Gladiator est sorti au cinéma en 2000 et pour l'époque... Les effets spéciaux sont fous. On a la Rome de l'Antiquité en 3D, le Colisée en 3D, des gladiateurs qui se battent contre des tigres à l'intérieur du Colisée en 3D.
Alors forcément... Mais tous ces trucs spectaculaires, ce n'est rien, comparé à cette scène. On dirait pas, mais elle est hyper spectaculaire. Parce que ce gars, là, il s'appelle Oliver Reed, il joue le rôle de Proximo, et au moment du tournage de ce dialogue, eh ben, il est mort. Pour de vrai.
Dans la vraie vie. Il ne devrait pas être à l'écran. Et pourtant, ils discutent tranquille avec Russell Crowe, comme si de rien n'était.
Et le problème, c'est qu'un acteur qui ressuscite comme ça, comme par magie, c'est très dangereux. En fait, ça pourrait même détruire le cinéma. Dans la vie, il existe plein de façons de mourir. Pour Oliver Reed, ça se passe pendant le tournage de Gladiator, un week-end, dans un pub, avec des amis.
Il boit de l'alcool, beaucoup trop, et tombe, inanimé. Arrêt cardiaque. Sauf que le tournage du film, il n'est pas du tout fini et que le personnage qu'il joue prend pas mal de place. Alors pour sauver l'histoire, après la mort d'Oliver Reed, il faut tuer Proximo. Pour ça, les gens des effets spéciaux prennent des scènes déjà tournées.
Ils découpent son visage sur un ordi et le copicolent dans une scène d'adieu. Après ça, doublure, filmé de dos, coup d'épée, problème réglé, film, sauvé. Des exemples comme ça, il y en a pas mal d'autres.
Le point commun, c'est que les acteurs sont morts pendant le tournage. Leur résurrection a permis de sauver les films. Mais depuis les années 2000, il se passe autre chose. On ne ressuscite plus les morts pour sauver un film, mais juste parce qu'on sait le faire.
Il y a les morts vraiment morts, et il y a ceux qui ne sont pas encore morts, mais dont on ressuscite une version 2 de quand ils étaient plus jeunes. Dans le cas où l'acteur d'origine est encore vivant, il peut même être sa propre doublure. On colle juste son visage jeune sur son visage vieux.
Globalement, ces résurrections servent à faire trois choses. Exposer un savoir-faire technique pour mieux vendre son film. Du fanservice pour capitaliser sur la nostalgie du public avec des personnages d'il y a longtemps. Et puis quand même... raconter une histoire qui a du sens. Dans certains cas, ça fait même les trois en même temps.
Pour l'instant, ces résurrections, on les utilise pour un seul film à la fois, au cas par cas, comme avec Indiana Jones, Rachel ou Tarkin. Mais tout ça, ça va changer. Lui, c'est Ben Morris, un pro des effets spéciaux.
En 2018, il explique que pour les films Star Wars, il a fait un scan en 3D de tous les acteurs principaux du film, sans savoir s'il en aurait besoin, mais au cas où, ça fait une base pour plus tard. Alors concrètement, un scan en 3D, ça ressemble à ça. L'acteur entre dans une grosse machine, il est photographié sous tous les angles, avec toutes les lumières possibles, transformé en objet numérique et stocké dans le coin d'un disque. En théorie, on peut scanner et archiver n'importe qui.
Quand on en a besoin, on le ressort, on le plaque sur une doublure et on lui fait faire ce qu'on veut, comme une marionnette pour l'éternité. Et bien sûr, ça marche même si l'acteur d'origine est mort depuis longtemps. Sauf qu'il reste une grosse question.
Qui appartient à ce disque dur ? Qui a le droit de faire jouer des acteurs morts ? Eh ben, ça dépend. Au pays du cinéma, en Californie par exemple, pour utiliser la voix ou l'apparence d'un acteur mort, il faut demander la permission à ses héritiers. C'est valable pendant les 70 ans qui suivent la disparition.
Après ça, en théorie, n'importe qui peut en faire ce qu'il veut. Sauf que c'est pas si simple. Pour la juriste Jennifer Rotman, si l'identité du mort est commercialisée sous forme d'un produit ou d'un service, elle peut rester protégée en tant que marque déposée.
Bref, un peu partout dans le monde, les lois sont en train de bouger sur ces questions, et ça devient urgent. Parce qu'avec la puissance de l'IA et des deepfakes, on peut manipuler des acteurs de plus en plus facilement. Il n'y a même plus besoin de les scanner. Genre, en 2021, quand Tom Cruise débarque sur TikTok, eh ben c'est un faux Tom Cruise. Il est fabriqué avec une IA qui scanne plein de photos de lui, fabrique un modèle, et on le colle sur un autre visage.
Tom Cruise se transforme alors en mec maladroit. Cette séquence, elle est un peu débile. Mais elle pose une question super importante.
Pourquoi est-ce que c'est si gênant de voir un faux Tom Cruise tomber par terre ? En fait, pour répondre, il faut bien voir qu'un acteur sait deux choses. à la fois un corps identifié par le public et des personnages.
Et donc, quand Star Wars ressuscite l'acteur Peter Cushing, c'est le personnage de Tarkin qu'on voit. Si l'acteur était vivant, il aurait probablement accepté de le rejouer. Dans le cas du Tom Cruise de TikTok, c'est différent. Il n'y a aucun personnage. On manipule le corps d'un acteur et on lui fait jouer un rôle qu'il n'a jamais accepté.
Mais il y a pire que ça. Ici, c'est une publicité de l'actrice Audrey Hepburn. Une fausse Audrey Hepburn.
Son corps est utilisé pour vendre du chocolat. Alors, les héritiers ont bien sûr été consultés, ils ont touché de l'argent, mais ils ont aussi expliqué que leur mère leur a souvent parlé de son amour pour le chocolat et qu'elle aurait été fière de ce personnage. Sauf que Audrey Hepburn, elle est morte.
Elle ne pourra jamais dire si c'est vrai ou pas. Pour éviter ça, il existe une solution. Interdire complètement l'utilisation de son image.
C'est exactement ce qu'a fait l'acteur Robin Williams. Dans son testament, il interdit carrément l'usage de sa voix et de son image pendant 25 années après sa mort. Ok, mais après cette période de 25 ans, qu'est-ce qui se passe ? Eh bien c'est exactement la question que pose un film sorti en 2013, Le Congrès. Dedans, l'actrice Robin Wright est en manque d'argent et galère à faire vivre sa famille.
Pour survivre, elle accepte de se faire scanner et vend l'utilisation de son image pour toujours. Elle pose juste quelques conditions. Sauf que 20 ans plus tard, elle découvre ce qu'on a fait d'elle.
Un personnage ridicule qui joue dans des films nuls. Mais elle ne peut rien y faire. Le contrat lui interdit de reprendre la main sur son image.
L'industrie du cinéma a acheté son corps et choisit comme elle veut les personnages qu'il joue. L'actrice a disparu. Et ce n'est pas la seule.
Dans le film, tous les acteurs ont disparu. En fait, c'est peut-être ça le cinéma du futur. Des films sans acteurs, avec des humains remplacés par les versions en 3D des stars du passé.
Peut-être alors qu'on n'aura plus besoin de nouveaux acteurs, peut-être qu'on aura juste des visages artificiels, et peut-être qu'on s'en rendra même pas compte et qu'on sera très content des films que ça donne. En tout cas, Oliver Reed reste encore aujourd'hui un des pionniers de cette tendance à la résurrection. Et ce qui est très amusant, c'est que c'était déjà parfaitement résumé dans Gladiator. Echoes of Eternity