas rêvait que son olivret était en danger. Ses arbres étaient stériles et ne donnaient pas de fruits. Rien ne poussait sur leurs branches, pas la moindre trace de fruits verts ou violets attendant d'être récoltés pour être pressés en huile ou cuisinés dans de délicieux plats. Les oliviers eux-mêmes avaient l'air malades. Leur bois, habituellement marron foncé, était devenu tout pâle. Et lorsque Nicolas tapotait sur leur tronc dans son rêve, il sonnait creux et semblait fragile, incapable de supporter le poids de leurs propres branches. Morphée sentit le désespoir de Nicolas et se glissa dans son rêve sous l'apparence d'un fermier. Il portait un simple habit en lin qui descendait jusqu'aux genoux et qui le protégeait des rayons du soleil. Il était plus vieux que Nicolas afin de paraître plus sage. Bonjour mon frère lança Morphée dans le rêve de Nicolas. Je vois que tu as des soucis avec tes arbres. Oui, lui répondit Nicolas, somnolent. Le fermier endormi remua légèrement sur son matelas, toujours plongé dans un profond sommeil. Dis-moi, continua Morphée, quel est ton problème ? Eh bien, mes oliviers sont faibles. Épale, il ne donne pas de fruits expliqua Nicolas. Que vais-je bien pouvoir récolter ? Tout mon avenir dépend de la production de ces arbres. Morphée, sous son déguisement humain, examina la terre. Qu'est-ce qui t'inquiète vraiment ? demanda-t-il à Nicolas. Est-ce vraiment le résultat de ta récolte ? Des oliviers sont-ils vraiment en danger ? Nicolas, endormi, marmonna dans son sommeil et se retourna sur son matelas. Non, je ne suis pas vraiment acquis, répondit-il dans son rêve. Les arbres sont en pleine forme. Et alors qu'il prononçait ces mots, les arbres se transformèrent et des centaines de fleurs apparurent. Les troncs et les branches des oliviers prirent de riches couleurs. De petites olives apparurent sur leurs branches. Morphée sourit à Nicolas. Il adorait les rêves pour cette raison. Le paysage pouvait se métamorphoser, et les choses les plus funestes pouvaient soudainement prendre des allures beaucoup plus joyeuses. Il aimait guider les gens vers des rêves paisibles et agréables. Morphée s'adressa à nouveau au cultivateur. Mais alors, si tu n'es pas inquiet pour tes oliviers, qu'est-ce qui te préoccupe tant ? Qu'est-ce qui t'empêche de dormir cette nuit ? Nicolas s'assit dans l'herbe, sous un olivier chargé d'olives, prête à être cueillie. Il croisa les jambes et posa son coude sur son genou, puis posa son menton dans sa main. En fait, dit le fermier, c'est à cause de mon fils. Il dit qu'il n'est pas sûr de vouloir s'occuper de l'olivrer avec moi. Il pense qu'un autre métier lui plairait peut-être davantage. Morphée, sous son habit, pocha la tête en signe de compassion. Et si nous allions voir ce qu'il en est ? demanda-t-il à Nicolas. Il tendit une main vers lui. Nicolas, plongé dans la logique absurde de son rêve, suivit Morphée sans poser de questions. Il prit sa main et les deux hommes glissèrent dans un kaléidoscope d'images tourbillonnant. Le temps et l'espace défilant sous leurs pieds. Le paysage de la campagne tapissé d'herbes vertes. et parsemés d'oliviers noirs, tournoyés sous les deux hommes, avant de s'ouvrir sur un pâturage. Des moutons broutaient paisiblement, leur épais manteau de laine blanche contrastant avec le vent. avec les champs verts émeraudes, le ciel bleu azur. Enfin, ils arrivèrent au bord de la mer. Des pêcheurs tiraient de gigantesques filets de leurs bateaux qu'ils posaient sur la terre ferme pour récupérer leurs brises argentées et brillantes. C'est alors que les poissons se transformèrent en oiseaux qui s'envolèrent dans les airs. Morphée et Nicolas, comme eux, observaient la Terre depuis les hauteurs. Enfin, ils redescendirent sur Terre et reprirent une posture humaine. Voici ton fils lança Morphée à Nicolas. Les deux silhouettes observaient un jeune homme, en train de frotter un chiffon imbibé d'huile d'olive sur la peau d'une autre personne. Que fait-il ? demanda Nicolas. Mon fils, que fais-tu ? L'image de son fils, comme un rêve dans un rêve, vacilla légèrement, mais resta bien nette. Le jeune homme resta concentré sur son travail et ne répondit