Je pense qu'il faut être très précautionneux. Et de ce point de vue-là, le fait de dire le SMIC, on le porte tout de suite à 1 600 euros net, c'est-à-dire quand même pas loin de 15% d'augmentation, sans indication de calendrier, je trouve que c'est assez imprudent. Je trouve que le SMIC à 1 600 euros, c'est une vraie bonne question.
Qu'est-ce que ça veut dire ? Comment on le met en œuvre ? Alors plusieurs éléments.
D'abord, je pense que c'est effectivement plus réaliste de le voir avec un calendrier. probablement, je ne sais pas moi, la moitié par exemple au départ, et avec un calendrier pour une deuxième moitié, ou en trois tranches sur, je ne sais pas, 18 mois, quelque chose comme ça. Pourquoi est-ce que c'est plus réaliste ? Pas d'abord pour une question de choc de coût, mais d'abord pour une raison que ce qui est envisagé, c'est quand même une redynamisation de l'ensemble des salaires.
Il faut laisser le temps au salaire au-dessus du SMIC d'être renégocié. Ça, c'est aussi une rupture avec tout. toute la politique des années précédentes, qui a visé à ce que les salaires n'augmentent pas. On met la prime Macron pour que les salaires n'augmentent pas, on gèle les points d'indice, etc.
Donc je pense effectivement qu'il faut un calendrier, et que ça, ce n'est pas suffisamment précis dans le problème du nouveau Front populaire. En termes de coûts, il y a un paradoxe qui est presque amusant, parce que moi je suis très critique des exonérations de cotisations sociales, mais il se trouve qu'elles donnent un levier pour augmenter le SMIC, parce que quand on augmente le SMIC, Le coût du travail au-dessus du SMIC baisse par un mécanisme un peu bizarre, c'est que les exonérations sur les salaires au-dessus du SMIC augmentent mécaniquement. Durablement, il ne faut pas faire ça parce que ça coûte ? Au-dessus du SMIC, aujourd'hui.
Si on augmente le SMIC, effectivement, on va rattraper, comme on a des exonérations qui sont en fonction du SMIC, on va rattraper des salaires qui ne bénéficiaient pas des allégements de cotisation. Donc concrètement, ça veut dire que quelqu'un qui est à 1,5 SMIC aujourd'hui sera un petit peu moins demain. Et que donc, en termes de coût pour l'entreprise, ce qu'elle paye un peu plus d'un côté, elle le paye un peu moins de l'autre. Donc ce n'est pas le seul mécanisme.
Mais ça veut dire qu'en fait, pour les entreprises, ce n'est pas une hausse de 7%, plus 7% ou de 14%. En fait, c'est une hausse moindre qui est en partie amortie par les finances publiques. Alors dans les débats sur la hausse du SMIC, il y avait aussi les idées de... Caisse de péréquation pour certaines entreprises, etc.
Mais ce que je veux dire, c'est que la question du coût du travail pour les entreprises, qu'il ne faut pas prendre à la légère, elle peut être pilotée. Et alors après, on peut regarder dans le passé, au moment où on a baissé le coût du travail de 6% d'un coup en deux ans, en fait, on n'a quasiment rien vu sur l'emploi. Et quasiment rien vu sur l'emploi à bas salaire. Donc ça, ça rend quand même assez confiant sur le fait que ce ne sont pas des chocs qui sont complètement surdimensionnés.
Mais je vous rejoins sur le fait que, moi, je ne crois pas à la version d'une augmentation du SMIC qui ne serait pas... accompagné d'un calendrier et accompagné de mesures pour piloter ça dans l'ensemble de l'économie. La contrepartie de ce que vous dites sur le fait que les salaires au-dessus du SMIC, le coût du travail baisse, c'est quand même qu'il y a de plus en plus de gens qui sont au SMIC.
Aujourd'hui déjà on a 17% des salariés qui sont au SMIC, on a un tassement de toute la hiérarchie des salaires. Et donc la mesure qui est inscrite dans le programme, c'est une mesure qui va encore une fois tasser la hiérarchie de salaire. Donc il faut accompagner ça de mesures, effectivement, pour stimuler des hausses de salaire au-dessus. Parce que sinon, c'est socialement une catastrophe, parce que les gens ont le sentiment, même s'ils gagnent plus, ils ont le sentiment qu'en fait, ils sont déclassés, parce qu'ils sont rattrapés par le SMIC.
Donc l'incitation, par exemple, à la formation, et tout ces choses-là, est très directement affectée. Je suis tout à fait d'accord. Pour moi, c'est un instrument de pilotage ou d'ambiance de la politique salariale.
On a vraiment une politique de dépression salariale parce que c'était une stratégie économique. C'est-à-dire qu'on voulait non seulement baisser le coût du travail, mais on ne voulait pas que le rythme d'augmentation des salaires soit rapide. Et donc, on a déployé tout un tas d'outils.
pour déprimer les salaires et le fait est que ça a marché parce que le SMIC a indexé et les autres salaires ne sont pas et se sont rapprochés. Et donc je suis d'accord avec vous que ça soit du côté du point d'indice qui concerne 20% des salariés quand même, que ça soit du côté du SMIC, que ça soit à mon avis du côté de la fiscalisation et la socialisation de la prime Macron par exemple, des choses comme ça. Il faut mettre en œuvre tout un tas de mesures et mettre en œuvre des négociations salariales rapides pour qu'il y ait une vraie dynamique des salaires.
Et donc le SMIC c'est un outil dans cette direction là, si c'était le SMIC pour le SMIC ce serait pas intéressant.