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Chap 2: Structure et stratification de la société française

SES - Chapitre 2 : Comment est structuré la société française actuelle

Section 1 : Comment l'espace social est-il structuré et hiérarchisé ?

Objectif d'apprentissage :

  • Savoir identifier les multiples facteurs de structuration et de hiérarchisation de l'espace social (catégorie socioprofessionnelle, revenu, diplôme, composition du ménage, position dans le cycle de vie, sexe, lieu de résidence).

Introduction : Qu'est-ce que la stratification sociale ?

Notre œil s'est exercé à reconnaître à chacun un profil social et à placer les individus dans un groupe social, lui-même hiérarchisé en fonction d'autres groupes sociaux. Nous avons l'impression de le faire intuitivement et très rapidement au gré des rencontres. Nous retrouvons là une compétence sociale acquise par l'expérience, « la compétence sociale de l'œil » évoquée par le sociologue américain Erving Goffman. Mais finalement quels critères utilisons-nous pour catégoriser socialement les individus ? Au-delà, comment les sociologues s'y prennent-ils pour représenter l'espace social, la structure sociale d'une société? La représentation de la structure sociale de la France aujourd'hui fait l'objet de débats entre sociologues. L'approche en termes de classes sociales a-t-elle retrouvé de la pertinence au regard des évolutions récentes, telles que les inégalités économiques croissantes ou le mouvement des Gilets Jaunes ? Toutes les sociétés sont structurées et organisées en groupes sociaux qui ne sont pas simplement juxtaposés les uns aux autres. Ces groupes sont hiérarchisés. Les sociologues utilisent la notion de stratification sociale pour appréhender les distinctions et hiérarchies entre différents groupes sociaux au sein d'une société, La stratification sociale désigne le découpage des sociétés humaines en catégories distinctes et hiérarchisées du fait de l'existence d'inégalités. Ces inégalités peuvent concerner le niveau de richesse, de pouvoir, de prestige ou de connaissance. Dans ce chapitre, nous penserons la société comme un espace social. C'est une métaphore utilisée par les sociologues pour décrire la société: on assimile la société à un espace, où les individus et les groupes sociaux sont répartis en fonction de leurs ressources et de leur prestige. La place d'un individu dans l'espace social indique sa place dans la structure sociale. Remarque : Structure sociale et stratification sociale sont deux notions équivalentes. Nous étudierons les grands facteurs qui structurent et hiérarchisent l'espace social en distinguant les facteurs liés à la position socio-économiques et les autres types de facteurs.

I/ Les facteurs économiques et socioprofessionnels

A/ La catégorie socioprofessionnelle

Catégorie socioprofessionnelle (PCS) : Outil construit par l'INSEE ayant pour objectif de repérer les groupes sociaux qui composent la société française à partir de la profession exercée. Les PCS (professions et catégories socioprofessionnelles) sont construites sur plusieurs critères, qui sont combinés : l'activité professionnelle (métier) : le statut juridique de l'emploi (salarié/indépendant/retraité) : le niveau de formation ou de qualification théoriquement requis pour l'emploi: la place dans la hiérarchie ; le secteur d'activité; l'importance de l'unité de production (ex : différenciation entre les agriculteurs suivant la taille de l'exploitation). L'idée qui préside à la construction de cette nomenclature est que les positions dans la division du travail « disent » beaucoup de choses sur les individus qui les occupent. Deux individus qui occupent la même position ont en effet de grandes chances d'avoir de nombreux points communs : conditions d'existence et de travail, niveau de revenu, niveau de diplôme. Bref, la position dans la division du travail concentre beaucoup d'informations. De fait, la variable PCS est prédictive de nombreux comportements, dans les domaines culturels ou politiques par exemple. Cette classification permet de mettre en évidence des différences sociales et des inégalités entre catégories en termes de revenu, de patrimoine, de pratiques sociales, de modes de vie, etc. Par exemple, les PCS permettent de constater que la réussite des enfants dans le système scolaire n'est pas la même selon la PCS des parents. Dans les filières sélectives comme les classes préparatoires, on trouve une surreprésentation des enfants de cadres et une sous-représentation des enfants d'ouvriers. Toutefois, cette nomenclature a des limites dont il faut être conscient. Ainsi, il peut exister une plus ou moins grande hétérogénéité au sein d'une même PCS. Ce n'est, par exemple, pas la même chose d'être ouvrier avec un emploi stable ou d'être ouvrier avec un emploi précaire. Pourtant, ces deux individus seront regroupés dans la même catégorie dans la nomenclature des PCS...