pas. Il soigne une personne malade, expliqua Morphée. Il lui applique de l'huile d'olive, de l'huile qui vient de tes propres olives, car elles ont des propriétés médicinales exceptionnelles. Il est connu dans toute la région pour ses connaissances sur le corps humain, pour sa compassion et pour son huile d'olive prodigieuse. L'huile qu'il fabrique avec mes olives s'émerveilla Nicolas. C'est fantastique. Eh oui ! répondit Morphée en souriant. Il savait qu'il avait terminé son travail auprès de Nicolas. Sur son matelas, dans le monde réel, Nicolas était parfaitement immobile. Il dormait à poing fermé. Un sourire dessiné sur ses lèvres. Il était tout aussi heureux dans le monde des rêves. Morphée était ravi lui aussi d'avoir aidé une personne aussi respectable. Il salua Nicolas et sortit de son rêve pour le laisser profiter d'un sommeil paisible. Morphée flotta pendant un moment à travers le royaume des rêves, naviguant entre les songes des humains. Il avait l'impression d'être l'un de ces petits poissons argentés qu'il avait vus dans le rêve de Nicolas. Un petit éclair de lumière brillant, nageant entre les rêveries nocturnes, qui ondulaient et s'écoulaient comme de l'eau. À qui allait-il maintenant venir en aide ? Ah, Morphée aperçut un rêve complètement insensé, comme il les adorait. Tous les rêves ne lui permettaient pas d'explorer les inquiétudes les plus profondes du genre humain. C'était bien sûr une fonction nécessaire des rêves, comme dans celui que Nicolas venait de faire. Mais certains songes n'étaient qu'un étrange mélimélo de pensées et d'images aléatoires dérivées d'expériences réelles ou imaginaires. Morphée adorait se glisser dans ces rêves-là. Il y dansait comme dans une délicieuse tempête, pour les guider vers des destinations plus paisibles. Et justement, quelqu'un était en train de se débrouiller. de faire un tel rêve. C'était une tisserande nommée Elena. Elle dormait allongée sur un matelas de laine. Son mari était berger. Aussi, ils avaient de la laine en abondance, qu'Elena filait pour tisser de magnifiques couvertures. Même dans ses rêves, elle tissait. Non pas de la laine épaisse, mais des pensées. Une longue pensée serpentant dans tous les sens, entre des centaines d'autres, formant une riche tapisserie dont on aurait à peine pu tirer le moindre fil, tellement les idées étaient serrées les unes aux autres. Ici, il y avait une rangée de moutons qui marchaient parfaitement alignés sur une colline verdoyante. Là, des moutons qui se tenaient debout sur leurs pattes arrières, reproduisant la danse qu'Hélèna avait effectuée avec d'autres femmes du village lors d'une fête quelques jours plus tôt. Comme ils étaient amusants ! Il se tenait en cercle, chaque mouton posant ses sabots avant sur les épaules de celui qui se trouvait devant lui. Il tournait gracieusement dans le sens des aiguilles d'une montre. puis dans le sens inverse. Dans son rêve, Héléna se tenait au centre du cercle. Elle regardait les moutons en riant. Morphée décida de s'approcher d'elle. Il apparut dans son rêve sous les traits de Sarah, une voisine d'Héléna qui habitait dans une ferme proche. Eh bien, je vois que tu regardes les moutons danser, d'imorfer dans la peau de Sarah. Oui, répondit Delénat. Je les regarde en espérant qu'ils m'apprennent quelques pas de danse. ce sont d'excellents danseurs. Morphée pencha la tête en arrière et se mit à rigoler. Il adorait l'absurdité de la logique des rêves et il voulait voir juste jusqu'où il pouvait aller. Je trouve que c'est une excellente idée répondit-il. Je crois même que nous devrions aussi leur demander de nous apprendre à mieux tisser la laine. Soudain, Sarah a fait le choix. Et Héléna se retrouvèrent face à d'énormes métiers à tisser, qui s'élevaient haut dans le ciel. Elles tenaient toutes les deux des bouts de fil de laine, qui serpentaient depuis des bobines aussi grosses que des rochers. C'est l'heure du tissage, lança le malicieux Morphée qui déroulait sa bobine en faisant de grands gestes et en faisant tournoyer la robe en lin de Sarah. Sinon, les moutons vont prendre notre place. Oui, répondit Héléna, en suivant le chemin que Morphée était en train