Bonjour à toutes et tous et bienvenue sur Le Français, c'est clair ! Je m'appelle Marie-Astrid, je suis professeure de français et après la poésie, l'autobiographie et la littérature d'idées, voici une vidéo qui va concentrer tout ce qu'il est utile de connaître sur le théâtre. Mais commençons par le commencement.
D'où vient le mot théâtre ? Ce mot vient du grec theaomai qui signifie regarder, contempler Les historiens font remonter la naissance du théâtre occidental en Grèce au Vème siècle avant Jésus-Christ. Le théâtre serait né en effet des dix tirambes, processions d'hommes chantant et dansant, et qui célébraient dieux et héros. Puis un premier acteur, le protagoniste est apparu, puis d'autres, dans une première forme théâtrale qui faisait alterner chant du cœur et vers parlé.
La place du chœur est allée décroissante, mais il est bien présent dans la plus ancienne pièce qui nous soit parvenue, les Perses d'Échille. Comme Euripide et Sophocle, autre grand nom de la tragédie antique, Échille a participé à des concours de tragédie, avec des acteurs portant masque et couturnes, sandales hautes qui leur permettaient de figurer des personnages surnaturels. Le théâtre a beaucoup évolué, nous le voyons. Mais avant de revenir sur sa longue histoire, demandons-nous aujourd'hui ce qu'est le théâtre, car vous allez voir que ce mot est riche de nombreuses significations.
Tout d'abord, le théâtre est à la fois un genre et un lieu. On dit lire du théâtre, mais aussi aller au théâtre. Le théâtre, c'est aussi une célébration, un spectacle vivant dans lequel l'art de la parole s'allie à l'art du geste. Pour certains spécialistes, le théâtre naît de la relation entre celui qui regarde et celui qui est regardé. Vous voyez que l'on revient à l'étymologie du mot.
Le théâtre est le lieu de l'artifice, du travestissement mais aussi et en même temps le lieu de la vérité pour Albert Camus. Pour revenir aux sources du théâtre, Aristote a défini le théâtre comme une imitation ou mimesis en grec, des hommes en action. Contrairement à l'épopée qui raconte, le théâtre montre et l'action est selon Aristote au cœur du projet théâtral. Mais pourquoi le théâtre existe-t-il ? Selon Aristote Toujours, le premier théoricien du théâtre, une tragédie sert à nous purger de nos passions, à nous en purifier, en nous faisant fortement éprouver terreur et pitié.
C'est ce que l'on appelle la catharsis. Quant à la comédie, Molière affirme qu'elle permet de corriger les mœurs. Il reprend pour cela l'adage latin castigat ridendo mores, châtier les mœurs en riant, mais notons qu'il le fait sans doute sous la forme de la chanson. sous la pression de ses ennemis les dévots, qu'il l'attaque violemment lorsqu'il présente sa pièce tartue. Faire rire, faire pleurer, faire peur, faire réfléchir, voilà sans doute les fonctions du théâtre, même si pour certains, trouver des utilités au théâtre, c'est vraiment trop bourgeois.
À moins qu'il ne s'agisse d'une distraction ou d'un divertissement pascalien inventé par les humains pour combattre la solitude et l'angoisse de la mort. Je ne me prononcerai pas, mais j'aime bien la définition donnée par Daniel Mesguich. Le théâtre, c'est mettre des solitudes en commun.
Car en effet, le théâtre joué sur scène est un travail d'équipe. Mais qui compose cette équipe ? Évidemment, le dramaturge, c'est le nom donné à celui ou celle qui a écrit la pièce de théâtre.
La troupe ou la compagnie théâtrale est composée de comédiens avant tout, mais aussi du metteur en scène, celui qui réalise la pièce et qui est parfois oublié alors que son rôle est crucial. Pour que le spectacle ait lieu, certains professionnels entrent également en jeu, selon les moyens de la troupe. Le régisseur, le directeur de troupe, Molière a occupé chacun de ses rôles. Mais entre aussi en jeu le décorateur ou la costumière, pardon des stéréotypes genrés car évidemment tous ces métiers peuvent être occupés par des hommes ou des femmes.