B/ Le revenu et le patrimoine

Les inégalités économiques sont fondamentales dans l'analyse de la structure sociale car elles se traduisent par des modes de vie différenciés. Les inégalités de revenu et de patrimoine s'entretiennent mutuellement : elles sont cumulatives. Les différences de revenu génèrent des niveaux de vie et des modes de vie divers. Le revenu détermine souvent la taille de l'appartement ou de la maison d'un individu, ainsi que le quartier ou la ville où il habite. Les inégalités de revenu alimentent les inégalités de patrimoine (l'ensemble des biens possédés par un individu ou un ménage). Ainsi, les ménages se constituent un patrimoine grâce à un revenu élevé. La détention de patrimoine génère aussi des revenus, ce qui va permettre aux individus de s'enrichir. C'est en ce sens que les inégalités économiques sont cumulatives. Par exemple, un cadre qui perçoit un revenu élevé peut investir dans l'immobilier en achetant un appartement, qu'il met en location. Cette location lui rapporte des revenus, qu'il pourra ensuite réinvestir dans d'autres biens s'il le souhaite.

C/ Le diplôme

L'accès aux différentes PCS et le niveau de revenus sont fortement dépendants du diplôme obtenu. Si un haut niveau de diplôme ne garantit plus forcément l'accès aux positions les plus élevées, il permet toutefois d'augmenter fortement les chances d'y accéder. En d'autres termes, un haut niveau de diplôme augmente les chances d'obtenir une rémunération élevée et diminue les chances d'être au chômage. En outre le diplôme offre une place élevée dans la hiérarchie professionnelle et peut ainsi s'accompagner d'un statut social élevé. Par exemple, les études de médecine, considérées comme longues et difficiles, sont symboliquement valorisées, et les médecins disposent d'une certaine reconnaissance sociale.

II/ Les facteurs sociodémographiques et sociogéographiques

L'âge, la génération, comme le sexe, peuvent apparaître à première vue comme des phénomènes biologiques, des données naturelles et donc universelles. En tant que « fait de nature », l'individu ne pourrait échapper à cette détermination d'âge ou de sexe. En fait, les groupes d'âge et de genre sont découpés différemment selon les sociétés et les époques, et il en est de même de leur statut et de leur rôle dans la société. Ce sont des phénomènes largement recomposés par la société, des constructions sociales, étudiées comme telles par la sociologie, qui sont aussi de véritables opérateurs de classement, définissant droits, avantages, privilèges mais aussi tâches, devoirs, rôles des différentes catégories ainsi constituées: femmes/hommes, enfants/adolescent ou jeune/adulte/vieux.

A/ La position dans le cycle de vie

Les analyses qui se concentrent sur l'âge utilisent le concept de position dans le cycle de vie. Cette notion exprime le fait qu'un individu vit des situations différentes en fonction de son âge et passe par des étapes qui rythment sa vie selon la société dans laquelle il vit. Des étapes du cycle de vie comme faire ses études, fonder une famille ou prendre sa retraite sont associées à des niveaux de vie, d'épargne et de consommation différents. L'âge constitue alors un facteur de structuration de l'espace social. Les jeunes sont particulièrement défavorisés en termes d'accès aux ressources économiques. Les 20-29 ans sont ainsi les plus touchés par la pauvreté. Cela s'explique notamment par une plus grande exposition des jeunes au chômage et à la précarité.