de tracer dans son rêve. Nous devons tisser la laine avant que les moutons ne fassent tout notre travail. Elle se mit à tisser la laine, et les moutons, qui ne dansaient plus, commencèrent à l'imiter sur leur propre métier à tisser en agitant vivement leurs sabots. Ils sont vraiment doués ! s'exclama Hélène en admirant le travail des moutons. Ils sont si raffinés et si soigneux, et en plus, ce sont d'excellents chanteurs, ajouta Morphée avec les lèvres de Sarah. Il fit un geste de la main et les moutons arrêtèrent aussitôt leur tissage pour se mettre à chanter. Héléna explosa de rire. Son rire résonnait dans le monde des rêves et même la vraie Héléna, toujours endormie, laissa s'échapper un petit gloussement. Morphée était satisfait. Il adorait apporter de la joie dans le monde des rêves. Il se dit qu'il était temps pour Elena de plonger dans un sommeil un peu plus profond. Il décida que Sarah pouvait l'éloigner de ce monde loufoque pour la guider vers des images plus calmes et plus paisibles qui l'entraîneraient vers un profond sommeil. Avec l'apparence de Sarah, Morphée se tourna vers Héléna. Je crois que l'heure est venue de les coucher les moutons. Qu'en dis-tu ? Héléna accepta la logique étrange du monde du sommeil. Oui, bien sûr, dit-elle alors. Nous devons les convaincre d'arrêter de chanter et d'aller se mettre au lit. Le seul moyen de les arrêter, répondit Morphée, qui ne pouvait s'empêcher de s'amuser encore un peu, c'est de chanter avec eux. Mais oui, tu as raison, Sarah, répondit Héléna. La bouche de la véritable Héléna remua légèrement pendant que dans ses rêves, elle se mit à chanter à plein poumon avec les moutons. Ces paroles étaient toutes mélangées et les deux jeunes femmes éclatèrent de rire. Regarde, les moutons sont fatigués, dit Morphée en les pointant du doigt. Sans surprise, les moutons avaient arrêté de chanter. Ils étaient en train de s'installer sur des matelas à leur taille, remplis de riz. de foin. Certains d'entre eux grignotaient leur matelas tandis que leurs paupières se fermaient. Ils ont l'air si heureux et si apaisés fit remarquer Elena. Oui, répondit Morphée, et toi, tu n'as pas envie de t'allonger sur ton matelas ? Je crois bien que si, répondit Héléna l'air songeur. Je me sens fatiguée tout d'un coup. Sûrement à force d'avoir tissé, dansé et chanté. Ou peut-être est-ce le simple fait d'avoir regardé les moutons faire toutes ces choses qui m'a épuisé. Dans son rêve, Elena se coucha sur un matelas qui ressemblait à celui sur lequel elle dormait dans le monde réel. Seulement, dans son rêve, il flottait juste au-dessus du sol. Regarde, lança Héléna sur un air somnolent à son amie, mon matelas n'est pas tout à fait comme ceux des moutons. C'est sûrement parce que je n'en suis pas un. Sans aucun doute, répondit Morphée sur un ton calme et réconfortant. C'est exactement pour cette raison que ton matelas flotte dans les airs, n'est-ce pas agréable ? Hmm, Marmona Elena. Morphée savait qu'elle était en train de quitter son rêve et de sombrer dans un profond sommeil. Dors bien, Elena. chuchota Morphée en glissant hors de son rêve, pendant que l'obscurité tombait. Morphée planait au-dessus du royaume des rêves, à la recherche d'un nouveau songe dans lequel s'immiscer. C'est alors qu'il en aperçut un très intéressant, un pêcheur nommé Hector. était en train de rêver que son destin était identique à celui de Sisyphe, roi de Corinthe. Sisyphe était un roi malhonnête, injuste et mal intentionné, qui un jour s'attira les foudres de Zeus après avoir trahi sa confiance. Comme châtiment pour son mauvais comportement, Sisyphe fut finalement condamné à faire rouler éternellement jusqu'en haut d'une colline, un rocher qui en redescendait chaque fois avant de parvenir au sommet. Morphée avait constaté que beaucoup d'humains faisaient des rêves dans lesquels leur sort était similaire à celui de Sisyphe. Dans ses rêves, il répétait encore et toujours la même tâche sans jamais la réussir. Morphée n'aimait pas que les gens se sentent mal dans leurs rêves. Aussi, il leur venait toujours en aide quand il le pouvait. Lorsqu'une personne parvenait à relever des défis dans ses rêves, alors