Aristote, le traité de l'âme, livre 1, l'âme, chapitre 1, la méthode dans l'étude de l'âme. Les connaissances de tout genre sont pour nous belles et admirables. Pourtant, une connaissance peut être préférable à une autre, pour deux raisons. Premièrement, pour son exactitude, et deuxièmement, pour la valeur et la supériorité de son objet. Selon ces deux motifs, l'étude de l'âme est à situer raisonnablement au premier rang.
De plus, la connaissance de l'âme apporte une grande contribution à l'étude de la vérité tout entière et surtout à la science de la nature, car l'âme est, pour résumer, le principe des animaux. Notre étude aura deux parties. Premièrement, connaître la nature et la substance de l'âme. Et deuxièmement, Connaître les propriétés qui s'y rattachent et dont les unes semblent être des déterminations propres de l'âme elle-même, tandis que les autres appartiennent aussi, mais par elles, à l'animal.
Mais il est des plus difficiles que d'acquérir une connaissance assurée au sujet de l'âme. Cette recherche, en effet, se trouve en commune à beaucoup d'autres objets, j'entends la recherche de la substance et de l'essence, on pourrait peut-être penser qu'il n'existe qu'une seule méthode. applicable à tous les objets dont nous voulons connaître la substance, comme c'est le cas de la démonstration pour les propriétés dérivées.
De sorte que c'est cette méthode qu'il faudrait rechercher. Si, d'un autre côté, il n'existe pas de méthode unique et commune pour résoudre la question de l'essence, notre tâche devient encore plus difficile car il faudra déterminer pour chaque cas quel est le procédé à employer. Et même s'il était évident que ce procédé consiste en une certaine démonstration ou en une division, ou même en une autre méthode, il resterait encore bien des problèmes et des incertitudes pour savoir de quelles données devrait partir notre investigation. Car les principes sont différents pour des choses différentes, comme par exemple dans le cas des nombres et des surfaces.
Sans doute est-il d'abord nécessaire de déterminer à quel genre l'âme appartient et ce qu'elle est. Je veux dire, si elle est une chose individuelle, une substance ou une qualité ou une quantité, ou encore quelques autres des catégories que nous avons distinguées. Il faut déterminer en outre si elle est au nombre des êtres en puissance ou si elle n'est pas plutôt une entéléchie, car la différence n'est pas sans importance.
On doit aussi examiner si l'âme est partageable ou sans partie, et si toutes les âmes sont de même espèce ou s'il n'en est rien. Et dans ce cas, si elle diffère entre elles par l'espèce ou par le genre, car les discussions et les investigations actuelles sur l'âme semblent porter seulement sur l'âme humaine. D'autre part, nous devons nous garder de passer sous silence la question de savoir si la définition de l'âme est une, comme celle de l'animal, ou si elle est différente pour chaque espèce d'âme, comme pour le cheval, le chien, l'homme, le dieu, et dans ce cas, l'animal en général, ou bien n'est rien.
ou bien est postérieure ? La même question se pose d'ailleurs pour tout autre prédicat commun que l'on affirmerait. De plus, en admettant qu'il n'existe pas une pluralité d'âmes mais seulement une pluralité de parties, faut-il examiner d'abord l'âme entière ou ses parties ?
Il est difficile aussi de déterminer lesquelles de ces parties sont naturellement distinctes les unes des autres et s'il faut commencer notre recherche par les parties ou par leurs fonctions. Si par exemple, c'est par l'acte de l'intellect ou l'intellect, par l'acte de sentir ou la faculté sensitive et ainsi de suite. Et si les fonctions doivent nous retenir en premier lieu, on pourrait se demander si l'étude de leur opposé ne devrait pas encore les précéder.
Par exemple, le sensible avant la faculté sensitive et l'intelligible avant l'intellect. Il semble bien que... Non seulement la connaissance de l'essence soit utile pour étudier les causes des propriétés des substances, comme dans les mathématiques, la connaissance de ce qu'est la droite et la courbe, ou de ce qu'est la ligne et la surface, pour savoir à combien de droite les angles du triangle sont égaux. Mais encore inversement, que la connaissance des propriétés contribue pour une grande part à la connaissance de l'essence. C'est en effet quand nous pourrons rendre compte, en accord avec l'expérience de toutes les propriétés d'une substance, ou de la plupart, que nous serons le plus à même de donner une définition de cette substance.
Car le principe de toute démonstration, c'est l'essence. De sorte que les définitions qui n'entraînent pas la connaissance des propositions propriété ou qui ne facilite même pas une conjecture à leur sujet, il est clair qu'elles sont toutes dialectiques et vides. Une difficulté se présente aussi à propos des affections de l'âme.