B/ Le sexe

Les inégalités de genre ont beaucoup reculé au cours du XXe siècle en France, à travers l'obtention des mêmes droits pour les femmes et les hommes. Cependant, beaucoup d'inégalités persistent, dans les milieux professionnel, politique, ou dans la sphère domestique. Les femmes accomplissent la majorité des tâches domestiques. Cela a aussi des conséquences sur leur vie professionnelle : elles sont plus nombreuses à travailler à temps partiel. Indépendamment du milieu social, le fait d'être une femme diminue les possibilités d'atteindre un statut socioprofessionnel élevé par rapport au fait d'être un homme. On parle de « plafond de verre » pour exprimer ce phénomène. Alors que les femmes sont en moyenne plus diplômées que les hommes, les fonctions les plus importantes, dans les entreprises ou la sphère politique, sont plus souvent occupées par des hommes.

C/ La composition du ménage

L'espace familial a évolué durant les dernières décennies et les configurations familiales se sont diversifiées avec notamment l'augmentation de la part des familles monoparentales. Ces différentes formes de famille ont un impact sur les niveaux de vie et les modes de vie des ménages. Ainsi, les différentes compositions familiales entraînent des différences de niveau de vie. -Les familles monoparentales sont plus touchées par les phénomènes de pauvreté et de difficultés scolaires. Pour un même revenu, une famille nombreuse aura un niveau de vie plus réduit qu'une famille avec moins d'enfants.

D/ Le lieu de résidence

Le lieu de résidence détermine également la place dans l'espace social : il influence l'accès au marché du travail, ainsi qu'à d'autres types de ressources (services publics, éducation et formation professionnelle, offre culturelle, etc.). Les habitants de certaines zones cumulent ainsi les difficultés, ce qui a un impact sur leurs conditions de vie.

Conclusion du II/

Les différences liées au sexe, à l'âge, au diplôme, au lieu de résidence, etc. se traduisent par des proximités entre certains individus dans les modes de vie, le rapport au monde, les contraintes matérielles... Ces différences constituent aussi des inégalités : elles contribuent à une hiérarchisation des individus et des groupes, certains étant plus dotés, plus puissants, plus reconnus que d'autres.

Section 2 : Les évolutions de la structure socioprofessionnelle en France

Objectif d'apprentissage :

  • Comprendre les principales évolutions de la structure socioprofessionnelle en France depuis la seconde moitié du XXe siècle (salarisation, tertiarisation, élévation du niveau de qualification, féminisation des emplois).

I/ La salarisation

La salarisation de l'emploi, c'est-à-dire l'accroissement de la part des emplois salariés parmi l'ensemble des emplois, constitue une première grande évolution de la structure socioprofessionnelle depuis la seconde moitié du XXe siècle. Cette tendance s'explique notamment par le déclin de l'artisanat, le développement de l'industrie et de la grande distribution et la concentration des exploitations agricoles. Pour illustrer notre propos, citons le recul des petits commerces au profit des grandes surfaces ou encore la réduction très importante du nombre d'agriculteurs engendrée par le bouleversement du monde agricole lié aux progrès techniques. La part des indépendants parmi les travailleurs en emploi a diminué, passant de 27% au début des années 1960 à 11% en 2014. En France, 90% des emplois sont aujourd'hui occupés par des salariés.

II/ La tertiarisation

Tertiarisation : Augmentation de la part des activités de services au sein au sein d'une économie. La seconde grande évolution de l'emploi est la tertiarisation. Le secteur tertiaire représentait un peu plus de 40% de la population en emploi en 1962 contre plus des trois quarts en 2016. Depuis les années 1980, on note en particulier de fortes créations d'emploi dans la santé, dans les services aux particuliers et aux entreprises, dans l'informatique et dans le commerce (avec la hausse des activités de conception et de marketing). A l'inverse, les effectifs des métiers agricoles et industriels ont diminué fortement du fait de l'automatisation et de la concurrence internationale.