elle réussissait mieux à affronter ceux qui se présentaient dans la vraie vie. Morphée le savait. Hector, pêcheur dans le monde réel, se tournait nerveusement dans tous les sens sur son matelas. Une fraîche brise marine soufflait de dessus de lui. Dans son rêve, il s'occupait de son bateau. Une petite embarcation en bois munie d'une grande voile. Le bateau était à terre et Hector devait le réparer avant de repartir pour une journée de travail en mer. Un trou n'arrêtait pas de revenir dans la coque et... Dans son sommeil, Hector le réparait sans cesse avec de petits morceaux de bois. Mais à chaque fois qu'il s'apprêtait à remettre le bateau à l'eau, un nouveau trou apparaissait. Ce n'est pas un rêve très reposant. Je vais lui montrer des images d'un futur proche, dans lequel il pourra naviguer sereinement. Ainsi, il pourra dormir à poing fermé. Morphée prit l'apparence d'un autre pêcheur, pieds nus et vêtu d'une tunique en lin qui recouvrait son corps. Il marcha en direction d'Hector, qui passait une main sur son front pour essuyer la sueur due à la chaleur et à la frustration. Bonjour mon ami, l'ensamorphe déguisé en pêcheur. Je vois que tu es en train de réparer ton bateau de pêche. Hector leva les yeux par-dessus son bateau. Oui, répondit-il. Mais à chaque fois que je bouche un trou, il y en a un nouveau qui apparaît, et je dois le réparer pour pouvoir reprendre la mer. Morphée hocha la tête, compréhensif. Cela ne se faisait pas de faire remarquer l'absurdité d'un rêve. Il fallait simplement accepter son commencement, puis le faire évoluer vers le dénouement idéal. Je peux peut-être t'aider, proposa Morphée en s'accroupissant à côté du pêcheur. Je m'y connais un peu en bateau de pêche. Je veux bien, répondit Hector en regardant Morphée, très convaincant sous son apparence de pêcheur. Tu trouveras peut-être d'où vient le problème. Le sourire sur le visage de Morphée s'envola. Comme s'il y avait une raison logique derrière tous ces trous. Il prit un air empli de curiosité et se pencha au-dessus de la coque du bateau. Il tapa plusieurs fois dessus avec son poing en faisant un bruit sourd. Puis il fit glisser sa main sur la surface parfaitement lisse de la coque. Je vois que tu prends bien soin de ton bateau, dit Morphée à Hector, visiblement touché par le compliment. Je fais de mon mieux, répondit-il. Mais regarde, un nouveau trou est apparu, alors que je venais tout juste d'en réparer un. Morphée vit qu'il disait vrai. Hector ramassa un morceau de bois et commença à le tailler à la bonne taille pour boucher le trou. Puis-je ? demanda Morphée en tendant la main. Bien sûr, répondit. dit Hector en lui tendant le morceau de bois. Morphée le posa sur le trou qui disparut aussitôt comme par magie. C'est alors qu'un autre trou apparut. Hector soupira de désespoir et se dirigea vers sa pile de morceaux de bois pour se lancer dans une nouvelle réparation. Un instant, suggéra Morphée. Il leva une main en l'air pour faire signe à Hector de faire une pause. Tu n'arrêtes pas de reboucher des trous, c'est bien cela ? C'est exact, répondit Hector, et le problème n'est toujours pas résolu. J'ai raison, demanda Morphée. Tout à fait, acquiesça Hector. Allô ? Il est peut-être temps d'essayer autre chose, proposa Morphée. Hector plissa ses yeux face au soleil éclatant. Comme quoi ? Monte avec moi dans le bateau, lui dit Morphée. Hector lui lança un regard dubitatif. Le bateau était couché sur son flanc, sur la terre ferme. Pourquoi monter dedans ? Comme ça ? dit Morphée. Il grimpa dans le bateau en gardant son équilibre tant bien que mal, les pieds posés à l'intérieur de la coque, couchés sur le sable. Dans le monde réel, Hector aurait sûrement dit à Morphée qu'il était fou, et dans le monde flottant des rêves, il se contenta de monter avec lui dans l'embarcation. Soudain, le bateau n'était plus couché sur le col. ni même posé au sol. Il naviguait paisiblement sur une mer azur, sa voile blanche gonflée par le vent. Au-dessus d'eux, des nuages cotonneux flottaient dans un ciel bleu foncé. La brise salée faisait danser leur tunique. Même si le monde des rêves n'avait rien de solide, Hector sentait la chaleur du pont