Sont-elles toutes communes à l'être qui possède l'âme ou bien y en a-t-il aussi quelqu'une qui soit propre à l'âme elle-même ? Le déterminer est indispensable mais difficile. Il apparaît que dans la plupart des cas Il n'est aucune affection que l'âme puisse, sans le corps, subir ou exercer, telle la colère, l'audace, l'appétit et en général la sensation.
S'il est pourtant une opération qui semble par excellence propre à l'âme, c'est l'acte de penser. Mais si cet acte est lui aussi une espèce d'imagination ou qu'il ne puisse exister indépendamment de l'imagination, il ne pourra pas davantage exister sans un corps. Si donc, il y a quelqu'une des fonctions, des affections de l'âme qui lui soit véritablement propre, l'âme pourra posséder une existence séparée du corps.
Par contre, s'il n'y en a aucune qui lui soit propre, l'âme ne sera pas séparée, mais il en sera d'elle comme du droit, qui en tant que droit a beaucoup d'attributs. Par exemple, celui d'être tangent à une sphère d'airain en un point, Alors que pourtant, le droit... Je pense qu'il faut entendre la droite. À l'état séparé, ne peut la toucher ainsi.
Il est en effet inséparable, puisqu'il est toujours donné avec un corps. Or, il semble bien que toutes les affections de l'âme soient données avec un corps. Le courage, la douceur, la crainte, la piété, l'audace et encore la joie, ainsi que l'amour et la haine. Car en même temps... Tant que se produisent ces déterminations, le corps éprouve une modification.
Ce qui le montre en fait, c'est que parfois, des causes d'affection fortes et frappantes surviennent en nous sans entraîner ni irritation ni crainte. Tandis que d'autres fois, des causes légères et faiblement perçues suffisent à provoquer des mouvements. Quand le corps est déjà surexcité, il se trouve dans un état comparable à la colère. Mais voici une preuve plus claire encore en l'absence de toute cause de crainte.
On peut éprouver les émotions de la peur. S'il en est ainsi, il est évident que les affections sont des formes engagées dans la matière. Il en résulte que dans leur définition, on doit tenir compte de cet état de choses.
On définira par exemple la colère, un mouvement de tel corps ou de telle partie, ou de telle faculté, produit par telle cause, pour telle fin. Et c'est pourquoi dès lors... L'étude de l'âme relève du physicien, soit qu'il s'agisse de l'âme tout entière, soit qu'il s'agisse de l'âme telle que nous la décrivons. Le physicien et le dialecticien définissent ainsi différemment chacune de ces affections.
Ce qui est par exemple la colère, pour le dernier c'est le désir de rendre l'offense, ou quelque chose de ce genre. Pour le premier, c'est l'ébullition du sang qui entoure le cœur, ou bien l'ébullition du chaud. L'un rencontre de la matière, et l'autre de la forme et de la notion.
Car la notion est la forme de la chose. Mais il est nécessaire qu'elle se réalise dans telle matière, si on veut qu'elle soit. C'est ainsi que la notion de la maison est la suivante.
Elle est un abri protecteur contre la destruction causée par les vents, les pluies et les chaleurs. Mais telle la décrira comme des pierres, des briques et des poutres, telle autre encore dira quelle est la forme réalisée dans ces matériaux en vue de telle fin, qui donc de ceux-ci est le physicien ? Est-ce celui qui s'intéresse à la matière et qui ignore la forme, ou celui qui s'intéresse à la forme seule ? N'est-ce pas plutôt celui qui tient compte de l'une et de l'autre ? Et que dire de chacun des deux autres ?
Ne serait-ce pas qu'il n'y a personne pour traiter les déterminations de la matière qui ne sont pas séparables, pas même en les considérant seulement en tant que séparables ? mais que c'est du physicien que relèvent toutes les activités et passivités appartenant à un corps de telle nature déterminée et à une matière de telle sorte ? Quant aux propriétés des corps qui ne sont pas considérées comme leur appartenant de cette façon, c'est un autre que le physicien qui les étudiera.
Pour certaines, ce sera l'artisan, le cas échéant, le charpentier ou le médecin, par exemple. Pour d'autres... qui sans être séparables ne sont pas considérés comme des déterminations d'un corps d'une nature déterminée, mais proviennent d'une abstraction, ce sera le mathématicien.
Pour celles enfin qui sont considérées comme ayant une existence entièrement séparée, ce sera le métaphysicien. Mais reprenons notre discours. Comme nous le disions, les affections de l'âme sont inséparables de la matière physique des animaux. Par suite, c'est en tant que tel ...
qu'elles leur appartiennent, le courage et la crainte par exemple, et non pas à la façon de la ligne et de la surface.