III/ L'élévation du niveau de qualification

Qualification: Aptitudes requises pour occuper un emploi, mais aussi ensemble des compétences du travailleur (acquises grâce aux études et à l'expérience). L'allongement de la durée des études a entraîné une augmentation du niveau de qualification de la population. En 1980, la moitié des travailleurs était sans diplôme. En 2014, huit sur dix sont diplômés. La structure socioprofessionnelle s'est également transformée en faveur des emplois qualifiés. Les effectifs de cadres ont ainsi beaucoup augmenté des années 1960 à aujourd'hui. Les avancées technologiques, comme l'informatique, l'automatisation ou l'intelligence artificielle, ont changé les façons de travailler. Beaucoup de tâches simples, manuelles ou répétitives ont été remplacées par des machines. Cela a fait disparaître certains emplois peu qualifiés, mais en même temps, de nouveaux métiers nécessitant plus de compétences ont émergé. Par exemple, les ouvriers d'usine sont de plus en plus remplacés par des ingénieurs, des techniciens ou des programmeurs qui savent utiliser et contrôler les machines. L'économie des pays développés s'est également orientée de plus en plus vers le secteur des services (comme la santé, l'éducation, la finance, la communication, etc.). Ces emplois demandent souvent des niveaux de qualification plus élevés. On a moins besoin de travailleurs dans l'agriculture ou l'industrie, mais beaucoup plus dans les secteurs qui exigent des compétences spécialisées, comme les médecins, les professeurs, les ingénieurs ou les experts en communication.

IV/ La féminisation des emplois

Féminisation des emplois : Augmentation de la part des femmes dans la population active La féminisation des emplois fait partie des évolutions majeures de la structure socioprofessionnelle en France. Les femmes ont toujours travaillé, à la fois pour la production non marchande et marchande, mais pendant longtemps, la participation des femmes au travail marchand, notamment dans l'agriculture et le commerce, était invisibilisée. En France, dès le début de XXe siècle, la féminisation de la population active était déjà relativement importante comparativement aux autres pays européens, mais à partir des années 1960, le mouvement s'amplifie. Le taux d'activité des femmes a continué à progresser au XXIe siècle pour atteindre 68,2% en 2019 (actuellement, environ 48% des personnes en emploi sont des femmes). Il existe plusieurs explications à cette augmentation de la part des femmes sur le marché du travail, mais les causalités sont difficiles à établir : par exemple, la salarisation et la tertiarisation sont l'une des conséquences de l'accroissement de l'activité féminine (émergence de nouvelles activités), mais c'est aussi parce que l'emploi est devenu plus salarié et plus tertiaire que les femmes y ont eu accès. L'expansion de l'activité féminine est liée au développement des luttes féministes, aux avancées juridiques rendant possible l'émancipation des femmes, à la maîtrise de la fécondité, au développement de la scolarisation des femmes, ou encore à l'émergence de nouveaux modèles familiaux. Notons tout de même que cette arrivée importante des femmes sur le marché du travail ne s'est pas faite de façon homogène: les femmes sont concentrées dans les métiers du tertiaire, la PCS des employés étant la plus féminisée.

Section 3 : Les analyses traditionnelles de la structure sociale

Objectif d'apprentissage :

  • Connaître les théories des classes et de la stratification sociale dans la tradition sociologique (Marx, Weber)

Karl Marx est surtout connu comme étant le philosophe allemand qui a théorisé le communisme, mais il faut savoir qu'il était également économiste, sociologue et historien. Son œuvre majeure s'intitule Le Capital (1867). C'est lui qui, le premier, a introduit la notion de classes sociales. Pour Marx, les sociétés capitalistes sont structurées par les oppositions entre les classes sociales. C'est pour lui la place dans le processus de production qui définit l'appartenance à la classe sociale: dans le mode de production capitaliste, il y a opposition entre la bourgeoisie (les propriétaires des moyens de production) et le prolétariat (qui ne possède que sa force de travail qu'il doit vendre pour survivre). Le critère économique est central chez Marx, mais il accorde aussi une importance à un critère subjectif: le sentiment d'appartenance à une classe sociale. C'est pourquoi il distingue classe en soi (groupe d'individus partageant une même position économique) et classe pour soi (groupe d'individus ayant conscience d'appartenir à une même classe sociale). Pour Weber, la stratification sociale ne se limite pas à une hiérarchie économique. Certes, l'accès inégal aux biens et services structure la société en classes sociales. Cependant, le prestige et le pouvoir sont deux autres dimensions à prendre en compte. Il propose alors une analyse tridimensionnelle de la société reposant sur trois ordres en interrelation :

  • L'ordre économique fondé sur les différences de chance de se procurer des biens et des services
  • L'ordre social fondé sur le prestige et les honneurs
  • L'ordre politique fondé sur le pouvoir La conception des classes sociales de Weber est nominaliste: une classe sociale est une collection d'individus rassemblés par le sociologue, un outil de classement élaboré par le sociologue. L'approche nominaliste considère que les concepts sont des constructions humaines et que les noms qui s'y rapportent ne sont que conventions de langage. Marx, quant à lui, développe une analyse réaliste des classes sociales : il considère qu'elles sont des groupes sociaux réels en conflit.