en bois sous ses pieds nus et l'air frais de l'océan, tandis que le bateau se frayait d'un chemin sur l'eau. Il se tourna vers Morphée, l'air ravi. Un grand sourire se dessina sur son visage. Il se retourna pour regarder l'océan, en prenant une grande inspiration d'air marin. Le bateau flotte ! s'exclama-t-il avec joie. Les trous sont réparés. Je peux à nouveau pêcher. Il se tourna une nouvelle fois vers Morphée. Comment as-tu fait ? demanda Hector. Comment as-tu réparé le bateau ? Morphée lui rendit son sourire. Il n'avait pas vraiment de réponse. Tout cela n'était qu'un rêve. Il s'était simplement faufilé dans son rêve, pour le faire évoluer selon ses envies. C'était là sa seule réponse. Peu importe comment j'ai fait, répondit-il calmement. Ce qui compte, c'est que ton problème est résolu, et que ton bateau peut aller sur l'eau. Hector hocha la tête, satisfait. Dans le monde réel, il dormait paisiblement sur son matelas, et ne remu... plus dans tous les sens. Dans son rêve, il commençait à s'éloigner. Morphée n'était plus avec lui sur le bateau. Il le regardait depuis le ciel prendre le large, le sourire aux lèvres. Morphée savait que le vrai Hector ressentait les mouvements de roulis de son bateau, la chaleur du soleil sur son visage, la satisfaction de son travail accompli. Il savait qu'il allait maintenant achever son rêve pour sombrer dans un sommeil profond et réparateur. Morphée avait passé une merveilleuse nuit à venir en aide aux mortels. Mais avant le lever du jour, il voulait accomplir une dernière mission. Il voulait influencer les rêves d'un dieu. Il parcourut les songes de plusieurs dieux et déesses pour finalement arriver dans les rêveries d'Hermès. Hermès était l'une des douze divinités de l'Olympe. Grand farceur, il était le patron des voleurs, des athlètes, des commerçants et des gardiens de troupeaux, pour n'en citer que quelques-uns. Il était également le dieu des frontières et des transitions. Les frontières et les transitions, pensa Morphée. L'essence même des rêves. L'idée de jouer avec les rêves du malicieux Hermès était trop tentante pour Morphée. Il se pressa de s'y introduire. Dans son rêve, Hermès jouait l'un de ses mauvais tours à son frère, le dieu Apollon. Dans le monde réel, il s'amusait à accomplir toutes sortes de méfaits sans jamais être puni par son père, Zeus. Il continuait donc à se comporter sans cesse de façon scandaleuse. Morphée se dit qu'il était peut-être temps de donner une leçon à Hermès, du moins un royaume des rêves. Cela l'aiderait peut-être à mieux se comporter à l'avenir. Dans son rêve, Hermès était en train de voler du bétail à son frère Apollon, comme il l'avait fait dans le monde réel. Il avait clamé son innocence et s'en était tiré sans problème. Mais son frère savait qu'il était coupable. Et maintenant ? Dans son rêve, il était en train d'accomplir le même méfait. Il guidait un troupeau de bœufs hors des terres de son frère Apollon en riant. Dans les songes, comme dans la vraie vie, les bœufs laissaient des traces de sabots derrière eux. Mais Hermès était rusé. Il faisait marcher les bœufs à reculons pour que leurs empreintes pointent. vers la mauvaise direction. Ainsi, elle ne permettrait pas de remonter jusqu'à lui. Et malin comme il était, il avait également accroché des branches d'arbres sous ses pieds, pour couvrir ses propres traces. Les empreintes qu'il laissait derrière lui ressemblaient à des traces de branches traînées par des animaux. Morphée se demanda quelle forme humaine il pouvait bien prendre pour perturber le rêve d'Hermès. Il décida de se déguiser en gardien de troupeau. Il apparut portant une robe et des sandales. et tenant un long bâton dans une main à côté de la rangée de bœufs qu'Hermès faisait reculer. Excusez-moi, bon bon monsieur ! demanda humblement Morphée à Hermès. Oui, répondit Hermès entraînant les branches accrochées à ses pieds sur le sol. Êtes-vous au courant que vos bœufs avancent à l'envers ? C'est assez inhabituel. Bien sûr, répondit Hermès. J'en suis bien conscient. Il rigola et continua son chemin à côté du troupeau. Pourtant, vous, vous marchez normalement. Vous regardez d'un à l'autre. direction que