Il en va de même pour les techniciens qui s'occupent de la lumière et du son, mais aussi du décor qui nécessite parfois la présence de machinistes. Aujourd'hui, les techniciens peuvent également prendre en charge les écrans car beaucoup de spectacles intègrent désormais des images numériques. Évidemment, n'oublions pas les indispensables spectateurs qui sont présents derrière ce qu'on appelle le quatrième mur. Il s'agit d'un mur imaginaire transparent qui sépare la scène du public, car au théâtre, contrairement à ce qui se passe dans un spectacle d'humour, les comédiens n'interpellent généralement pas les spectateurs, ils jouent comme s'ils n'étaient pas là. De son côté, le public, fin de croire que ce qu'il regarde est réel, il suspend son jugement pour croire à l'illusion représentée sous ses yeux.
À bord dont maintenant est dans les grandes... l'histoire du théâtre en France qui n'est pas restée figée au fil des siècles, loin de là. Au Moyen-Âge, l'une des plus anciennes formes qui nous soit parvenue est celle des mystères, jouées dans toute l'Europe et, le plus souvent, sur les parvis des églises.
Ces mystères montraient de manière spectaculaire un épisode biblique, la vie d'un saint, ou des épisodes historiques mythiques comme la guerre de Troie ou le roi Arthur. Parallèlement, des farces étaient destinées à faire rire le public, avec des personnages caricaturaux qui se jouaient des tours, comme dans la farce de Maître Patelin, qui est, comme toutes les farces qui nous sont restées, anonyme. Je ne serai pas longue concernant les premières comédies et tragédies en français, celles de Jodel ou de Jean-Luc de la Taille, au XVIe siècle, que l'on a pu appeler le théâtre humaniste.
À la fin du XVIe et au début du XVIIe siècle, signalons l'existence du théâtre baroque et de grandes armatures européennes dont les noms sont restés dans l'histoire. Calderon, en Espagne, célèbre les faux-semblants et l'illusion. tout comme Shakespeare dont l'œuvre et le style sont avant tout marqués par la variété.
Mais venons-en à la deuxième moitié du XVIIe siècle. Le roi Soleil Louis XIV qui était danseur aimait tant la représentation que le théâtre a connu alors ses heures de gloire. Concernant les tragédies comme celle de Racine, par exemple, je n'évoque que brièvement les règles des unités de temps, de lieu et d'action, dont un poète comme Corneille s'est affranchi en partie avec le Cid, qui est d'ailleurs une tragé-comédie. Autre exigence imposée aux dramatures du XVIIe siècle, la vraisemblance, la bienséance et la clarté de l'expression. Quant aux comédies qui se résument aujourd'hui à l'œuvre de Molière, elles se permettent plus d'influence, La farce, la comédia dell'arte, l'opéra donnent ainsi naissance à des pièces qui mêlent chant et danse, les comédies-ballets dont la plus fameuse peut-être est le malade imaginaire.
Au XVIIIe siècle, le jeune Diderot, qui était passionné de théâtre, prend le contre-pied de la bienséance classique et donne à voir des pièces mouillées de larmes et de bons sentiments que je ne suis pas certaine de vous conseiller. C'est ce qu'on appelle le drame bourgeois. Je préfère les comédies de Beaumarchais qui, à la veille de la Révolution française, font entendre des revendications sociales de plus en plus grandes, et vous savez sans doute qu'Olympe de Gouges écrivit elle aussi plusieurs pièces.
Le XIXe siècle est celui du drame romantique, incarné par Vigny, Dumas, Musset et surtout Hugo, qui lui donne en quelque sorte ses tables de la loi avec la préface de Cromwell. Revendiquant le mélange des genres, l'alliance du grotesque et du sublime, le drame romantique s'oppose radicalement à la froideur classique. Du XXe siècle, notons le drame symboliste, qui nous permet d'évoquer, même si j'ai un peu de mal avec les étiquettes, le théâtre de Paul Claudel. Mieux identifié, le théâtre de l'absurde, au milieu du XXe siècle, rassemble un groupe hétérogène de dramaturges comme Ionesco, Jari ou Beckett, qui remettent tous en cause le théâtre occidental.
