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Comprendre le Mercantilisme historique

Bonjour ! Bienvenue dans ce nouveau numéro de Explique-moi l'économie. Aujourd'hui, nous allons parler du mercantilisme. Du milieu du XVIème jusqu'au milieu du XVIIIème siècle domine le courant mercantiliste. Nous avions vu dans le numéro précédent comment, petit à petit, l'économie devenait autonome par rapport à la morale et à la politique. Et bien, avec le mercantilisme les activités économiques n'ont plus une finalité morale ou religieuse, mais visent la richesse nationale. En revanche, l'économie est encore associé avec le politique. Les principaux représentants sont Jean Bodin, Antoine de Montchrestien et William Petty. Avant de voir en quoi consiste le mercantilisme, il faut parler du contexte de l'époque. À l'époque, il y avait les grandes découvertes, Christophe Colomb qui découvrait l'Amérique, Magellan qui faisait son premier tour du monde. Et donc, les échanges s'accentuaient entre les pays. C'est aussi l'époque où l'on voit apparaître les premiers États modernes. En effet, les États nations remplacent petit à petit les anciens pouvoirs féodaux. Et, ces États vont chercher à accroître leur pouvoir notamment en faisant venir d'importantes quantités de métaux précieux. On pense alors que la puissance d'un pays va dépendre de ses stocks de métaux précieux. Ainsi, nous verrons d'abord comment pour les mercantilistes la richesse doit être mise au service du souverain, puis nous verrons les différentes variantes nationales du mercantilisme, enfin nous résumerons en quelques points le mercantilisme. Les mercantilistes cherchent à articuler la richesse et la puissance. Ils étudient la manière dont la richesse peut être mise au service de la puissance du souverain. C'est la dernière fois que la production et la richesse seront un moyen, ils deviendront dans les analyses suivantes la finalité. Les mercantilistes ont l'idée que l'échange est un jeu à somme nulle, c'est-à-dire ce que gagnent les uns correspond à ce que perdent les autres, et donc à chaque fois que l'on s'enrichit, le pouvoir sur l'autre augmente puisque l'autre s'appauvrit. Ainsi, pour qu'un pays connaisse richesse et puissance, il y a trois facteurs de croissance. D'abord, il faut être abondant en hommes puisque cela permet beaucoup de main d'œuvre pour pouvoir produire en grande quantité. Ensuite, il faut une abondance en métaux précieux puisque les métaux précieux sont le signe de la puissance. Enfin, il faut une intervention de l'État, notamment dans le commerce extérieur, puisque l'État doit stimuler l'activité économique et l'emploi. Il doit aider et protéger les entreprises, notamment par des subventions, par des droits de douane, et être centralisé pour pouvoir imposer sa politique et contrôler les échanges commerciaux. Les mercantilistes considèrent que l'État doit conserver ses richesses à l'intérieur du pays. Pour cela, l'État doit aider au développement des manufactures et au développement des infrastructures, notamment des routes, pour pouvoir favoriser les échanges dans le pays. Il doit également favoriser les exportations et limiter les importations. Par exemple, en France, en 1539, un décret royal interdit l'importation de marchandises à base de laine d'Espagne, ainsi que d'une partie de la Flandre. Les auteurs mercantilistes défendent donc un protectionnisme et des subventions pour les exportations. Le lien entre économie et politique est important pour le mercantilisme. En fait, les intérêts des marchands et du souverain sont convergents, la puissance politique de l'un passe par l'enrichissement des autres. La richesse du souverain et du peuple dépend en fait de la capacité à capter les richesses de l'étranger, et donc l'enrichissement national implique la constitution d'un excédent commercial, il faut en fait diminuer les importations et favoriser les exportations. Il est possible de distinguer plusieurs variantes au mercantilisme, qui s'adaptent aux spécificités de chaque pays. Ainsi, en Espagne et au Portugal, on parle de mercantilisme bullioniste, qui préconise avant tout l'accumulation des métaux, puisque la source de la richesse est l'or et l'argent. Pour ces auteurs, il faut augmenter au maximum le stock de métaux et empêcher les sorties de capitaux. Ceci est bien sûr lié au contexte de ces pays, puisque l'Espagne et le Portugal cherchaient à conquérir l'Amérique latine, et on ramenait l'or qui s'y trouvait. En France, on parle de mercantilisme colbertiste, et celui-ci se concentre plutôt sur l'industrialisation. En effet, la France avait comme atouts sa population et son territoire, il était donc défendu que l'État intervienne pour pouvoir développer l'industrie et l'artisanat. Ainsi, Colbert va fonder différentes manufactures dans le pays, des réglementations douanières ont également été instaurées et des aides octroyées aux entreprises pour les aider à exporter. Pour faciliter les échanges intérieurs dans le pays, les droits de douane intérieurs ont été supprimés et un réseau de routes et de canaux a été construit. En Angleterre et au Pays-Bas, on parle plutôt de mercantilisme commercial mettant l'accent sur le commerce extérieur. Ces pays ont cherché à créer des monopoles commerciaux, cela est notamment passé par la création des Compagnies anglaises ou hollandaises des Indes orientales, créées en 1600 en Angleterre, en 1602 aux Pays-Bas. L'objectif était en fait de contrôler le commerce maritime pour devenir le principal intermédiaire des transactions commerciales mondiales. Le mercantilisme a donc des variantes pour s'adapter aux caractéristiques de chaque pays. Pour cette raison, on ne parle pas d'École de pensée, mais plutôt de courant de pensée avec des spécificités selon les auteurs ou les pays. Pour résumer, il est possible de caractériser les mercantilistes par cinq points. D'abord, il y a une sécularisation de la pensée économique, c'est-à-dire que les réflexions s'émancipent de l'Église, et l'enrichissement devient accepté, contrairement à ce qu'elle était, par exemple, avec Thomas d'Aquin. Ensuite, il y a une volonté d'augmenter la puissance politique de l'État, et cette puissance politique passe par la puissance économique. Il y a également une réhabilitation du marchand, puisque avec Aristote ou Thomas d'Aquin, le marchand avait mauvaise réputation, il était considéré comme celui qui a acheté un prix bas pour revendre plus cher. Ici, le marchand est vu comme celui qui va permettre l'enrichissement du royaume et donc la puissance politique du pays. Le quatrième point est que la richesse provient de l'étranger. Les mercantilistes préconisent alors l'excédent commercial le plus élevé possible, il faut augmenter les exportations et diminuer les importations pour accumuler des métaux précieux, puisque la richesse est justement l'accumulation des métaux précieux. Enfin, nous n'avons pas parlé de ce point, mais, on trouve chez les mercantilistes également l'émergence de la théorie quantitative de la monnaie. En effet, Jean Bodin, en 1568, remarque que, suite à l'arrivée d'or en provenance d'Amérique, en Europe, et bien l'Europe avait connu une inflation très importante. Cet auteur fait donc un lieu entre la quantité de monnaie en circulation, ici la quantité d'or, et le niveau des prix. Cela sera repris par la suite et deviendra la théorie quantitative de la monnaie avec Irving Fischer, mais nous parlerons de celle-ci dans un autre numéro. Le mercantilisme sera repris et critiqué par les libéraux par la suite. Nous verrons ceci dans un prochain numéro de Explique-moi l'économie.