vous prenez, observa le gardien de troupeau sur un air naïf qui n'avait rien à voir avec le vrai Morphée. Tout à fait, répondit Hermès. Par ici, lança-t-il au bœuf. On bouge d'abord les pattes arrière, puis les pattes avant. C'est bien. Morphée insista. Puis je vous dis que je ne vais pas vous faire un bœuf. demandez pourquoi vous faites reculer vos bœufs alors que vous-même vous marchez à côté d'eux dans l'autre sens. J'ai simplement eu envie de faire comme ça, rétorqua le méchant Hermès. Bonne journée. à vous. Morphée, peu enclin à s'occuper uniquement de ses propres affaires, continua. J'ai l'impression que vous les perturbez un peu. Ah bon ? répondit Hermès en s'arrêtant. Oui, dit Morphée, en fait, j'ai même l'impression qu'ils vont bientôt se rebeller. Je crois qu'eux aussi aimeraient bien utiliser leurs pattes dans le bon sens. Ah oui, répondit Hermès, qui commençait à être un peu inquiet. Je vois ce que vous voulez dire. J'ai bien remarqué qu'ils étaient un peu réticents. Je ne pensais pas que c'était parce que je marchais dans le bon sens, mais vous avez peut-être raison. Les bœufs, continua Morphée, sont des animaux très sensibles. Ils se rebellent très rapidement s'ils ressentent de l'injustice. Il ne faut pas qu'ils se rebellent, répliqua Hermès, qui avait maintenant l'air vraiment inquiet. Cela gâcherait toute ma manœuvre. Dans ce cas, lui conseilla Morphée, vous feriez mieux de vous tourner pour marcher dans le même sens qu'eux. Vous croyez ? demanda Hermès sur un air hésitant. Il avait l'habitude de donner des ordres, pas d'en recevoir. Oui, affirma Morphée. Hermès se retourna, les branches accrochées à ses pieds laissant de drôles de traces sur le sol. Il dessina par terre un demi-cercle en se retournant à 180 degrés pour se retrouver. dans le même sens que les bœufs. Voilà ! s'exclama Morphée. Maintenant, vous pouvez reprendre votre route, mon ami. Les bœufs seront bien plus enclins à vous suivre maintenant que vous faites comme eux. Hermès traînait des pieds à reculons à côté des bœufs et Morphée lutta pour se retenir de rigoler. Dans le monde physique, Hermès remuait les pieds d'avant en arrière. Morphée savait que le monde était un monde de rire. que quand il se réveillerait, il se souviendrait à quel point il s'était senti idiot. Désormais, il réfléchirait à deux fois avant d'entraîner quiconque, humain, dieu ou animal, dans l'un de ses mauvais tours. En attendant... Morphée se rendit compte que la nuit passait. Il voyait à l'horizon les rayons dorés du soleil, qui commençaient à illuminer le paysage. La lune, qui brillait quelques heures plus tôt, haut et fort dans le ciel, disparaissait petit à petit, pour laisser place au soleil. L'obscurité du ciel virait vers des tons bleus et gris. Bientôt, les humains et les dieux se réveilleraient et se frotteraient les yeux avant de commencer leur journée. Mais avant de se lever, ils passeraient quelques instants à se remémorer leurs rêves de la nuit passée. Nicolas, le cultivateur d'olives, se rappellerait avoir aperçu l'avenir heureux de son fils. Elena, la tisserande, se souviendrait de ses étranges pensées nocturnes, telles que des fils tissés ensemble pour former une couverture chaude et confortable, qui l'avait aidée à plonger dans un sommeil profond et reposant. Hector, le pêcheur, se souviendrait avoir commencé sa nuit en faisant un rêve frustrant, mais... L'avoir terminé sur son bateau tout neuf au beau milieu d'une mer étincelante. Enfin, le malicieux Hermès se rappellerait comme il s'était senti bête après être devenu le dindon de sa propre farce. Avec un peu de chance, Morphée avait réussi à transformer leur vie en influençant leurs rêves. Il était temps de se réveiller. de quitter l'esprit des autres et de rentrer chez lui. Royaume des rêves, son esprit se faufila jusque dans la grotte où il habitait. Ses yeux se fermèrent et ses narines laissaient s'échapper par moments de petits bruits. Dans sa grotte, Morphée dormait paisiblement. Il n'avait plus de rêve à visiter cette nuit et pouvait maintenant... Profitez d'un sommeil profond et paisible. Notre histoire est maintenant terminée. Dormez bien et faites de beaux rêves.