Leurs personnages sont de moins en moins caractérisés du point de vue psychologique, l'intrigue de plus en plus mince, comme la capacité des personnages à communiquer de manière efficace. Mais venons-en au texte théâtral que l'on étudie en classe sans forcément le voir représenté, ce qui est un peu absurde car le théâtre est fait pour être vu plutôt que lu, mais hélas, il faut bien faire avec les moyens du bord. Le dramaturge utilise une écriture spécifique qui se reconnaît au premier coup d'œil. Les didascalies en sont un élément essentiel.
C'est un mot qui, comme le mot didactique vient du grec, il signifie enseignement, instruction donnée par le dramaturge sur la manière de jouer sa pièce. Les noms au-dessus des répliques sont donc des didascalies, tout comme les indications notées en italique précisant le lieu et éventuellement le moment où la pièce ou la scène prend place. Tout au long des scènes, les didascalies donnent aussi des indications sur le jeu des acteurs, leurs déplacements, leurs gestes ou les intonations à donner à telle ou telle parole. Notons que jamais le dramaturge ne décrit les acteurs qu'il imagine.
N'importe quel comédien peut incarner le personnage qu'il souhaite, pour peu qu'il y croit et que le spectateur aussi. Quant aux répliques des personnages, elles peuvent porter des noms plus spécifiques. On parle de tirade, lorsqu'un personnage se livre à un morceau de bravoure, comme Rodrigue racontant ses exploits devant le roi ou Cyrano à propos de son nez. Si un personnage expose seul en scène ses pensées ou ses souffrances, cela s'appelle un monologue. Je pense à celui de Don Dieg, au rage, au désespoir, vous connaissez la suite.
Rodrigue en livre une variation plus poétique avec ses stances qui font revenir à la rime les mots peine et chimène. Certaines répliques ou morceaux de répliques sont dites en aparté. Ils sont dits pour le public seul et l'ont faim de croire que l'autre personnage sur scène n'a pas entendu que nous, spectateurs, avons très bien compris. Autre type de réplique, les stichométies, qui sont des échanges très rapides d'une ligne ou d'un verre, comme lorsque le comte et Don s'affrontent lors de ce qu'on appelle une joute verbale, une scène de clash en quelque sorte.
J'allais oublier une dernière caractéristique de l'écriture théâtrale, le découpage en actes et en scènes qui n'est pas obligatoire, puisque certains préfèrent les tableaux aux scènes et les parties aux actes, comme Jean-Luc-Luc Lagarce, que certains connaissent bien. Mais face à un texte de théâtre à commenter, que faut-il observer ? Commencez d'abord par vous demander ce qui est dit et ce qui est montré, en observant bien les didascalies qui apportent presque toujours des informations essentielles. Demandez-vous ensuite si le spectateur en sait autant que le personnage sur scène.
En effet, c'est ce que l'on appelle la double énonciation. Chaque parole prononcée sur scène a deux destinataires. L'interlocuteur sur scène est un interlocuteur. et le public, et parfois ce dernier peut rire lorsqu'il en sait plus que le personnage. Il assiste alors à un quiproquo, un malentendu qui le fait rire, lui qui en sait bien plus.
Évidemment, vous n'étudierez pas une scène en vers comme une scène en prose. Il faudra alors observer tous les effets produits par les vers. Bien sûr, vous vous demanderez à quel genre de pièce vous avez affaire.
Comment l'effet recherché est-il produit ? Vous pourrez aussi observer les types et les formes de phrases d'un dialogue. car parfois les questions se succèdent mais au lieu de fournir des explications elles témoignent au contraire d'un véritable dialogue de sourds je pense au dialogue entre Toinette et Argan par exemple. Dernier point, prenez garde à la position de la scène dans la pièce vous ne traiterez pas pareil une scène d'exposition et le moment du dénouement.
C'est avec le mot de dénouement que j'achève cette leçon il approche pour tous ceux qui passent le bac de français et à qui je souhaite chance et détermination. Merci à tous pour vos commentaires ou pouces en l'air. Quant à moi, je vous envoie mes meilleures ondes. A très bientôt.