Section 4 : L'affaiblissement des logiques de classe...

Objectif d'apprentissage :

  • Comprendre que la pertinence d'une approche en termes de classes sociales pour rendre compte de la société française fait l'objet de débats théoriques et statistiques : évolution des distances inter- et intra-classes, articulation avec les rapports sociaux de genre, identifications subjectives à un groupe social, multiplication des facteurs d'individualisation.

I/ La réduction des distances inter-classes et l'augmentation des distances intra-classes

Certaines analyses présentent les classes sociales comme un outil dépassé pour rendre compte de la société française contemporaine. En 1988, Henri Mendras montre le déclin des oppositions de classe au profit d'une vaste classe moyenne. Cette moyennisation s'accompagne d'une réduction des inégalités économiques et d'une homogénéisation sociale : les styles de vie se rapprochent, les distances interclasses se resserrent dans la mesure où les inégalités les plus criantes se réduisent. Cet affaiblissement des classes sociales est renforcé par l'augmentation des distances intra-classes (à l'intérieur d'un même groupe social, les situations sont hétérogènes). Cette présentation permet de décrire le phénomène de moyennisation qui s'explique par le développement de la société de consommation, l'amélioration des salaires et des conditions de travail, mais aussi par l'affaiblissement des conflits et une conscience de classe moins marqués au sein d'une classe ouvrière dont les effectifs se réduisent dès le milieu des années 1970 et dont le niveau de vie progresse.

Distance inter-classes : Inégalités entre individus appartenant à deux classes différentes. Distance intra-classes : Inégalités entre des individus appartenant à la même classe sociale.

II/ L'affaiblissement de l'identification subjective à une classe sociale A partir des années 1980 on assiste aux phénomènes suivants :

  • le déclin du syndicalisme ouvrier et du PCF (Parti Communiste Français) :
  • le déclin du sentiment d'appartenance à la classe ouvrière, très prononcé chez les jeunes, et mis en évidence par des sondages réguliers :
  • la généralisation du sentiment d'appartenance à la « classe moyenne ». La conscience de classe semble moins forte et l'identification subjective à la classe ouvrière est faible, y compris parmi ceux qui occupent des métiers d'ouvriers. Une majorité de français semble s'identifier à la classe moyenne, difficile à objectiver. On assiste donc, à partir des années 1970, à un affaiblissement du sentiment d'appartenance à une classe sociale, et notamment à la classe ouvrière.

III/ La multiplication des facteurs de différenciation

Se limiter aux classes sociales et les prendre comme des ensembles cohérents, c'est oublier certains autres critères de différenciation. Les inégalités sont multiples: les oppositions entre les classes sociales ne seraient donc plus la principale ligne de fracture de la société française. Les groupes touchés par les inégalités se sont multipliées. « Ils sont définis par l'activité professionnelle, mais aussi par le statut d'emploi, l'âge, la génération, le genre, les sexualités, les origines, les appartenances religieuses, les territoires ou encore les handicaps. » (François Dubet, Le temps des passions tristes, 2019). L'origine des personnes, leur couleur de peau, leur religion, leur orientation sexuelle sont autant de sources d'inégalité et de domination que la logique de classe sociale ne peut résumer mais qui s'articulent avec elle. Ainsi, les individus s'identifient de moins en moins à une classe sociale, mais de plus en plus à des groupes relevant de critères ethniques, religieux, générationnelles, territoriaux, etc... Quelle que soit leur classe sociale, les femmes connaissent souvent des inégalités ou des discriminations qui leur sont propres. La notion de rapports sociaux de genre désigne le fait qu'il existe, en fonction du sexe, une répartition inégale des tâches dans la société, à la fois dans les tâches domestiques et dans le monde du travail.